Egeablog - Représentations2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearMonuments aux mortsurn:md5:f8fa1bb2aeb62e5699c0c349c9e7a4ac2019-04-15T09:00:00+01:002019-04-15T09:00:00+01:00Olivier KempfReprésentationsarc de triompheMonumentMonument aux mortsMémoireSouvenir<p>Aujourd'hui il y a des monuments aux morts. Avant, c'étaient des arcs de triomphe...</p>
<p><img src="https://leparisdalexis.fr/wp-content/uploads/2017/02/G-porte-saint-denis-paris.jpg" alt="" /></p> <p>L'hommage a changé.</p>
<p>Je me faisais ma réflexion du changement de perspective. Rendu visible après la 1ère Guerre mondiale, mais décelable dès la guerre de 1870 avec les premiers monuments aux morts .</p>
<p>Au 19eme siècle, on marqué les batailles de Napoléon, notamment pendant la campagne de France de 1814, et surtout on bâtit l'arc de triomphe de l'étoile vers 1836, donc longtemps après sa mort. C'est le dernier arc de triomphe, alors que les Romains avaient lancé la vogue.</p>
<p>Depuis le 20eme siècle, on ne construit comme monuments commémoratifs que des monuments funéraires, peu importe l'issue de la bataille, victoire ou défaite.</p>
<p>D’ailleurs, un intéressant transfert a eu lieu lorsqu'on plaça le soldat inconnu sous la voûte de l'arc de triomphe de l'étoile.</p>
<p>Plus d'attention aux hommes, moins au succès politique. Effet de la République, d'ailleurs ? Mouvement du temps, plus porté vers l'individu ? Je ne sais....</p>
<p>NB : savez vous qu'il y a quatre arcs de triomphe à Paris :<a href="https://leparisdalexis.fr/4-arcs-de-triomphe-de-paris/"> voir ici</a> (source photo d'illustration).</p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2019/04/12/Monuments-aux-morts#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2244Le monde vu d'Asieurn:md5:f54d4318b90cf47aa8793fb136eebd782018-08-30T13:45:00+01:002018-08-30T13:45:00+01:00Olivier KempfReprésentationsAsiecartesGuimetGéopolitiqueRerpésentation<p>C'est une remarquable exposition qu'a organisé le Musée Guimet et qu'il faut se dépêcher d'aller voir, puisqu'elle se termine le 10 septembre...</p>
<p><img src="https://amis-musee-cernuschi.org/wp-content/uploads/2018/05/mva.jpg" alt="" /></p> <p>Le monde vu d'Asie traite donc de la question des représentations du monde. Le terme "Asie" reprend la façon dont nous nous représentons, nous Européens, l'Asie, c'est-à-dire en omettant allègrement l'Asie Occidentale. Cela commence donc en Afghanistan, avec peut-être quelques allusions à la cartographie arabo-musulmane, mais guère plus. L'essentiel se concentre en Chine (et Taïwan), Japon, Corée, un peu la péninsule indochinoise ou l'Inde, accessoirement l'Asie centrale.</p>
<p>Mais nous n'allons pas mettre en miroir nos "représentations réciproques" : cela permet toutefois de montrer que la notion de "représentations" ne se réduit pas à l'appareil cartographique, même si évidemment, là est l'essentiel. D'ailleurs, le sous-titre de l'exposition (du moins du catalogue) se dénomme : "une histoire cartographique".</p>
<p>Car à l'origine, le "monde" en Asie s'articule, comme dans toute pensée traditionnelle, entre la terre et le ciel, entre le microcosme et le macrocosme, dans l'interaction entre le pays des hommes et le pays des cieux. La "géographie" est donc religieuse et sacrée, elle est d'abord empreinte de symboles. Il ne s'agit donc pas de dresser des territoires, mais des indications spirituelles où des éléments physiques (tel mont, tel rivage, tel fleuve) reçoivent des significations religieuses.</p>
<p>Viennent ensuite des représentations graphiques des paysages : une première façon de décrire la géographie et la morphologie. Viennent ensuite des plans de villes et de place-fortes.</p>
<p>Mais au fond, je n'ai pas perçu réellement de cartographie, au sens où nous l'entendons, d'origine purement asiatique. Dresser l'état des lieux du monde importe peu : seul comptent les territoires du souverain, ici empereur chinois en visite de ses possessions, là de tel roi ou prince... Le "reste du monde" (cette incroyable invention américaine qui reproduit, finalement, le splendide isolement des empereurs chinois, méprisant tout ce qui n'est pas eux comme étant des barbares), n'existe pas : pourquoi le cartographier ?</p>
<p>Tout change, apparemment, avec l'arrivée des jésuites et de Matteo Ricci : de cette rencontrent naissent deux choses : la perception du monde, mais aussi le recentrage du monde. Ainsi, la remarquable carte sino-centrée datant du XVII° siècle en est-elle emblématique : la Chine demeure "au milieu du monde" (c'est comme cela qu'elle se pense, empire "du milieu") et en même temps, elle reconnait qu'elle n'est qu'une partie du monde.</p>
<p><img src="http://www.egeablog.net/public/.CArte_Monde_Asie_Ricci_m.jpg" alt="CArte_Monde_Asie_Ricci.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="CArte_Monde_Asie_Ricci.jpg, août 2018" /></p>
<p>La question des proportions est ici passionnantes : dans les premières cartes d'origine asiatique, datant de plusieurs cercles auparavant la venue de Matteo RIci, la représentation de la Chine est assez fidèle à la réalité (au moins autant fidèle que nos cartes similaires de l'époque représentant l'Europe), mais les contours (Inde, Russie, îles du Pacifique, Afrique, Europe) sont écrasés à la portion congrue, aplatis, comme les cartes anamorphiques qui sont aujourd’hui courantes.</p>
<p>Le choc du monde entraîne de nouvelles représentations cartographiques, de nouvelles influences, mais aussi un regard sur le monde avec les décalages entre la façon dont les Asiatiques s'imaginent Paris, Londres ou New-York et la réalité que nous connaissons bien mieux, évidemment : à cet égard, les dernières salles sont assez jubilatoires car nous comprenons que nos représentations de l'Asie doivent être aussi décalées que celles qu'ils avaient de nous.</p>
<p>Pour le reste, cette plongée dans un univers culturel asiatique est absolument passionnante, avec une grande richesse de formes et de références qui sont un bonheur pour les yeux.</p>
<p>Le visiteur achètera le catalogue, indispensable pour tout amateur de cartes, rédigé par Pierre Singaravélou et Fabrice Argounès, auteur d'une "<em>Théorie de la puissance</em>" dont j'ai rendu compte sur La Vigie (<a href="https://www.lettrevigie.com/blog/2018/08/21/theorie-de-la-puissance-f-argounes/">ici</a>).</p>
<p>A voir, donc, très vite.</p>
<p>Le monde vu d'Asie, musée Guimet, <a href="http://www.guimet.fr/event/le-monde-vu-dasie/">informations</a></p>
<p>O. Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2018/08/29/Le-monde-vu-d-Asie#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2205Plan-reliefs : géopolitique en trois dimensionsurn:md5:e8288eac6e626df3785f416433396aaa2012-02-05T22:38:00+00:002012-02-05T22:38:00+00:00Olivier KempfReprésentations<div class="post-excerpt"><p><a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/10/29/%22La-g%C3%A9ographie%2C-%C3%A7a-sert%2C-d%E2%80%99abord%2C-%C3%A0-faire-la-guerre%22-d-Yves-Lacoste">La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre</a>. C'est au fond un des programmes de la géopolitique. Et c'est pourquoi l'exposition en cours des plans-reliefs au Grand palais est si passionnante : car on y voit une géopolitique en trois dimensions, qui suscite bien des réflexions. Non seulement un spectacle, mais aussi l'occasion de questions.</p>
<p><img alt="" src="http://www.rmn.fr/local/cache-vignettes/L273xH410/arton2511-aafe4.jpg" /> <a href="http://www.rmn.fr/la-france-en-relief">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ En effet, on pouvait voir ces plans-reliefs au musée des Invalides : avouons le, qui y allait ? Les exposer sous la verrière du Grand Palais est <ins>une excellente idée</ins> : on a la place de tourner au tour, avec de plus des miroirs inclinés qui permettent de voir ces maquettes "de haut" : un sentiment d'espace et de perspective qui était d'ailleurs un des premiers desseins de ces plans-reliefs. L'autre dessein consistait à disposer d'outils de guerre : ne nous y trompons pas, l'effort poursuivi au long de trois siècles (de <strong>Louis XIV</strong> à <strong>Napoléon III</strong>) est d'abord un effort de "connaissance-anticipation", comme on dit aujourd'hui. C'était un outil de renseignement, de préparation de la guerre, d’entraînement.</p>
<p><img alt="" src="http://static.lexpress.fr/medias/1697/869358.jpg" /> <a href="http://static.lexpress.fr/medias/1697/869358.jpg">source</a> (Saint-Omer)</p>
<p>2/ <ins>Outil d'abord géographique</ins> : la petite pièce, au début de l'exposition, sur les relevés et épures, sur l'ingénierie de construction de ces maquettes, sur les instruments est à la fois passionnante et trop brève. Qu’on comprenne seulement qu'il fallait énormément de relevés : planimétriques, mais aussi d'élévation. Autrement dit, la 2D mais aussi la 3D, notamment pour les hauteurs des maisons : le plan de Grenoble nécessita qu'un releveur passe quatre mois dans la ville pour prendre toutes les hauteurs des immeubles ! Dès lors, la maquette est d'abord construite autour d'une planimétrie, sur laquelle on dispose les hauteurs : immeubles, fortifications, arbres, vignes, maisons, ponts...</p>
<p><img alt="" src="http://www.tout-paris.org/wp-content/uploads/2012/01/expo_france_relief_grand_palais.jpg" /> <a href="http://www.tout-paris.org/wp-content/uploads/2012/01/expo_france_relief_grand_palais.jpg">source</a> (Brest)</p>
<p>3/ <ins>Le pré carré</ins> : l'expression est régulièrement utilisée, sans que souvent l'on sache précisément de quoi il s'agit. Or, elle désigne le réseau de fortifications dressé au Grand Siècle pour défendre la frontière nord du royaume contre les Pays-Bas espagnols, jugée trop proche de Paris (200 Km). Il s'agit d’ailleurs d'une double trame, avec forteresses principales et secondaires, organisées de sorte qu'on ralentisse l'ennemi : un réseau défensif.</p>
<p><img alt="" src="http://theudericus.free.fr/Vauban/Vauban_France/Vauban_Pre_Carre.gif" /> source (<a href="http://theudericus.free.fr/Vauban/Vauban_France/Vauban_France.htm">sur cette très bonne page sur Vauban</a>)</p>
<p>4/ <ins>Une géographie militaire, donc ? Oui, mais pas seulement</ins>. Certainement une géographie. Car ce développement des plans reliefs s'inscrit dans les deux grands projets de description cartographique du pays : la <strong>carte de Cassini</strong> (au 86.400°) levée à partir de 1756 et la "<strong>carte d'état-major</strong>", au 40.000°, développée aux débuts de la III° République (projet lancé dès 1818, avec une première "édition" en 1875). Certes, les premiers plans-reliefs datent de la fin du XVII°. Remarquons toutefois, ainsi que nous le propose le parcours de l'exposition, qu'il s'agit au début surtout de dresser les maquettes des forteresses, afin de comprendre comment préparer les sièges : c'est tout l'art de la poliorcétique dont le prince est, assurément, <strong>Vauban</strong>. Une affaire militaire, qui rapidement devient aussi géopolitique : en dressant le plan des villes (Grenoble, Briançon, Strasbourg ...) le roi "prend connaissance" de son royaume. Le territoire est approprié par le pouvoir, de façon différente du premier "tour de France", celui de Charles IX de 1564 à 1566. De la guerre on passe à la ville, dans une "géographie de la ville avant la guerre" qu'apprécierait <a href="http://geographie-ville-en-guerre.blogspot.com/">B. Tratnjek.</a></p>
<p><img alt="" src="http://www.besancon.fr/gallery_images/site_1/257/263/22394/planreliefg.jpg" /> <a href="http://www.toutsimcities.com/forums.php?viewthread=699969">Source</a> (Besançon)</p>
<p>5/ On appréciera également l'<ins>apparition de l'urbanisme</ins> : avec le temps, les maquettes s'agrandissent et montrent des villes : on pense à Besançon, puis à Strasbourg, enfin à Cherbourg et Brest. Sur des plateaux qui dépassent les 100 m², on observe l'expansion des villes, mais aussi leur modernisation : non seulement les ateliers industriels, mais aussi le chemin de fer ou les gazomètres. En sus de la réflexion stratégique, voir Besançon "avant" l'extension des faubourgs du XIX° siècle est également tout à fait passionnant pou rqui connaît la ville aujourd'hui : il s'agit là de "reflets de réalité" qui constituent une intéressante butte témoin pour les géographes.</p>
<p><img alt="" src="http://www.culture.fr/fr/sections/themes/histoire_et_archives/articles/collection-du-musee/downloadFile/diaporama_image_f0/imgintbrisach.jpg" /> <a href="http://www.culture.fr/fr/sections/themes/histoire_et_archives/articles/collection-du-musee#">source</a> (Neuf-Brisach)</p>
<p>6/ Cette représentation (mot géopolitique s'il en est) de la réalité <ins>s'arrête à la fin de la révolution industrielle</ins>, à un moment où la guerre également s'industrialise, et où, peut-être, il n'est plus besoin de ces maquettes : mais on a peu d'indications sur les raisons de l'arrêt de leur construction :</p>
<ul>
<li>le nouveau réseau de fortification <strong>Serré de Rivière</strong> en est-il la cause ?</li>
<li>croit-on au contraire qu'à cause du chemin de fer, la guerre ne se fera plus en ville mais dans les campagnes ?</li>
<li>ou faut-il y voir la conséquence de la longue période de stabilité apportée par l'Europe du traité de Vienne ?</li>
<li>voit-on apparaître un autre facteur de puissance, économique, qui rend ces maquettes désuètes, à cause justement de la dynamique du "progrès" qui rend ces représentations statiques trop figées par rapport à l'évolution et, déjà, l'accélération du temps ?</li>
<li>est-ce lié à la défaite de 1870, et au questionnement géopolitique qui s'ouvre alors autour de <strong>Vidal de La Blache</strong> ? une géographie trop visiblement associée à la puissance est-elle alors tolérable ?</li>
</ul>
<p>On ne sait, et je laisse la question ouverte.</p>
<p><img alt="" src="http://img.over-blog.com/600x398/3/98/78/96/f/plan-relief-grand-palais3.png" /> <a href="http://diorama-militaire-ho.over-blog.com/article-exposition-des-plans-reliefs-dans-la-nef-du-grand-palais-de-paris-du-18-01-au-17-02-2012-97516193.html">source</a> (Briançon)</p>
<p>7/ Pour conclure, on s'interroge sur des notions proches : "Pouvoir", "Puissance". S'agit-il de synonymes ? Le pouvoir (politique ?) dépend-il de la puissance (militaire mais aussi économique) ? Cette question recouvre, en fait, l'interrogation fondamentale de la géopolitique et de ses rapports au territoire.</p>
<p><img alt="" src="http://img.over-blog.com/600x340/3/98/78/96/f/embrun.png" /> <a href="http://diorama-militaire-ho.over-blog.com/article-exposition-des-plans-reliefs-dans-la-nef-du-grand-palais-de-paris-du-18-01-au-17-02-2012-97516193.html">source</a> (Embrun)</p>
<p>Exposition "<a href="http://www.rmn.fr/la-france-en-relief">La France en relief</a>", jusqu'au 17 février, 5 € l'entrée, 2,5€ pour tarif réduit. Pas mal d'animations pour les enfants qui rendent la visite ludique et familiale.</p>
<ul>
<li>Un seul regret : le catalogue, certes peu cher (9 €), est un peu décevant, avec peu d'information et de bibliographie : Dommage !</li>
<li>le site <a href="http://lafranceenrelief.maison-histoire.fr/">internet</a> créé pour l'occasion, en lien avec la "<ins>Maison de l'histoire</ins>" qui anime la chronique</li>
<li>J'ai enfin appris que l'<a href="http://www.ign.fr/">IGN</a> a un peu changé de format depuis le 1er janvier 2012 : il est devenu "<ins>Institut national de l’information géographique et forestière</ins>" après avoir fusionné avec l'Inventaire forestier national. Il conserve le sigle ign.</li>
</ul>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2012/02/04/Plan-reliefs-%253A-g%25C3%25A9opolitique-en-trois-dimensions#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1307MENA, acronyme à la modeurn:md5:c4152ccbe426a81be92ab5418d601d1f2011-10-30T22:37:00+00:002011-10-30T22:37:00+00:00Olivier KempfReprésentations<div class="post-excerpt"><p>Et voilà : cela faisait longtemps qu'on n'avait pas eu un acronyme pour nous expliquer le monde : après BRICS, BASIC, PIGS.... (cf. mon <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/12/15/BASIC-PIGS">billet</a> d'il y a deux ans), voici MENA. Bon, MENA n'est pas très nouveau, mais ce qui est significatif, c'est qu'il revienne au devant de la place publique. Pas un hasard....</p>
<p><img alt="" src="http://www.whatinvestment.co.uk/article_images/articledir_3208/1604058/1_fullsize.jpg" /> <a href="http://www.whatinvestment.co.uk/funds/equities/emerging-markets/1604058/charlemagne-launches-middle-east-and-north-africa-fund.thtml">source</a></p></div> <div class="post-content"><p>1/ En effet, ces <ins>acronymes</ins> se veulent significatifs. On remarquera qu'un acronyme n'est pas d'une simple abréviation (succession des initiales) mais une abréviation qu'on peut prononcer, quitte même à ce qu'elle ait un sens. MENA, ça se prononce bien, ce qui a la force de l'évidence, autant que BRICS ou BASIC.</p>
<p>2/ MENA, donc, est américain, en auriez vous douté? Cela signifie : <ins>Middle East and North Africa</ins>. Oui, bon, et alors ?</p>
<p>3/ Alors, ça <ins>remplace le bon vieux "Grand Moyen Orient"</ins> de nos amis néo-conservateurs, et en français l'arc de crise qui en était, un peu, la traduction. Donc, nous dit <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/MENA">wikipedia</a>, qui est à coup sûr le dispensateur de la norme orthodoxe, ça rassemble "<em>généralement tous les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord</em>." Vous adorerez le "généralement", bien sûr. Car quand vous regardez les cartes (voir ci-dessous), vous voyez que ça varie. Du Maroc à la Syrie et à la péninsule arabique, tout le monde s'accorde là-dessus. Quant aux marges, parfois on incorpore l'Iran, parfois la Mauritanie, parfois la Turquie, parfois le Soudan....</p>
<p>4/ Oui, bon, mais encore ? Eh! bien cela signifie d'une part qu'on ne met plus l'Afghanistan, et que même l'Iran n'est plus aussi évidemment dans la zone. Surtout, cet acronyme <ins>revient en force après les révoltes arabes</ins>. En cela, il a une validité que n'avait pas le GMO.</p>
<p>5/ Enfin, on sent une sorte de <ins>partage des tâches</ins> : à l'Europe le NA, aux États-Unis le ME: chacun son job, en quelque sorte, même s'il s'agit, encore et toujours, de désigner le monde arabo-musulman : ce qui explique d'ailleurs les hésitations envers les Turcs et les Iraniens....</p>
<p>Bref, derrière la communication, de vrais ressorts géopolitiques.</p>
<ul>
<li>ex1 : <img alt="" src="http://www.pr-inside.com/images/pics/445564-middle-east-and-north-african-mena.jpg" /> <a href="http://www.pr-inside.com/middle-east-and-north-african-mena-r2492794.htm">source</a></li>
<li>ex 2 : <img alt="" src="http://dakiniland.files.wordpress.com/2011/03/map-mena-middle-east-north-africa-image.jpg?w=464&h=307" /> <a href="http://skydancingblog.com/2011/03/24/the-changing-face-of-the-mena-region-breaking-news/">source</a></li>
<li>ex 3 : <img alt="" src="http://www.columbia.edu/cu/mesaas/images/mena-geographic-regions.jpg" /> <a href="http://www.columbia.edu/cu/mesaas/events/meandnaworkshop.html">source</a></li>
</ul>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2011/10/30/MENA%252C-acronyme-%25C3%25A0-la-mode#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/1197Caste et neturn:md5:1faaa509df4b19d260f0a3eefa4eb8d02010-08-12T21:08:00+00:002010-08-12T21:08:00+00:00Olivier KempfReprésentations<div class="post-excerpt"><p>Un <a href="http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2010/08/12/la-fureur-des-castes-envahit-le-net_1398242_3224.html">article</a> très intéressant, dans Le Monde de ce soir, sur la question des castes en Inde qui sont remises en cause par Internet.</p>
<p><img alt="" src="http://www.esperrance.org/images/esperrance/Inde_2_Tamil_Nadu/090713_Les_castes_en_Inde.PNG" /></p></div> <div class="post-content"><p>En effet, les réseaux sociaux, grâce à leur relatif anonymat, et surtout à la possibilité de partage permettent aux basses castes de dire tout le mal qu'elles pensent du système, et notamment de leur condition. En ce sens, Internet est un outil de libération, d'abord individuelle, et par agrégation collective (cette précision est utile car elle marque la différence de processus avec les libérations "collectives" des siècles passés). Mais il remet en cause les systèmes sociaux prévalant jusque là, qui supposent un certain immobilisme, et donc une perpétuation.</p>
<p>Internet serait, de ce point de vue, la remise en cause de liens identitaires traditionnels.</p>
<p>Mais simultanément, Internet permet également la constitution de regroupements identitaires, rassemblant les membres de la caste, où qu'il soient dans le monde : Internet serait alors un outil de calcification identitaire, selon une logique de club.</p>
<p>La question dépasse le seul fait de la caste : c'est en fait des relations ambivalentes d'Internet (et au-delà, de la mondialisation) sur les processus identitaires : Internet constitue un double agent, qui à la fois remet en cause les processus identitaires traditionnels, mais permet également leur perpétuation.</p>
<p>Ce double phénomène est symptomatique de la planétisation en cours.</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2010/08/12/Caste-et-net#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/725BASIC PIGSurn:md5:bb533a51933aed892eb539be8659b20a2009-12-16T21:08:00+00:002009-12-16T21:08:00+00:00Olivier KempfReprésentations<div class="post-excerpt"><p>La famille des mots de la géopolitiques ne cesse d'augmenter, grâce aux acronymes qui se multiplient.</p>
<p><img alt="" src="http://sitesmedia.s3.amazonaws.com/yearofsocialchange/files/2009/10/four-pigs1-300x300.jpg" /></p>
<p>Les deux derniers sont BASIC et PIGS, apparus cet hiver (je sais, c'est le 21 décembre, mais les températures ayant plongé, vous admettrez pour la démonstration que l'hiver est là).</p></div> <div class="post-content"><p>1/ <strong>BASIC</strong> est apparu tout récemment à Copenhague (voir <a href="http://mobile.lemonde.fr/le-rechauffement-climatique/article/2009/12/10/copenhague-le-texte-reve-des-pays-emergents_1278627_1270066.html">ici</a>). Il s'agit d'un groupe réunissant le Brésil, l'Afrique du sud, le Soudan, l'Inde et la Chine, qui propose au sommet de Copenhague un projet d'accord concurrent de celui évoqué par le Danemark.</p>
<ul>
<li>"<em>Les pays du Basic (acronyme constitué de la première initiale de chacun des cinq pays à l'initiative du texte) se sont mis d'accord sur une position commune, que le gouvernement chinois a finalisée et envoyée à ses partenaires le 30 novembre par fax.</em>" : le plus significatif est l'accord de ces pays pour trouver un nom : à l'heure de la communication globale, il faut une communication globale, et parlante.</li>
<li>Parlante : car c'est "simple" (basic) et à la base (au sud).</li>
<li>Enfin, on remarque le changement par rapport au précédent BRIC : on n'y trouve pas la Russie, mais deux pays africains.</li>
</ul>
<p>2/ <strong>PIGS</strong> désignent le groupe des pays membres de l'eurolande dont les situations économiques sont au bord du gouffre : Portugal, Irlande, Grèce et Espagne (<em>Spain</em> en anglais).</p>
<ul>
<li>là encore, un regroupement de lettre se veut significatif : la simplification devient explication.</li>
<li>Les petits cochons sont également des animaux peu recommandables : sales et omnivores.... la comparaison n'est à l'évidence pas flatteuse, encore moins que le vieux "pays du club Med" qui avait prévalu au moment de la création de l'euro : à l'époque, la saillie venait d'Allemagne, et on n'y comptait que des pays du sud.</li>
<li>la nouveauté vient cette fois de l'incorporation de l'Irlande, qui n'est pas exactement un pays du club Méd....</li>
</ul>
<p>Quel sera le prochain succès de Noël ? ça pourrait être N'IMPORTE QUOI (Namibie, Inde, Maldives, Pays-Bas, Orégon, Russie, Tchad, Equateur, Québec, Uruguay, Ossétie du nord et du sud réunies, Islande) : et ça voudrait vraiment dire n'importe quoi...</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2009/12/15/BASIC-PIGS#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/422Les mots de la géopolitique du mondeurn:md5:69d089737e44eb2d308c78d425040c332009-08-06T17:51:00+00:002009-08-06T17:51:00+00:00Olivier KempfReprésentations <div class="post-content"><p>Les mots utilisés pour décrire le monde ne sont pas anodins. Ils portent la plupart du temps une représentation géopolitique.</p>
<p><img alt="photo_mondialisation.gif" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/photo_mondialisation.gif" style="display:block; margin:0 auto;" title="photo_mondialisation.gif, août 2009" /> (image venant de <a href="http://www.marrakech-ville.com/navbar/img36.gif">www.marrakech-ville.com</a>)</p>
<p>1/ Nous pensons immédiatement au mot "<strong>mondialisation</strong>". Il est d'ailleurs curieux de noter que l'anglais retient "<strong><em>globalisation</em></strong>" ou "<strong><em>globalization</em></strong>" qui renvoie à l'objet, le globe et sa dimension sphérique : le français parle du monde, plus général et conceptuel.</p>
<p>2/ Le "<strong>monde bipolaire</strong>" a eu plusieurs successeurs directs : "<strong>unipolaire</strong>", "<strong>hyperpuissance</strong>", "<strong>multipolaire</strong>", entre la fin des années 1990 et le début des années 2000.</p>
<p>3/ "<strong>emerging markets</strong>" (marchés émergents) que tout le monde emploie sans réfléchir, date de 1981, quand Antoine van Agtmael le propose chez <em>Bankers trust</em> : cela remplace avantageusement "<strong>tiers-monde</strong>", tellement vieillot et famélique quand "<strong>nouveaux pays industrialisés</strong>" sonne trop l'analyse géographique.</p>
<p>4 Mais les crises de la fin des années 1990 (Mexique 1994, Asie du sud-est en 1997, Russie en 1998) font planer une menace sur ce groupe d'émergents. Comment le recycler ? en inventant les <strong>BRIC</strong> (Brésil, Russie, Inde, Chine), même s'il y a loin entre une économie de rente pétrolière et une croissance dopée au yuan sous-évalué. Le concept de BRIC date de 2001.</p>
<p>5/ Un des derniers à la mode est le "<strong>chindia</strong>", afin de montrer que tout se joue en Asie. D'ailleurs, n'est-ce pas, chacun sait qu'il y a un "<strong>déplacement du centre de gravité vers l'Asie</strong>".... C'est "indiscutable", tant ça appartient aux mantras dont on ne discute pas. Du coup, chacun y va de son néologisme, Eurabie, Arasie, etc....</p>
<p>6/ Cela suffit-il ? non, bien sûr, puisqu'il y a eu l'éclatement de la bulle financière. La solution? un nouveau mot. Par exemple <strong>G 20</strong>, alfa et oméga de tous les discours contemporains sur la gestion du monde..... Même si un Brzezinski invente le <strong>G2</strong>, dans le <em><a href="http://www.ft.com/cms/s/0/d99369b8-e178-11dd-afa0-0000779fd2ac.html">Financial Time</a></em> de janvier 2009. Les deux ? Chine et Amérique, la "chimérique <strong>chinamérique</strong>" (Michel Foucher)...</p>
<p>Cette petite recension illustre à quel point les mots utilisés par les média ne sont pas aussi neutres qu'il y paraissent, et méritent d'être questionnés....</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2009/08/06/Les-mots-de-la-g%25C3%25A9opolitique-du-monde#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/280Emblèmes : des tas d'aigles, et un seul coq....urn:md5:702ca99735456991f0b632a842b8bd972009-07-29T12:29:00+00:002009-07-29T12:29:00+00:00Olivier KempfReprésentations <div class="post-content"><p>Les pays ont plusieurs moyens de se représenter : un roi, un drapeau, un hymne, une devise, une figure (Guillaume Tell pour les Suisses, le Sénat pour les Romains). Clarisse avait donné une <a href="http://www.alliancegeostrategique.org/2009/07/09/drapeaux-une-lecture-geostrategique/">excellente interprétation</a> comparée des drapeaux américain et européen.</p>
<p>Or, cette représentation peut aussi être un animal. Les rois de France, déjà, aimaient se symboliser par un animal (le porc-épic, la salamandre, le dauphin, l'hermine en Bretagne).</p>
<p>1/ Or, je constate qu'un nombre incroyable de pays ont choisi l'<strong>aigle</strong> comme symbole : l'aigle impériale figure (ou a figuré) aussi, sous différentes formes, dans les armes d'Autriche, de Russie, de Prusse, de Pologne, de Sicile, d'Espagne, de Sardaigne, etc.; l'Autriche, la Russie et la Prusse portaient l'aigle à deux têtes.</p>
<p>2/ Mais ce n'est pas spécifique à l'Europe. Les États-Unis ont choisi une sorte d'aigle, le pygargue à tête blanche. On trouve l'aigle dans les pays arabes (Égypte, Irak) en référence à l'aigle de Saladin, au Mexique, en Namibie, ....</p>
<p>3/ L'aigle a plusieurs références antiques : Saint-Jean l'évangéliste est nommé l'aigle de Patmos. Mais ce sont surtout, les légions romaines qui choisirent l'aigle. Ce symbole de domination militaire et impériale explique que les chevaliers teutoniques l'aient repris, ainsi que tous les empires européens : le SERG, les empires déjà évoqués, mais aussi notre Napoléon national (qui choisit simultanément, à l'intérieur, l'abeille).</p>
<p><img alt="representatin_coq_gaulois.jpg" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/.representatin_coq_gaulois_m.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="representatin_coq_gaulois.jpg, juil. 2009" /></p>
<p>4/ Devant ce ciel aussi incroyablement encombré d'aigles orgueilleux, dominateurs et rapaces, il est amusant de noter que seule la France a choisi un oiseau qui ne vole pas, mais qui chante, le <strong>coq</strong>. Amusant puisque le symbole date d'un jeu de mot romain (gallus veut dire Gaulois et coq), voire anglais au milieu du moyen-âge. Évoqué dès la Révolution, le coq a eu de succès sous la Restauration et au XIX° siècle. A la fois religieux (compagnon du Christ, il dit le plus tôt la lumière qui arrive, et donc la vérité et la justice, d'où sa présence au faîte des clochers), il est également laïque (sous la IIIème République. Il est aujourd'hui un peu délaissé, sauf dans les rencontres sportives.</p>
<p>5/ Le coq ne vole pas, et il trône sur un tas de fumier. Mais il chante fort et réveille tout le monde. Manière de marquer une différence, un discours autonome au monde, et peut-être la seule exception française. Le fait qu'il appartienne moins à l'imaginaire collectif est peut-être le signe de la disparition de cette exception....</p>
<p><ins>Références</ins></p>
<ul>
<li>Le symbolisme de l'aigle : <a href="http://www.citadelle-fr.com/l%27aigle.htm">ici</a></li>
<li>L'aigle, emblème national : <a href="http://www.diakadi.com/afriquedunord/pays/egypte/egypte.htm">Egypte</a>, <a href="http://krishnablackeagle.m6blog.fr/archive/2007/02/20/l-aigle-embleme-des-usa.html">Etats-Unis</a>, <a href="http://users.skynet.be/lotus/flag/mexico-fr.htm">Mexique</a>, <a href="http://www.diakadi.com/afriqueaustrale/Pays/namibie/namibie.htm">Namibie</a></li>
<li>Le coq, symbole français : <a href="http://c.fauvelliere.free.fr/coq.htm#coqgaulois">ici</a></li>
</ul>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2009/07/29/Embl%25C3%25A8mes-%253A-des-tas-d-aigles%252C-et-un-seul-coq....#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/270Géopolitique de Michael Jackson....urn:md5:6612d3f0d4b501ca8d50ce378431536c2009-07-01T13:58:00+00:002009-07-01T13:58:00+00:00Olivier KempfReprésentations <div class="post-content"><p>Ainsi donc, une idole est morte. Cela a-t-il à voir avec la géopolitique ? a priori, bien peu, il faut en convenir. Toutefois, au risque de tomber dans le travers de l'économie qui prétend tout expliquer, on peut essayer de commenter cet événement au prisme de la discipline.</p>
<p><img alt="h_9_ill_1211757_d40f_878132.jpg" src="http://www.egeablog.net/dotclear/public/h_9_ill_1211757_d40f_878132.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="h_9_ill_1211757_d40f_878132.jpg, juil. 2009" /> <strong>REUTERS/HO</strong> : Une peinture de Michael Jackson habillé en roi, par Norman Oak.</p>
<p>1/ On se reportera tout d'abord au cours et brillant <a href="http://mars-attaque.blogspot.com/2009/06/ahmadinejad-fan-inconditionnel-de.html">billet</a> de <strong>mars attaque</strong>, qui montre que médiatiquement, cette nouvelle permet de passer sous silence la <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?post/2009/06/24/Iran-et-fait-r%C3%A9volutionnaire">répression en cours</a> en Iran. La bulle médiatique est devenue un espace à lui seul, une "infosphère", lieu d'affrontements stratégiques désormais bien appréciés (même si on a encore du mal à les utiliser). Ce nouveau "lieu" de bataille s'ajoute aux lieux précédents (terre, mer, air, espace, cyber, nucléaire, ...) et ne saurait les remplacer, mais juste ajouter à leur complexité. Relire <a href="http://egea.over-blog.com/article-21572315.html">Colin Gray</a></p>
<p>2/ Utiliser le mot d'idole n'est évidemment pas anodin. On pourrait bien sûr remarquer que la fabrication des idoles est une industrie coutumière du XX° siècle passé, et qu'on s'aperçoit que ce XXI° siècle n'arrive plus à fabriquer des idoles (voir l'excellent <a href="http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/06/27/michael-jackson-la-derniere-des-superstars-par-thomas-sotinel_1212450_3232.html">article</a> de Thomas Sotinel). Même si je n'ai pas beaucoup d'inquiétude (est-ce le bon mot? : d'illusions, plutôt) quant à la capacité des sociétés de demain à continuer le <em>panem et circenses</em>.</p>
<p>Au-delà pourtant de cette description "économique", il faut noter également l'aspect religieux de la dévotion dont le chanteur était l'objet. <a href="http://littre.reverso.net/dictionnaire-francais/definition/idole/39196">Idole</a>. <em>Figure, statue représentant une divinité et exposée à l'adoration</em>. M. Jackson n'était-il pas une "figure", une "représentation" ? n'était-il pas "exposé" ? N'y avait-il pas "adoration", certes extrêmement dévoyée par rapport au sens primitif de l'antiquité, mais adoration contemporaine? Pour qui en douterait, on regardera le dernier Ken Loach, "<em><a href="http://www.lookingforeric.fr/">Looking for Eric</a></em>", où la "divinité" intervient magiquement dans la vie de l'adorateur afin de lui permettre de surmonter ses difficultés existentielles ?</p>
<p>3/ La religion est souvent considérée comme un facteur géopolitique. J'en ai même fait une <a href="http://www.egeablog.net/dotclear/index.php?category/Facteurs-g%C3%A9opolitiques/Religion">catégorie</a> de billets. Religion, à la fois <em></em>religio<em></em> (crainte du sacré) et <em></em>religare<em></em> (relier) : la double étymologie classique sert à comprendre ce qui est ici important : derrière le simulacre de "<em>religio</em>" (puisqu'à l'évidence, une star, M. Jackson pas plus que les autres, n'est sacrée), ce qui compte est le "<em>religare</em>", la dimension horizontale de la religion. Elle est ici totalement laïcisée, et a donc un intérêt géopolitique. Il n'est pas anodin, en effet, qu'on parle autant de M. Jackson alors qu'il n'avait plus de succès ; et que l'émotion paraît largement surjouée par la plupart des émus; qu'au fond, l'émotion tient plus à ce qu'il a été (autrefois, dans "notre jeunesse", ce qui marque donc le temps qui passe) qu'à un vrai deuil, impossible dans la mesure où il n'y avait pas d'intimité. Mais plus que ce rapport au temps, qui a été noté par plusieurs commentateurs, ce qui est intéressant est l'universalité de l'émotion : en ce sens, M. Jackson est une icône de la mondialisation culturelle. Elle est objet de partage, avant que d'être uniformisation. Elle est "point commun", "plus petit commun dénominateur" de la modernité contemporaine. Et donc, pas forcément méprisable.</p>
<p>4/ Tout ça pour un histrion, un saltimbanque, un homme du loisir et de l'oisiveté ? Oui, tout ça pour ça. Regardez les fêtes au village de Brueghel et confrères : la fête commune est lieu d'intégration, de communauté villageoise, d'identité. J'ai prononcé ci-dessus le mot "représentation", l'avez-vous remarqué ? Populaire ? ne méprisons pas le peuple. M. Jackson est un outil de représentation de l'universalité contemporaine.</p>
<p>5/ Ou plutôt, était : c'est bien pourquoi il faut revenir à l'article de Sotinel : sera-t-il possible demain de construire de telles idoles? du moins, des idoles qui durent plus qu'un été ? La mort de M. Jackson n'est-elle pas la mort symbolique d'un certain système? Il est probablement trop tôt pour y répondre, mais on peut déjà se poser la question. La mort de Jackson serait, selon cette interprétation, une réplique de la faillite de Lehman. Un symptôme.</p>
<p>6/ Vient enfin le dernier point, à mon avis le plus surprenant, celui de la transformation de M. Jackson. Certes, dès le départ, les <em>Jackson Five</em> furent fabriqués par <ins>Tamla Motown</ins>. Mais le plus intéressant fut, une fois le succès arrivé, la poursuite d'une transformation de l'individu. On lira l'étonnante <a href="http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/06/30/la-vraie-voix-du-mime-par-francis-marmande_1213415_3232.html">chronique</a> de Francis Marmande. Tout était devenu artificiel, comme le symbole des artefacts du modernisme. Les fantasmes contemporains : rajeuni, asexué, nez droit et fin, peau blanche. Peau blanche, surtout. Je ne comprends pas que les noirs américains disent qu'un des leurs s'en va : il n'était plus des leurs. B. Obama est un symbole bien plus positif que MJ. Celui-ci était devenu le phénomène de la déculturation planétaire, il devait logiquement devenir cet androgyne sans relief, qui d'ailleurs inquiétait : à la fin, cela entravait son succès. Mais le plus surprenant fut l'abandon des racines, le rejet de l'identité originelle, la volonté de "devenir", au sens propre, quelqu'un d'autre : là encore, il était le symbole du trouble identitaire qui anime la géopolitique mondiale depuis, mettons, 1989.</p>
<p>7/ Sa fin renvoit ainsi à un autre basculement, peut-être : 2009 serait ainsi l'année où Barack Obama aurait remplacé M.Jackson dans l'imaginaire noir à l'intérieur des Etats-Unis, et dans le <em>soft power</em> américain à l'extérieur.</p>
<p>8/ Tout cela est-il vraiment de la géopolitique ? non, pas vraiment, il faut bien en convenir. Mais ces quelques remarques ne déparent toutefois pas trop sur ce blog : et vous voudrez bien me les pardonner....</p>
<p>O. Kempf</p></div>http://www.egeablog.net/index.php?post/2009/07/01/G%25C3%25A9opolitique-de-Michael-Jackson....#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/240