Egeablog - Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Commentaires2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearDu coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Christophe Richardurn:md5:5fada301f3bb0dd4ba3c07a9649febea2010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Christophe Richard
<p>J'abonde dans le sens du général Gambotti, la méthode ne fait qu'organiser l'intelligence collective que déploie l'état-major, qui ne peut pas se contenter d'être une juxtaposition d'intelligence individuelle.<br />
Le but, rappelons le n'est pas d'être "brillant", mais d'être utile, c'est à dire de produire des ordres compréhensibles et exécutables à même de remplir une mission dans sa lettre comme dans son esprit!<br />
Avec cette particularité que comme vous écrivez vous même votre mission, vous n'aurez pas l'excuse de la lettre pour excuser le manque d'esprit.</p>
<p>Bien cordialement</p>
<p>égéa : quelle belle dernière formule ! bravo !</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Jean-Pierre Gambottiurn:md5:ba14b42ddc52d709b7bc654076b766f02010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Jean-Pierre Gambotti
<p>Doit-on avoir peur du GOP ?<br />
Si je connaissais le concepteur et artisan de la MRT je lancerais une
campagne pour qu’un amphithéâtre de l’Ecole militaire porte son nom.
Peut-être même une cour, car je suis un admirateur et un thuriféraire
de cette méthode, j’ai d’ailleurs fait l’éloge de l’effet majeur dans
plusieurs articles publiées dans une revue officielle de notre armée de
terre. Mais c’est une méthode de niveau tactique et personne ne peut
défendre qu’elle soit transposable au niveau stratégique.<br />
Puis-je rappeler, sans nostalgie, à Yves Cadiou, qu’avant le GOP/MPO
nos planificateurs interarmées utilisaient un outil complexe, la
Méthode d’appréciation de situation, dont j’ai toujours douté de
l’interopérabilité et qui était de surcroît incompatible avec les
méthodes d’armées.<br />
Sans vouloir être le moins du monde provocateur, je dirai que la vérité
est venue par les faits, c'est-à-dire par les engagements en coalition
de niveau stratégico-opératif et l’impérieuse nécessité de concevoir et
de conduire les opérations en commun.<br />
Avons-nous sacrifié notre « french touch », cette culture de l’effet à
obtenir sur l’ennemi, plutôt que celle du point culminant et du centre
de gravité ? Je ne le pense pas.<br />
Quand « enfin le GOP vint », nous avons appris simplement à raisonner
la guerre, je veux dire que nous avons enfin pu faire vraiment de la
stratégie, c'est-à-dire « combiner les différentes batailles qui
composent la guerre en vue d’atteindre le but de la campagne et celui
de la guerre », selon la formule de Clausewitz.<br />
Et pour tenter de rassurer les tenants de la théorie de la domination
du noos militaire français par le truchement de cet algorithme
américain qu’est le GOP, je répéterai que c’est notre « dieu de la
guerre » corse qui est tout entier dans cette méthode !<br />
Et pour convaincre, si c’était encore possible ces contempteurs de cet
outil universel, je citerai deux extraits d’un excellent ouvrage
collectif rédigé sous la direction d’Edward Mead Earle, "Les maîtres de
la stratégie" volume 1, Champs Flammarion ( l’édition en anglais date
de 1943 !).<br />
« On peut dire que Jomini, avec Clausewitz qu’il précède à peine, fit
pour l’étude la guerre un peu ce que fit Adam Smith pour l’étude de
l’économie. Tout comme il y eut des livres importants sur l’économie
avant la parution de "La richesse des nations en 1776", il existait
également des ouvrages notables sur la guerre avant la publication des
premiers volumes du "Traité des grandes opérations militaires en 1804".
La plupart d’entre eux, et notamment les écrits des prédécesseurs
immédiats comme Lloyd, Grimoard, Guibert, Bülow, Frédéric le Grand,
étaient bien connus de Jomini qui fit fréquemment allusion à ce qu’il
leur devait. Néanmoins, sa démarche systématique pour cerner les
principes de la guerre l’autorise à partager avec Clausewitz le titre
de cofondateur de la pensée militaire moderne. »<br />
Et plus loin cette étonnante anecdote :<br />
« Napoléon préparait la bataille d’Iéna. Jomini, à la fin de la
conférence demanda s’il pouvait rejoindre l’empereur à Bamberg quatre
jours plus tard.<br />
« Qui vous a dit que je vais à Bamberg ? » demanda l’empereur – non
sans contrariété, car il supposait que sa destination était demeurée
secrète.<br />
« La carte de l’Allemagne, sire, et vos opérations d’Ulm et Marengo. »<br />
Et je répondrai par une question à ma question en exergue :<br />
Comment peut-on avoir peur de perdre son âme en utilisant une méthode
directement inspirée des cofondateurs de la pensée militaire moderne,
stratèges et stratégistes européens, exégètes et théoriciens de
Napoléon ?<br />
Très cordialement<br />
Jean-Pierre Gambotti</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - urn:md5:39bb2dc6f365e476d1397169a1e203f72010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00
<p>L’un des aspects intéressants du débat que l’on vient de voir se
développer ci-dessus, c’est son évolution : l’on est parti du « coup
d’œil à la guerre », l’on est passé par Clausewitz et l’on en est
maintenant au GOP/MOP (Guidelines for Operationnal Planning / Méthode
de Planification des Opérations) dont les lecteurs de ce blog savent ce
que c’est depuis le 7 septembre dernier grâce à JPG : <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2010/09/04/A-propos-de-La-bataille-de-Qadesh#c1879" rel="nofollow" title="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2010/09/04/A-propos-de-La-bataille-de-Qadesh#c1879">http://www.egeablog.net/dotclear/in...</a> .</p>
<p>L’évolution du débat s’explique peut-être par la question initiale
que le Maître du blog formulait (comment le chef prend-il une décision
?) en ne précisant pas de quel niveau de chef on parlait : décurion,
centurion ou millurion (pour ce grade-ci, je ne fais que citer Obelix,
le livreur de menhirs bien connu).</p>
<p>Si l’on parle de coup d’œil, on se situe au niveau du chef qui voit
le terrain, l’action, l’ennemi (je reviendrai plus loin à la notion de
« coup d’œil de l’esprit »). De ce fait il faut tempérer les références
historiques : il y a deux siècles, les Maréchaux et l’Empereur voyaient
le terrain (du moins à partir de dix heures du matin le 2 décembre
1805). Aujourd’hui, le plus haut grade qui voit le terrain et capte par
lui-même l’ambiance de l’action (les « signaux faibles ») c’est le
capitaine des armes de mêlée (infanterie, cavalerie). Dans des cas très
particuliers et rares, le terrain est vu et l’ambiance est encore
captée par les chefs de ces bataillons que l’on nomme GTIA (groupement
tactique interarmes).<br />
<br />
Au-dessus de ces grades, le chef dispose d’une représentation du
terrain, de l’action et de l’ennemi qui est donnée seulement par la
carte, les rapports que font les capitaines par radio, les infos
données par les spécialistes du renseignement et, je suppose, par les
drones. De nos jours le métier de l’officier supérieur ou général est
devenu abstrait et n’est pas le même métier que celui du sergent
(décurion), du capitaine (centurion) ni que celui de Napoléon et des
Maréchaux d’Empire.</p>
<p>C’est pourquoi, lorsqu’on parle de prise de décision, il faut
d’abord fixer de quel métier l’on parle pour être sûr de parler de la
même chose. Il le faut d’autant plus que l’armée américaine envahit de
plus en plus nos esprits en passant par Clausewitz et autres références
d’origine européenne mais américanisées (la COIN, Galula, …). Or la
faiblesse des petits échelons de commandement (dit aussi « encadrement
de contact ») de cette armée américaine est notoire, compensée par la
puissance de feu et le shoot’em all. Au contraire dans l’armée
française, et probablement aussi dans d’autres armées d’Europe, la
qualité de l’encadrement de contact est l’élément déterminant de
l’efficacité et de la modération des feux.</p>
<p>Tel est ce qui motive le présent commentaire, mon deuxième
commentaire sur le sujet : en cédant à l’américanisme, nous risquons de
perdre notre principale qualité. Dans ce débat sur le coup d’œil, on
est passé par Clausewitz pour arriver aux Guidelines for Operationnal
Planning. C’est plus que regrettable : dangereux.</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Jean-Pierre Gambottiurn:md5:39e4e5e577dd4a74925de465fecc25162010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Jean-Pierre Gambotti
<p>La prose exubérante et passionnée d’Immarigeon m’enthousiasmerait si j’étais d’accord avec la totalité de son discours.<br />
Deux remarques.<br />
-D’abord la décision à la guerre se fait autant dans l’urgence que dans le différé. Même sur un théâtre d’opérations, dans l’action, existent concomitamment une planification chaude et une planification froide. En conséquence le chef qui conçoit, décide et conduit les opérations sur Bucéphale n’est pas un exemple fréquent, même dans la province de Bactriane qui a vu pourtant passer Alexandre la décision est souvent le dernier acte d’un raisonnement stratégique issu de la méthode. De surcroît je pense que l’état-major, quel que soit le degré d’urgence, prend toujours en considération les signaux faibles dans ses réflexions, ils sont essentiels pour les conclusions partielles proposées au chef. Néanmoins, contrairement à ce qui est souvent avancé, le chef ne peut méconnaître les considérants de la réflexion menée par l’état-major, une décision fondée nécessite la prise en compte des signaux faibles par exemple, mais de bien d’autres éléments, ne s’appuyer que sur des synthèses, aussi pertinentes soient-elles, est insuffisant.<br />
-Ensuite, je ne comprends pas la contradiction qui existerait entre la culture militaire européenne et le modèle américain. Clausewitz et Jomini, théoriciens de Napoléon, ont traversé l’Atlantique au XIXème siècle et sont rentrés en Europe dans les cantines américaines avec l'OTAN. Pendant cette migration, notre école de pensée française a assimilé Clausewitz et si j’osais, je dirais que Foch en est un délicat épigone et peut-être même un subtil plagiaire. D’évidence chacune des écoles, a évolué de part et d’autre de l’Atlantique, mais la méthode de raisonnement des opérations franco-otanienne actuelle est une synthèse qui n’obère pas, à mon sens, la logique française.<br />
Personnellement je me réjouis de la réintégration de De la guerre dans notre corpus stratégique, le « penser la guerre » de Foch passe par Clausewitz, et pour l’heure la meilleure méthode de raisonnement des opérations est à mon avis le GOP/MPO.<br />
Très cordialement<br />
Jean-Pierre Gambotti</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Aurelurn:md5:76f15c117e3fbd60e6b9817b20298bdc2010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Aurel
<p>A mettre en relation aussi avec "star ship troopers" de Heinlein (le
livre bien sur) qui évoque aussi cet apprentissage de la fonction
d'officier. Avec notamment l'obligation pour un officier d'avoir été
"au feu", en opposition avec saint cyr et west point.<br />
Autre exemple dans "fort navajo" avec Blueberry qui est devenu officier
pendant la guerre et l'autre qui est officier de l'école. Blueberry
malgré son manque "d'érudition" est le plus compétent<br />
C'est la grande différence entre le savoir et la connaissance.</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Jean-Pierre Gambottiurn:md5:56d893bf35a1a3cdd3304c35221ee7d02010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Jean-Pierre Gambotti
<p>Je suis d’accord avec Christophe Richard, mais ce qui m’intéresse
aussi dans le « coup d’œil » clausewitzien, c’est précisément le
processus intellectuel qui mène à la décision. Va pour « intuition »
dans l’oxymore que vous proposez, intuition comme rémanence de la chose
apprise et méditée, mais, je le répète, je la pense, cette « intuition
», trop synonyme « d’instinct » pour ne pas imaginer que certains
pourraient être confirmés dans l’idée du chef comme être d’exception et
quelque peu élu.<br />
Par l’image de l’anamorphose que je propose, je veux dire que la
décision ressortit aussi au procédé, que c’est une techné. Et que
décider s’apprend. Qu’il s’agit de trouver la clef qui donnera à la
problématique parcellisée de la guerre à conduire que nous donne
l’analyse, une cohérence, une unité, un sens.<br />
Un simple « coup d’œil », à l’Anamorphose cylindrique, station de
métro, Saint-Germain des Près, vaut mieux que tous mes discours obscurs!<br />
Très cordialement.<br />
Jean-Pierre Gambotti</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - urn:md5:aa8696feba90713f04e2132385ec7c272010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00
<p>Bonjour,</p>
<p>Je me permets d’entrer dans le débat sur la contradiction qui
consiste à vouloir intégrer l’intuition, le coup d’œil ou l’occasion
dans le processus de décision. Etre chef ça s’apprend, et l’intuition,
ça se travaille. Sauf que…</p>
<p>Soit le chef (qui a mandat pour l’être parce que les autres font
confiance en ses capacités) perçoit précocement des signaux faibles et
décide en conséquence, sur leur seul fondement, en se contentant de
cette seule information qu’il sait parcellaire et incomplète, quand
bien même elle serait contradictoire au modèle. (Après, il y a le débat
philosophique de savoir si le chef est celui qui perçoit à l’avance ce
que va devenir un monde déjà prédéterminé, ou si au contraire il use de
son don pour influer le cours des choses).</p>
<p>Soit au contraire il met les signaux faibles en « input »
additionnels dans le processus de décision et les noie dans la masse,
et ça ne sert à rien qu’à amodier le modèle. Mais on ne peut pas faire
les deux, par principe. D’autant que la rapidité est l’élément premier
de la décision. (Autre débat philosophique : comme il est dit dans un
commentaire, l’intuition est le stade ultime de la rationalité, c’est «
l’inéïté intuitive » dont parle Victor Hugo. Mais de ce fait elle
échappe à tout modèle quelqu’il soit qui est sous-déterminé. Elle est
toujours explicable après-coup, elle n’est jamais anticipable par un
modèle, si complet se croit-il).</p>
<p>Or notre modèle otanisé d’importation US est non seulement celui du
modèle mais de l’impossibilité absolue de le remettre en cause.
Forcément, il se croit sur-déterminant, totalisant et explicatif de
toute chose (dans le dictionnaire, ça correspond à un mot précis :
totalitaire) : c’est cet orgueil prométhéen qui est en train de nous
faire sombrer. Il est rigoureusement impossible de le faire cohabiter
avec l’intuition, la prise en compte de signaux faibles, etc. On sait
les difficultés qu’ont eu de tous temps les rares généraux américains
qui marchaient au doigt mouillé, c’est-à-dire qui « surfaient » sur
leurs intuitions à partir d’une solide culture historique éprouvée mais
réfutable au cas où. Patton en est l’exemple le plus connu.</p>
<p>Donc il faut faire un choix : soit la culture et la tradition
militaire européenne, de Machiavel à Foch en passant par Clausewitz,
soit l’importation d’un modèle contraire à nos valeurs. L’Europe et la
France récemment ont choisi la greffe : elle n’a aucune chance de
prendre, et le temps que le mouvement soit inversé, les défaites vont
s’ajouter aux échecs. Ca s’appelle perdre dix ans. Tant pis pour nous,
tant mieux dans l’intervalle pour les chefs talibans et quelques autres
qui, eux, fonctionnent au doigt mouillé.</p>
<p>Immarigeon</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - urn:md5:198f2f256fc7db845a19c154a31fafc82010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00
<p>L’intuition est rationnelle. Cette affirmation d’entrée est un
paradoxe qui est là pour attirer l’attention du lecteur. Mais
rapidement l’affirmation n’est plus un paradoxe grâce aux explications
qui suivent.</p>
<p>Ma réflexion à ce sujet s’est appuyée il y a quelques années sur ce
qu’écrivait le Colonel François Lecointre au sujet du stress au combat.
Son texte avait été mis en ligne par François Duran mais le texte a
malheureusement disparu <a href="http://cozop.com/francois_duran/le_stress_au_combat" rel="nofollow" title="http://cozop.com/francois_duran/le_stress_au_combat">http://cozop.com/francois_duran/le_...</a><br />
Je le cite de mémoire, certain d’en conserver l’idée sinon la forme : «
raconter une situation d’urgence alors que l’événement est terminé,
c’est une narration qui présente un risque de déformation involontaire
parce qu’on donne de la rationalité à une suite de décisions que l’on a
prises intuitivement, presque sans réfléchir. »<br />
<br />
Ma sympathie pour François Lecointre (pensez : il a commandé la
Première du Grand Trois, il est le Capitaine de Vrbanja 1995) ne
m’empêche pas d’analyser différemment la prétendue « irrationalité » de
l’intuition. Après l’événement l’on explique facilement la suite des
décisions prises intuitivement parce que l’intuition est un
raisonnement instantané, si rapide qu’on n’a pas conscience de son
déroulement. Rapide et même fulgurant, le raisonnement est pourtant
bien là : on n’imagine pas de quelle vitesse le cerveau est capable en
situation d’urgence. Lorsque les circonstances pressent, la première
intuition est « si je tarde à décider, ça va devenir ingérable ».</p>
<p>L’on a tous connu, pas seulement « à la guerre », des situations
d’urgence où il fallait décider vite parce qu’un incident imprévu
pouvait se transformer en accident. Ceci arrive parfois sur la route et
dans des sports que l’on a coutume de qualifier « extrêmes » alors
qu’ils sont seulement des activités que l’on ne peut matériellement pas
interrompre en cours d’action : par exemple on interrompt sans délai
une partie de tennis, on n’interrompt pas un saut en parachute après
passage de la porte, ni une plongée profonde qui nécessite des paliers.
Dans ces environnements lorsqu’un incident doit être traité d’urgence,
c’est l’intuition qui prend les décisions. Par la suite, au débriefing
(qu’il ne faut jamais oublier de faire, même uniquement pour soi-même
si l’on était seul), on ne parlera probablement pas d’intuition mais de
« réflexe », parfois de « chance », termes qui éliminent toute idée de
réflexion. C’est pourtant bien une réflexion, instantanée mais
rationnelle mais inconsciente, qui a guidé la décision instantanée.</p>
<p>La faiblesse de ce processus de décision, c’est que le raisonnement
n’est pas formulé parce qu’on n’a pas le temps : de ce fait il n’est
pas vérifié (la logique a besoin du « logos »). Mais qu’on y
réfléchisse plus tard (débriefing et donc logos) la rationalité de
l’intuition apparaît. Ceci se retrouve dans des formules célèbres : «
la chance, ça se mérite » (Napoléon) ; « le hasard ne favorise que les
esprits préparés » (Louis Pasteur).<br />
.</p>
<p>La préparation justement. Ce qui peut entraver la rationalité de
l’intuition, c’est l’émotion : la peur, le plus souvent, parfois la
surprise. C’est pourquoi il importe de se préparer à réfléchir
clairement dans des conditions dites « extrêmes ». Voici deux exemples
qui tiennent compte de cette donnée.</p>
<p>Le brevet de plongée profonde comporte une série de questions
simples posées au candidat à 80m de profondeur sur une ardoise qui
permet d’écrire dans l’eau ; le cerveau du candidat subit la pression
au sens physique du terme, les réponses sont souvent insensées mais il
n’en prend conscience qu’après retour à la surface.</p>
<p>Le concours d’entrée à l’Ecole d’état-major naguère et peut-être
encore maintenant, je ne sais pas : les épreuves intellectuelles (fiche
de synthèse, description de carte, questions d’actualité en rafale
chronométrée…) commençaient à sept heures du matin après une marche de
vingt kilomètres commencée à deux heures du matin et obligatoirement
finie avant six heures du mat’. Les organisateurs de ce concours
pensaient certainement, comme je le crois moi-même, qu’il faut être
préparé à prendre des bonnes décisions dans l’urgence, c’est-à-dire à
rester rationnel en toute circonstance, en dépit de l’urgence, de la
fatigue, de la peur. Oui : être chef, ça s’apprend.</p>
Du coup d’œil à la guerre, ratiocinations… - Christophe Richardurn:md5:56c14af6d16a8e551b455dc7b42b62bb2010-12-11T20:55:00+00:002010-12-11T20:55:00+00:00Christophe Richard
<p>Bonjour,<br />
Merci de cette réflexion, je me souviens d' avoir assisté l'an dernier à une partie du colloque sur le maréchal Foch. Une formule employée alors par le CEMAT au cours de son discours de clôture m'avait frappé. Il soulignait que le maréchal était avant tout un officier qui travaillait... Et il faisait de son "coup d'oeil", une intuition qui était la rémanence de la chose apprise et méditée.</p>
<p>Bien cordialement</p>
<p><ins>égéa </ins>: je pense que vous avez tout doit, y compris sur la plupart des sources de l'inspiration</p>