Egeablog - Italie2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearFrance-Italie : une crise plus profonde qu'il y paraîturn:md5:1a8cfbd253fb71d30e169cd51c16f6402019-11-02T15:53:00+00:002019-11-02T15:53:00+00:00Olivier KempfItalieFranceItalieLibye<p>En février, j'avais été participer à Gênes à un festival de géopolitique organisé par Limes, la revue italienne de Géopolitique. J'étais intervenu sur le thème des rapports entre la France et l'Italie. On était alors au sommet de l'animosité qui s'est depuis calmée. Mais si ces rapports ne démangent plus trop et font moins de bruit, cela ne signifie pas que tout va pour le mieux. Bref, un texte publié 9 mois après.... A vous de vous faire votre idée.</p>
<p><img src="https://blog.flightsite.co.za/wp-content/uploads/2015/04/italy.jpg" alt="" /> <a href="https://blog.flightsite.co.za/italy-or-france-which-destination-is-right-for-you/">source</a></p> <p>France-Italie : une crise plus profonde qu’il n’y paraît</p>
<p>Le dissentiment entre la France et l’Italie était observable depuis plusieurs mois : la preuve, ce colloque est organisé depuis l’été et notre table ronde est prévue depuis ce temps-là. Cependant, l’escalade de ce début d’année a fait la une des journaux au point qu’il faille parler de crise « sans précédent depuis la fin de la guerre », selon les mots du quai d’Orsay.</p>
<p>Cette crise a pourtant plusieurs dimensions. Elle est évidemment une affaire de politique intérieure des deux côtés des Alpes, chacun des protagonistes faisant face à de profondes difficultés internes et ayant trouvé dans la dispute le moyen de se positionner. Le calcul politicien l’a largement emporté sur le calcul diplomatique, c’est une évidence. Mais le terreau était là.</p>
<p>Car la crise est aussi, plus profondément, une crise franco-italienne qui remonte loin. Il y a eu incontestablement une certaine arrogance française, il y a eu aussi des maladresses italiennes : il y a surtout un négligence réciproque sous-jacente qui est dommageable, tant elle témoigne de l’absence de vision régionale plus encore que bilatérale.</p>
<p>Car voici au fond le troisième caractère de cette crise : elle est européenne. Aussi bien une crise évidente de l’Union Européenne mais aussi, paradoxalement, une européanisation des débats politiques.</p>
<p><strong>Est-ce seulement une affaire de politique intérieure ?</strong></p>
<p>Le différend franco-italien n’aurait pas existé s’il n’y avait pas eu E. Macron, et s’il n’y avait pas eu L. Di Maio et M. Salvini. Les trois se ressemblent finalement par bien des aspects, malgré leur opposition profonde.</p>
<p><ins>Macron, le Jupiter inconscient</ins></p>
<p>Emmanuel Macron a en effet été élu par surprise au printemps 2017. Il a bénéficié d’un double écroulement : celui de la gauche, entraînée par le fond autant par la présidence de F. Hollande que par un logiciel idéologique épuisé ; celui de la droite qui avait campagne gagnée jusqu’à ce que le favori, François Filon, ne soit plombé par des soupçons sur sa moralité. Il ne restait que Marine Le Pen au deuxième tour. Macron l’emporta aisément mais pas très brillamment (60 % des suffrages au deuxième tour, dans un contexte de Front républicain) sachant que son socle électoral de premier tour était assez faible (24 %) et dans un contexte de grande abstention. Malgré les louanges incessantes de la presse, vantant un mélange de Kennedy et d’Obama, malgré son charme indéniable, malgré sa chance insolente, il n’avait pas convaincu plus que ça. Il crut cependant que son destin n’avait pas été seulement de renverser la table d’un jeu politique épuisé, mais qu’il le mandatait à conduire un programme de réformes finalement très conventionnel, dans la droite ligne du libéralisme européen.</p>
<p>L’état de grâce permit de conduire la réforme de la SNCF, déjà de façon crispée. Cependant, les macroniens étaient très inexpérimentés et leur manque de sens politique assez flagrant. Le président maniait tout le monde à la baguette. Se désignant Jupiter, il se croyait au moins l’égal de De Gaulle. C’était ne pas comprendre que les circonstances avaient changé. Le vieux pays encore ordonné des années 1960 avait beaucoup plus changé qu’on ne l’avait dit. Il se cabra.</p>
<p>C’est le propre des premiers révolutionnaires que de croire qu’ils peuvent maîtriser le flot dont ils ont ouvert les vannes. Quasiment toujours, ils sont finalement emportés par lui et d’autres viennent, encore plus radicaux ou habiles, qui les mettent à l’écart. On le sait depuis le passage de 1789 à 1793, plus tard des mencheviks aux bolcheviques. Elu sur le renvoi du vieux système, Macron croit qu’il pourra s’appuyer quand même sur les institutions.</p>
<p><ins>Une crise française persistante</ins></p>
<p>La crise s’annonça dès l’été. Le président connaissait une décrue dans les sondages, normale pensait-on. Voici qu’au début de l’été, un de ses conseillers, A. Benalla, était accusé d’avoir violenté des manifestants, sous un déguisement de policier. On découvrit alors un système très opaque de privilèges, un président isolé, un entourage mutique et apparemment sourd. Surtout, le président se raidit, couvrit son subordonné, clama d’une vois trop haut perchée, devant des députés réunis pour l’occasion : « Qu’ils viennent me chercher ». La France apprit que le macronisme n’était pas un programme, mais une bande autour d’un chef.</p>
<p>L’automne vint. Avec lui, les Gilets jaunes, mouvement improbable que personne n’avait vu venir et qui jeta des dizaines de milliers de manifestants dans les rues chaque samedi, sans même parler de l’occupation de ronds-points où se recréait une sociabilité perdue dans la vie moderne. Il ne s’agit pas ici d’analyser les ressorts du mouvement : toujours est-il que beaucoup voulaient justement « chercher » le président, qui était finalement le principal point commun des manifestants, à cause de l’hostilité qu’il inspirait.</p>
<p>Trois mois après, les manifestations continuent et le mouvement bénéficie toujours d’un large soutien de l’opinion, 70 % des Français « le comprenant ». Quant au président, il ne rassemble le soutien que d’un cinquième à un quart des Français, ne réussissant pas à élargir son socle électoral, malgré le désordre politique évident. Au fond, il apparaît plus comme un déclencheur que comme une solution : c’est gênant quand on se croit Jupiter.</p>
<p>E. Macron est donc dans une situation difficile car la crise intervient finalement très tôt dans son quinquennat. Il risque d’être bloqué dans sa volonté de réforme et ne veut pas terminer comme un roi fainéant. Aussi est-il enclin à rejouer, plus que jamais, le clivage qui lui a permis d’arriver en tête : celui de l’hostilité à l’extrême droite. Et puisque Marine Le Pen est habilement silencieuse à l’intérieure, il lui faut trouver un adversaire à sa mesure. Ce seront les dirigeants italiens. Passons sous le prétexte qui a causé le rappel de l’ambassadeur de France et l’émission d’un communiqué très dur du ministère des affaires étrangères. Il est vrai que l’expédition de M. Di Maio en France, à la rencontre des Gilets jaunes, est tout sauf courtoise et qu’il venait précisément rencontrer des acteurs de la vie politique intérieure française. C’est à l’évidence contre tous les usages et, à proprement parler, une incursion politique que Paris ne pouvait laisser passer.</p>
<p><ins>MM. Salvini et Di Maio, duettistes improbables</ins></p>
<p>Car à Rome aussi, on avait tout mis par terre. Le gouvernement de Matteo Renzi (élu finalement sur les mêmes prémisses que celui d’E. Macron, ce qui devrait attirer plus d’attention de la part des politistes) était devenu extrêmement impopulaire, perdant les élections qui virent la victoire de deux mouvements contradictoires mais partageant la même volonté de mettre bas le système.</p>
<p>D’un côté, une Lega renouvelée sous la houlette de Mateo Salvini, partie d’un mouvement régional nordiste pour s’élargir à l’ensemble de la péninsule. De l’autre, Luigi Di Maio, à la tête du mouvement Cinque Stelle, regroupement un peu anarchique des refuzniks du système. Deux mouvements marginaux ayant finalement peu de choses en commun, sinon le refus de l’existant et la volonté de passer à autre chose. Il ne s’agit pas ici de vous l’expliquer car vous êtes bien plus au fait de ces nuances, simplement d’exposer comment ces deux mouvements sont perçus de l’autre côté des Alpes.</p>
<p>Or, la dynamique de ces mouvements n’est pas homogène, tant M. Salvini prend des initiatives qui lui donnent l’avantage sur son allié mais concurrent, ce que l’on observe dans les élections régionales récentes. Là réside probablement la cause de l’initiative de M. Di Maio, désireux de trouver des alliés en Europe. En effet, la Lega se rapproche assez facilement des mouvements européens de droite radicale, et notamment du Rassemblement National de Marine Le Pen en France. Cinque stelle est un mouvement différent, sans ligne politique très claire et ayant donc des difficultés à trouver des alliés.</p>
<p>Il s’agissait donc pour M. Di Maio de faire un coup d’éclat, inspiré par deux considérations : tout d’abord, se démarquer de son partenaire de gouvernement qui est en même temps un concurrent sur la scène politique intérieure ; mais aussi démontrer que le mouvement a une signification européenne : de ce point de vue, le mouvement des Gilets jaunes procède finalement des mêmes racines que le M5S et cette rencontre revêtait une signification importante, dans la perspective des élections européennes à venir et au-delà, de la constitution de groupes parlementaires à Strasbourg.</p>
<p><strong>Une signification européenne</strong></p>
<p>Voici donc deux dynamiques politiques intérieures qui s’insèrent dans une perspective européenne, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes. On ne peut en effet résumer la crise à une simple crise bilatérale, sur laquelle nous reviendrons. Elle possède en effet une dimension européenne.</p>
<p>E. Macron n’a cessé de clamer son programme européen, manifesté par exemple dans le discours de la Sorbonne, prononcé en septembre 2017, quelques mois seulement après son élection. Ce plaidoyer a pourtant eu du mal à s’incarner dans la réalité politique européenne : M. Macron s’est en effet fâché avec de nombreux gouvernements européens, notamment d’Europe centrale et orientale. Au fond, il émet une approche morale qui lui fait condamner les mouvements qui s’écartent, à ses yeux, de l’idéal européen : on pense bien sûr à la Hongrie de V. Orban, mais aussi à la Pologne et bien sûr, à l’Italie.</p>
<p>Il dénonce ainsi l’illibéralisme de ces partenaires, suggérant même (novembre 2017) de conditionner l’octroi des fonds européens au respect de l’Etat de droit, à l’occasion du prochain budget pluriannuel de l’Union, qui sera LE débat européen à partir de l’automne. De même, il n’hésite pas à se présenter comme « le principal opposant » de MM. Orban et Salvini sur le dossier des migrants : « Je ne céderai rien aux nationalistes et à ceux qui prônent ce discours de haine. S'ils ont voulu voir en ma personne leur opposant principal, ils ont raison » dit-il en août 2018. E. Macron voit ainsi une opposition politique qui traverse l’Europe, affirmant : « Il se structure une opposition forte entre nationalistes et progressistes ». Ainsi, Macron se voit à la tête d’un « arc progressiste ». Il y a là encore des arrière-pensées politiciennes puisque M. Orban fait partie du groupe PPE au Parlement européen, celui des conservateurs. Au fond, M. Macron souhaite reproduire en Europe le même dynamitage des clivages qui l’a conduit au pouvoir : faire éclater les groupes traditionnels pour constituer un groupe centriste majoritaire. Notons que cet éclatement du clivage ancien entre droite et gauche correspond très fortement à celui réalisé par l’attelage entre Lega et M5S. Au fond, même s’ils ont des lignes différentes, les dirigeants français et italiens ont des points communs.</p>
<p>Le seul problème d’E. Macron vient de ce que ses alliés naturels ne le suivent pas autant qu’il le voudrait : les Allemands poursuivent leur approche prudente qui convient à leurs intérêts et ne ils voient pas la nécessité du grand chambardement suggéré par le président français. Ce sont aujourd’hui les principaux bénéficiaires de la structure politique et économique européenne et ils se méfient de l’activisme d’E. Macron. Ce ne sont pas les seuls : à preuve, le gouvernement hollandais vient d’entrer subrepticement au capital d’Air France KLM, sans avertir Paris, afin de contrôler les initiatives de Paris sur ce dossier économique. Cette initiative défiante montre que l’Italie n’est pas le seul pays avec lequel Paris a des problèmes.</p>
<p>Économiquement en effet, la France continue de ne pas rassurer les tenants de l’ordo-libéralisme européen, rassemblés autour des Allemands. Si les Italiens ont testé les autorités européennes sur leur budget, constatons que les Français ne rassurent pas Bruxelles, surtout après avoir débloqué dix milliards d’euros pour calmer les Gilets jaunes et alors que les fondamentaux du pays ne sont pas des plus brillants.</p>
<p>L’auditeur italien pourra se dire que finalement, les situations des deux pays se rapprochent beaucoup, aussi bien vis-à-vis de la politique économique européenne que de l’établissement politique en place à Bruxelles et Strasbourg.</p>
<p>Ces considérations amènent à une conclusion partielle : la crise franco-italienne est la manifestation d’un débat plus large, européen, qui traverse tous les pays, avec bien sûr des expressions différentes mais qui toutes, tournent autour d’un débat commun : Quelle Europe voulons-nous ? Comment l’amender alors qu’elle est visiblement en crise ? Comment résoudre la « polycrise » décrite par J.-C. Juncker ? stagnation économique, poids dominant de l’Allemagne, crise des migrants, défis de l’Amérique trumpienne, développement de mouvements populaires antisystèmes, voisinage russe, voisinage méditerranéen en sont des expressions multiples mais qui pose une question d’abord européenne.</p>
<p>L’Europe fait évidemment partie de la réponse à ces questions géopolitiques. Mais force est de constater qu’il y a ici un particularisme franco-italien, qu’il s’agit de décrire.</p>
<p><strong>Différends géopolitiques de part et d’autre des Alpes</strong></p>
<p><ins>Obsessions françaises</ins></p>
<p>Il convient de revenir ici sur la psyché française. Elle tourne autour de la question de la puissance. La France a été une superpuissance, elle sait qu’elle ne l’est plus depuis la Seconde Guerre mondiale. Se pose alors la question de son rang : est-elle une grande puissance ou juste une puissance moyenne ?</p>
<p>Objectivement, elle demeure une grande puissance (poids économique, siège au Conseil de Sécurité de l’ONU, langue internationale, rayonnement diplomatique mondial, possession de la bombe nucléaire, activisme militaire). Mais la crainte du déclassement l’obsède, surtout depuis le désastre de juin 1940. Cela explique son besoin d’un multiplicateur de puissance. Ce fut longtemps l’empire colonial mais sa disparition à la fin des années 1950 mit fin à ce rêve. Voici pourquoi elle choisit l’Europe, décision prise par le général De Gaulle au début des années 1960 : une Europe qu’il voulait contrôler afin de faire le poids vis-à-vis de Américains et des Soviétiques. Quelque furent les évolutions politiques depuis soixante ans, cette obsession demeure en France et explique par exemple que les élites parisiennes ne cessent de parler d’« Europe de la défense », expression ambiguë et intraduisible, donc totalement incomprise par nos partenaires européens.</p>
<p>Ce mythe de la puissance perdue explique également l’obsession allemande et corrélativement, la négligence envers les autres Européens. Au fond, il s’agit de tirer parti de la puissance économique allemande pour acquérir un poids politique suffisant et peser dans les affaires du monde. Ce faisant, la France adopte, sans s’en rendre compte, un complexe de supériorité envers les autres : c’est vrai des Belges, des Espagnols et bien sûr, des Italiens. Souvent, la France adopte envers beaucoup l’attitude dominatrice qu’elle reproche tant aux Américains, voire aux Allemands.</p>
<p><ins>Raidissements italiens envers l’expansionnisme économique</ins></p>
<p>Simultanément, la France se trouve très à l’aise avec ses voisins latins et ne se rend pas compte qu’elle agace. Les médias français ont beaucoup évoqué la rivalité entre MM. Macron et Salvini, bien peu ont remarqué à quel point la France était décriée en Italie, avant même l’arrivée d’E. Macron au pouvoir. Cela peut tenir à un certain expansionnisme économique (investissements de Bolloré dans Mediaset ou Telecom Italia, rachat de Moncler par Eurazeo, de Parmalat par Lactalis ou de Bulgari par LVMH). Ainsi, les acquisitions françaises en Italie (52 milliards d’euros entre 2006 et 2016 contre 7,6 milliards d’euros d’acquisitions italiennes en France durant la même période) nourrissent une méfiance croissante et des appels au patriotisme italien. Elles expliquent également la dispute sur la question du rachat des chantiers de l’Atlantique par Fincantieri, qui a été un temps bloqué par le gouvernement français ce qui a été mal vécu par Rome. On pourrait enfin évoquer la question de la ligne à grande vitesse entre Lyon et Turin (le TAV), promue par les Français mais source de trouble chez les Italiens, non pas parce que cela vient de la France mais parce que les deux partenaires principaux de la coalition ont des points de vue différents sur le sujet, la Lega étant d’accord, le M5S s’y opposant.</p>
<p><ins>Méditerranée, cause de discorde</ins></p>
<p>Sur le versant plus géopolitique, les deux voisins ont manifesté leur désaccord notamment sur le problème des réfugiés. Il ne s’agit pas seulement de la question de l’immigration mais aussi des vagues de migrants traversant la Méditerranée et arrivant, pour beaucoup, en Italie. Or, la solidarité européenne et notamment française n’a pas fonctionné. Convenons que cela arrangeait bien Paris qui pouvait poursuivre ses manifestations publiques de vertu européenne sans accroître l’accueil interne de réfugiés, question également très sensible en France. Là encore, le différend bilatéral rend visible une question qui est d’abord européenne, même si les deux pays sont sortis temporairement de Schengen (la France sur la totalité de ses frontières, l’Italie pour sa frontière avec l’Autriche).</p>
<p>Mais ce sujet pose aussi la question de la Méditerranée, espace commun entre les deux pays, notamment la Méditerranée centrale et occidentale. Les deux pays devraient pourtant partager une approche commune et l’ont d’ailleurs longtemps eue (dialogue 5+5, EUROFOR, EUROMARFOR, Force de Gendarmerie européenne). Mais les choses se sont étiolées au cours de la dernière décennie, notamment à la suite de l’affaire libyenne. On sait qu’elle fut déclenchée par Nicolas Sarkozy, sans consulter ses alliés et que l’Italie s’y rallia, obtenant que cela passe sous commandement de l’OTAN. Pourtant, le chaos qui s’ensuivit a renforcé une certaine amertume romaine. D’une part, envers un déclenchement hâtif et des buts de guerre peu identifiés qui allèrent jusqu’à la chute du régime, avec le désordre consécutif, source première des migrations en Méditerranée centrale ; d’autre part, à cause de l’arrivée de la France en Libye, considérée comme un champ traditionnel d’influence italienne, depuis au moins la colonisation du début du XXème siècle. Or, les initiatives diplomatiques de Paris et de Rome se succèdent sans coordination, démontrant une sorte de rivalité latine et de lutte des egos assez infantile et surtout, sans guère d’effets sur le terrain. Mais si le dossier libyen est marginal pour Paris, beaucoup plus préoccupée de la bande sahélo-saharienne ou du Proche-Orient, elle est au contraire beaucoup plus centrale dans la politique extérieure de Rome qui est donc beaucoup plus susceptible sur ce dossier. Ceci explique également les sorties un peu outrées de Matteo Salvini sur le franc CFA ou le néocolonialisme français en Afrique, qui trahit plus l’impensé italien que la réalité actuelle, malgré tout fort éloignée de la « Françafrique » du général De Gaulle.</p>
<p><strong>Conclusion</strong></p>
<p>Nous pourrions évoquer cette psyché italienne qui anime sa géopolitique contemporaine : ce n’est ni le lieu ni le moment mais notons ici que s’il y a des obsessions françaises, il y a également des obsessions italiennes qui jouent incontestablement dans les rapports franco-italiens.</p>
<p>Ces dynamiques de fond s’insèrent dans un double contexte. Il est européen, en arrière-plan mais déterminant car la plupart des discussions entre Paris et Rome portent aussi sur l’Europe que les deux pays fondateurs envisagent pour la construction européenne. Mais il est aussi le fait des circonstances marquées par les personnalités au pouvoir dans les deux voisins transalpins. Les personnalités sont marquées et fortement différentes, tirant d’ailleurs parti de leur opposition qu’elles mettent volontiers en scène. Cependant, elles font courir un risque, celui d’abimer durablement une relation qui est naturellement celle de la proximité ; au-delà de la culture, il s’agit d’abord d’une communauté de tempérament qui font Français et Italiens si proches et si complices. Les responsabilités de cette crise sont évidemment partagées mais il est plus que temps de sonner le holà et de revenir à de meilleurs sentiments et des rapports plus courtois. Il semble que les deux capitales en aient pris conscience et soient en train de raccommoder les choses. Mais les temps sont désormais tellement imprévisibles que l’embellie actuelle reste encore bien fragile.</p>
<p>Olivier Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/11/02/France-Italie-%3A-une-crise-plus-profonde-qu-il-y-para%C3%AEt#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2273Rigueur contre corruptionurn:md5:cedb723fa33df2da49a3909885f058b52013-03-03T20:26:00+00:002013-03-03T20:26:00+00:00Olivier KempfItalie<div class="post-excerpt"><p><a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2013/02/24/M%C3%A9lange-hebdo-9/13">J'évoquais hier</a> le choc géopolitique que constituait le résultat des élections italiennes de la semaine dernière. C'était un peu lapidaire, et cela mérite plus de développements. Les voici.</p>
<p><img alt="" src="http://www.humanite.fr/sites/default/files/imagecache/une_article_horizontal/2013-02-26beppe-grillo.jpg" /> <a href="http://www.humanite.fr/monde/beppe-grillo-est-il-dangereux-pour-la-democratie-516189">source</a></p>
<p>Le succès du mouvement cinq étoiles (M5S), en Italie, ne surprend que ceux qui s’intéressent à l’Italie une fois tous les deux ou trois ans. Il reste que le résultat des élections possède une signification fort importante. Comme le disait D. <strong>Reynié</strong> <a href="http://abonnes.lemonde.fr/elections-italiennes/article/2013/02/27/dominique-reynie-on-assiste-a-un-delitement-des-systemes-politiques-europeens_1839553_1824859.html">dans Le Monde</a>, après la crise financière puis la crise économique, voici surgir la crise politique.</p></div> <div class="post-content"><p>D’emblée, cessons d’affubler <strong>Bepe Grillo</strong> des différents surnoms plus ou moins dépréciateurs qu’adorent nos censeurs journalistes : <strong>Coluche</strong> (au sens de <strong>Coluche</strong> amuseur public, et pas <strong>saint-Coluche</strong> créateur des restaus du cœur), clown, pitre, bouffon et autres amabilités. Car d’une part <strong>Coluche</strong> n’a fait que semblant d’aller à l’élection ; d’autre part cela fait dix ans que M. <strong>Grillo</strong> fait de la politique et trois ans que son mouvement rencontre un vrai succès politique ; enfin, et peut-être surtout, ce sont les électeurs qui ont voté pour son mouvement. Ah ! le peuple … Eh ! oui, le bougre, il ne lit pas <ins>The Economist</ins>, cet hebdomadaire influent qui soutient toujours le candidat perdant. Mais le peuple vote : a-t-il tort ?</p>
<p>Les commentateurs ont généralement retenu <ins>deux interprétations</ins>. L’une, additionnant les voix de <strong>B. Grillo</strong> et de <strong>S. Berlusconi</strong> (et de la Ligue du Nord), constate que la moitié des lecteurs italiens a voté contre l’Europe (assimilée, au choix, à l’euro, l’Allemagne ou la rigueur ou les trois ensemble). L’autre, liant cette élection aux mouvements politiques observés en Grèce (Aube dorée), au Portugal et même en Espagne (les <em>Indignados</em>), constate la limite politique des mesures d’austérité imposées par la crise économique, mais aussi et surtout la défiance envers le personnel politique en place, jugé inefficace et corrompu. Ce que confirme la Bulgarie (<a href="http://fr.euronews.com/2013/03/03/les-bulgares-dans-la-rue-contre-la-corruption-et-la-pauvrete/">voir ici</a>) dont la grosse manifestation du jour dénonçant la corruption du personnel politique s’insère dans ce mouvement général.</p>
<p>Il y a bien sûr un lien entre ces deux interprétations. On peut pousser plus loin l’analyse.</p>
<p><ins>Dialectique rigueur et corruption</ins> : je suis frappé de cette association politique qui dénonce à la fois la « rigueur » et la « corruption ». La rigueur est certes économique et budgétaire, quand la corruption serait politique. Toutefois, chacun comprend que la rigueur est devenue une « politique », et même « la seule » politique. Ainsi ne voit on pas d’alternative à cette « seule politique raisonnable », celle promue par les gens sérieux, les techniciens (comme monsieur <strong>Monti</strong>) et les sachants. Accessoirement, elle est aussi promue par l’Allemagne et les marchés. Or, personne n’est vraiment convaincu ni par l’une ni par les autres.</p>
<p>L’une, en effet, a organisé une réforme au début des années 2000, présenté comme le modèle. Mais chacun sait désormais que cette compétitivité se fait surtout envers le marché intérieur européen, que le niveau « relativement » bas de l’euro (favorisé justement par tous les pays en crise) permet à l’Allemagne de faire encore des affaires en dehors de la zone euro, qu’en fait cette compétitivité est surtout une précarité intérieure généralisée. Qu’accessoirement, cela permet d’importer de la main-d’œuvre formée et bon marché du reste de l’Europe, afin de compenser à faible prix la crise démographique allemande. Qu’enfin, cette rigueur est bien égoïste : ce qu’on ne saurait reprocher en soi, mais qui passe difficilement comme un modèle de vertu partageuse et européenne.</p>
<p>Quant aux marchés, même en prenant soin d’éviter la personnalisation excessive qu’on leur attribue, force est de constater qu’ils représentent justement la source initiale de la crise. Ce sont eux qui promeuvent depuis des années la dérégulation et qui ont admis les dérives corruptrices des banques et des marchés financiers. La finance est corrompue, depuis <em>Lehman Brothers</em>, <strong>Kerviel</strong>, la manipulation du Libor ou UBS. La finance a fait la crise, s’est défaussée sur les États pour se débarrasser de sa propre crise de la dette pour ensuite demander aux États de nettoyer cette dette, jugée soudainement excessive. La même qui n’a eu de cesse de maquiller les comptes, y compris les comptes publics, comme par exemple en Grèce. La même qui ne cesse de faire placer les fonds off-shore pour « optimiser » l’impôt et ne pas payer. Et cette finance, cette économie corruptrice viendraient donner des leçons de rigueur ? Il faut bien comprendre pourquoi les électeurs ne marchent plus dans la combine.</p>
<p>Oh ! le peuple est lui aussi corrompu. Constatons en effet que la dérégulation ne touche pas seulement le droit public, mais aussi la société. Que le mouvement ultra individualiste qui est la marque de l’Occident (cf. la <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2013/01/27/Occident-et-mondialisation-par-Pierre-Brochand">conférence de Pierre Brochand</a>) dissout toutes les institutions, et donc les institutions sociales. Que les marchés, les gouvernements, les entreprises sont constituées d’hommes et que ce sont eux qui sont « corrompus ». Et qu’il ne s’agit pas de « morale », qu’elle soit religieuse ou laïque. Parce qu’en plus, les élites (et notamment les médias) ne cessent de donner des leçons de morale.</p>
<p>Il s’agit tout simplement du contrat social, des règles de vie en commun, de cette limitation collective à ma liberté qui nous permet de vivre ensemble, et donc de cette éthique que je m’impose parce que je partage avec mon voisin, mon proche, mon concitoyen, qu’il s’agisse d’impôts sur le revenu, d’impôts sur les sociétés ou de péréquation territoriale entre les régions pauvres et les régions riches.</p>
<p>En un mot : les élites ne sont pas exemplaires et leur discours de rigueur apparait comme le masque de la perpétuation de leurs privilèges. Le vote italien n’est que la façon populaire d’arracher le masque.</p>
<p><img alt="" src="http://md0.libe.com/photo/497758/?modified_at=1361963062&ratio_x=03&ratio_y=02&width=476" /> <a href="http://www.liberation.fr/monde/2013/02/26/l-italie-suspendue-aux-grillini_884878">source</a></p>
<p>Cette tentative est rendue possible par l’émergence de nouvelles expressions politiques via Internet. Lors du <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2012/05/08/Colloque-Se-r%C3%A9volter-au-21%C3%A8me-si%C3%A8cel-%3A-dernier-appel">colloque de l’an dernier sur la révolte</a>, nous avions essayé de rendre compte de ce nouveau mouvement qui rend possible les <em>Indignados</em>, la révolte des tentes, le printemps érable et, maintenant, le M5S. Voici donc un leader qui refuse d’aller sur les plateaux télé, et qui invente un nouveau système de mobilisation alternant Internet et une succession de meetings populaires, de rencontres physiques avec les électeurs. Autrement dit, qui est pleinement 21ème siècle quand la télé paraît datée, 20° siècle. Un mouvement qui va au bout de la réunion. La télé est hiérarchique, et elle a perdu. Internet n’est pas autant hiérarchique, puisqu’il permet le dialogue et donc la réintermédiation. Et surtout, le côté froid et technologique d’Internet est compensé par ces rencontres physiques, ces expériences charnelles qui font toute la différence entre une musique téléchargée et un concert live.</p>
<p>Toutefois, l’originalité de <strong>Bepe Grillo</strong> ne tient pas seulement à une invention technique, celle de l'invention d'un procédé de mobilisation électorale. Il marque aussi l’émergence d’une démocratie directe, rendue justement possible par la technique. Au fond, il pose la question de la « représentation », ce système politique inventé au XVIII° siècle pour tenir compte des conditions de l’époque : lorsqu’une nouvelle mettait plusieurs jours pour se répandre, quand les débats n’étaient pas instantanés, quand l’on ne savait pas ce que pensaient les gens, quand il n’était pas possible de réunir une pétition de 700.000 signatures en trois semaines. <strong>B. Grillo</strong> propose de voter loi par loi, projet par projet, pour permettre aux députés de voter en conscience, sans avoir à se poser la question de leur réélection et du contrôle du parti. On comprend que l’élite n’aime pas ça !</p>
<p>Et ensuite ? Ensuite, M. <strong>Bersani</strong> a la majorité à la chambre et une majorité relative au Sénat (comme M. <strong>Rocard</strong> en 1988) et il devra donc composer. Il devra surtout se poser la question de la politique qu’il veut mettre en œuvre. Car voici au fond la vraie, la seule question : le clivage droite et gauche n’a plus aucune signification, comme je ne cesse de le répéter dans ce blog. Économiquement, la « gauche » mène une politique « sérieuse » et donc « libérale » et donc « rigoureuse ». Et quant aux questions de société, sous prétexte de défendre « les droits » elle défend les positions les plus individualistes, celles du « moi d’abord » qui va à l’encontre de son logiciel (ou de ce qu’elle dit de son logiciel). Quant à la droite, cela fait des générations qu’elle est obligée de conjuguer malaisément les libéraux (« les affaires d’abord ») et les patriotes.</p>
<p><strong>M. Bersani</strong> va-t-il choisir le commun, ou l’individuel ? voici la question que lui pose l’électorat italien, au-delà de <strong>Bepe grillo</strong>.</p>
<p>O. Kempf</p>
<p>PS : Il faut constater en Espagne qu’aux dérives fractionnistes s’ajoute la question de la corruption : aussi bien celle du gouvernement que celle qui touche au symbole du renouveau espagnol, la monarchie. Les affaires (dans tous les sens du mot) du gendre du roi et les goûts maladroits du monarque pour des chasses somptuaires ont affecté la personne du roi, et au-delà l’institution qui réunissait les Espagnols. Ainsi, la crise touche non seulement la classe politique, mais aussi l’institution symbolique qui marquait l’unité de la nation : cela renforce évidemment les tendances sécessionnistes.</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2013/03/03/Rigueur-contre-corruption#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1717A propos du 150° anniversaire de l’unité italienne (J Pellistrandi)urn:md5:bac0fc24f9ff61d84cbc4814b4ad9c832011-09-17T17:42:00+00:002011-09-17T17:42:00+00:00Olivier KempfItalie<div class="post-excerpt"><p>A la suite de mon <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2011/09/07/Italie-%3A-n%C3%A9gligence-fran%C3%A7aise">petit billet sur l'Italie</a> et la négligence française à son égard, Jérôme qui connaît bien le pays m'envoie ce texte très intéressant, qui dit clairement des choses dont j'avais l'intuition : mille mercis à lui encore une fois, car cela manquait...</p>
<p><img alt="" src="http://www.pronoplus.com/blog/wp-content/uploads/2008/06/francia-italia-football-1935.jpg" /> <a href="http://www.pronoplus.com/blog/vivez-france-italie-avec-nous-sur-le-forum-16-06-2008.html">source</a></p>
<p>O. Kempf</p></div> <div class="post-content"><p><strong>A propos du 150° anniversaire de l’unité italienne</strong> :</p>
<ul>
<li>Autour du livre d’A<ins>lberto Toscano</ins> :<a href="http://www.armand-colin.com/livre/362960/vive-l-italie.php"> Quand les Français se passionnaient pour l’unité italienne</a>, Armand Colin, 2010.</li>
</ul>
<p>Ce printemps 2011 a vu l’Italie fêter le 150° anniversaire de sa réunification à travers de très nombreuses manifestations dans la péninsule mais celui-ci a eu au final peu d’écho de l’autre côté des Alpes. C’est un paradoxe d’autant plus que la France, qu’elle fut royauté, empire ou république s’est longtemps passionnée pour la célèbre Botte. Autre paradoxe actuel, les relations franco-italiennes, d’habitude plutôt sereines, ont connu récemment de sérieuses perturbations dans lesquelles la dimension passionnelle n’est jamais très loin. Il suffit de se rappeler une certaine finale d’un certain Mondial en juillet 2006.</p>
<p>Les clichés fusent entre les deux nations, alors que le voisinage initialement si intime semble s’estomper. Les deux peuples croient se connaître, mais en fait, s’ignorent alors que leur destin fut jadis entremêlé. Alberto Toscano, journaliste italien correspondant de presse vivant en France depuis plusieurs décennies et donc intime connaisseur de notre pays et surtout de ses habitants, nous propose donc de redécouvrir comment la France a été un acteur essentiel et controversé du processus de réunification de la Péninsule italienne tout au long du XIX° siècle et combien les liens ainsi créés conditionnent encore la relation entre les Français et leurs cousins italiens.</p>
<p>Sur un mode journalistique attrayant mettant fréquemment en parallèle histoire et actualité, l’auteur montre combien la France a été attirée par la Péninsule italienne depuis des siècles mais aussi combien les rapports restent complexes, laissant subsister encore de très nombreuses incompréhensions.</p>
<p>La France, quelque soit la nature de son régime politique, toujours unitaire et centralisée, n’a cessé d’admirer ce foyer de civilisation et de pouvoir sous un angle plus culturel, artistique et sentimental que strictement politique et économique. Les Italiens ont, de leur côté, longtemps cherché en la France un soutien politique et intellectuel pour limiter l’emprise des puissances tutélaires comme l’empire austro-hongrois, le royaume d’Espagne, et bien sûr, la Papauté alors pouvoir temporel. Les échanges ont donc toujours été permanents, réguliers et intenses, la Péninsule ayant été depuis le Moyen-Age un des espaces géographiques où les rivalités européennes se sont affrontées au détriment des populations locales, à la recherche d’alliances plus ou moins solides avec les principales principautés et autres royaumes italiens. C’est également le foyer de départ de la Renaissance qui a tant suscité l’intérêt des Rois de France et l’accroissement des échanges artistiques et scientifiques comme l’illustre Léonard de Vinci.</p>
<p>Morcelée depuis la fin de l’Empire romain, ce n’est qu’à partir de la fin du 18° siècle et de la révolution française que l’Italie va s’engager dans un processus de réunification laborieux et violent tout au long du 19° siècle, le siècle des nationalismes. Certes, officiellement, la réunification s’est faite en 1861, mais d’autres jalons restent essentiels pour comprendre la constitution d’un état italien autour d’une nation italienne : 1871 avec la prise de Rome au détriment des Papes, 1922 avec la prise du pouvoir par Mussolini, 1929 avec les accords du Latran entre l’Etat italien et le Saint Siège, 1943 avec la chute du fascisme, voire 1978 lorsque Jean-Paul II est élu, devenant le premier Pape non italien depuis le début du 16° siècle… Encore aujourd’hui, l’échiquier politique avec la Ligue du Nord, parti de la majorité et très critique envers le sud du pays, traduit bien le fait que l’unité italienne n’est pas forcément arrivée à maturité.</p>
<p>Tout d’abord, la Révolution française et l’Empire napoléonien ont eu un impact direct sur la volonté de certaines élites italiennes formées à l’esprit des Lumières de retrouver une unité disparue depuis l’Antiquité et perçue comme un mythe politique à rétablir. Mais les obstacles internes et externes ont été particulièrement nombreux. Parmi les oppositions internes, il faut souligner l’absence d’une volonté de cohésion nationale entre le Nord et le Sud. La ruralité et une mentalité souvent rétrograde ont freiné durablement l’essor économique et restent une faiblesse majeure dans le Mezzogiorno, encore perceptible de nos jours, prolongeant une pauvreté endémique, mais également la prospérité des organisations mafieuses. L’immobilisme du Sud contraste avec le dynamisme industriel et économique du Piémont et de la Lombardie, depuis toujours tournés vers l’Europe et ses marchés. Milan et Turin sont plus proches à tout point de vue de Lyon, Genève, Munich ou Stuttgart que de Naples ou de Palerme. Le morcellement étatique, les différentes formes de pouvoir local –royauté, principauté, commune libre,… et les rivalités dynastiques ont également retardé le Risorgimento –ce mouvement de renaissance- qui ne prend son essor que vers les années 1840, d’autant plus que l’Eglise, à travers la Papauté, n’a pas facilité l’émergence d’une unité construite sur une approche certes conciliatrice, mais ne mettant pas le Pape en position centrale.</p>
<p>L’unité italienne a donc été un processus complexe, souvent confus, où les acteurs internes – les Italiens- et externes – les puissances européennes- n’ont cessé d’avoir des approches contradictoires et la plupart du temps, incompatibles avec les désirs et les choix des Italiens. Ceux-ci, également, ne partageaient pas du tout une vision commune et identique d’une Italie souveraine : Républicains contre Monarchistes, élites urbaines éclairées du Nord contre paysans du Sud illettrés mais ultra-conservateurs et soumis au clergé, anticléricaux contre Princes de l’Eglise fervents défenseurs de l’immobilisme pour mieux protéger leurs privilèges,…</p>
<p>La Maison de Savoie à partir des années 1840 va être l’acteur principal de l’unification avec l’appui de la France de Napoléon III contre l’Empire austro-hongrois. Habilement, le roi Victor Emmanuel II , bien conseillé par son ministre Camillo Cavour , va obtenir le soutien politique et militaire français. Louis-Napoléon Bonaparte, dans sa jeunesse, a vécu à Rome et a appartenu au mouvement secret des Carbonari. Par ailleurs, une grande partie de l’intelligentsia française est depuis toujours passionnée par l’Italie, un des berceaux du Romantisme. De Madame de Staël à Chateaubriand, sans omettre Stendhal ou encore Ingres, nombreux sont les artistes, écrivains, peintres et musiciens qui admirent l’Italie dans son lien au passé et qui se sont formés dans les augustes murs de la Villa Medicis comme Georges Bizet. Soutenir l’unification italienne est donc alors légitime aux yeux de l’opinion publique française pour de multiples raisons dont le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le Printemps de 1848 a ainsi été le moteur de ce processus irréversible où la liberté des nations est devenue une réalité politique.</p>
<p>Pour Napoléon III, l’engagement militaire en Italie doit lui apporter la gloire des victoires, comme son oncle l’Empereur, mais aussi renforcer la place de la France en Europe face à l’Empire Austro-hongrois. C’est aussi un soutien idéologique en rapport avec ses opinions personnelles favorables au romantisme, au libéralisme mais aussi à l’unité sociale des nations. Les succès militaires seront en effet nombreux : Magenta et Solférino sont des noms bien connus du moins à travers les plaques de rue ou les stations de métro. Politiquement, le bénéfice sera moindre dans la mesure où Napoléon III n’est pas allé jusqu’au bout du processus de réunification en empêchant l’annexion des Etats pontificaux, voulant ainsi ménager le Pape et donc les Catholiques français. Du côté italien, une amertume certaine –en laissant quelques traces non encore cicatrisées- en est apparue, considérant exagérément que la France n’avait pas tout fait et donc s’opposait à cette unité. Pourtant, il est indéniable que sans l’aide française, et malgré la bravoure de certains héros italiens comme Garibaldi, le Royaume de Piémont-Sardaigne n’aurait pas réussi à vaincre les armées austro-hongroises.
La fin de l’unification est liée directement à la guerre franco-prussienne, dans la mesure où le retrait des troupes françaises protégeant Rome laisse le champ libre, en 1870 , aux armées de Victor-Emmanuel II pour pénétrer dans la Ville éternelle, entraînant un enfermement volontaire du Pape Pie IX dans le Vatican qui se considère alors comme prisonnier. Cette situation perdurera jusqu’aux accords de Latran en 1929, mettant ainsi fin à la « Question romaine » entre la Papauté et le Royaume d’Italie.</p>
<p>Les années qui suivirent la réunification de 1871 ont peu bénéficié à la relation franco-italienne. L’Italie exporte sa main d’œuvre misérable fuyant le Mezzogiorno vers la France et ses régions frontalières comme la Provence ou industrielles comme la Lorraine. En 1911, les Italiens constituent le premier groupe étranger et représentent 1% de la population française . Dans les années 1880, les relations commerciales entre les deux pays sont d’ailleurs quasi nulles car Rome a dénoncé le traité de commerce qui les liait.</p>
<p>Paris ne s’intéresse plus à la Péninsule sauf lorsque Rome se tourne de trop près vers Berlin ou Vienne avec la Triple Alliance. La Troisième République, laïque, voire anticléricale, récuse de plus l’autorité du Pape. Rome est bien passée de mode, y compris pour les artistes.</p>
<p>L’engagement italien durant la première guerre mondiale est dramatique avec de très nombreux revers militaires, des pertes élevées et un résultat mitigé lors des conférences de paix, entraînant là-encore un nouveau ressentiment envers la France. Et les relations durant le fascisme seront elles-aussi tendues, oscillant entre compromis et hostilité finalement déclarée en juin 1940.</p>
<p>Au final, ce n’est qu’avec le projet européen lancé à la fin des années 50 et concrétisé avec le Traité de Rome du 25 mars 1957 que la France et l’Italie vont enfin réapprendre à se connaître et à mieux se comprendre. Les relations vont peu à peu devenir sereines et fructueuses dans tous les domaines y compris économiques, même si la compétition reste vive. Rome redevient à la mode, notamment sur le plan culturel grâce au cinéma. Don Camillo envahit les écrans français et Fellini fascine les germanopratins.</p>
<p>Plus récemment, sur le plan militaire, de nombreux programmes concernant principalement les marines ont été lancés à la fin du XX° siècle avec les frégates anti-aériennes Horizon puis les nouvelles frégates FREMM dont les premiers exemplaires entament leurs essais. Pourtant, des écueils subsistent, au point de voir les deux pays partenaires devenir concurrents pour arracher des marchés à l’exportation. L’état-major de l’EUROFOR , établi à Florence, n’a pas rencontré le succès escompté et pourrait fermer ses portes, au grand soulagement des financiers. Les résultats sont donc mitigés et ambigus traduisant de fait un manque d’ambition et de volonté politique, Rome ayant toujours privilégié l’OTAN, au détriment d’une réelle défense européenne.</p>
<p>Et de fait, il faut bien admettre qu’en ce cent-cinquantième anniversaire de l’unité italienne, l’indifférence française est assez éloquente et contraste avec la passion qui fut celle de notre pays au cours du 19° siècle pour aider les peuples italiens à devenir une nation. Cette indifférence est bien paradoxale dans la mesure où les liens économiques , politiques et culturels sont essentiels. Sans parler du tourisme, tant les pavés romains résonnent de la langue française ! Il convient donc de recréer cet intérêt en y ramenant un peu de passion.</p>
<p>Jérôme Pellistrandi</p>
<ol>
<li>1820-1878.</li>
<li>1810-1861. Sa langue maternelle est le Français.</li>
<li>Les troupes italiennes rentrent dans Rome le 20 septembre 1870 près de la Porta Pia.</li>
<li>En 2008, environ 4 millions de Français ont des origines italiennes.</li>
<li>Créé en 1995, cet état-major permanent est multinational et comprend outre les participations françaises et italiennes, des représentants de l’Espagne et du Portugal.</li>
<li>L’Italie est le second partenaire économique de la France, après l’Allemagne.</li>
</ol></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/09/09/A-propos-du-150%25C2%25B0-anniversaire-de-l%25E2%2580%2599unit%25C3%25A9-italienne-%2528J-Pellistrandi%2529#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1150Italie : négligence françaiseurn:md5:3e2988819b941fc75b3c05773d3683d52011-09-07T21:56:00+00:002011-09-07T21:56:00+00:00Olivier KempfItalie<div class="post-excerpt"><p>Travaillant sur un certain nombre de relations bilatérales, je m'aperçois qu'il y a finalement peu de choses sur l'Italie. Et qu'au fond, il s'agit du grand oublié de la géopolitique française. On ne peut pourtant réduire "France-Italie" à un simple match de foot ?</p>
<p><img alt="" src="http://files.fluctuat.net/images/b/u/but-de-materazzi-fep-1.jpg" /> <a href="http://foot.fluctuat.net/blog/6463-france-italie-le-match-en-images.html">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ Des liens naturels, ancestraux, intimes entre France et Italie, les sœurs latines :</p>
<ul>
<li>deux pays latins catholiques, avec donc la double filiation romaine, à la fois impériale et papale</li>
<li>une longue parenté historique (Charlemagne couronné à Rome, guerres d'Italie, Napoléon, unification italienne, ....)</li>
<li>une longue tradition migratoire</li>
<li>une proximité linguistique évidente : la vitesse à laquelle j'ai appris l'italien m'a fait perdre beaucoup de l'admiration que j'avais pour le don des Allemands à parler anglais.</li>
<li>le facteur méditerranéen : de l' EUROFOR de Florence au format 5+5 ou à l'UPM, évidemment, les deux pays ont énormément de points en commun.</li>
</ul>
<p>2/ Une ambition italienne : être considéré comme "un grand"</p>
<ul>
<li>parce que la taille de la population</li>
<li>la puissance économique</li>
<li>l'héritage de l'histoire cf. les ambitions impériales de Mussolini qui voulait avoir ses colonies comme les autres....)</li>
</ul>
<p>3/ Un choix occidental américain et européen constant et affirmé :</p>
<ul>
<li>Avec les US, en raison de la diaspora italienne et de la libération de 43-45. : dès le début, choix de l'Alliance atlantique (payée en retour : longtemps, énormément de bases OTAN et américaines en Italie)</li>
<li>En Europe, en adhérant à toutes les institutions : Traité de Bruxelles UO, plan Marshall/OSCE/OCDE, CEE, UE, Conseil de l'Europe.....</li>
</ul>
<p>4/ Mais une négligence politique française constante, peut-être parce qu'on néglige toujours la famille par rapport à l'ami de la famille qui nous impressionne par sa richesse (l'Allemagne) ou ses manières (l'Angleterre).</p>
<ul>
<li>commencée sous De Gaulle et poursuivie par Giscard même si Mitterrand essaye de trouver un nouveau modus vivendi (sa première visite d'Etat est à Rome en 1982 : sur cette période, voir <a href="http://www.mitterrand.org/spip.php?article182">ici</a>)</li>
<li>alors pourtant que les relations économiques et culturelles fonctionnent très bien. Trop bien peut-être, les Italiens s'agaçant récemment du capitalisme français trop envahissant (banques, luxe, électricité...)</li>
</ul>
<p>5/ On perçoit donc des agacements réguliers de la part de Italiens, qui déplorent toujours le manque d'égard des Français :</p>
<ul>
<li>Ils ne sont pas d'entrée de jeu dans le G4 convoqué par VGE, au milieu des années 1970</li>
<li>L'asile français accordé aux participants actifs des "années de plomb"</li>
<li>plus récemment, la controverse sur l'accueil des immigrés en provenance de Tunisie et au-delà, la question de la "solidarité Schengen"</li>
<li>quelques divergences sur le dossier libyen, à ses débuts.</li>
<li>des divergences sur la politique énergétique, l'Italie soutenant de près les vues russes et notamment le gazoduc Southstream</li>
</ul>
<p>6/ Pendant ce temps-là, les Français ne pensent pas à s'appuyer sur ce "quatrième grand d'Europe", et restent fascinés par les Etats-Unis, l'Allemagne et l'Angleterre.</p>
<p>7/ Un dernier point : la relation entre la France et le Vatican s'insère/s'ajoute à cette relation générale :</p>
<ul>
<li>certes, et depuis longtemps le Vatican n'est pas l'Italie et les deux ambassades sont distinctes.</li>
<li>Le réseau de l’Église est trop influent et "catholique", c'est-à-dire au sens premier universel, pour que la France puisse le négliger.</li>
<li>Toutefois, l'importance des prélats italiens dans la Curie, et l'influence de l’Église dans la vie italienne sont telles que cette relation, couverte par le principe général de laïcité, a quelques recoupements avec la relation franco-italienne.</li>
</ul>
<p>Ainsi, au bilan, une relation "bonne", excellente même : les Alpes n'existent plus. Mais cette proximité peut laisser la place à de la négligence, qui n'est pas forcément la meilleure politique.</p>
<p><ins>NB</ins> : Je suis à la recherche de littérature académique sur le sujet, et signe encore de cette négligence, je ne trouve pas grand chose (même sur <a href="http://temi.repubblica.it/limes/">limes</a>, pourtant excellente revue italienne de géopolitique) : pouvez-vous m'aider ? En revanche, tapez "France Italie" sur google images, vous n'aurez que du foot (et un soupçon de rugby) : significatif...</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/09/07/Italie-%253A-n%25C3%25A9gligence-fran%25C3%25A7aise#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1140Italie : les premières 150urn:md5:b1b1389d6cad6f1df274f0d3f8b873992011-03-21T22:03:00+00:002011-03-21T22:03:00+00:00Olivier KempfItalie<div class="post-excerpt"><p>Nous fêtons ces jours-ci le 150ème anniversaire de l'unification italienne. On se reportera à l'intéressant entretien d'Umberto Eco, paru dans le Monde Magazine de ce week-end.</p>
<p><img alt="carte_italie.gif" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/.carte_italie_m.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="carte_italie.gif, mar. 2011" /> (<a href="http://www.clg-debeauvoir.ac-aix-marseille.fr/spip/spip.php?article166">source</a>)</p>
<p>Comme j'aime beaucoup l'Italie, à divers titres, il me semble important de marquer cet anniversaire.</p></div> <div class="post-content"><p><strong>1/ L'Italie est-elle fragile au point d'être menacée ?</strong> c'est la question sous-jacente qui agite tous les esprits, quand on voit la déliquescence de la vie politique, les foucades de la ligue du nord, ou la persistance de la corruption. En clair, n'est-ele qu'un moment ou a-t-elle encore un destin ?</p>
<p>2/ L'analyste opposera volontiers le sud au nord, croyant voir là un clivage géopolitique majeur. C'est je crois faire trop d'honneur à la rhétorique léguiste. Tout d'abord, on remarquera que les Lombards sont arrivés "après" les autres (voir ce <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/02/09/Sentiment-national-italien">billet</a> et surtout les deux liens qu'il entraîne). Surtout, que <ins>ce duo est trop simpliste</ins>. Pour ne m'en tenir qu'à la péninsule, je vois <strong>une Italie du Nord</strong> (depuis toujours divisée alors qu'elle se présente -faussement- comme unie), <strong>une du Sud</strong> (très tôt unifiée dans le royaume des deux Siciles) <strong>et une du centre</strong>, lointaine héritière des Etats pontificaux. D'ailleurs, vous qui connaissez l'Italie : quand commence le sud ? sans hésiter, vous répondez : Rome, vraie capitale du sud (Naples étant une capitale à part entière, une capitale sans État et sans pays, mais une capitale à maints égards plus capitale que Rome).</p>
<p>2/ Encore ne parle-ton que de la péninsule. Car il y a la <strong>Sicile</strong>, certes. Mais surtout, la <strong>Sardaigne</strong> : n'oubliez pas qu'elle appartenait au Piémont, et qu'elle était donc "nordiste". Enfin, on apprend que la première royauté a violemment réprimé les mouvements siciliens qui s'opposaient à l'unification, avec, dit Eco, 200.00 morts : la Sicile serait ainsi une Vendée-Vengé du sud, brimée par le nord..... Il est significatif qu'Eco explique que les Italiens, à la différence des Français ou des Anglais, n'ont pas "tué le père", en décapitant leur roi. Ils ne seraient pas nés au monde adulte, en quelque sorte.</p>
<p>3/ Beaucoup de choses unifient l'Italie. L'histoire, avec un fabrique scolaire et la 1ère guerre mondiale, cette guerre qui fut le creuset national de l'Italie. Et <strong>surtout</strong>, explique U. Eco, <strong>la télévision</strong> : la langue italienne, fondement du Risorgimento , n'a vraiment unifié l'Italie que depuis vingt ou trente ans : aujourd'hui, tout le monde parle italien.</p>
<p>4/ <strong>Une nation, donc. Mais pas d'Etat.</strong> Là gît au fond la fragilité essentielle de l'Italie, mais aussi, probablement, sa capacité à durer. Elle existe et puis basta, pensent beaucoup d'Italiens. Mais le temps passe, et avec lui la bonne habitude de vivre ensemble.</p>
<p>Les mariages de raison ne sont pas ceux qui durent le moins longtemps.....</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/03/20/Italie-%253A-les-premi%25C3%25A8res-150#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/966Grâce à la mafia, pas de terroristes en Italieurn:md5:97b15c097770ae160317f19f6d4614312010-02-19T12:33:00+00:002010-02-19T12:33:00+00:00Olivier KempfItalie<div class="post-excerpt"><p>Laurent me communique ceci : merci à lui et à Raphael.</p>
<p>Le quotidien italien "<strong>La Repubblica</strong>" a expliqué, dans son édition du 28 janvier dernier, pourquoi Al Qaeda ne réussira jamais un attentat en Italie, ceci à travers un récit amusant mettant en avant plusieurs problèmes qui minent la société italienne, en particulier le problème de la mafia qui, par rapport au terrorisme, se transforme en arme efficace: "<ins>Le système immunitaire napolitain parfait</ins>", a résumé Raphaël qui nous a signalé cette info. Voici la traduction partielle de l'article.</p></div> <div class="post-content"><p><em>Certains documents des Services Secrets Italiens, dont le contenu a été récemment révélé, ont permis d'affirmer que Ben Laden a déjà essayé, il y a quelque temps, d'organiser un attentat en Italie. Deux terroristes, en provenance d'un pays du Moyen-Orient, sont arrivés à Naples avec la ferme intention d'exécuter le châtiment d'Allah pour les italiens infidèles. Voici comment cela s'est déroulé...</em></p>
<blockquote><p>
Dimanche 23h47</p>
<p>
Les terroristes arrivent à l'aéroport international de Naples. Ils sortent de l'aéroport après huit heures, car on a égaré leurs valises.</p>
<p>
La société de gestion de l'aéroport n'assume pas la responsabilité de la perte et un employé conseille alors aux terroristes de repasser le lendemain : "Qui sait, avec un peu de chance..."</p>
<p>
Ils prennent alors un taxi. Le conducteur (qui travaille au noir, sans licence officielle) les regarde dans le rétroviseur et, voyant qu'ils sont étrangers, les promène dans toute la ville pendant une heure et demi.
Voyant qu'ils ne se plaignent pas, juste après que le compteur ait indiqué 200 euros, il décide de leur faire un sale coup. Arrivé au rond-point de Villarica, il s'arrête et fait monter un complice. Après les avoir volés et roués de coups, ils les abandonnent, inanimés, dans le quartier 167.</p>
<p></p>
<p>
Lundi 04h30</p>
<p>
A leur réveil, après un passage a l'hôpital, les deux terroristes réussissent à rejoindre un hôtel dans la zone de Piazza Borsa. Ils décident donc de louer un voiture chez Hertz, à Piazza Municipio. Ils se dirigent alors vers l'aéroport, mais juste avant d'arriver à Piazza Mazzini, ils restent bloqués dans une manifestation d'étudiants, d'anti-mondialistes en blouse blanche et de chômeurs napolitains, qui ne les font pas passer.</p>
<p>
Lundi 12h30</p>
<p>
Ils parviennent finalement à Piazza Garibaldi. Ils décident de changer leurs devises.... Leurs dollars sont alors changés en faux billets de 100 euros.</p>
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Lundi 15h45</p>
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Ils arrivent à l'aéroport de Capodichino avec la ferme intention de détourner un avion pour le précipiter sur les tours de l'ENEL (l'équivalent de EDFen Italie) du "Centro Direzionale". Mais les pilotes d'ALITALIA sont en grève car il réclament le quadruplement de leur salaire et de réduire leur temps de travail. Même chose pour les contrôleurs aériens, qui exigent la machine à poinçonner pour tous ("sinon, quels foutus contrôleurs sommes-nous?!" ont-ils déclaré).</p>
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Le seul avion disponible sur la piste est un avion de la MARADONA AIRLINES dont la destination est Alghero (en Sardaigne) et il a 18 heures de retard...</p>
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Les employés et les passagers campent dans la salle d'attente... et se mettent à brailler des chants populaires... et entonnent des slogans contre le gouvernement et les pilotes!</p>
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Les hommes de la Sécurité Aéroportuaire arrivent et commencent à frapper tout le monde à grands coups de gourdins, à droite et à gauche, et s'acharnent en particulier sur les deux arabes.</p>
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Lundi 19h05</p>
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Finalement, les choses se tassent.</p>
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Les deux terroristes, couverts de sang, s'approchent du comptoir de MARADONA AIRLINES pour acheter des billets pour Sassari, s'emparer de l'avion et le précipiter contre les tours de l'ENEL. Le responsable de MARADONA AIRLINES qui leur vend les billets, ne dit pas que le vol, en réalité, a déjà été supprimé.</p>
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Lundi 22h07</p>
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A ce moment-là, les terroristes discutent pour savoir s'ils doivent poursuivre ou non... Ils ne savent pas si détruire Naples est un acte de guerre ou plutôt de charité...</p>
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Lundi 23h02</p>
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Morts de faim, ils décident de manger quelque chose au restaurant de l'aéroport. Ils commandent un sandwich "omelette, moules et pépéronade".</p>
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Mardi 04h35</p>
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En proie à une salmonellose foudroyante provoquée par l'omelette, ils finissent à l'Hôpital Cardarelli, après avoir attendu toute la nuit dans le couloir des urgences. La chose n'aurait pas duré plus de deux jours, si le choléra provoqué par les moules ne s'était pas déclaré.</p>
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Dimanche 17h20</p>
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Ils sortent de l'hôpital après douze jours et se retrouvent dans les parages du Stade San Paolo. L'équipe de Naples a perdu à domicile contre le Palermo 3 à 0, grâce à deux penalties accordés à l'équipe sicilienne par l'arbitre Concettino Riina de Corleone. Une bande d'ultras napolitains, voyant les deux à la peau basanée, les prennent pour des supporters du Palermo et leur filent une rouste. Le chefs des ultras, un certain "Peppo u Ricchione" ("Peppo la Tarlouze"), abuse sexuellement d'eux.</p>
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Dimanche 19h45</p>
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Finalement les ultras s'en vont. Les deux terroristes décident de se saouler pour la première fois de leur vie (même si c'est pêché!). Dans une gargote de la zone portuaire, on leur refile du vin coupé avec du méthanol et les deux retournent à l'hôpital Cardarelli pour intoxication. On leur découvre aussi la séropositivité au virus HIV (Peppo ne pardonne pas!).</p>
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Mardi 23h42</p>
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Les deux terroristes fuient l'Italie en radeau, direction la Libye, à moitié aveugles à cause du méthanol ingéré et avec une bonne douzaine d'infections dues au virus HIV. Ils jurent devant Allah qu'ils ne tenteront jamais plus rien contre notre beau pays chéri.</p></blockquote></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2010/02/19/Gr%25C3%25A2ce-%25C3%25A0-la-mafia%252C-pas-de-terroristes-en-Italie#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/503Sentiment national italienurn:md5:715aa8e16741bf6c16b829432f9b56e72009-02-09T20:24:00+00:002009-02-09T20:24:00+00:00Olivier KempfItalie <div class="post-content"><p>Sur le sujet du sentiment national italien, on lira avec intérêt le <a href="http://www.theatrum-belli.com/archive/2009/02/04/le-sentiment-national-italien.html#more">billet</a> suivant, publié sur l'excellent "Theatrum Belli". Il est signé de Paul Guichonnet.</p>
<p>On lira aussi mes billets sur EGEA :
<a href="http://egea.over-blog.com/article-26046447.html">ici</a>
<a href="http://egea.over-blog.com/article-26274092.html">ici</a></p>
<p>Oui, oui, je n'ai pas encore terminé le livre : mais je vais le reprendre, dès que j'ai du temps, c'est-à-dire... très bientôt, sûrement. :-))))</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2009/02/09/Sentiment-national-italien#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/60