Egeablog - France2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearAspects géopolitiques des élections régionalesurn:md5:a101f89202ed05c071ea05c1dd03d3d62015-12-14T21:30:00+00:002015-12-14T21:47:34+00:00Olivier KempfFrance<p>Quand on est géopolitologue, on est forcément un peu politologue. D'où ce billet qui veut repérer quelques éléments épars mais qui prennent une grande signification, surtout en variant la focale, et permettent de comprendre en partie les résultats des élections de ces deux derniers dimanches.</p>
<p><img src="http://www.metronews.fr/_internal/gxml!0/r0dc21o2f3vste5s7ezej9x3a10rp3w$jvxia0833kqcgkwb7suo6idicmm3a6d/Simeoni.jpeg" alt="" /> <a href="http://www.metronews.fr/elections/resultats-elections-regionales-2015-en-corse-les-nationalistes-l-emportent/mojD!HBLyEVOJCmdnw/">source</a></p> <p>Populisme ? ou défiance envers la mondialisation ? Les commentateurs ont ainsi longuement parlé du populisme, remarquant qu'il se répandait à travers l’Europe (mais pas seulement, regardez Trump aux États-Unis). Une des explications les plus simples tient au rejet de la mondialisation telle qu'elle est perçue (peu importent en l’espèce ses avantages et défauts réels : en termes de choix d'électeur, seule compte la perception, ce qui est de bonne analyse géopolitique). De même, le rejet de l'Europe est plus dû à ce qu'elle n'est pas perçue comme protégeant de la mondialisation. De ce point de vue, la crise financière puis la crise des migrants apparaissent pour beaucoup comme les signes de cette incapacité. Cela entraîne un repli national, fondé sur le souhait que l’État y pourra quelque chose.</p>
<p>Toutefois, à l'intérieur, les choses ne sont pas aussi simples. Il suffit d'entendre candidats et reportages pour entendre que derrière "l'insurrection froide" (Mélenchon) ou la jacquerie électorale, il y a un rejet des élites et "de Paris".. En France, les élites sont forcément perçues comme parisiennes. Aussi, le rejet de l'Europe s'accompagne d'un rejet des élites. Le parisianisme est de plus assimilé à de la complicité avec la mondialisation, ce qui augmente le ras-le-bol.</p>
<p>Ainsi, la solidarité du corps social est-elle mise à l'épreuve ce qui pousse nombre d'électeurs soit à s'abstenir, soit à voter contre. La cohésion territoriale et politique est mise en question. Il n'est pas anodin que toutes les récentes élections soient des élections locales, allant toutes dans le même sens : montée du Front National et victoire sans éclat, au finish, des partis de gouvernement, désignés par défaut (par sursaut, cette nouvelle pirouette gymnastique très en vogue ces derniers temps).</p>
<p>Aussi faut-il pointer deux élections qui, en d'autres moments, auraient fait la une de nos journaux : l'élection de deux directions indépendantistes en France. L'une en Corse où l'alliance entre "nationalistes" et "indépendantistes" (fichtre, quelle distinction) l'emporte largement ; l'autre en Martinique où la liste indépendantiste, ayant fusionné avec la liste LR, gagne également. Qu'il me soit permis de considérer que si les grands médias se sont largement émus du haut score du FN, il apparaît au moins aussi inquiétant de voir cette montée des listes séparatistes qui n'augurent rien de bon (on aurait pu aussi bien mentionner, au premier tour, la persistance de la liste bretonnante en Bretagne). Elles manifestent également la perte de cohésion politico-territoriale de la nation.</p>
<p>Or, la géopolitique moderne insiste sur l'analyse des perceptions : celles-ci sont structurantes dans la construction des cohésions territoriales (je n'ose parler d'identité). Voici poindre en France également les pousses d'indépendantismes vivaces, dont on a déjà eu l'aperçu en Belgique, en Espagne ou au Royaume-Uni. Même la France, souvent présentée comme l'archétype de l’État-nation, voit donc ses marges flagoler. C'est dire à quel point l'état du pays est inquiétant.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2015/12/14/Aspects-g%C3%A9opolitiques-des-%C3%A9lections-r%C3%A9gionales#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2069Attentats du 13 novembre : premiers commentairesurn:md5:756cc24e03c248755e061de23355d5792015-11-13T23:21:00+00:002015-11-14T00:51:05+00:00Olivier KempfFranceAttentatsJihadismeParisTerrorisme<p>Il est toujours difficile de commenter à chaud des événements aussi brutaux et dramatiques que ceux de ce soir. Encore plus pour leur donner du sens. Essayons, au risque d'être démenti et critiqué. C'est forcément flou, comme la photo ci-dessous.</p>
<p><img src="http://storage.journaldemontreal.com/v1/dynamic_resize/sws_path/jdx-prod-images/9b70640c-4dd7-4da6-88e6-5d9fdcf92e2e_JDX-NO-RATIO_WEB.jpg?quality=80&version=17&size=968x" alt="" /> <a href="http://www.journaldemontreal.com/2015/11/13/bataclan-des-spectateurs-pris-en-otage">source</a></p> <p><strong>Le fil des événements</strong>.</p>
<ul>
<li>- Peu après 21h00, plusieurs événements se déroulent. Visiblement (non confirmé), un commando à bord d'une voiture (à moins qu'il y ait plusieurs commandos) effectue plusieurs agressions, mitraillant à chaque arrêt des terrasses de bar. Au moins trois endroits dans le X° et le XI°, dernier endroit à proximité de la place de la République.</li>
<li>- Simultanément deux explosions vers 21h15 (une troisième vers 21h50?) ont lieu à proximité du stade de France où se déroulait un match de football (le PR est évacué). Il semble qu'il y ait eu deux attentats suicide.</li>
<li>- Enfin une prise d'otages a lieu à la salle de concert Le Bataclan, là encore près de République. Encore en cours à l'heure où je m'exprime. On ne sait si les tireurs "mobiles" sont ceux qui se sont retranchés dans le Bataclan ou s'ils ont pris la fuite.</li>
</ul>
<p><strong>Bilan</strong> : à minuit, officiellement 46 morts, certaines sources parlent de 60.</p>
<p><strong>Réaction</strong> : déploiement de toutes les forces de sécurité disponibles. Le PR annonce à la télé, peu avant minuit (le Conseil des ministres se réunit dans la foulée) trois choses : l'état d'urgence, la fermeture des frontières, des renforts militaires (on apprend plus tard que 400 soldats sont envoyés immédiatement en ile de France).</p>
<p><strong>Auteurs</strong> : pas de revendication. Personne ne doute toutefois qu'il s'agisse de jihadistes, mais on ne sait quelle chapelle (AQ ou EI). Toutefois, plusieurs choses apparaissent immédiatement :</p>
<ul>
<li>Des agressions simultanées ce qui signe une certaine coordination. Toutefois, Il ne s'agit pas de combinaison opérationnelle avec appuis réciproques etc. Mais on pense à ce qui s'est passé à Mumbai en Inde, il y a qq années. Bref, prouve une vraie capacité d'organisation à distance.</li>
<li>Si la piste de la mortelle randonnée tient, il s'agit d'un mode d'action "nouveau" (je me méfie, on trouvera forcément des précédents, mais ils ne sont pas fort connus).</li>
<li>On ne sait pas si certains ont réussi à s'échapper. Les preneurs d'otage sont encore en place au Bataclan, nombre inconnu. Grande confusion et suivi de situation visiblement difficile de la part des forces de l'ordre. Pas de piste.</li>
<li>Hypothèses (attention, il ne s'agit pas d'affirmation, seulement de questions) : On pense forcément à des combattants étrangers, de retour des combats au Levant : hypothèse pour l'instant, l'enquête le dira. Mais il ne s'agit pas simplement de loups solitaires (trois attentats à Saint Denis, on parle d'au moins quatre agresseurs dans le centre de Paris, soit sept personnes en tout ? Hypothèses, toujours), ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de nationaux. En fait, une conjonction entre des nationaux restés en France et des Foreign fighters serait la plus inquiétante.</li>
</ul>
<p><strong>Signification</strong> :</p>
<ul>
<li>Il ne s'agit pas de surprise stratégique, malheureusement. Mais incontestablement un nouveau tournant : une surprise tactique (même si tous les spécialistes du terrorisme annonçaient, depuis des mois, qu'un scénario à la Mumbai était plausible, tous s'y attendaient, malheureusement). Mais surprise tactique pour l'ensemble des Français.</li>
<li>Première fois qu'il y a des attentats suicide en France. C'est probablement aussi le plus haut bilan à la suite d’attaque terroriste.</li>
<li>Si pas surprise stratégique, il s'agit en revanche d'une rupture stratégique. L'état d'urgence en témoigne.</li>
</ul>
<p><strong>Manœuvre sémantique</strong></p>
<ul>
<li>Incontestablement, les jihadistes ont réussi à "semer l'effroi", au sens premier. L'émotion du PR lors de son allocution en témoigne.</li>
<li>Pas de revendication pour l'instant.</li>
<li>Attentats dans le quartier "République", épicentre de la manifestation monstre de janvier dernier, et au stade de "France" : pas besoin d'en ajouter.</li>
<li>Grosse émotion en France, évidemment. Constatons que les attentats ont lieu très régulièrement en Irak ou en Afghanistan...</li>
<li>Peur d'un côté, résilience de l'autre... Telle sera la réaction française et la cohésion nationale d'abord.</li>
<li>Et puis, il y a incontestablement un lien entre théâtre intérieur et théâtre extérieur... En Syrie, tout d'abord, mais aussi au Sahel.</li>
<li>La notion de "guerre" prend un nouveau tour...</li>
</ul>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2015/11/13/Attentats-du-13-novembre-%3A-premiers-commentaires#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2063La France et la négociation nucléaire avec l'Iranurn:md5:9341289b028673fcf648bf59f7d62fed2015-03-30T22:48:00+02:002015-03-30T22:48:00+02:00adminFranceArabie SaouditeFranceIranNucléaire<p>Dans <ins>Le Monde</ins> de mercredi dernier, deux pages sont publiées pour dénoncer l'influence croissante de l'Iran au Moyen-Orient. Un article détaillé explique la position française, de faucon, à rebours des efforts américains et même ceux des Européens qui semblent, implicitement, être très tentés par l'accord. On peut s'interroger sur les raisons d'une telle fermeté.</p>
<p><img src="http://image.almanar.com.lb/french/edimg/2014/outside/fabius_iran.jpg" alt="" /> <a href="http://www.almanar.com.lb/french/adetails.php?fromval=1&cid=86&frid=86&eid=181972">source</a></p> <p>En apparence, il s'agit d'éviter la prolifération nucléaire et d'obtenir le maximum de garanties pour éviter que l'Iran soit trop proche du seuil. D'un point de vue tactique, on pourrait considérer qu'il y a répartition des rôles, Paris jouant " le méchant " comme dans tout polar qui se respecte. Oui, mais quand en fin d'article, <ins>Le Monde</ins> explique qu'à la clôture, Paris passera sous les fourches caudines de Washington, on s'interroge sur l'efficacité de cette stratégie dont on comprend qu'elle n'émeut pas beaucoup la partie iranienne.</p>
<p>Alors ? <ins>Le Monde</ins> donne, juste en dessous, un interview d'un émissaire israélien, partisan sans surprise d'une ligne encore plus dure. Juste après la réélection de B. Netanyahou, on pourrait donc considérer que la France veut faire plaisir à Israël, ce qui serait toutefois surprenant tant Tel Aviv semble aujourd'hui isolé. Il me semble que tel n'est pourtant pas le but recherché. Nous pensons que les calculs sont plus subtils.</p>
<p>Au fond, il ne s'agit pas tant de plaire aux Israéliens qu'aux monarchies arabes du Golfe. En s'affichant comme un dur face à l'Iran, obsession de l'Arabie Saoudite, Paris vise à s'attacher les bonnes grâces de ce client hors pair, à qui on escompte vendre encore et encore. La diplomatie économique n'est-elle pas l'alfa et l'oméga de la feuille de route de M. Fabius ?</p>
<p>Oui, mais Paris risquerait de déplaire à l'Iran, pourra-t-on objecter. Là encore, les choses paraissent plus subtiles. En montant les enchères, on peut espérer obtenir des Iraniens des concessions sur d'autres dossiers, par exemples sur tel ou tel grand chantier espéré, une fois que les sanctions seront levées. Chose que Téhéran acceptera volontiers, ne serait-ce que pour faire affaire avec des Européens et diversifier un peu ses clients, surtout que cela aura peu d'effets politiques sur le nucléaire et favorisera le démarrage de l'économie. Gagnant - gagnant.</p>
<p>Finalement, Paris a beaucoup d'intérêt à jouer au faucon en ce moment, tant la course vers l'accord semble désormais inéluctable. Autant en profiter pour profiter de l'effet de levier et gagner sur tous les tableaux, des deux côtés du Golfe Persique.</p>
<p>Bref, un joli coup tactique. Je ne sais si Le Monde en est conscient mais en publiant deux pages sur la croquemitaine iranienne, il sert indirectement nos objectifs, qui ne sont peut-être pas ceux qu'il croit.</p>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2015/03/30/La-France-et-la-n%C3%A9gociation-nucl%C3%A9aire-avec-l-Iran#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2484Nouveau découpage régionalurn:md5:677604a2269abd663526abce95e94e192014-06-11T19:42:00+01:002014-06-11T19:42:00+01:00Olivier KempfFrance<p>Je n'ai personnellement jamais été un fervent partisan des régions qui m'ont toujours semblé artificielles. Quant au discours sur leur exiguïté, souvent asséné en comparaison du voisin allemand, il ne tient pas la route quand on regarde la Sarre ou les villes-États d'Hambourg ou de Brême. Il reste que je suis désormais assez opposé aux excès de la "décentralisation" qui nous coûte horriblement cher. Que le diagnostic du pays doit admettre que la région Ile de France finance à corps perdus le reste du pays et que le désert français est une farce de 1947 qui n'a plus de sens aujourd'hui, <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/12/04/G%25C3%25A9opolitique-de-la-France-%2528OK%2529">cf mon livre</a>.</p>
<p><img src="http://s1.lemde.fr/image/2014/06/03/532x580/4430737_6_20ec_ill-4430737-ac9c-jpg_17f5da346369011f69c73a9cde603391.png" alt="" /> <a href="http://abonnes.lemonde.fr/politique/discussion/2014/06/03/les-14-regions-proposees-par-francois-hollande-vous-semblent-elles-faire-sens_4430736_823448.html">source</a></p> <p>Je n'entrerai donc pas dans le débat qui passionne politiciens, journalistes et quelques géographes commis d'office : était-ce le bon découpage ? fallait-il choisir ceci plutôt que cela ? était-ce le bon tempo ? Tout ceci, on s'en fiche, en fait.</p>
<p>Mais une décision a été prise. De toute façon, les régions n'ont pas de sens et en fait, elles n'ont pas à en avoir. C'est pourquoi la notion d’identité régionale n'aurait pas dû entrer en ligne de compte. Il est donc bon que l'Alsace soit intégrée à une grande région Alsace Lorraine, dommage que la Bretagne n'ait pas été fusionnée avec Pays de Loire, la Corse avec PACA et NPDC avec la Picardie.</p>
<p>Mais il ne s'agit là que de défauts véniels par rapport à de multiples qualités : d'abord, ne pas toucher à la répartition des départements. Ceci est une idée géniale et simplissime. Ensuite, de décider et d'organiser l'évanouissement à terme de deux échelons territoriaux. D'une part les départements (même si je ne comprends pas très bien le rôle résiduel du préfet : au fond, le préfet de département devra jouer le rôle aujourd’hui dévolu au sous-préfet). D'autre part en rendant l'intercommunalité de droit commun, on simplifie les choses l(es communes demeurant une circonscription d'enracinement local, sur le modèle des mairies d'arrondissement pour PLM).</p>
<p>Espérons qu'on en profitera pour se débarrasser de toutes les mécaniques intermédiaires dont j'ai oublié les sigles, sauf les "pays", seule appellation venant à ma mémoire. Espérons surtout que cette simplification s'accompagnera d'une diminution des budgets locaux et des impôts afférents, et que l’augmentation de la distance entre le centre décisionnel régional et les territoires permettra une juste répartition en fonction des besoins et non des lobbies de proximité.</p>
<p>Après, n'exagérons pas les effets de la décision : elle prend soin d'envoyer le plein effet à dans dix ans, le temps au moins de deux alternances et donc de deux séries de complications supplémentaires. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, faire aujourd'hui quand on peut renvoyer à demain ? Mais ne boudons pas notre plaisir. Toute réforme est imparfaite, forcément sujette à critiques. Celle là a le grand mérite d'être.</p>
<p>Alors que tout le monde critique, j'approuve.</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/06/07/Nouveau-d%C3%A9coupage-r%C3%A9gional.#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1917Mali : Les permanences géopolitiques s'imposent....urn:md5:ca35ed1037134a4e356e95fc90365f442013-01-17T21:50:00+00:002013-01-17T21:50:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Bon, un petit coup de g... Vous me direz, je ne suis pas le seul. Mais le sujet nous ramène aux fondamentaux. Et alors que la France se prépare à publier un livre qui engage son avenir, le rappel des choses essentielles intervient à point à tous ceux qui étaient prêts à faire des choix "raisonnables".</p>
<p><img alt="" src="http://s1.lemde.fr/image/2013/01/16/534x0/1817645_5_4b1a_blinde-leger-d-un-convoi-d-une-colonne-de_a5694569fc31838bbd51c6c2d341304e.jpg" /> <a href="http://abonnes.lemonde.fr/afrique/article/2013/01/16/le-retour-a-des-options-strategiques-plus-classiques-au-mali-rassure-les-militaires-francais_1817559_3212.html">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>Ainsi, voici la France engagée, seule, dans une intervention militaire en Afrique. Quel cruel démenti à bien des illusions, pour ne pas dire postures idéologiques, et angéliques. Qu'il soit bien entendu que je soutiens l'action en cours (parce qu'il n'y avait pas le choix). Récapitulons.</p>
<p>1/ fin de la Françafrique ? Ce vieux mantra que l'on entend depuis dix, quinze, trente ans à bien sûr été répété par le président de la République comme par tous ses prédécesseurs. Continuité des postures depuis vingt ans. La France, n'est-ce pas, n'allait pas poursuivre la colonisation. Là n'est plus la question. Mais plus du tout. Elle est celle de la construction étatique face aux trafics et aux réseaux, qui constituent des facteurs tout aussi structurants qu'Al Qaïda dans la région. Cela fait trois ans qu'on tournait autour du pot. Qu'on discutaillait, dialoguait, négociait. Que les Américains menaient une action indirecte et "globale" de formation de l'armée malienne (600 millions de dollars, qui justifiaient l'existence d'AfricaCom). Jusqu'à ce que des excités prennent tout d'abord les armes, puis conquièrent le nord du Mali. Au passage, la question des armes libyennes n'est qu'un épiphénomène: elles viennent en sus d'années de négligence de la question touareg, de développement d'une économie de la rançon et du trafic de drogue, et de subsides "arabes" nourris par la manne pétrolière.</p>
<p>Alors, il a bien fallu se souvenir que la Méditerranée ne sépare pas deux rives, et que le vrai rivage se trouve quelques milliers de kilomètres au sud. Dans ces confins, puisque Sahel signifie, en arabe, rivage. Et que donc, pour reprendre <strong>Castex</strong>, là est notre intérêt, partagé avec celui des Maliens.</p>
<p>2/ La Françe, seule. Certains le déplorent. Ils ne voient pas que pour la guerre, être seul est parfois plus efficace. Voici d'une certaine façon le contre-pied d'une opinion si répandue selon laquelle "à plusieurs, c'est mieux et on fait des économies d'échelle". Oui, mais pas toujours dans les affaires militaires. Où trop souvent, 1+1 ne font pas 2, encore moins trois, et très souvent 1,5 voire moins de 1. C'est d’ailleurs ce qu'ont beaucoup ressenti les Américains lors de la guerre d'Afghanistan, lorsqu'ils voyaient tout un tas d'alliés européens se défiler dans des zones peu dangereuses, sans même parler des caveats. L'avenir est à la coopération ? vous trouvez vraiment ?</p>
<p>3/ Démenti aussi au pari selon lequel l'Afrique n'est pas une priorité stratégique, et que l'important est "l'arc de crise", cette traduction française d'un "Grand Moyen-Orient" importé. Perdu. Heureusement que pour cent raisons, on avait encore des troupes à Dakar, en RCI, au Tchad, sans même parler des dispositifs temporaires au Burkina ou au Niger. Ça compense les lacunes de "transport stratégique" dont on nous rebat les oreilles depuis dix ans.</p>
<p>4/ Intérêt, disais-je, qui n'est pas celui de la Françafrique, puisqu'on est dans une nouvelle ère, mesdames et messieurs les commentateurs qui nous fatiguez les tympans de cette dénonciation du néocolonialisme : atterrissage, nous ne sommes plus au XX° siècle. Nous avons même changé de millénaire. Or donc, les Africains sont en croissance de 5 à 7 %, soit un rythme très vif. Et ils ont compris qu'il n'y a pas de prospérité sans sécurité. Et que les deux autres solutions, la chinoise et l'américaine, ne sont pas tenables.</p>
<ul>
<li>La chinoise ? que du pognon, rien de politique : au fait, quelqu'un a-t-il entendu Pékin évoquer la question du Sahel ?. Les Africains sauront s'en souvenir.</li>
<li>Et l'américaine : du pognon, et du <em>leadership from behind</em>, avec cet AfricaCom qui n'est pas installé sur le continent, et qui développe de l'approche globale avant la lettre, avec les résultats déjà évoqués. Il y a une certaine logique américaine, me direz-vous : puisqu'on bascule (le <em>pivot</em>) vers l'Asie, on délaisse toute l'Eurafrique. Là encore, les Africains sauront mesurer la fidélité.</li>
</ul>
<p>Qui reste-t-il ? Ben la France, qui est là bas par intérêt, bien sûr, mais aussi parce que simplement elle aime l'Afrique, et qu'elle a le sens des responsabilités, justement au regard de l'histoire. Ni blanche ni noire, la France, ni bonne ni mauvaise, tout comme l'Afrique, d'ailleurs : 10 nuances de gris, avec de part et d'autres des pourris et des héros. Mais de la pâte humaine qui se comprend, et qui d'ailleurs parle la même langue.</p>
<p>4 bis/ Avez-vous remarqué : l'Afrique intervient plus vite à nos côtés que les Européens ? Avec une CDEAO qui prend enfin conscience du défi sécuritaire. Et pendant qu'on n'entend pas les sud -Africains, pourtant prompts à dénoncer le néo-colonialisme mais envoyant sans complexe des troupes en Centrafrique, voici des Nigérians, des Togolais et même des Tchadiens qui arrivent au Mali. Au passage, triomphe d'Idriss Déby. Les Africains ne mégotent pas. Pas comme cet autre qui affirme benoîtement "<em>on ne va pas former une armée qui va partir au combat</em>".</p>
<p>5/ C'est peut-être pour ça qu'on est seuls à leurs côtés. Car le plus fabuleux, c'est de regarder qui nous a prodigué de l'aide, du côté européen : la Belgique (que je remercie, car elle agit conformément à ses discours et son sens des responsabilités : et puis c'est tellemnt rare que je peux m'appesantir en remerciements), et puis le Royaume-Uni et le Danemark (que je remercie aussi) : les deux pays qui refusent la PSDC ! Les plus hostiles à tous nos baratins sur l'Europe de la Défense, cette expression intraduisible en aucune langue et qui a quinze ans d'âge : mais à la différence d'un bon vin ou d'un bon whisky, la chose vieillit mal. Je parlerai bientôt de l'Allemagne : dans deux ou trois jours, nous fêterons le cinquantième anniversaire du traité de l’Élysée. Fêter. Le mot est mal choisi. La cérémonie sera triste et coincée et grinçante. Mieux vaut se taire pour l'instant. (mais au passage, j'ai adoré Cohn-Bendit quand il a dit : "<em>Vous avez dit 'nous', 'Nous sommes concernés', tout le monde dit 'nous', mais il n’y a que des soldats français là-bas (…) On dit aux Français : 'On va vous donner les infirmières et allez vous faire tuer au Mali</em>'»).</p>
<p>6/ Ainsi donc, nous voici à intervenir contre ces pirates des mers de sable, aux confins du Sahara. Qui auront réussi, par leur idiot coup de force, à s'affaiblir alors même qu'ils croyaient se renforcer. Encore un paradoxe stratégique (la stratégie est par essence paradoxale), et pourtant totalement explicable. Leur salut venait de leur capacité de dispersion. En se regroupant, ils s'offrent à nos frappes et donc s'affaiblissent. Quant à nous, nos palabres inutiles ont démontré notre absolue faiblesse, ce qui a induit l'ennemi en erreur. La faiblesse est notre froce ? point trop n'en faut, quand même. Voici encore cet autre paradoxe : à cause d'une prise d'otage en Algérie (organisée par des cousins des pirates mais sans liaison avec ce qui se passe au Mali, car on n'organise pas une prise d'otages de 300 personnes à 3000 km de là en trois jours), les dits pirates islamistes ont réussi l'exploit de faire renouer l'Algérie et la France : car nous voici désormais en train de faire la guerre côte à côte contre l'ennemi. On a vraiment changé de siècle.</p>
<p>7/ Et pourtant, la guerre sera longue. Militairement, puisqu'il va falloir organiser un dispositif avec trois fonctions : le contrôle de zone, l'intervention de vive force, et la remise en état (remise en État ?) administrative du pays. En veillant d'ailleurs à ce que l'armée malienne ne déborde pas en représailles et n'attise pas les tensions. Tout en posant les bases d'une négociation pour régler la question des confins.</p>
<p>8/ Car ce rivage sahélien borde une mer de sable. Comme toutes les mers, ce qui compte ce sont les routes et les échanges. Et sur les mers, il n'y a pas de frontières. De même que notre représentation de la guerre (massive et industrielle) est désuète et ne correspond pas à la réalité de celle que nos menons, de même notre représentation de la frontière, linéaire et administrative et étatique et moderne et westphalienne ne peut s'appliquer à ces étendues lisses, comme dirait <strong>Deleuze</strong>. Politiquement, il va falloir enfin trouver une solution pour ces terres-mers, qui se trouvent de plus à la charnière entre populations noires et blanches, entre musulmans et non musulmans. Sachant que bien sûr, très vite, le jeu des petits calculs et les coups bas des copains jaloux va recommencer.</p>
<p>9/ Voici donc revenus les fondements de la géopolitique : l'horizon africain de la France, la nécessité de l'intervention, la persistance à horizon prévisible du modèle expéditionnaire, la nécessité de troupes pour contrôler le terrain, la remise en cause des illusions coopératives en matière de défense et donc, par voie de conséquence, l’impérieuse nécessité de conserver un outil de défense. Autant de réalités qu'on se dépêchait d'oublier parce qu'elles n'étaient pas à la mode. Qui font qu'on est bien seul aujourd’hui. Mais cette solitude orgueilleuse est le gage de succès futurs.</p>
<p>De ce point de vue là, le timing est parfait alors que le Livre Blanc lambinait. Dites, M. le président de la commission : si vous tirez les vrais enseignements de ce qui se passe en ce moment, on ne vous en voudra vraiment pas si vous publiez le LB avec un ou deux mois de retard. Je suis même prêt à attendre jusqu’à juin, c'est dire que je saurai être patient.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2013/01/17/Les-permanences-g%25C3%25A9opolitiques-s-imposent....#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1665Stratégie de la France et Europe (2/2)urn:md5:bb7fe75374645a140c631b27875280c82012-09-24T21:32:00+00:002012-09-24T21:32:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Suite et fin de notre <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/09/20/Strat%C3%A9gie-de-la-France-et-Europe-%281/2%29">billet</a> de l'autre jour.</p>
<p><img alt="" src="http://www.rfi.fr/sites/filesrfi/imagecache/rfi_43_large/sites/images.rfi.fr/files/aef_image/76025102_0.jpg" /> <a href="http://www.rfi.fr/europe/20120709-quelle-strategie-europeenne-developpement-defense-francaise">source</a></p></div> <div class="post-content"><p><strong>2/ La question posée par le LB est la suivante : comment dépasser ces deux limites ?</strong></p>
<p><ins>21/ Tout d’abord en se plaçant résolument dans une démarche politique, donc inter-nationale.</ins></p>
<p>Cela entraîne deux conséquences.</p>
<ul>
<li>Il faut tout d’abord répondre à la question des « grands » acteurs, à savoir la Grande-Bretagne et l’Allemagne. N’en choisir qu’un (l’Allemagne, option longtemps privilégiée, ou la GB, option Lancaster House) ou associer les deux sont des choix politiques.</li>
<li>Il faut ensuite, et dans tous les cas, associer les pays moyens (Italie, Pologne, Espagne, Suède …) et les petits (Belgique, Grèce, Portugal, Finlande …), ce que la France fait rarement et mal, tant elle est obsédée par la puissance.</li>
</ul>
<p><strong>22/ Il faut ensuite repenser notre « puissance ».</strong></p>
<p>Pour cela, il s’agit de mieux dire ce que nous ne pouvons partager et ce que nous acceptons de sacrifier. Cela renvoie à la notion d’intérêt vital, d’intérêt supérieur et d’intérêt majeur.</p>
<p><ins>Intérêts vitaux</ins> : Nous ne pouvons partager la réalité ultime de l’Etat souverain sur un territoire habité par une population. Aujourd’hui, l’Etat national dispose encore du monopole de la puissance légitime. La défense doit donc assurer la sécurité du territoire, la protection des citoyens, la continuation des pouvoirs publics : voici des intérêts « vitaux » qu’on ne saurait partager pour l’instant.</p>
<p>Cela suppose l’arme nucléaire (garante de paix et permettant d’éviter les défaites de 1870 ou de 1940) mais aussi une armée prête à intervenir à l’extérieur, soit pour défendre les DOM-COM qui appartiennent au territoire (syndrome de Dien Bien Phu) soit pour défendre les intérêts supérieurs (syndrome de Suez).</p>
<p>Ce domaine a une dimension principalement militaire.</p>
<p><ins>Intérêts supérieurs</ins> : ceux-ci en revanche peuvent et doivent être partagés. Il s’agit de la défense de l’Europe et de la préservation de son unité.</p>
<ul>
<li>- Le premier intérêt pose la question de l’Otan : or, trop de nos partenaires européens estiment que la défense de l’Europe est assurée par l’Alliance, malgré les mises en garde américaines et l’affaiblissement du couplage transatlantique.</li>
<li>- Quant à la préservation de son unité, la question mérite d’être posée à nouveau. Et si la CEE ne disposait pas en son temps d’outils pour résoudre la crise yougoslave, elle n’aurait aujourd’hui plus besoin de l’Otan ou de l’Onu pour intervenir.</li>
<li>- Ces domaines connaissent une tonalité militaire majeure mais non exclusive.</li>
</ul>
<p><ins>Intérêts stratégiques majeurs</ins> : Enfin, une démarche dynamique proposerait de nouvelles ambitions. La notion d‘intérêts stratégiques majeurs viendrait compléter cette répartition. Ils seraient de l’ordre de la sécurité avec des dimensions civiles et militaires. Deux catégories d’intérêts viennent à l’esprit :</p>
<ul>
<li>- la première est géographique, et vise les voisinages. Ainsi, il est opportun de proposer la zone arctique, la zone des confins slaves ou la zone méditerranéenne comme des zones d’intérêt stratégique majeur de l’UE, même si celle-ci accepte de déléguer leur mise en œuvre à des coopérations locales avec un siège Européen de droit (ainsi, seuls certains Etats sont membres du conseil baltique).</li>
<li>- La deuxième est transversale. Ainsi les espaces maritimes, la sécurité des flux, l’espace exo-atmosphérique ou le cyberespace pourraient constituer des centres d’intérêt majeur.</li>
</ul>
<p>Cette répartition en cercles permettrait de satisfaire ceux qui sont disposés à avancer sur une coopération plus aboutie, à qui on proposerait de partager les intérêts supérieurs, et ceux qui adoptent une attitude de consommation de sécurité qui verraient leur avantage à collaborer sur les champs d’intérêt majeur.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/09/20/Strat%25C3%25A9gie-de-la-France-et-Europe-%25282/2%2529#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1542Stratégie de la France et Europe (1/2)urn:md5:2b6865803aff0e5c46ccd2a973b1daac2012-09-20T21:08:00+00:002012-09-20T21:08:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Ça réfléchit beaucoup en ce moment, notamment sur les questions de stratégie française par rapport à l'Europe, ce qui m'amène à quelques réflexions actuelles.</p>
<p><img alt="" src="http://www.2e2f.fr/images/pages/presentation-agence.jpg" /> <a href="http://www.2e2f.fr/agence.php">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Trop souvent par le passé, on a raisonné les questions de stratégie européenne sous <ins>deux prismes imparfaits</ins> :</p>
<p>11/ le premier est celui des <ins>outils</ins> : autrement dit, chacun considérait (conformément à ce qu’on comprenait de la méthode des petits pas chère à <strong>Jean Monnet</strong>) qu’il fallait « avancer » peu à peu et que les liens (techniques) entraînerait une agglomération des esprits et des consciences : à un moment, l’effet de saturation forcerait l’émulsion à changer de nature (à cristalliser disent les chimistes et <strong>Stendhal</strong>).</p>
<p>L’application à la défense de ce schéma est passée par de nombreuses étapes : UEO et BFA dans les années 1980, puis à la suite de la chute du mur de Berlin PESC, PESD, GEAO, OCCAR, AED, PSDC, SEAE, GT 1500, headline goals, etc….</p>
<p>Or, l’échafaudage n’a pas produit l’émulsion, loin s’en faut, car on à l’impression d’un véritable entassement de mikados enchevêtrés.</p>
<p>La conclusion est claire : la méthode des outils, des petits pas et des bonnes volontés ne suffit pas.</p>
<p>12/ La deuxième méthode, surtout française, emprunte une <ins>approche réaliste de puissance</ins>. Cette approche classique et westphalienne répond à un tropisme français qui n’est pas partagé en Europe, sauf par nos voisins anglais. Ce tropisme tient à plusieurs éléments : tout d’abord, le consensus sur une politique de puissance classique, dure (militaire et économique) et douce (politique culturelle et francophonie, discours sur les droits de l’homme et universalisme français).</p>
<p>Longtemps, la France a cru que l'Europe lui servirait de multiplicateur de puissance : puisque la France seule (« celle de la grandeur et du rang ») ne pouvait plus agir seule, elle s’appuierait sur les voisins européens pour amplifier son action.</p>
<p>Mais cette méthode sous-entendait d’une part que les voisins partageraient la même conception de la puissance, d’autre part qu’ils accepteraient notre férule. Or, ces deux conditions ne sont pas pleinement remplies.</p>
<p>(à suivre)</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/09/20/Strat%25C3%25A9gie-de-la-France-et-Europe-%25281/2%2529#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1537Priorités LBurn:md5:93bdacbe2e8f99b596e1c95bb8d789532012-09-11T22:18:00+00:002012-09-11T22:18:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Marrant : il y a plein de gens qui me contactent, comme ça, pour papoter et me demander ce que je pense de ceci ou cela. Ce doit être la rentrée : pléthore de commission, GT, cellules réponses, sous-cellules, <em>black groups</em> et autres réunions où ça cause de stratégie. Et comme s'il n'y en avait pas assez, on vient poser la question à quelqu'un qui ne fait partie d'aucune. Comme si une idée de plus pouvait faire un tant soit peu avancer le schmilblick. Mais pour répondre à un ami suédois qui me demandait "quelles sont les centres d'intérêt ?" et pour aider les candidats qui terminent leur préparation à l'oral, voici donc les questions de diagnostic géopolitique auxquelles j'essaierai de répondre, si j'avais à prendre des décisions stratégiques.</p>
<p><img alt="" src="http://laszlya.com/public/.100_2520_m.jpg" /> <a href="http://laszlya.com/post/2009/06/08/De-retour-d-une-semaine-en-Haute-Savoie">source</a></p>
<p>Est-il besoin de préciser que ces quelques idées n'engagent que moi, et peuvent d'ailleurs être pillées sans vergogne. Mais puisqu'il paraît que l'on veut consulter large, j'apporte ma pierre à l'édifice commun.</p></div> <div class="post-content"><p>1/ La première question à laquelle répondre est la suivante :<ins> jusqu'où y a-t-il découplage transatlantique ?</ins> en effet, celui-ci a pris naissance au Kossovo, s'est envenimé avec l'affaire d'Irak, a été péniblement réparé en Afghanistan, mais les Américains nous le disent, par la voix de Bob Gates ou celle de la QDR : l'Europe n'est plus leur priorité. Même si beaucoup d'Européens ne cessent de courir après Washington (sans toutefois mettre la main à la poche).... Bref : avons nous intérêt à suivre les États-Unis dans leur stratégie globale (remarquons au passage que ce sont les seuls à avoir encore l'ambition de cette stratégie), notamment envers la Chine, ou avons nous d'autres intérêts collectifs européens ? Ce qui pose la question de l'Europe.</p>
<p>2/ <ins>L'Europe est-elle assimilable à l'UE ?</ins> Cette question est stratégique, sa réponse l'est donc tout autant, et la réponse n'est pas aussi évidente qu'elle en a l'air. J'ai déjà <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/09/02/Triangle-europ%C3%A9en-et-Europe-de-la-d%C3%A9fense">mentionné</a> le miroir aux alouettes que constituait l'expression "Europe de la défense" qui est invendable à l'extérieur. Or, force est de constater qu'il y a des Europes. Laquelle veut-on ? qui choisit-on ? La GB ou l'Allemagne ? la grammaire de puissance (sérieusement écornée) ou le noyau carolingien ? l'océan ou le continent ? une grande Europe ou un noyau agissant ?</p>
<p>3/ Il y a des <ins>vulnérabilités intérieures</ins>. Je ne pense pas à cette sénatrice qui demandait l'armée contre les trafiquants de drogue (voir cette remarquable <a href="http://aboudjaffar.blog.lemonde.fr/2012/08/31/soupir-2/">réponse</a> d'Abou Djaffar : ce serait bien que les sénateurs connaissent quand même l'état du droit qui fait un Etat de droit qui empêche toute mesure de ce type). Non, le sujet est ailleurs : quid si une catastrophe type Fukushima intervient ? les FAD japonaise ont déployés 100.000 hommes, nous ne pouvons déjà plus le faire. Autre exemple : une tempête casse des lignes à haute tension, mais les équipes EDF qui utilisent leurs téléphones portables ne sont plus en liaison puisqu'il n'y a plus d'électricité pour approvisionner les relais telecom. Autrement dit, la question n'est pas celle des infrastructures critiques (tout est critique), mais celle de l'intégration systémique et donc du risque systémique. Nous vivons aujourd’hui sur une économie de flux (1,5 jours de stocks dans les supermarchés de la région parisienne), que faire si ça s'arrête ?</p>
<p>4/ <ins>Dernier côté du triangle, celui au sud</ins>. Quand verrons-nous que l'arc de crise est une invention qui n'a plus de sens, que le désengagement américain du Moyen Orient élargi et d'Asie centrale pose un problème qui n'est pas le nôtre (malgré ce qu'ils disent), qu'il y a plusieurs Méditerranée (une à l'ouest et une à l'est, voir <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/08/22/Coups-d-oeil-m%C3%A9diterran%C3%A9ens">ici</a> et <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/08/28/Discours-aux-ambassadeurs-2012.">ici</a> point 9) et plusieurs Afrique (voir <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2010/05/20/L-%C3%AEle-Afrique-du-sud">ici</a>), et qu'il faudrait peut-être choisir. Notre façade méditerranéenne nous regarde, nous riverains, sans que tous les Européens n'aient forcément à nous dire quoi faire, tout comme il est normal que les riverains de la Baltique s'entendent entre eux sans que l'UE soit au Conseil baltique...</p>
<p>Il n'y a rien de bien nouveau ici, puisque j'avais déjà évoque quelques points dans ma <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/03/03/Une-strat%C3%A9gie-fran%C3%A7aise">série "stratégie française"</a>. Disons que voici les questions stratégiques qui se posent.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/09/11/Priorit%25C3%25A9s-LB#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1528Repenser les fondements de la Défense (E. de La Maisonneuve)urn:md5:c4f71e532a23e27b72585796792851a52012-08-30T21:08:00+00:002012-08-30T21:08:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>En ces temps où l'on parle du Livre blanc (sans grande impatience, l'avez vous remarqué ? peut-être parce que cela ne paraît pas très ouvert, comme le<a href="http://www.marianne2.fr/blogsecretdefense/Livre-blanc-des-experts-tres-socialistes_a723.html"> remarque JDM</a>), il paraît opportun d'alimenter le débat, en espérant qu'il soit écouté... Voici donc le texte proposé par le général de <strong>La Maisonneuve</strong>, président de la <a href="http://www.societe-de-strategie.asso.fr/">société de stratégie</a>, au moyen de sa dernière lettre (<a href="http://www.societe-de-strategie.asso.fr/actuelpr.php">Actuel</a> n° 32). UN style clair, des formules choc (l’Alliance atlantique décrite comme prison stratégique), voici qui devrait faire causer dans les chaumières.... Il reste que je peine à croire à l'innovation suggérée sur la notion de sécurité : elle est, il faut bien le dire, le grand creux du précédent livre blanc ....</p>
<p><img alt="" src="http://jssnews.com/wp-content/uploads/2010/05/strategie.jpg" /> <a href="http://jssnews.com/2010/05/25/face-a-liran-quelle-strategie-choisir/">source</a>
O. Kempf</p></div> <div class="post-content"><p>En ces temps de vaches très maigres, sans doute annonciateurs de graves tensions internationales, il est à craindre que le budget de la Défense soit, une fois de plus, considéré comme une variable d’ajustement, selon la formule favorite des états-majors. Il est d’ailleurs frappant de noter que les 33 milliards d’économies qu’il faut trouver en 2013 correspondent à peu près exactement au montant du budget des armées. Bien sûr on n’ira pas jusque-là, mais cette comparaison peut faire des ravages dans certains esprits expéditifs. Cette attrition est d’autant plus probable que la ligne stratégique sur laquelle s’enferre le pays depuis deux décennies n’a ni consistance ni crédibilité aux yeux de responsables politiques en quête d’économies faciles. Le raisonnement par les boutons de guêtre fourvoiera toujours les militaires, accrochés à l’existant et soucieux de pouvoir répondre à la lettre de l’actualité plus qu’à une logique stratégique qui, il faut le dire, ne leur plus été enseignée depuis un demi-siècle. C’est pourtant bien à ce qu’on appelle « l’ordre du monde » que doit répondre et coïncider une politique de défense digne de ce nom.</p>
<p>Ce n’est pas faute de l’avoir dit et écrit sur tous les tons, mais sans résultat : il faudrait prendre conscience que la guerre froide est terminée et qu’avec elle toute une phase de notre histoire et surtout toute une conception des relations inter-nationales, plus même une « vision du monde », sont désormais achevées et dépassées.</p>
<p>La crise dans laquelle nous sommes durablement englués, pas seulement pour des raisons conjoncturelles, est une des conséquences lourdes de ce « basculement » du monde dans un ailleurs pour l’instant obscurci par un épais brouillard, brouillard que d’aucuns s’acharnent à entretenir avec cynisme et non sans arrière-pensées. Nous y reviendrons, mais il paraît évident que certaines « puissances » ont tout intérêt à maintenir d’une façon ou d’une autre une logique de guerre froide, celle qui leur avait permis d’assurer leur emprise sur le monde.</p>
<p><strong>Un nouveau monde</strong></p>
<p>La guerre froide a été le dernier avatar d’une conception westphalienne des relations internationales qui a entraîné, sous prétexte d’ordre européen, les Etats du continent à se faire la guerre sans discontinuer pendant trois siècles : guerre due à leurs propres ambitions ou à l’instabilité de leurs systèmes politiques, guerre due aux ingérences extérieures pour empêcher tout ordre européen de voir le jour. Elle avait ses propres règles, ses équilibres, ses exigences dont beaucoup provenaient d’une lecture clausewitzienne des ressorts de la politique. Elle mettait l’épée de Damoclès au premier rang des préoccupations, agitant sans cesse les étendards de la menace pour maintenir l’état d’inquiétude et une situation d’insécurité. L’Union soviétique s’est effondrée et avec elle tout cet artifice séculaire, mais la mentalité en est restée, durablement gravée dans les esprits, encore inscrite dans les institutions.</p>
<p>Et elle est savamment entretenue par ceux qui y ont intérêt. Sans ordre européen et dans un « désordre » qui, par contrecoup – Russie, Moyen-Orient, Asie centrale -, touche la totalité du grand continent eurasiatique, la maîtrise du monde appartient aux « insulaires » : petits insulaires du XIX° siècle, l’Angleterre puis bientôt le Japon, grand insulaire du XX° siècle, les Etats-Unis.</p>
<p>Sur cet ordre du monde et ses lignes de forces, relisons les concepteurs anglais et allemands - Mackinder, Haushofer - de ce que nous appelons aujourd’hui la géopolitique ; ils avaient bien mis en exergue l’importance du continent eurasiatique et de son « heartland » - le cœur du monde. Napoléon les avait précédés qui avait compris, après Richelieu et quelques autres, que, pour atteindre ce centre du monde, il lui fallait en 1805 lever le camp illusoire de Boulogne face à l’Angleterre pour tenter de s’imposer au milieu du continent ; ce que ni lui ni personne n’a jamais su faire contre l’immensité du territoire russe – le vide spatial mortel pour les stratèges - qui ruina ses ambitions peu d’années après.</p>
<p>Pendant trois siècles le grand continent a été la proie des flammes : tous ses peuples s’y brûlèrent, certains manquèrent d’y périr. La France, géographiquement placée à sa pointe occidentale, au rendez-vous du continent et des espaces maritimes, a cru avoir le choix d’une double politique. Elle s’y est ruinée. Au traité de Paris en 1763, à la fin d’une désastreuse guerre de Sept ans menée en sous-main par l’Angleterre, elle perdit la plupart de ses colonies. Et elle déclencha le mécanisme des guerres mondiales en 1870 en se faisant humilier par la Prusse à laquelle elle n’opposa qu’une armée de projection – la fameuse armée d’Afrique, ardente mais équipée et entraînée pour des théâtres d’opérations sans mesure avec les obligations de la défense du pays. En 1914, à la suite de la bataille de la Marne, il s’en fallut de peu et du courage gigantesque des poilus que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Tout cela, nous l’avons payé au prix fort, à un prix même scandaleusement excessif, dont il est probable que nous ne sommes toujours pas remis aujourd’hui.</p>
<p>Mais, à la limite, l’histoire a sa logique et la France n’est pas seule responsable des malheurs du monde. On peut donc comprendre le mécanisme infernal par lequel le continent dans son ensemble a été soumis à des forces centrifuges d’une telle violence qu’il ne parvenait pas à trouver lui-même son équilibre et devait alors s’en remettre à d’autres – les insulaires anglais et américains – trop contents d’exploiter une situation qui servait leurs intérêts.</p>
<p>Mais nous sommes au XXI° siècle, la guerre froide est terminée, la Russie est plus ou moins rentrée dans le rang, la Chine se normalise progressivement et, surtout, les nations hostiles, celles qui furent à l’origine des plus grandes guerres de l’histoire humaine, se sont associées dans une Union européenne.</p>
<p>Plus rien ne s’oppose donc à ce qu’on considère enfin et pour la première fois notre continent eurasiatique dans sa totalité et dans une perspective de son propre équilibre, sans que s’y mêlent encore des pays insulaires qui sont soumis à une logique différente sinon opposée.</p>
<p>On voit bien d’où émanent aujourd’hui les discours de propagande antirusse et antichinoise pour tenter d’attiser les peurs et de nous faire croire que rien n’a changé et qu’en conséquence il nous faut rester soumis aux mêmes diktats. Le lobby de l’Alliance contre des pays qui partagent les mêmes terres que nous et dont nous sommes les voisins et partenaires naturels ne veut rien céder à une nouvelle logique stratégique qui le réduirait à ce qu’il est : une partie du monde mais non l’essentiel.</p>
<p>Le continent qui nous concerne n’a jamais été autant qu’aujourd’hui le véritable « cœur du monde ». Il est bien l’essentiel du monde par sa taille, par sa situation au nord de l’équateur, par sa population : sur sept milliards d’habitants, cinq y vivent. Il regroupe 120 des 200 nations du monde. C’est là que sont nées les deux grandes civilisations, gréco-romaine devenue occidentale, chinoise ou asiatique. C’est là qu’ont surgi les religions. C’est là enfin que se trouvent encore les plus grandes réserves énergétiques du monde. Et c’est aux peuples qui y habitent, aux nations qui le fragmentent de gérer leurs propres affaires en même temps qu’ils doivent s’accorder sur leurs relations de voisinage.</p>
<p>La géostratégie de notre époque, plutôt que de s’appesantir sur des phénomènes révolus qui entraînent des lectures absconses de la réalité, plutôt que de penser en termes surannés de rapports de forces – de toutes façons inapplicables, on le voit en Afghanistan comme on l’a subi dans tous les conflits dits périphériques des cinquante dernières années -, plutôt que de laisser prendre comme signes avant-coureurs de la « guerre » les excès du terrorisme, ou les dérives des rivalités informatiques et monétaires, devrait s’efforcer de reprendre les fondamentaux qui découlent de la géographie et de nos histoires croisées. On s’apercevrait alors qu’on peut voir et penser le monde différemment, de façon moins dogmatique et manichéenne.</p>
<p>Cette façon de voir le monde est nouvelle, puisqu’elle n’a pas eu cours depuis au moins trois siècles et qu’auparavant le monde n’était pas accessible dans sa totalité ni dans sa diversité. Nous avons donc une chance historique de réviser nos notions stratégiques et, partant, de repenser des systèmes de défense qui sont devenus, par obsolescence, aussi coûteux qu’inefficaces.</p>
<p><strong>Assurer la sécurité</strong></p>
<p>Lors de l’élaboration de livres blancs précédents, à la sortie de la guerre froide, l’idée avait été proposée d’associer le concept de sécurité à celui de défense. La chose a été faite en 2008 mais dans un sens détourné de l’intention initiale. Pour des raisons de politique intérieure, c’est une notion très restrictive de la sécurité qui a été introduite dans le dispositif de défense avec un simple effet cosmétique sans conséquences. Ce que nous avions à l’esprit alors, c’était bien de faire évoluer le concept de défense vers un concept de sécurité, dans la logique de la fin de la guerre froide et de l’équilibre du continent eurasiatique tel que nous le pensions possible.</p>
<p>Pour des raisons à peu près identiques à celles du XIX° siècle, faute de pouvoir trouver un consensus de défense et de sécurité avec nos voisins et partenaires, nous nous sommes laissés convaincre de rejoindre une fois encore nos alliés insulaires dans la quête improbable d’un ordre mondial imposé par la force et de l’extérieur. Même sous couvert des Nations unies, cet ordre n’est jamais que la continuation de l’impérialisme par d’autres moyens. L’humanitaire et le devoir d’ingérence ont bon dos : nous faisions la même chose pour protéger nos Mission-naires au XIX° siècle.</p>
<p>C’est pourquoi nous sommes allés au plus facile : il est politiquement et militairement plus aisé et plus gratifiant de constituer une force de projection de 40 ou 60 000 hommes que de tisser un réseau de sécurité régionale, je veux dire un système de défense européen. Tous les responsables ont été lâches, militaires et civils, politiques de tous bords : ils ont laissé pencher la barque du côté où elle avait tendance à s’incliner. Et il faut reconnaître qu’il est plus intéressant à tous égards de s’évader six mois en Côte d’Ivoire ou de risquer sa peau en Afghanistan que de moisir d’ennui dans les marches de l’Est.</p>
<p>Nous allons devoir revenir à l’essentiel, à notre cœur de métier, pour des raisons financières, mais il eût été plus intelligent et responsable de le faire par un raisonnement stratégique : la France doit abandonner ses chimères d’expéditions lointaines et glorieuses pour se consacrer modestement mais utilement à consolider le tissu maintes fois déchiré et fragile de la sécurité de son propre continent. Camus avait eu, comme souvent, une belle formule pleine de sagesse : « Nous n’avons pas pour tâche de refaire le monde, mais d’empêcher celui-ci de se défaire ». Et aujourd’hui, alors que le grand conflit du continent eurasiatique s’est apaisé, nous avons pour devoir d’éteindre les dernières braises et de mettre en place un système de protection solide.</p>
<p>Nous avons un rôle historique en Europe, conforme à notre tradition d’éclaireur, celui de remettre la défense européenne sur les rails – les vrais – et celui de coordonner nos politiques économiques. C’est là le cœur politique d’une Europe qui, avec la Chine et la Russie, doit donner au continent un équilibre qu’il n’a jamais connu et qu’avaient imaginé seulement de grands conquérants comme Alexandre, Gengis Khan ou Napoléon.</p>
<p>Il faut cesser, quels que soient nos liens d’amitié durable avec les Etats-Unis, nous laisser imposer une Alliance atlantique qui n’a plus de raison d’être, qui est même une prison stratégique et qui nous pousse parfois à des tentations excessives, celles d’intervenir pour changer un ordre – même injuste – ce qu’il ne nous appartient pas de décider.</p>
<p>A l’aune de cette vision renouvelée du monde, nous devons revisiter tout notre système, y compris nucléaire, pour en mesurer la pertinence et l’efficacité. Une fois encore, toutes les données du problème ont changé, il est donc ridicule d’en appeler aux mânes du Général de Gaulle. Lui-même, homme des circons-tances, reprendrait sans doute l’analyse à zéro et n’aurait pas de formules assez fortes pour fustiger les errements actuels.</p>
<p>Il n’y a pas place ici pour un descriptif détaillé des besoins financiers, techniques et humains d’un système de sécurité conçu avec nos partenaires européens ; du partage des tâches que cela suppose, de la mutualisation des formations, de la simplification des structures, de la répartition des compétences, etc. Sans compter les oppositions de toutes sortes et les arguments, dument fondés, qui les soutiennent.</p>
<p>C’est un travail de longue haleine ; il faudra bien s’y atteler un jour, et avant celui où nous risquons de nous apercevoir que, pour préserver l’essentiel, nous n’aurons d’alliés que ceux avec lesquels nous partageons non seulement les intérêts mais aussi la vision du monde. Prenons garde à ne pas nous retrouver seuls et démunis, comme nous le furent par trois fois en un siècle. Assurons-nous de ne pas avoir, une fois de trop, à appeler à l’aide. Dans le monde tel qu’il est désormais, ce serait suicidaire.</p>
<p>Eric de La Maisonneuve</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/08/30/Repenser-les-fondements-de-la-D%25C3%25A9fense-%2528E.-de-La-Maisoneuve%2529#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1516Saint-Denisurn:md5:a7128e68638cb60f76f686a625aaf6f02012-03-24T19:06:00+00:002012-03-24T19:06:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Samedi de printemps : pourquoi ne pas sortir de sa casemate et aller faire un peu de tourisme culturel, histoire d'emmener le "p'tit dernier" en dehors de son environnement virtuel ? Oui, bon, d'accord, le papa (c'est moi) il faut aussi le sortir de ses bécanes, je le confesse. Or donc, nous voilà à visiter la basilique, la-haut, au nord de Paris. Et je me suis fait la réflexion que la géographie sacrée était l'ancêtre de la géopolitique.</p>
<p><img alt="" src="http://www.tourisme93.com/Local/basilique/images/06.jpg" /> <a href="http://www.tourisme93.com/basilique/abbaye-saint-denis.html">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ La géographie sacrée n'est pas simplement une discipline ésotérique où elle est trop souvent cantonnée. On se référera ici aux écrits de <strong>Jean Richer</strong> (<em>Géographie sacrée du monde grec, Géographie sacrée du monde romain</em>). Il s'agit bien d'un monde "religieux", celui d'avant le <em>désenchantement du monde</em> décrit par <strong>Marcel Gauchet</strong>. Alors, la religion oriente la vie publique. Le roi n'est pas qu'un homme d’État (a-t-on assez remarqué à quel point l’apocryphe "<em>L’État c'est moi</em>", prêté à <strong>Louis XIV</strong>, signifiait une laïcisation de la vie publique ?).</p>
<p>2/ C'est tout l'enjeu de la Renaissance, qui dans l'ordre politique se conclut pas les traités de Westphalie : sortir justement de ce monde religieux, où le sacré oriente la vie quotidienne. Mais auparavant ? La géopolitique n'était-elle que "rivalité de puissances sur des territoires" ? alors qu'on avait des luttes de princes et des systèmes féodaux compliqués ? Notre approche contemporaine pouvait-elle suffire ?</p>
<p>3/ Au fond, les rois étaient non seulement des "hommes d’État", c'étaient aussi des personnes sacrées, tenant une fonction liturgique (cf. <em>La royauté sacrée</em>, décrite par <strong>Jean Hani</strong>). Et cette sacralité devait s'inscrire dans la géographie. Elle passait non seulement par le travail de l’Église qui marquait le territoire avec de nombreux lieux de culte, n'hésitant pas à convertir des sanctuaires païens en lieux de culte catholique. Elle passait aussi par la constitution d'une géographie royale qui devait couvrir le territoire. On peut penser aux places royales de Paris, ou aussi à la fabrication de Chambord (cf. mon billet sur <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2011/05/07/Chambord%2C-un-ch%C3%A2teau-politique">Chambord, un château politique</a>), ou bien sûr à la scénographie de pierre et de jardin mise en place à Versailles (ne jamais oublier le rôle fondamental des jardins dans l'ensemble de Versailles).</p>
<p>4/ Saint-Denis participe de ce même objectif : les rois français inventent l'idée de nécropole royale, avec <strong>Dagobert</strong> puis avec <strong>Saint Louis</strong>. L'abbé <strong>Suger</strong>, en inventant le style gothique, invente le premier <em>soft power</em> de l'histoire : le "style français" se répand dans toute l'Europe (lisez les <em>Piliers de la terre</em>, roman agréable de <strong>Ken Follett</strong> qui raconte justement l'invention de Saint-Denis).</p>
<p>5/ L'idée de nécropole royale se répand également en Europe : Westminter et l'Escurial sont toutefois plus tardifs (dans cette fonction) (voir la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_n%C3%A9cropoles_royales">liste des nécropoles royales</a>). En faisant se reposer les corps des rois dans un lieu unique, la royauté marque le territoire : la fonction du monarque qui instaure un lien personnel avec ses sujets, est symbolisée par cette similitude d'humanité. Le cimetière de famille devient celui du royaume.</p>
<p>6/ Aussi, ce n'est pas un hasard si la Révolution, dans ses derniers mouvements d'ivresse de la fin 1793, s'acharne contre cette nécropole et disperse les ossements. Puisqu'il faut mettre à bas ce vieux lien personnel, il faut déménager le symbole. Et dresser un symbole alternatif qui sera le Panthéon, "pour les grands hommes". Une géographie sacrée de remplacement, laïque cette-fois.</p>
<p>7/ Le dernier avatar de la sacralité posthume passe par les monuments aux morts. Les premiers sont<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Monument_aux_morts_de_la_guerre_de_1870_en_France"> inventés à l'issue de la guerre de 1870</a> (même si l'on peut mentionner l'Arc de triomphe de l’Étoile, ou la porte Desille à Nancy)... Mais c'est la guerre de 1914 qui va diffuser ce monument communal, dont l'expansion s’explique par la gigantesque saignée de la première guerre mondiale. Alors, le souvenir des morts se démocratise et se répand sur le territoire. Le monument aux morts est à la fois sacré (puisqu'il évoque le mystère de la mort) et national (puisque sa cause est la défense de la Nation).</p>
<p>La géographie sacrée a alors changé de lieu. En se laïcisant, elle est devenue une représentation, appartenant à la géopolitique.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/03/24/Saint-Denis#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1364La décentralisation épuiséeurn:md5:8d059dab126b178099f89c5183e84af82012-03-18T19:35:00+00:002012-03-18T19:35:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>J'ai assisté il y a quelques semaines à un débat sur les territoires. Cela m'a agacé à plusieurs reprises mais aussi intéressé grâce à des idées nouvelles et des points de vues nouveaux (pour moi). Voici quelques réflexions que j'en tire. Et tout d'abord le constat de <ins>l'épuisement de la décentralisation</ins> : pas seulement due à des raisons politiques, contrairement à ce qu'on croit trop souvent.</p>
<p><img alt="" src="http://www.insee.fr/fr/insee_regions/rhone-alpes/themes/syntheses/lettre_analyses/02105/img/02105_rhone_alpes_attractivite_france.gif" /> <a href="http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=8&ref_id=14361">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Constatons tout d'abord qu'au-delà de tous les discours et de toutes les dispositions institutionnelles mises en place depuis 1982, la décentralisation s'affaiblit.</p>
<p>2/ On observe tout d'abord une sorte de concurrence des régions,qui veulent toutes affirmer leur rôle, aussi bien à Paris qu'à Bruxelles, avec des succès divers.</p>
<p>3/ Surtout, la réalité du pouvoir économique réside à Paris : c'est un des effets de la révolution des transports, mais aussi de la mondialisation, qui est à la fois un mouvement d'internationalisation économique, et le résultat des techniques de communication informatique. On a ainsi assisté à une concentration des entreprises. La France a ainsi privilégié une logique de grand champion, afin de durer dans la concurrence internationale. Désormais, les centres financiers et décisionnels se trouvent tous à Paris. Les patrons de province viennent une fois par semaine à Paris. Les centres déplacés en région n'ont finalement qu'une faible autonomie décisionnelle, et rapportent très vite "au siège". Du coup, pour obtenir la décision favorable, il faut monter à Paris, de façon beaucoup plus fréquente qu'autrefois.</p>
<ul>
<li>Ainsi, la modernité a resserré le territoire. Celui-ci était autrefois beaucoup plus distendu, et permettait donc une décentration de fait.</li>
</ul>
<p>4/ Ajoutons que la France est, d'une certaine façon, trop riche : comme elle a les moyens, elle refuse de choisir et accorde tout à tous. C'est très égalitaire (donc très français) mais pas forcément très efficace, puisque par conséquent cela implique de ne pas faire de choix territorial. L'aménagement du territoire ne signifie pas qu'il faille installer des pêcheries au cœur du Massif Central, au motif qu'il y en a en Bretagne. C'est pourtant, peu ou prou, ce qu'on a fait. Dès lors, on refuse de mettre en place des spécialisations, ou même d'accepter des destructions créatrices schumpéteriennes.</p>
<p>5/ Il y a toutefois des difficultés liées à l'organisation institutionnelle du territoire :</p>
<ul>
<li>il est probable que le cumul des mandats empêche une saine répartition des responsabilités entre le député (élu de la nation et non pas d’un territoire : il est néfaste d'entendre sans cesse parler de "député-maire") et l'élu local. L'un devrait s'occuper, comme l'indique son mandat, des affaires nationales, l'autre des affaires locales. Cela redonnerait d'ailleurs du sens au sénat, qui représente justement les collectivités territoriales.</li>
<li>ensuite, le refus de choisir a suscité une multiplication délétère des échelons : outre la commune et le département, on a ajouté l'intercommunalité et la région. Constatons que l'intercommunalité a entraîné une augmentation incroyable des budgets (et des fonctionnaires) alors que le chef de l’intercommunalité n'est pas élu : autrement dit, une couche "fonctionnelle", technocrate et pas vraiment démocratique, qui avait été pensée pour économiser (puisqu'on allait partager) et qui a dans les faits conduit à l'inverse : augmenter les dépenses. La France, championne du monde des ronds-points à l'entrée des villages !</li>
</ul>
<p>6/ Puisque l'on refuse de choisir, on laisse les décisions se prendre par une sorte de concurrence économique, et non par choix politique. En abandonnant l'aménagement du territoire (et donc non seulement la décision, mais l'impopularité de la décision et l'opprobre traditionnelle du <em>Paris et le désert français</em>, comme si le diagnostic de 1947 avait encore du sens), on laisse les régions se bagarrer dans la chasse aux subventions, avec une sorte d’émiettement des crédits qui favorise autant, sinon plus, le pouvoir central.</p>
<p>7/ Je n'ai pas aimé entendre des expressions comme "souveraineté territoriale", "redonner le pouvoir de l'impôt", "rendre la capacité normative aux régions".</p>
<p>8/ En fait, je suis assez gêné par les régions qui ont une identité qui se superpose (plus ou moins exactement) avec celle d'ancien régime (Bretagne, Corse voire Alsace). Remarquons qu'elles sont toutes excentrées.</p>
<ul>
<li>Surtout, puisqu'elles sont trop petites, regroupons : plutôt qu'une région Bretagne, une région grand ouest (Bretagne et pays de Loire et basse-Normandie), une grand nord (Nord-Pas de Calais et Picardie), une Alsace Lorraine, une région Centre ouest (Bourgogne + Comté), etc... Des grands machins assez hétérogènes pour qu'il n'y ait pas de processus d’identification.</li>
<li>Et bien sur, un vrai grand Paris, joignant l'IDF à la Haute-Normandie, faisant du Havre l'avant-port de Paris et le grand port français. Sinon, le grand port de Paris sera Rotterdam., comme l'indique la rénovation du canal du Nord actuellement décidée.</li>
</ul>
<p>9/ Pour finir, une question : le territoire est-il le lieu du "réseau" ? surtout si l'on considère que le réseau est la caractéristique du 21ème siècle ...</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/03/18/La-d%25C3%25A9centralisation-%25C3%25A9puis%25C3%25A9e#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1358Une stratégie françaiseurn:md5:4a68075a3793313c5e9a613cf88c4d4e2012-03-04T21:59:00+00:002012-03-04T21:59:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Fin de la petite série sur la stratégie française (<a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/02/07/Pens%C3%A9e-strat%C3%A9gique-fran%C3%A7aise">1ici</a> et <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/02/19/Strat%C3%A9gie-%3A-qui-pour-quoi">2ici</a>). J'avais conclu le précédent en expliquant qu'il existait peut-être une stratégie dépassant les intentions des acteurs, une stratégie qui serait en fait le résultat d'une géopolitique. Car la France peut être victorieuse !</p>
<p><img alt="" src="http://www.sudouest.fr/images/2011/09/18/premiere-mi-temps-laborieuse-pour-le-xv-de-france-qui-n-ont_504115_460x306.jpg" /> <a href="http://www.sudouest.fr/2011/09/18/rugby-suivez-en-direct-la-rencontre-france-canada-502626-8.php">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>Au fond, posons la question ainsi : au-delà du projet, au-delà des acteurs, y a-t-il une stratégie<em> per se</em>, propre à la France, qui serait déterminée par sa situation, ses racines, son équation ? Alors, d’une certaine façon, elle s’imposerait à tous les acteurs, avec des variations et des tempéraments selon les caractères de chacun, mais <ins>reposant sur un besoin inévitable</ins>. En fait, elle serait l’expression d’une géopolitique. Je crois en effet que la stratégie n’est que la conséquence de la géopolitique, ou plus exactement du diagnostic géopolitique. Venant de terminer une « <strong>Géopolitique de la France</strong> » (si ! si ! elle devrait paraître au second semestre), me voici à élaborer l’ébauche d’une suite. Qu’on en pardonne donc le caractère imparfait.</p>
<p><ins>La France est une puissance et se pense comme puissance</ins>. En cela, elle ressemble un peu aux Etats-Unis (c’est d’ailleurs une des seules ressemblances). Elle accepte encore le vocabulaire ancien de la puissance, qui passe notamment par l’utilisation de la force armée. Cela est due au grand traumatisme des guerres civiles européennes : la saignée de 1918 qui vient clore un siècle et demi de malthusianisme, aussi bien que l’humiliation de mai-juin 1940 qui vient démontrer à la face du monde que le vainqueur de Rethondes était un roi nu. Avec la bombe nucléaire, la France sait qu’elle ne peut plus être battue militairement. Plus jamais ça dirent les anciens le soir du 11 novembre. Plus jamais ça dirent-ils également le 25 août 1944 en chassant les Allemands de Paris. La bombe chasse à tout jamais le risque de la défaite. La bombe répond à la profonde inquiétude française qui demeure, nappe phréatique de l’inconscient français.</p>
<p>La France a été menacée si profondément dans son existence qu’<ins>elle continuera longtemps de préserver cet outil nucléaire</ins>. Elle conservera également un modèle complet d’armée, car la dissuasion est globale avant d’être nucléaire, et qu’instinctivement, le Français sait que la frontière ne gît pas qu’au pied de Strasbourg mais peut devoir être défendue à des milliers de kilomètres. Elle sait aussi qu’elle doit investir dans les nouveaux espaces : fonds marins, cyber, espace extra-atmosphérique. Elle développe déjà les outils pour cela.</p>
<p>La Puissance n’est pas que militaire : <ins>elle est démographique</ins>, et la France constitue de ce point de vue une exception en Europe, qui la fera dépasser l’Allemagne d’ici 2050. Certes, le poids relatif et de la France par rapport au reste du monde baissera, mais elle peut compenser le nombre par la qualité, et notamment celle de la <ins>formation</ins> : c’est pourquoi il est probable qu’elle réinvestira son appareil éducatif et universitaire, afin de continuer de former les travailleurs qualifiés et compétitifs.</p>
<p>La puissance et économique. Malgré les pronostics les plus sombres, malgré les répétitions incessantes sur le destin de puissance moyenne (on les sert depuis 40 ans), la France demeure au premier rang des nations : <ins>sa hantise du déclin la forcera à se réformer pour demeurer à cette place</ins>. C’est en cela que les discours déclinistes sont utiles : ils incitent chacun à faire des efforts, à comprendre, à évoluer, et à permettre à la France de demeurer un des leaders. La puissance économique française n’est pas feinte.</p>
<p>La puissance est culturelle, on le sait mieux encore depuis Joseph Nye qui a inventé la notion de puissance douce (soft power). A croire qu’il a observé la pratique française depuis toujours : des cathédrales gothiques aux imitations de Versailles, depuis les Lumières jusqu’à la patrie des droits de l’homme, la France a toujours su inventer un discours propre qui en fait <ins>une grande puissance culturelle</ins>. Elle a même inventé cette chose quasiment unique qu’est la politique culturelle ! Or, il y a encore un esprit français, et ce qui vient de Paris est encore écouté, ne serait-ce que parce que c’est différent du flux général. Aussi bien, ce que regrettent les esprits chagrins appartient à une domination désuète. Désormais, le vrai atout du soft power français tient justement à <ins>son caractère minoritaire, distinct, autre : différent</ins>.</p>
<p>Au fond, la France <ins>conservera sa personnalité</ins> qui la distingue radicalement de tous ses voisins. Elle bénéficiera de sa position majeure en Europe : codirigeant la sphère économique avec l’Allemagne, codirigeant la sphère militaire avec l’Angleterre, assise sur sa dynamique démographique, la France se trouve à la poignée de l’éventail et n’a pas eu, depuis longtemps, une aussi bonne posture. C’est en fait la seule à pouvoir développer une stratégie originale face à la panne européenne (l’absence de stratégie) et la panne américaine (l’épuisement d’une stratégie).</p>
<p>Depuis qu’elle a quitté ses ex-colonies, la France a investi son environnement immédiat, à savoir l’Europe. Il reste que cet axe ne suffit plus à orienter une politique étrangère. Plus exactement, le niveau d’intégration est désormais tel que l’Europe appartient quasiment aux affaires intérieures. En fait, la politique étrangère ne se définit plus aujourd’hui en « dans ou hors l’Europe » mais en « <ins>fais-je aussi quelque chose en dehors de l’Europe ?</ins> ». A cette question, il me semble que la France répondra par l’affirmative. Ce qui l’amène à devoir répondre à la question de la mondialisation.</p>
<p>Il faut pour cela <ins>dépasser la question de l’Occident, autrement dit du rapport transatlantique</ins>. La France est de ce point de vue la seule à pouvoir continuer de porter un projet alternatif au projet américain, la seule à énoncer un autre universalisme, grâce à son projet politique hérité des rois et de la révolution, et qui pose la diversité comme source du lien politique. C’est pourquoi, appuyée sur l’héritage de l’histoire et la présence territoriale sur tous les océans, appuyée également sur la francophonie qui n’est pas défense de la langue mais défense de l’exception culturelle, la France peut faire deux choix simultanés :</p>
<ul>
<li>Le premier consiste à <ins>opter pour la maritimisation</ins>, maintenant que les frontières terrestres sont sûres : l’incertitude stratégique qui durait depuis des siècles étant levée, la France peut choisir de développer une action maritime, d’autant plus importante que la mondialisation est d’abord une maritimisation. Le pari des DOM-COM, l’exploitation des Zones économiques exclusives, la priorité donnée à deux ports, l’extension du grand-Paris jusqu’au Havre sont autant de repères qui marqueront cette option.</li>
<li>Le second consiste à <ins>choisir la prochaine étape de l’émergence</ins>. Celle-ci s’établit non comme un ensemble constitué, mais comme l’affirmation de puissances renouvelées et qui se vivent selon un mode westphalien. Plutôt que de parier sur tel ou tel dans une concurrence délétère du bon élève (je suis plus ami que toi avec l’Inde ou avec le Brésil ou avec…), il convient de parier sur la prochaine émergence, celle qui viendra d’Afrique. En effet, la croissance démographique est un indicateur qui ne trompe pas et qui annonce le monde de 2050, où le continent noir pèsera plus d’un milliard d’hommes. La France y a des atouts et doit s’attacher <ins>réinvestir l’Afrique, toute l’Afrique, en passant notamment par le Maghreb</ins>.</li>
</ul>
<p>Ainsi, la France a non seulement des atouts, mais aussi une sorte de destin. Au fond, elle n’a pas le choix de sa stratégie qui s’imposera à elle.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/03/03/Une-strat%25C3%25A9gie-fran%25C3%25A7aise#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1343Trois couleursurn:md5:738264d33ba369a2f20dd9f5b031515a2012-02-25T18:37:00+00:002012-02-25T18:37:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Beaucoup d'entre vous sont probablement abonnés aux éphémérides d'histoire militaire du LCL <strong>Plantec</strong>. L'autre jour, il nous parle des trois couleurs : un très beau texte, écrit par le Lcl <strong>Pierre Garnier de Labareyre</strong> (conservateur du musée du génie). Avec l'autorisation des deux, je le reproduis ici avec tous mes remerciements.</p>
<p><img alt="patrouille-de-france-nice.jpg" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/.patrouille-de-france-nice_m.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="patrouille-de-france-nice.jpg, fév. 2012" /></p></div> <div class="post-content"><p><strong>L’HISTOIRE DE TROIS COULEURS</strong></p>
<p>Tous signes, emblèmes, drapeaux, couleurs, symboles ont une signification ou véhiculent une idée. Un symbole n’est pas neutre. Tel est le cas des drapeaux des nations. Leur naissance est souvent liée à l’histoire du pays, de l’Etat ou de la nation.</p>
<p>Un drapeau est composé de couleurs qui ont, chacune, une histoire. En effet, leur sens évolue dans le temps. Leur utilisation et leur perception chez les hommes varient en fonction des idées, des modes et aussi des techniques.</p>
<p>Aussi, avant de se remémorer l’histoire de notre drapeau, il est intéressant de s’attarder sur les trois couleurs qui le composent afin de mieux comprendre les possibles raisons de leur présence.</p>
<p><strong>LE BLEU</strong></p>
<p>La couleur bleue est, par excellence, la couleur de la France. Elle est portée sur les maillots des équipes sportives, sur les carrosseries des voitures de compétition …Le bleu est donc associé à la France.</p>
<p>D’ailleurs, très tôt, cette couleur est liée à notre pays.</p>
<p>Tout d’abord, le fond des armoiries de la famille royale est bleu. Les armes de France, d’abord d’azur semé de fleurs de lys d’or puis d’azur à trois fleurs de lys d’or sous Charles V , sont apparues vraisemblablement sous Philippe Auguste vers 1180. Or, à cette époque, le bleu est peu employé et n’est présent que dans 10% des armoiries. Alors, pourquoi les capétiens ont-ils usités cette couleur ? Il semble qu’ils en aient repris l’usage à l’imitation de Clovis et des mérovingiens. En effet, Clovis aurait choisi cette couleur en hommage à Saint Martin, ancien évêque de Tours au IVème siècle. La légende veut que le célèbre manteau de cet ancien officier de l’armée romaine, pourpre à l’origine et exposé à la vénération des fidèles, ait viré de couleur et soit perçu comme bleu.</p>
<p>A la fin du XIIème siècle, le bleu est associé à la vierge dont le culte ne cesse de croître en Occident. A la même époque, les verriers mettent au point la couleur « bleu de Chartres » expérimentée sur l’abbaye de Saint Denis à l’initiative de l’Abbé SUGER. Le bleu est aussi utilisé dans les habits. A partir du XVème siècle, le bleu est perçu comme la plus belle couleur et la plus noble. Aussi, au XVIIIème siècle, la présence du bleu dans les armoiries françaises dépasse 50%.</p>
<p>Sous la Révolution, l’uniforme de la Garde nationale de Paris est bleu. Cette couleur se généralise et devient, après la proclamation de la République, celle des uniformes des soldats. Dès lors, les « Bleus » sont les partisans de la Révolution par rapport « aux blancs », partisans du retour de la monarchie. Le bleu est alors la couleur des révolutionnaires mais au cours du XIXème et du XXème siècle, il devient progressivement celle des centristes puis celle des conservateurs.</p>
<p>Si, de la Restauration jusqu’à la Première Guerre mondiale, l’uniforme des soldats est à dominante rouge notamment avec le célèbre « pantalon garance », il retourne au bleu en 1915.</p>
<p>Aujourd’hui, le bleu reste, tant en France qu’en Europe, la couleur préférée.</p>
<p><strong>LE ROUGE :</strong></p>
<p>La couleur rouge a une histoire très mouvementée. Au départ, le rouge ou plus exactement le pourpre est, par excellence la couleur impériale tant sous Rome que dans l’Empire Byzantin. Au début du XIIème siècle, cette couleur est très employée notamment dans l’héraldique. Au XIIIème siècle, plus d’un tiers des armoiries ont une dominante gueules (c’est la dénomination de la couleur rouge dans la science héraldique). Dans la tradition chrétienne, le rouge est la couleur des martyrs. D’ailleurs, aujourd’hui encore, dans la liturgie catholique, les habits sacerdotaux du prêtre officiant porte la couleur rouge lors des célébrations, le jour d’une sainte ou d’un saint martyr ainsi que pour les « grandes fêtes » comme les Rameaux ou la Pentecôte.</p>
<p>Le rouge est souvent synonyme de richesse et de fête. Du Moyen-Age jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, notamment dans la paysannerie française, la robe de la marié est rouge!
Le rouge était aussi la couleur de l’oriflamme de Saint Denis. A partir du XIIème siècle, les rois de France utilisèrent cette oriflamme lors d’expéditions militaires ou de guerre avec l’étranger. Cet étendard devient alors pendant près de trois siècles, le symbole militaire de la dynastie capétienne et du royaume de France . La dernière bataille où il fut déployé est la funeste défaite d’Azincourt en 1415.</p>
<p>Jusqu’à leur suppression sous Louis XV, les galères royales arboraient le pavillon rouge.</p>
<p>De même, le drapeau de Picardie, régiment d’infanterie qui deviendra sous la révolution le 1er régiment d’infanterie (1791), possède un drapeau à la croix blanche cantonnée de rouge.</p>
<p>A coté du rôle militaire, toujours au XVIIIème siècle, le drapeau rouge est un signal préventif et d’ordre. En effet, on déployait un tissu rouge pour prévenir la population en cas de danger et, si nécessaire, lui demander de se disperser. Le rouge est donc associé aux lois contre les regroupements parfois même à la loi martiale. Au début de la révolution, le rouge est clairement un signal de danger et d’appel à la force publique.</p>
<p>Le drapeau rouge change de signification à l’issue de la journée du 17 juillet 1791. Sur le Champ de Mars, la foule rassemblée est prise à partie par la garde nationale qui tire dessus avant sa dispersion demandée par les instances municipales par le déploiement du drapeau rouge. Dès lors, le drapeau rouge, « teinté de sang » du peuple devient le symbole du peuple « opprimé ou révolté ».</p>
<p>Deux fois, le drapeau rouge a failli devenir l’emblème de notre pays. Le 25 février 1848, Lamartine, par sa verve, réussit à écarter cette couleur . En 1871, il est l’emblème de la commune de Paris insurgée qui s’effondre sous les assauts de l’armée légaliste et nationale.</p>
<p>Dès lors, le rouge devient la couleur de la révolution sociale et du socialisme international.</p>
<p>Les régimes communistes utilisent donc principalement cette couleur.</p>
<p>En 1917, la révolution bolchevique l’adopte et en fait le drapeau de la Russie puis de l’U.R.S.S. avec la faucille et le marteau en sautoir surmontés d’une étoile le tout d’or sur le canton dextre. Libéré du joug communiste en 1991, la Russie reprend ses couleurs ancestrales : blanc, bleu, rouge.</p>
<p><strong>LE BLANC :</strong></p>
<p>La couleur blanche a toujours eu un rôle particulier dans la plupart des civilisations. Le blanc a été, au XIXème et au début du XXème siècle, considéré comme une non couleur. Cela n’a pas toujours été le cas particulièrement au Moyen-age.</p>
<p>Selon la Bible, le blanc est la couleur de la maison de David. Elle est donc celle du roi Salomon et celle du Christ. Elle y puise la symbolique de pureté, de l’innocence mais aussi de la grandeur. Le blanc est associé à la lumière divine.</p>
<p>Le mot « blanc » est issu d’un mot d’origine germanique qui signifie « brillant, clair ». Le terme « arme blanche » (attestée dès la fin du XVIIème siècle) se rapproche de cette signification étymologique en qualifiant les armes à lame ayant un métal ni bronzé, ni doré, ni gravé.</p>
<p>En héraldique, le métal argent est représenté par la teinte blanche. Ce métal était sensé représenter les vertus d’espérance, de pureté et de justice.</p>
<p>Hors d’Europe, en Asie et en Afrique noire, le blanc est la couleur du deuil. Cette tradition est présente en Europe où les reines issues de la famille des Bourbon prenaient le deuil en blanc.</p>
<p>Dans presque toute l’Europe, à partir du XVIème siècle, elle est la couleur du commandement. Les généraux et chefs de guerre portaient souvent une cravate ou une écharpe blanche. Le drapeau colonel de la compagnie colonel (c’est-à-dire celle dépendant directement du colonel, commandant le régiment) est blanc. Les drapeaux d’ancien régime des régiments portaient une croix blanche. Seuls les cantons disposaient de couleurs qui variaient avec chaque corps. Le blanc s’est maintenu comme marque de commandement militaire jusqu’au XXème siècle en France avec l’écharpe blanche et les plumes blanches des bicornes des maréchaux et généraux.</p>
<p>La révolution de 1789 fait du blanc le symbole de la monarchie de droit divin mais surtout le symbole de la contre-révolution. Partout, les contre-révolutionnaires remplacent la cocarde tricolore, devenu national en 1790 puis obligatoire , par la cocarde blanche. Dans l’ouest de la France, l’armée catholique et royale possède des drapeaux blancs sur lesquels sont ajoutées des fleurs de lys d’or ou les armes de France. Dans les armées des émigrés, les soldats portaient souvent un brassard blanc. Sous la restauration, Louis XVIII abandonne le drapeau tricolore et établit un drapeau du même type que celui des armées vendéennes .</p>
<p>Entre temps, le drapeau blanc uni prend une signification qu’il conserve encore aujourd’hui : celui de la reddition, de la capitulation ou d’une trêve. Il semble que, dès le Moyen Age, cette signification ait déjà cours.</p>
<p>Enfin, à la fin du XIXème siècle, le blanc devient la couleur représentative de la Sainte Vierge, mère du Christ, avec la proclamation du dogme de l’immaculée conception.</p>
<p><strong>LE DRAPEAU TRICOLORE</strong></p>
<p>L’origine du drapeau tricolore date de la révolution française. Néanmoins, l’association du bleu, du blanc et du rouge est bien antérieure à cette période.</p>
<p>En effet, les gardes français et les gardes suisses de la Maison du roi portaient un uniforme associant les trois couleurs avec une prépondérance du bleu pour les français et du rouge pour les suisses. De même, la livrée des serviteurs du roi était composée de ces trois couleurs. Cette combinaison de couleurs est attestée dès les Valois (Charles V) puis chez les Bourbon.</p>
<p>Ainsi, le 17 juillet 1789, lorsque Louis XVI attache la cocarde bleue et rouge, que lui offre le maire de Paris Jean-Sylvain BAILLY ou bien le Marquis de Lafayette sur la cocarde blanche qu’il arbore sur son chapeau, la réunion des trois couleurs ne peut en aucun cas offusquer ce monarque qui y est habitué .
Mais pourquoi le bleu et le rouge ? Saint Denis, martyr, est le saint patron de la ville de Paris. Sa couleur est le rouge. C’est sans doute pour cette raison que le champ des armes de Paris est de gueules. Au début du XVème siècle, les armes de France (d’azur semé de fleurs de lys d’or) font leurs apparitions au chef des armes de Paris. Ainsi, le bleu et le rouge, couleurs de fond des armoiries de Paris, sont naturellement prises par les révoltés.</p>
<p>Il existe aussi une autre raison.</p>
<p>Dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle, le bleu, le blanc et le rouge sont souvent utilisés par les partisans du changement ou des nouvelles idées. En effet, ces couleurs sont celles du drapeau de la toute nouvelle république des Etats-Unis d’Amérique, elles-mêmes issues du drapeau britannique « l’Union Jack ».
Ainsi, lors de la « création » de la cocarde tricolore par Lafayette, celui-ci, héros de la guerre d’indépendance des Etats d’Amérique, doit certainement songer à la symbolique très forte à laquelle revoie la combinaison de ces trois couleurs.</p>
<p>Le 28 mars 1790, la Constituante interdit le port de cocardes autre que bleu-blanc-rouge. Le 10 juin, cette cocarde est déclarée « nationale ». Le 14 juillet 1790, lors de la fête de la Fédération, le Champ de Mars est entièrement pavoisé de bleu, de blanc et de rouge. A cette date, les trois couleurs combinées symbolisent totalement les idées nouvelles de la Révolution.</p>
<p>C’est en 1790 que les trois couleurs entrent dans l’histoire militaire de la France. Deux décrets, datés du 22 et 24 octobre, instituent, d’une part, le remplacement de la cravate blanche par une cravate tricolore sur les emblèmes des régiments et, d’autre part, un nouveau pavillon de nationalité pour les bateaux de la Marine. Ce nouvel emblème est blanc avec, au franc-quartier dextre , le rouge, le blanc et le bleu disposés en pal .</p>
<p>Cette intrusion des trois couleurs sur les emblèmes militaires ne va pas cesser de se renforcer jusqu’à la fin de l’Empire.</p>
<ul>
<li>Le 22 avril 1792, une loi institue, dans l’infanterie seulement, un drapeau régimentaire avec les trois couleurs dans une disposition qui doit varier pour chaque régiment.</li>
<li>Le 15 février 1794 (27 pluviôse, an II), la Convention adopte la position des couleurs : le bleu à la hampe, le rouge flottant, le blanc entre les deux, le tout en trois bandes verticales de même largeur. Il semble que seule la Marine ait utilisé ce drapeau à cette date.</li>
<li>Sous l’Empire, le nombre de formation possédant un emblème augmente. En 1804, Napoléon 1er impose un emblème unique pour toutes les formations de toutes les armes atteignant un certain effectif. Ce nouveau drapeau est composé d’un carré blanc posé sur une pointe permettant de former quatre triangles dans les coins dont deux en bleu et deux en rouge.</li>
<li>Enfin, en 1812, l’Empereur reprend la disposition des trois couleurs adoptée par la Convention en 1794 : trois bandes verticales avec le bleu à la hampe et le rouge flottant.</li>
</ul>
<p>Dès lors, le drapeau tricolore, pavillon national, ne changera plus de forme. Après son éclipse durant la Restauration (1815-1830), il n’a plus cessé d’être le symbole de la France.</p>
<p>En 1848, Lamartine proclame : « La France et le drapeau tricolore, c’est une même pensée, un même prestige, une même terreur au besoin pour nos ennemis ».</p>
<p>Le Second Empire conserve les Trois couleurs et les dispositions préalables.</p>
<p>Sous la troisième République, les trois couleurs ne sont plus contestés et rassemblent, dès lors, l’immense majorité des Français .</p>
<p>La constitution de la Vème République cite nommément, dans l’article 2, les trois couleurs qui composent le drapeau français et leur positionnement. Cependant la nuance des teintes n’est pas définie et est laissée à l’appréciation de chacun.</p>
<p>La France possède donc un emblème national se rattachant à sa longue histoire et à une tradition symbolique très marquée. Elle s’identifie totalement à son drapeau. C’est, peut-être, la raison pour laquelle la France est le seul pays européen à ne pas posséder d’armoiries. Car les Français n’en éprouvent, sans doute, pas le besoin ni l’utilité.</p>
<p>Peu de pays et de nations, comme la France, possèdent un symbole aussi puissamment ancré dans son histoire . Chacun peut et doit y puiser des forces pour forger un avenir à notre pays.</p>
<p>Les trois couleurs symbolisent bien la France d’hier, d’aujourd’hui et de demain.</p>
<p>Pour conclure, voici une récitation tirée d’un livre de l’école primaire datant de la fin du XIXème siècle : les trois couleurs.</p>
<ul>
<li>Les connais-tu, les trois couleurs,</li>
<li>Les trois couleurs de France,</li>
<li>Celles qui font rêver les cœurs</li>
<li>De gloire et d’espérance :</li>
<li>Bleu céleste, couleur du jour ;</li>
<li>Rouge de sang, couleur d’amour ;</li>
<li>Blanc, franchise et vaillance !</li>
<li>Jusqu’à la mort on le défend</li>
<li>O sublime folie !</li>
<li>Et quand on revient triomphant,</li>
<li>Vers sa loque chérie</li>
<li>Les yeux sont de larmes remplis ;</li>
<li>Car le drapeau garde en ses plis</li>
<li>L’âme de la patrie.</li>
</ul>
<p>CDT Pierre de LABAREYRE,
Conservateur du musée du génie</p>
<p><strong>BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE :</strong></p>
<ul>
<li>- CHARRIE Pierre, Drapeaux et étendards de la Révolution et de l’Empire, édition Copernic, 1982</li>
<li>- HUYON Alain, Trois couleurs et deux siècles, RHA décembre 1994</li>
<li>- PASTOUREAU Michel, les emblèmes de la France, édition Bonneton, 1998</li>
<li>- PASTOUREAU Michel, une histoire symbolique du Moyen Age occidental, édition du Seuil, 2004</li>
<li>- Revue Historique des Armées n° 1, 1958</li>
<li>- THIEBAUD Jean-Marie, dictionnaire des termes du blason, 1994</li>
<li>- ZNAMIEROWSKI, l’encyclopédie mondiale des drapeaux, 2004</li>
</ul></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/02/16/Trois-couleurs#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1332France Amérique : la déprise des sentimentsurn:md5:bc5b5391a1e9e603d25970d437a4d69f2011-11-24T19:43:00+00:002011-11-24T19:43:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Comment penser aujourd'hui la relation franco-américaine ? J'ai le sentiment d'un éloignement, malgré les tentatives de rapprochement. On est en tout cas bien loin de la politique d'indépendance entre les deux blocs, définie par De Gaulle. Aujourd'hui, il se passe autre chose. On a définitivement quitté le 20ème siècle.</p>
<p><img alt="" src="http://www.contrepoints.org/wp-content/uploads/2011/05/usa-france.jpg" /> <a href="http://www.contrepoints.org/2011/05/24/26137-dsk-le-malentendu-franco-americain">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>La relation franco-américaine n’est pas simplement bilatérale, et la particularité française s’insère dans une relation transatlantique liant l’Amérique à l’Europe : cela date de l’après-guerre, avec la participation au plan Marshall puis à l’Alliance atlantique. Mais si les choses ont été assez simples au cours de la guerre froide, pendant laquelle la posture d’indépendance permettait de trouver un « juste milieu » entre les deux blocs, les choses ont évolué après la chute de l’URSS. Les nombreuses crises ont souvent été l’occasion de différences d’approche, avec des divergences qui sont allées se creusant.</p>
<p>L’éclatement de l’ex-Yougoslavie et la question de l’intervention en Bosnie furent une première entaille : en effet, de 1991 à 1995, la France a déploré la passivité américaine et son refus d’intervenir. Les choses se sont conclues finalement par un engagement de l’OTAN en 1995 à la suite des accords de Dayton : mais ceux-ci gelaient finalement un découpage acquis sur le terrain par les différentes forces en présence (serbes, croates ou musulmanes) et l’opération de l’OTAN n’avait en fait qu’à constater un état stabilisé, non à l’imposer. A vaincre sans péril…. Toutefois, les crispations et les ressentiments de la France (et aussi, sotto voce, de la Grande-Bretagne) envers l’allié américain avaient été une réalité.</p>
<p>En 1999, au moment du Kossovo, le ressentiment s’inversa puisque ce furent les Américains qui le portèrent : en effet, ils imposèrent une ligne très interventionniste, utilisèrent l’OTAN pour bombarder la Serbie malgré les réticences des alliés et notamment des Français, qui conservèrent tout du long une capacité d’appréciation politique et d’utilisation de leurs moyens militaires. Les Américains découvrirent alors que l’OTAN n’était pas aussi efficace qu’ils le croyaient, et que les alliés indociles (particulièrement les Français) étaient finalement bien gênants : ceci explique leur comportement ultérieur et leur défiance envers les Européens.</p>
<p><img alt="" src="http://www.linternaute.com/musee/image_musee/540/56072_1169055890/allegorie-de-la-france-liberant-l-amerique---jean-suau.jpg" /> La France libérant l'Amérique (<a href="http://www.linternaute.com/musee/diaporama/1/7338/musee-national-de-la-cooperation-franco-americaine/5/35284/allegorie-de-la-france-liberant-l-amerique/">source</a>)</p>
<p>Ainsi, dès septembre 2001, juste après les attentats, le secrétaire américain à la défense<strong> D. Rumsfeld</strong> déclare que « c’est la mission qui fait la coalition » : cela signifie qu’ils ne sont plus liés par les structures habituelles et qu’ils chercheront des coalitions de volontaires. La question se pose deux ans plus tard, au moment de l’Irak en 2003 : les justifications hasardeuses des Américains se heurtent à la farouche opposition française, qui réussit à entraîner l’Allemagne : si à l’époque on perçoit surtout la division des Européens (vieille Europe contre jeune Europe), il faut surtout comprendre le creusement d’un différend transatlantique dont la France est une actrice majeure. C’est pourquoi la période suivante est consacrée à renouer les fils, prudemment sous la présidence <strong>Chirac</strong> qui apporte un soutien mesuré en Afghanistan, de façon plus prononcée sous la présidence <strong>Sarkozy</strong>.</p>
<p>Au fond, ce rapprochement tire parti de la <a href="http://www.la-croix.com/Archives/2011-09-08/LA-NOUVELLE-IMPUISSANCE-AMERICAINE-d-Olivier-Zajec-Ed.-de-l-AEuvre-192-p.-18-_NP_-2011-09-08-709028">nouvelle impuissance américaine</a> (<strong>Olivier Zajec</strong>) : si on avait craint un moment l’hyperpuissance, si on avait réagi à l’agression du 11 septembre avec solidarité mais sans verser dans l’excès, les déboires militaires et économiques américains relativisaient la domination d’outre-Atlantique. Le rapprochement redevenait possible. Mais était-il souhaité ? quand <strong>N. Sarkozy</strong> affichait une ligne pro-américaine, <strong>B. Obama</strong> (élu simultanément) démontrait un tropisme moins pro-européen : en fait, les deux parties procédaient au même mouvement vers l’ouest, les Français vers l’Atlantique, les Américains vers le Pacifique, sans combler le fossé. Et les dirigeants américains (<strong>Robert Gates, Leon Panetta</strong>) ne cessent de dénoncer le découplage militaire entre les Etats-Unis et l’Europe, même s’ils reconnaissaient quelques vertus à la France et au Royaume-Uni.</p>
<p>Il y a donc une distance mutuelle qui s’installe entre les deux pays. On utilisait autrefois le verbe « se déprendre » pour désigner la fatigue des sentiments. C’est un peu l’impression donnée aujourd’hui par la relation franco-américaine : celle de deux pays qui se déprennent l’un de l’autre, comme s’ils n’avaient même plus envie de se chamailler, comme s’ils n’étaient plus essentiels l’un à l’autre.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/11/24/France-Am%25C3%25A9rique-%253A-la-d%25C3%25A9prise-des-sentiments#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1226A propos du sénaturn:md5:f00a4199c465f5a1e00632cc84dfb11b2011-09-25T18:35:00+00:002011-09-25T18:35:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Les élections sénatoriales ont lieu ce dimanche. Occasion, au-delà des commentaires "simplement" politiques sur le sujet, d'évoquer le rôle géopolitique, souvent méconnu, du Sénat, bien plus significatif qu'il y paraît. En effet, on verrait mal autrement la raison d'une deuxième assemblée. Le bicamérisme n'est pas juste une commodité démocratique.</p>
<p><img alt="" src="http://www.ulcgtroissy.fr/IMG/png/Senat_-_Palais_du_Luxembourg.png" /> <a href="http://www.onavance.info/?p=163">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Le sénat est en effet l'expression d'une représentation "territoriale". La première assemblée est centrée sur les individus, la deuxième sur les territoires. Qui n'a pas aperçu cette distinction fondamentale n'a rien compris. Cela justifie d'ailleurs le système de votation (élection indirecte par un collège de grands électeurs,
Maires et conseillers) mais également la grande permanence politique : le sénat bouge à mesure des territoires, c'est-à-dire lentement.</p>
<p>2/ Le Sénat est traditionnellement le « <em>grand conseil des communes de France</em> ». Il tempère ainsi le système centralisé et évite le système fédéral : il a donc un vrai rôle géopolitique, qui équilibre la centralisation, même si on peut également noter son rôle d’équilibre politique à la première assemblée ou à la majorité en place (il a ainsi servi de contre-pouvoir à De Gaulle en 1969, puis à Mitterrand dans les années 1980).</p>
<p>3/ C’est dans cette perspective qu’il faut d’ailleurs considérer l’organisation territoriale : les 36.000 communes françaises. ce qui est une exception européenne. C’est un émiettement considérable, et pourtant les Français y sont très attachés. La commune, selon<strong> Armand Frémont</strong>, est le lieu de la liberté quand le département serait celui de l’égalité. Or, la plupart des communes sont rurales, et le rôle du Sénat n’est pas seulement la chambre des communes de France, mais aussi la chambre de la ruralité et de l’espace français</p>
<p>4/ C'est pourquoi le reproche traditionnel (un sénateur rural vaut trois fois moins d'électeur qu'un sénateur urbain) ne tient pas réellement. Pourtant, on observe une lente évolution d'une part à cause des réformes du mode de scrutin (sans même parler du chamboulement que provoquera la réforme territoriale), d'uatre part à cause du socialisme municipal qui progresse continûment, enfin à cause d'un lent basculement de la démographie française, désormais urbaine à 80 %.</p>
<p>5/ Cela étant, ce n'est pas parce qu'une majorité de Français vivent dans les villes qu'il faut penser exclusivement l'espace comme un espace urbain. C'est d'autant plus vrai de la France qu'elle a un vaste territoire, avec des zones peu peuplées, et d'autres peu développées : le sénat répond à ce déséquilibre, et dépasse le seul jeu des rapports politiciens du gouvernement. Introduisant de l'espace, il introduit de la longue durée par rapport à la première assemblée, centrée sur l'individu et son rythme plus court.</p>
<p>Il faut garder cette compréhension du Sénat à l'esprit, avant de se lancer dans les commentaires qu vont fleurir ce soir sur les "significations politiques du scrutin".
Le Sénat reste une assemblée essentielle à la géopolitique française. Quelle que soit sa couleur politique.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/09/24/A-propos-du-s%25C3%25A9nat#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/115815 aout, exemple de synthèseurn:md5:330d539acb82022c8a56916a454bea392011-08-15T18:31:00+00:002011-08-15T18:31:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>En cette journée de 15 août, les catholiques célébreront l'Assomption de la Vierge, et les autres profiteront du jour férié. Pourtant, cette fête est un bel exemple de cette synthèse française, catholico-républicaine, qui fait le charme et le paradoxe de notre pays. C'était du temps où la Saint Napoléon était fête nationale....</p>
<p><img alt="" src="http://napoleon1er.perso.neuf.fr/saint-napoleon-le-chesnay-O-Chauvelin.jpg" /> <a href="http://napoleon1er.perso.neuf.fr/Saint-Napoleon.html">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ En effet, on peut remonter assez loin les origines du 15 août : une ascendance païenne (Demeter et les mystères d'Eleusis), une tradition de la haute église, puis la dormition mentionnée par Grégoire de Tours, puis une célébration à partir du VIII° siècle qui se répand ensuite dans toute la Chrétienté.</p>
<p>2/ On peut de même évoquer le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/V%C5%93u_de_Louis_XIII">vœu de Louis XIII</a>, consacrant la France à la Vierge, pour montrer que l'Assomption est fériée dès l'ancien régime. Toutefois, remarquons que la notion de "jour férié" n'avait alors pas le sens qu'elle a aujourd’hui, dans un temps où l'ensemble de la société était régie par le modèle catholique. Signalons d'ailleurs que s'il n'y avait pas à l'époque de "congés payés" ni même de vacances, il y avait énormément de jours chômés qui assuraient le repos régulier des travailleurs.</p>
<p>3/ Il reste que l'histoire du 15 août férié, dans son acception moderne, date de l'après révolution. En effet, Napoléon 1er décide en 1806 que le 15 août est la saint Napoléon (le jour de sa naissance) et décide d'en faire la fête nationale. Si la Restauration s'empresse de mettre fin à cette célébration, ne conservant que l'Assomption, en 1852, Napoléon III réinstaure la fête par décret, qui reste fête nationale jusqu'en 1880, date où les dirigeants républicains décident de faire du 14 juillet la fête nationale, qui rappelle, souvenez-vous, 1790.</p>
<p>4/ Ainsi, le 15 août "férié" ne l'est pas seulement en souvenir du caractère majoritairement catholique du pays, mais aussi de la première invention d'une fête "nationale" qui est une invention révolutionnaire. Il est ainsi logique que ce soit Bonaparte, l'homme qui réunit monarchie et révolution, qui l'instaura. Et si certains y voient un paradoxe ou une incongruité, j'y décèle plus une richesse et cette synthèse "bizarre" qui fait le génie français.</p>
<p>5/ Il demeure un autre signe de cette commémoration : le 15 août est toujours la <a href="http://www.lessignets.com/signetsdiane/calendrier/aout/15.htm">fête nationale des Acadiens</a>, et la date fut choisie en ... 1881.</p>
<p><img alt="" src="http://www.laprocure.com/cache/couvertures_mini/9782847344042.jpg" /></p>
<p><ins>Réf</ins> :</p>
<ul>
<li><a href="http://www.histoire-fr.com/dossier_15_aout.htm">histoire du 15 août</a></li>
<li><a href="http://www.laprocure.com/livres/sudhir-hazareesingh/la-saint-napoleon-quand-14-juillet-fetait-15-aout_9782847344042.html">sur la saint Napoléon</a></li>
</ul>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/08/15/15-aout%252C-exemple-de-synth%25C3%25A8se#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1114Conseillers territoriauxurn:md5:ff38105abbc2bf60cccaed9731084f482011-08-05T21:59:00+00:002011-08-05T21:59:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Le conseil constitutionnel a validé le 21 juillet le projet de loi du gouvernement fixant la répartition des effectifs par départements et par régions, adopté définitivement, le 6 juillet 2011, à l'Assemblée nationale. C'est presque le terme du parcours du combattant qu'a rencontré cette réforme, lancée il y a maintenant deux ans.</p>
<p><img alt="" src="http://agence.ucciani-dessins.com/wp-content/uploads/2010/02/02-06-territorial.gif" /> <a href="http://agence.ucciani-dessins.com/conseiller-territorial/">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>La multiplication des collectivités territoriales a posé la question du millefeuille administratif de la France. C’est pourquoi le gouvernement a décidé une refonte du dispositif à la suite du rapport Balladur en 2009. La réforme a été très controversée (le conseil constitutionnel a été saisi trois fois, et certains ont soupçonné une mise au pas des régions qui étaient toutes, sauf une, sous la direction de l’opposition). Elle a logiquement rencontré de nombreuses difficultés pour être adoptée, à cause notamment des réticences du Sénat, ce garant des collectivités locales.</p>
<p>La carte électorale a ainsi été révisée, et crée un conseiller territorial qui se substitue au conseiller général (département) et au conseiller régional (en place à partir de 2014). Il s’agit de favoriser l’émergence d’un pôle région département, et de réduire le nombre d’élus intermédiaires, qui passeront de 6.000 à 3.000. La clause de compétence générale n’est plus désormais que le fait des communes et de l’Etat, les départements et les régions bénéficiant de compétences d’attribution. Il s’agit également de créer un statut de « métropole » pour les agglomérations de plus de 500.000 habitants, et d’achever d’ici 2013 la couverture intercommunale du territoire (afin de lutter contre l’éparpillement communal).</p>
<p><ins>Commentaire</ins> : La réforme est compliquée, et ne garantit pas une simplification du niveau local. Une solution aurait pu être de généraliser la loi PLM (Paris Lyon Marseille), permettant une mairie de ville (ou d’intercommunalité) et simultanément des mairies d’arrondissement, afin de favoriser le lien local qui est une demande continue des Français.</p>
<p>Et vous, quel commentaire géopoltiique faites-vous de cette réforme ?</p>
<p>Réf : <a href="http://www.courrierdesmaires.fr/juridique/essentiel-sur-la-reforme-des-collectivites-territoriales-100.html">l'essentiel de la réforme, in "courrier des maires"</a>.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/08/05/Conseillers-territoriaux#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1105Paris-plageurn:md5:f365515fc7f219243238ca3346c646b42011-08-03T17:44:00+00:002011-08-03T17:44:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>ça y est : la dixième édition de <a href="http://parisplages.paris.fr/">Paris plage</a> bat son plein. Il est temps d'en faire une analyse géopolitique !</p>
<p><img alt="" src="http://www.actualitte.com/images/news/v-11142.jpg" /> <a href="http://www.actualitte.com/actualite/11973-Flammarion-installer-bibliotheque-Paris-plage.htm">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Tout d'abord, je m'étonne que désormais, quand on parle de Paris plage, chacun pense aux berges dela Seine. Personnellement, cela m'évoque tout d'abord la côte normande, avec Deauville, Trouville, Proust, Boudin..... Et tout de suite après, je pense au Touquet, le seul "paris plage" officiel, et lieu de chars à voile, d'enduro, et d'été picard. Bref, la plage de Paris, c'est sur la Manche, donc en province.</p>
<p><img alt="" src="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/fr/a/a1/Logo_Le_Touquet_Paris-Plage_B.jpg" /></p>
<p>2/ Il reste qu'il y a là un fantasme aboslu : la plage avec tous ses inconvénients (promiscuité, moustiques, saleté, bruit, ...) sans les avantages : la mer. Car c'est une plage où on ne se baigne pas, une plage virtuelle où on fait semblant d'être à la plage et même d'être à la page, avec le même monde que sur les bords de la Costa Brava, ou de la Côte d'Azur.</p>
<p><img alt="" src="http://www.publiciblog.com/blog/images/204/plage-bondee.jpg" /></p>
<p>3/ Toutefois, derrière le fantasme, il y a le symbole :</p>
<ul>
<li>celui d'une littoralisation de la France (poussée démographique vers les côtes)</li>
<li>celui d'une aspiration à la mer, à rebours du tropisme français, <em>forcément</em> continental</li>
<li>et donc, celui d'un désir inassouvi qu'il est temps, enfin de réaliser.</li>
</ul>
<p>4/ En effet, notre histoire est celle d'une rencontre ratée entre la France et la mer, le sabordage de la flotte en 1942 (après le premier de 1707, ce que j'ai appris récemment : marrant cettte propension des marins français à couler leurs bateaux dans le port de Toulon) étant la réplique maritime du gâchis de la campagne de France, deux ans plus tôt en juin : un événement marquant dans la géopolitique française contemporaine, et en même temps l'héritage de tendances venant de beaucoup plus loin dans le passé.</p>
<p><img alt="" src="http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Belagerung_von_Toulon_1707.jpg" /> <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_de_Toulon_%281707%29">source</a></p>
<p>5/ Mais c'est peut-être l'annonce d'une géopotliique future, et derrirèe mes railleries, il faut voir de l'espérance : celle de voir Paris devenir, enfin, une cité maritime, conséquence logique de la pacification continentale, en même temps que de la planétisation : car vous le savez, la mondialisation est d'abord une maritimisation.</p>
<p>Réf : sur le grand Paris, un <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/05/06/Paris-Rouen-Le-Havre">billet</a> d'il y a deux ans</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/08/03/Paris-plage#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1103Chambord, un château politiqueurn:md5:542f93729c2dabc3cb9b036ab146db332011-05-07T22:23:00+00:002011-05-07T22:23:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>J'ai passé ma journée à Chambord : je confesse, à ma grande honte, que c'était la première fois de ma vie et que ce fut donc une découverte. Outre le plaisir de s'échapper de Paris par une belle journée de printemps (ça avait un air de vacances......!) cela m'a occasionné quelques réflexions géopolitiques. Au-delà de la carte postale.</p>
<p><img alt="Chambord__7_.jpg" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/.Chambord__7__m.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Chambord__7_.jpg, mai 2011" /> <a href="http://webtournaire.com/Centre.htm">source</a></p>
<p>Car au fond, Chambord est un château qui est surtout politique.</p></div> <div class="post-content"><p>1/ On pense bien sûr à d'autres châteaux politiques : en France, le Louvre d'un côté, Versailles de l'autre. Mais Chambord est différent.</p>
<p>2/ Regardez la photo ci-dessus, prise sous un autre angle que ce qu'on montre d'habitude : on y distingue bien le donjon central, entouré des fioritures (les deux ailes, la terrasse).. Alors que notre représentation habituelle voit dans Chambord un château plat (la longue façade face au parc), c'est en fait d'un château carré qu'il s'agit. Un château qui témoigne encore de l'idée militaire qui l'anime. François 1er n'est-il pas passionné de chevalerie, n'est-il pas le roi-chevalier ? il y a donc le rappel de la fonction "militaire" du château. Pourtant, il n'y a là qu'évocation.</p>
<p>3/ Car immédiatement, on constate que ce n'est qu'un prétexte : ce château n'a aucune fonction guerrière, il est percé de larges baies, couvert de cheminées affriolées, entouré d'une douve qui fait plus bassin d'apparat que barrière liquide. Le plan carré est organisé en quatre parties géométriquement distribuées autour d'un escalier central (à double volte, comme à Amboise). Autant de signes qui montre que l'utilité est autre. Elle n'est pas seulement symbolique, elle est une idée.</p>
<p>4/ Les guides expliquent que c'est la Renaissance : pourquoi pas? je constate que le "pavillon de chasse" dépasse par son ampleur le simple lieu d'accueil d'activités cynégétiques, aussi royales qu'elles fussent. Je vois que ce château a été peu habité : Gaston d'Orléans, Maurice de Saxe, Stanislas Leszczynski, ... et c'est à peu près tout. En fait, c'est un château vide. Planté là, au milieu d'une forêt certes giboyeuse, mais loin de tout, même pas sur les terres traditionnelles des rois de France, une glacière en hiver, un affolement de moustiques en été, un marais mal curé.... Pourquoi avoir planté là cette grande machinerie ?</p>
<p>5/ Parce que l'idée est politique. Le château, c'est le moyen que trouve François 1er (qui y passe, de mémoire, 73 jours en tout....!) d'imprimer sa marque, d'impressionner ses visiteurs, de montrer sa grandeur. C'est parce que c'est vain qu'il est puissant. Le château devient, dans sa démesure, le signe extérieur de la puissance, de la toute-puissance. La démesure (car le château est démesuré) loin de tout démontre,quasiment par l'absurde, à quel point le roi est le maître.</p>
<p>6/ C'est la vraie raison du caractère "renaissant" de ce château : il n'est pas dû seulement à son plan "logique", pas seulement à l'accumulation de détails décoratifs, mais surtout, au changement radical dans l'expression politique du pouvoir. Ce château n'a d'autre utilité que d'être un discours : il est la manifestation du pouvoir du roi et, déjà, de l'Etat.</p>
<p>7/ C'est en cela que Chambord diffère du Louvre ou de Versailles : car ces deux lieux ont été des endroits où le pouvoir s'est réellement exercé : l'association était alors forcément directe. Dans le cas de Chambord, rien de tout ça. Un château "pour rien", qui exprime donc l'essentiel.</p>
<p>8/ Il n'y a donc pas tout à fait de hasard si le dernier prétendant sérieux au trône, Henri V comte de Chambord, a porté ce nom. On lira le <a href="http://www.heraldica.org/topics/france/manifestes.htm">manifeste</a> du 5 juillet 1871, où il pose la question du drapeau blanc (qui le fait, finalement, renoncer au trône) : il est daté de Chambord.... Par une singulière coïncidence, ce château si politique allait, pour la première fois de son histoire, être le lieu d'une décision politique... qui marquait la fin de la monarchie en France.</p>
<p>9/ Un château très peu politique, donc, en apparence. Et pourtant, un château qui symbolisait, déjà, avec 250 ans d'avance, la dépersonnalisation du pouvoir. Quand vous arrivez par l'autre côté, pas celui du parc mais celui du jardin, vous apercevez d'ailleurs, au dessus du petit fronton d'entrée, un drapeau tricolore. Plus que la réponse républicaine aux prétentions d'Henri V, j'y vois la symbolique du château, lui qui marque l'entrée dans la modernité : bientôt, la politique serait désincarnée, elle serait fondée sur les idées.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/05/07/Chambord%252C-un-ch%25C3%25A2teau-politique#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1018Champion national françaisurn:md5:15ab7d7ca6a8eb4816f8019701e7c0ec2011-04-05T21:37:00+00:002011-04-05T21:37:00+00:00Olivier KempfFrance<div class="post-excerpt"><p>Dans le <ins>Monde éco</ins> d'hier soir, un édito très intéressant de <strong>Jean Pisani-Ferry</strong> sur la compétitivité comparée de l'Allemagne et de la France.</p>
<p><img alt="" src="http://s2.lemde.fr/image/2011/04/04/211x270/1502947_8_fef6_une-du-monde-economie-du-mardi-5-avril-2011.jpg" /> <a href="http://s2.lemde.fr/image/2011/04/04/211x270/1502947_8_fef6_une-du-monde-economie-du-mardi-5-avril-2011.jpg">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Quelle est la thèse ? Que le déficit de croissance est dû, certes à des consommations différentes, ou des coûts du travail : toutefois, un examen attentif ne rend pas ces explications si probantes. En fait, la différence tient surtout au rôle exportateur. Et là il faut regarder de plus près.</p>
<p>2/ En effet, selon JPF, les champions nationaux français sont souvent de taille mondiale. Mais du coup, ils sont tellement intégrés qu'ils ont une logique "mondiale" avec finalement peu de retours "nationaux". Ce qui fait la grande différence, c'est l'existence d'entreprises moyennes exportatrices en nombre en Allemagne, alors qu'elles n'existent pas en France.</p>
<p>3/ Une vraie politique économique de croissance viserait donc à encourager ces entreprises de taille moyennes, et pour tout dire ( je en crois pas me souvenir que JPF ait prononcé la chose, mais j'y vais des deux pieds) familiales : en effet, elles suivent une logique forcément patrimoniale de long terme, et elles ne dépendent pas des marchés financiers et de leur dictature de court terme.</p>
<p>4/ Cela me fait penser à un autre article, lu je ne sais plus où, qui remet en question les aides à l'emploi : trop souvent, elles sont tournées vers des emplois de service finalement peu productifs, et pas assez vers des emplois industriels ou exportateurs.</p>
<p>5/ Mais au fond, là n'est pas le vrai objet de ce billet : il s'agit surtout de constater ce goût français pour "les champions". En fait, on y voit là une "mesure de puissance" comme autrefois on aimait à compter nos canons. Quiconque a été aux États-Unis a été amusé par le nombre de panneaux, au fin fond de la moindre bourgade, "<em>the biggest in the world</em>". En fait, en France, on aime d'autant plus être les premiers qu'on a été bluffé, pendant cinquante ans, par le fait que les Américains l'ont été.</p>
<p>6/ C'est vrai en matière de sport (souvenez-vous, il fallait se "décomplexer mentalement") ou de défense (le retrait de 1966), ce le fut pour l'économie : nous aussi, nous allions nous adapter aux règles de l'économie de marché, et gagner des places à ce jeu fabuleux, auquel j'ai joué petit des heures et des heures, le "Richesses du monde", sorte de monopoly économique. Le premier déclencheur fut le tournant de la rigueur, en 1983. Le second tint aux débats sur la mondialisation, au milieu des années 1990.</p>
<p><img alt="" src="http://www.touslesprix.com/ph_tar/1/1/9/6/11960784.jpg" /></p>
<p>7/ Deux fascinations qui nous poussèrent, collectivement, à construire ces grands groupes français, substituts de notre puissance nationale : on pouvait jouer le jeu, on n'était pas si mauvais. Du coup, l'effort collectif tourné vers le visible, vers "la France du rang et de la grandeur" version Wall Street, on a négligé la France moyenne, celle de province, celle des terroirs, la France intermédiaire. Au fond, on a joué au parisianisme en économie, et pas au décentralisateur. L'Allemagne, "fédérale", structurellement décentrée, n'a pas eu de mal à encourager ses entreprises moyennes, même si certaines sont devenues, selon une vieille tradition industrielle, des grands groupes mondiaux. Mais la taille mondiale était en Allemagne une résultante, quand elle était en France un objectif : <em>big is beautiful</em>, ou la vieille fascination française pour la puissance.</p>
<p>Au fond, les performances d'une économie reflètent aussi la géopolitique d'un pays.</p>
<p>O. Kempf</p>
<p><ins>Réf : la fin de <a href="http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/04/04/competitivite-francaise_1502572_3232.html">l'édito</a> de JPF, tiré du Monde</ins></p>
<p><strong>Compétitivité française</strong>, LE MONDE ECONOMIE | 04.04.11 | 15h19</p>
<p>Deux raisons sont couramment données à cette évolution. La première est la faiblesse de la demande intérieure allemande. Depuis les débuts de l'euro, la consommation des ménages a progressé trois fois plus vite en France qu'en Allemagne. Cela ne peut cependant expliquer les écarts de performance sur les marchés tiers ni suffire à rendre compte du fait que les exportations françaises ont crû de moins de 3 % par an depuis 1999, contre plus de 6 % pour l'Allemagne.</p>
<p>La deuxième raison est le coût du travail. Mais si la rémunération des salariés français a progressé deux fois et demie plus vite qu'en Allemagne depuis 1999, les prix des exportations ont en revanche évolué de manière très similaire. Le recul français n'est donc pas le seul effet d'une concurrence par les prix.</p>
<p>Pour comprendre ce qui s'est passé, il faut s'armer d'un microscope. Les données fines révèlent, tout d'abord, la forte disparité des appareils exportateurs, comme le montrent les travaux de Lionel Fontagné (Centre d'études prospectives et d'informations internationales), Gianmarco Ottaviano (université Bocconi de Milan) et Nicolas Véron (Fondation Bruegel, à Bruxelles).</p>
<p>La France compte trois à quatre fois moins d'entreprises exportatrices que l'Allemagne. L'essentiel des ventes à l'étranger y repose sur un petit nombre d'acteurs (les mille premiers exportateurs font 70 % des ventes), quand la performance allemande s'appuie sur un tissu beaucoup plus dense.</p>
<p>Si la France exporte moins, c'est d'abord parce qu'elle compte moins d'entreprises, surtout de taille moyenne. Les mêmes données montrent que le nombre d'exportateurs a baissé de 15 % depuis dix ans, tandis qu'il augmentait de 20 % en Allemagne. Les groupes internationalisés ont tendance à exporter moins à partir du territoire national, parce que leur stratégie est de produire davantage là où ils réalisent leurs ventes.</p>
<p>Entre des grandes entreprises qui vont produire ailleurs et des entreprises moyennes trop peu nombreuses, la France souffre d'un déficit croissant d'exportateurs. C'est le coeur de son problème économique. Non qu'il faille à tout prix exporter, mais toutes les analyses montrent que les entreprises présentes sur les marchés internationaux sont plus productives, plus innovantes et paient des salaires plus élevés.</p>
<p>Si ce défi est désormais bien identifié, la réponse ne va pas de soi. Par tradition ou par facilité, les dirigeants politiques français ont tendance à assimiler intérêt national et prospérité des champions industriels. Ils sont donc enclins à promouvoir ces derniers en les défendant contre la politique de la concurrence européenne et en tentant d'arracher pour eux des contrats à l'exportation.</p>
<p>ENVERGURE MONDIALE</p>
<p>Cette assimilation n'a cependant plus guère de fondement. Certes, une partie des éclatants profits de l'indice CAC 40 revient aux résidents de l'Hexagone. Mais pour l'essentiel - et on ne peut le leur reprocher -, l'objectif stratégique de ces grandes entreprises est d'acquérir une envergure mondiale. Il n'est pas de promouvoir le territoire national.</p>
<p>L'intérêt de l'économie française est en revanche de faire naître, croître et prospérer de nouvelles entreprises, quitte à ce que celles-ci bousculent les champions établis. Cela suppose qu'elles soient suffisamment rentables pour engager et maintenir des efforts d'exportation, qu'elles aient accès à des financements de croissance, au lieu de dépendre excessivement du crédit bancaire, et qu'elles aient la capacité d'investir dans la recherche et l'innovation.</p>
<p>C'est à ce prix que l'économie française retrouvera une capacité de croissance au sein de la zone euro.</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/04/05/Champion-national-fran%25C3%25A7ais#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/986