Egeablog - Ukraine2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearLe point sur le Donbassurn:md5:65dc465c6f401ad11b5b048898d917052014-08-27T22:09:00+02:002014-08-27T22:09:00+02:00adminUkraine<p>Le lecteur régulier du Chardon aura remarqué que j'étais resté assez silencieux sur l'affaire ukrainienne, depuis deux mois. Le seul <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/07/15/Que-signifie-la-chute-de-Slaviansk">billet récent</a> date du 15 juillet et j'y évoquais mon incertitude. Bêtement, je me tais quand je n'ai rien à dire (plus fréquent en été, bizarrement, ce qui est dommage car la plupart des opérations militaires ont lieu à cette période pour des raisons qui m'échappent mais ont peut-être lien avec la météo ou la volonté d'embêter le plagiste, au choix) et je me laisse aller à dire que je n'y comprends goutte. Pas très sérieux pour un géopolitologue mais si vous étiez sérieux, je ne suis pas sûr que vous me liriez. Tout ceci pour vous dire qu'il est temps, quand même, de formuler quelques hypothèses.</p>
<p><img src="http://binaryapi.ap.org/12eb3f3075d946828f8a36c8e810ca55/460x.jpg" alt="" /> <a href="http://bigstory.ap.org/article/us-russian-directing-new-offensive-ukraine">source</a></p> <p>Une des premières questions à répondre est : <strong>Poutine a-t-il le choix des cartes ?</strong> en effet, deux théories s'affrontent : la première est celle de l'action progressive et du grignotage. Alors, je saisis la Crimée et je parie sur la déliquescence du système ukrainien pour rebâtir une large zone d'influence, dans le marigot opaque des oligarques ukrainiens dont je connais la corruption. Pendant ce temps-là, je pourris la situation dans le Donbass pour augmenter le chaos et forcer Kiev à perdre des forces dans un effort de guerre trop lourd pour lui. La seconde explication estime que Poutine ne joue que ce dont il dispose et que les seuls radicaux prêts à la suivre ne sont pas à Odessa ou Dniepropetrovsk mais dans le Donbass, qui heureusement est limitrophe et contribue à 60 % au PIB ukrainien. Agissons ici, on verra bien ce qui sortira de la partie tactique.</p>
<p>Probablement, la réponse est une conjonction des deux : la pari sur l'écroulement économique et politique mais aussi l'appui sur les zones favorables, la Galicie étant considérée comme perdue et de peu de valeur.</p>
<p>La deuxième question est différente : <strong>comment expliquer l'évolution militaire du conflit dans le Donbass ?</strong> en effet, le début de l'été a vu la progression des forces ukrainiennes qui peu à peu ont pris contrôle d'une partie de la région, jusqu'à presque encercler Donetsk et Lougansk. Depuis août cependant, on assiste à une inversion de tendance, comme si le point culminant avait été passé.</p>
<p>Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cette évolution. Elles sont compatibles, relativement. Les dire ne signifie pas qu'elles sont vraies, elles demeurent des hypothèses.</p>
<ul>
<li>Kiev a bénéficié d'une part d'un sursaut national avec une certaine mobilisation pour disputer la région aux dissidents ; or, cet effort s'épuise, d'autant que les unités ont du mal à être approvisionnées et qu'il n'y a surtout plus de relèves. Accessoirement, le nombre de pertes est élevé et atteint le moral de "l'arrière" (on parle de 15 morts par jour côté armée régulière ; la ministre "anticorruption" vient de démissionner parce que son mari est mort là-bas le 10 août; etc).</li>
<li>Kiev a bénéficié d'autre part "d'aides extérieures", parce que les SMP ça n'est pas fait que pour les chiens et qu'il n'y a pas de raisons que seul Poutine utilise les proxys. Accessoirement, on peut même imaginer des conseillers militaires très discrets mais là, mon imagination risque de me jouer des tours et vous allez m'accuser d'un mauvais roman d'espionnage, je brise donc là. Ceci explique les succès initiaux mais la nécessité du camouflage impose de ne pas aller trop loin (là où Poutine paraît moins gêné). Dès lors que les troupes de manœuvre s'épuisent (hyp précédente), cette aide ne suffit plus surtout si l'adversaire augmente à ce moment là son effort.</li>
<li>La stratégie Kiévienne ne réussit pas : elle vise à séparer la population des séparatistes en organisant à la fois un siège (et donc un blocus du ravitaillement et le pourrissement des conditions de vie) et des bombardements indiscriminés. Pas de chance, cette stratégie est toujours vouée à l'échec car dans les souffrances, une population soutient toujours ses "défenseurs" et considère toujours que ce sont les autres les fauteurs ds troubles et des maux. Regardez Gaza. Accessoirement, cela explique la nécessité des convois humanitaires russes : non, il ne s'agit pas de transporter des T 72, messieurs les journalistes, mais bien de l'eau, des aliments bébé et des médicaments (et accessoirement, rapatrier les corps des soldats russes tombés dans le coin...).</li>
<li>Initialement, Poutine a vaguement répété l'erreur "Yanoukovitch" : un Ukrainien ne doit pas avoir pour seule qualité d'être fidèle, il doit aussi faire le job : homme politique ou chef de guerre. Or, ce sont visiblement des amateurs qui avaient initialement pris les commandes, même s'ils étaient conseillés très directement par des gens très polis. C'est bien (maîtrise de l'artillerie, grande capacité à réduire la maîtrise aérienne ukrainienne) mais pas assez. Ceci explique le remaniement d'il y a quinze jours. Certains l'avaient interprété comme le signe que ça partait en ... ouille. Vrai d'une certain façon, mais c'était surtout le signe d'une reprise en main. Du coup, cinq commandants de brigade sur six ont été changés. On voit le résultat au bout de quinze jours avec l'armée ukrainienne sur l recul (ce qui explique peut-être que Poutine se cache moins, cf. photo de l'article, allez voir le billet source)).</li>
<li>Dès lors, les Russes auraient mené un combat d'usure, reprenant les choses en main lorsque ça allait trop loin, pile au moment du "point culminant" (je vous en ai déjà parlé, lisez Clausewitz, quoi). Ceci explique la "contre-offensive" lancée depuis deux jours et qui jette une colonne de blindés vers Mariopol, pour ouvrir un troisième front et disloquer le dispositif ukrainien. On verra si ça marchera mais le changement de rythme intervient à un moment crucial.</li>
</ul>
<p>Cela vous rappelle quelque chose ? Une usure longue sur un front avant de relancer la marche en avant ? Stalingrad, vous disiez ??? Y aurait-il des fondamentaux de la stratégie russe ? Si c'est le cas, c'est d'autant plus remarquable que ça a nécessité :</p>
<ul>
<li>une volonté de fer pour "encaisser" et s'en tenir au plan initial, sans surréaction et avec la capacité d'accepter des pertes jugées minimes tant que l'essentiel (Donetsk et la liaison avec Lougansk ainsi que le contrôle de la frontière) était assuré.</li>
<li>des calculs stratégiques de très grand style pour combiner une opération très agile comme la Crimée et une manœuvre opérative comme celle qui se déroule sous nos yeux.</li>
</ul>
<p>Ceci doit se combiner à une attitude sur les autres fronts (politique, diplomatique, économique et informationnel) que nous regarderons un jour prochain.</p>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/08/27/Le-point-sur-le-Donbass#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2425Que signifie la chute de Slaviansk ?urn:md5:8c158fc73be37525c7c0875689a140512014-07-15T20:03:00+02:002014-07-15T22:38:53+02:00adminUkraineRussieUkraine<p>J'avoue avoir du mal à interpréter le cours des événements des quinze derniers jours en Ukraine. Qu'il y ait progression des forces du régime est incontestable. Ce que je discerne mal, par manque d'informations et d'indices, ce sont les facteurs et surtout les intentions sous-jacentes qui ont permis une telle évolution. Mieux vaut le constater. Parfois, l'observateur reste interdit. Il faut alors le signaler.</p>
<p><img src="http://scd.rfi.fr/sites/filesrfi/imagecache/rfi_16x9_1024_578/sites/images.rfi.fr/files/aef_image/2014-06-03T111506Z_723844005_GM1EA631G0R01_RTRMADP_3_UKRAINE-CRISIS_4_0.JPG" alt="" /> <a href="http://www.rfi.fr/europe/20140604-ukraine-offensive-poursuit-sloviansk/">source</a></p>
<p>Toutefois, deux constats. (cliquez sur le titre pour lire la suite)</p> <p>Dans une perspective annuelle, la Russie semble quand même sur le recul. Après avoir fait signer à l'Ukraine la participation à l’Union eurasiatique en novembre, elle subit un revers de taille avec la révolte de Maïdan en février. Après avoir repris l'initiative en Crimée en mars puis dans les zones russophones, elle constate que ça ne suit pas au sud (Odessa) en avril et elle est en train finalement de perdre pied au Donbass (juillet).</p>
<p>Dans une perspective de stratégie militaire, elle a incontestablement innové avec sa stratégie indirecte. Indirecte non dans le variantement des axes d'effort mais dans la multiplication et la combinaison d'actions tactiques, ce qu'il faut bien appeler une manœuvre opérative. Infiltration d'hommes masqués, mobilisation de la population locale (on n'insiste jamais assez sur la présence de relais de population pour faciliter cette manœuvre), pression conventionnelle aux frontières (voilà, pour le coup, une gesticulation de force de grande ampleur qui a donné des effets tactiques réels), manœuvre d'information, guerre secrète et ROEM...</p>
<p>Il reste que cela fonctionne "un temps". Cette stratégie qui agit sur les perceptions n'est efficace que temporairement. Elle s'émousse dans la durée. Vient un moment où il faut entrer dans l'escalade de la violence. Les insurgés s'y sont essayé mais ils n'ont pas été soutenus avec assez de volonté par les Russes. Pourquoi, je ne sais, je le répète. Je constate que du coup, les forces lancées par Kiev, probablement très soutenues en sous main par les Occidentaux (et là, personne ne s'offusque d'une quelconque ingérence ou de manœuvre par proxys), ont peu à peu repris le contrôle du terrain, avec une offensive violente, ne nous voilons pas la face. Il reste à voir ce qui adviendra à Donetsk. Mais on voit mal comment les insurgés peuvent reprendre l'avantage si le conflit se poursuit sur les errements actuels.</p>
<p>L'option du chaos sécuritaire, qu'on a cru que Poutine avait joué, ne va bientôt plus être validée ce qui réduit le champ des possibles pour Poutine et consacre un revers au moins tactique. Il voulait arrimer l'Ukraine, il n'aura récupéré que la Crimée.</p>
<p>Sauf retournement prochain (et les survols de l'espace aérien russe par des aéronefs ukrainiens ou les bombardements "par mégarde" de villages russes frontaliers constituent, à n'en pas douter, des provocations pouvant déclencher la riposte, sous la forme d'une "opération humanitaire"), V. Poutine est en train d'abandonner la carte sécuritaire. Ne lui reste que la carte économique. Accessoirement notons que les 3 milliards d'aide du FMI sont consacrés à 25 % au budget de la défense ... Mains on n'est pas à une contradiction près, par chez nous.</p>
<p>A. Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/07/15/Que-signifie-la-chute-de-Slaviansk#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2406Ukraine, ça repart (phase III)urn:md5:827aca546459107dfa7471f1777fa2382014-06-23T22:14:00+02:002014-06-23T22:14:00+02:00adminUkraineGazRussieUkraine<p>J'avais signalé dans un précédent billet la relative accalmie du "front" ukrainien. Cela dura ce que vivent les roses, l'espace d'une élection, l'espace d'un D-day, l'espace d'une apparente normalisation. Sous l'eau, bien sûr, les affaires se poursuivaient. Voici quelques éléments d'appréciation avec moult hypothèses, dues au manque d'accès aux sources. Mais la crise est repartie : acte III !</p>
<p><img src="http://static.lexpress.fr/medias_9618/w_2048,h_890,c_crop,x_0,y_92/w_605,h_270,c_fill,g_north/gazprom-russie_4924515.jpg" alt="" /> <a href="http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/ukraine-russie-quatre-questions-pour-comprendre-la-crise-du-gaz_1552012.html">source</a></p> <p>Côté russe : J'ai le sentiment que V. Poutine a temporisé quelque temps pour plusieurs raisons. Tout d'abord, il doit savoir que les plans stratégiques ont des phases et qu'il est aussi bien de séparer les phases. La première phase fut la Crimée : réussie. La deuxième fut le déclenchement d'un soulèvement similaire dans les provinces russophones. Or, cette deuxième phase n'eut pas le succès espéré. Certes, la population marqua sa défiance envers Kiev mais elle ne se précipita pas sur un chemin criméen. Les incidents dans l'est ou à Odessa suscitèrent de l'indignation mais sans que l'on atteigne la cristallisation attendue. Enfin, les autonomistes de tout poil manquaient clairement d'esprit d’organisation et de leadership.</p>
<p>Dans le même temps, les décisions de Kiev démontraient leur inefficacité. L'armée envoyée dans l'est ne réussissait qu'à se faire renvoyer et il fallu des troupes privées pour obtenir quelques succès.</p>
<p>A domicile, V. Poutine fait peut-être face à deux écoles. J'ai suffisamment expliqué la difficulté du pouvoir américain pour ne pas émettre l'hypothèse de difficultés comparables (dans leur esprit sinon leur ampleur) à Moscou. Donc, entre les politiques qui ne voient que les rapports de force, le sursaut de popularité et la géopolitique eurasienne d'un côté, et de l'autre les économistes et autres oligarques qui appellent à la prudence et à ne pas rompre avec l'Occident avec qui on fait des affaires, il est probable que V. Poutine a dû sinon hésiter, du moins donner le change et du temps au temps. Manière pour lui d'apaiser les inquiétudes en Europe, de mobiliser plus sérieusement en Ukraine et donc de préparer la troisième phase. Nous y sommes.</p>
<p>Elle a commencé il y a quelques jours, après l'élection de Porochenko. Face à cela, V. Poutine a lancé une action en cinq axes :</p>
<ul>
<li>l'axe politique continuant l’apaisement apparent et insistant pour la négociation, l'offre de paix, etc.</li>
<li>l'axe militaire avec la remobilisation de 65 000 hommes aux frontières, des exercices en mer Baltique et à Kaliningrad, quelques gesticulations nucléaires.</li>
<li>l'axe intérieur après une reprise en main des autonomistes désormais encadrés, politiquement et militairement, la fourniture d’armement lourd, le ciblage d'objectifs réguliers, ici un avion de transport bourrés de parachutistes (en opération intérieure ? en maintien de l'ordre ? cela n'a étonné personne, à l'Ouest), là un hélicoptère, hier trois chars lourds...</li>
<li>l'axe économique avec la montée des enchères sur le prix du gaz (<a href="http://oilprice.com/Latest-Energy-News/World-News/Russia-Halts-Talks-With-Ukraine-Over-Gas-Debt.html">cf. cette brève qui nous annonce que la Russie coupe le gaz</a>).</li>
<li>l'axe informationnel en saisissant le moment de l’offensive de l'EIIL en Irak qui attire immédiatement l'attention occidentale (qui a quand même plus peur des<em> sauvages jihadistes mon bon monsieur, que des Russes sauvages, certes, mais quand même un peu européens, tiens connaissez-vous Tchaïkovski?</em>). Accessoirement, la révélation "par hasard" d'enregistrements "sauvages" (décidément le mot en vogue) du ministre des affaires étrangères polonais met un gigantesque scandale politique dans le pays le plus opposé à la Russie doit relever d'un pur hasard, une bonne surprise qui tombe bien. Par hasard, je vous dis.</li>
</ul>
<p>En face, les choses sont plus compliquées. Certes, Porochenko bénéficie d'un soutien occidental affirmé et d'une légitimité donnée par son élection au premier tour. Certes, l'UE et les Américains ont fait pression sur la Bulgarie pour stopper les travaux de Southstream. Il reste que le président ukrainien fait face à de sérieuses difficultés :</p>
<ul>
<li>la situation économique est désastreuse, ce qui est un sous-jacent qu'on ne saurait oublier car il empire au fur et à mesure de la crise. It's economy, stupid !</li>
<li>un appareil d’État qui ne répond pas aux ordres, avec une armée inconsistante, malgré tous les renforts de SMP occidentales, désormais avérées. Il n'y a pas que les Russes à utiliser des proxys et si beaucoup dénoncent le soutien en armement et munitions des autonomistes du Donbass, on lit peu d'enquêtes sur les soutiens de toute sorte à l'armée ukrainienne</li>
<li>la structure oligarchique puisque les oligarques sont tous en concurrence. DE ce point de vue, même l’observateur occidental réussit à percevoir l'opposition entre Porochenko et Kolomoisky. Je continue de m'interroger sur les objectifs et soutiens de ce dernier qui joue la politique du pire en relançant systématiquement les hostilités dès qu'il y a un soupçon d'apaisement lancé par Porochenko.</li>
</ul>
<p>Il est bien sûr difficile de prédire la conclusion de la phase en cours. Ce billet propose à tout le moins une grille d'analyse permettant d'interpréter les événements. Il faudra certainement l'ajuster.</p>
<p>Arthur Le Chardon.</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/06/23/Ukraine%2C-%C3%A7a-repart#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2400L’Ukraine : et maintenant ?urn:md5:ee3ddc1383c7aea23800a6ada40366292014-06-11T21:50:00+02:002014-06-11T21:50:00+02:00adminUkraine<p>La fumée est légèrement retombée et l’attention s’est portée ailleurs. Comme si la question de l’Ukraine, désormais, appartenait au passé, une crise dont il fallait gérer les suites sans envisager que le volcan puisse se réactiver. Il y a bien sûr du vrai dans cette approche qui n’est pas due, simplement, à la courte vue occidentale manipulée par le tempo médiatique et le besoin de toujours trouver « du neuf, coco ».</p>
<p><img src="http://www.ouest-france.fr/sites/default/files/styles/image-640x360/public/2014/06/07/porochenko-promet-de-maintenir-lunite-du-pays.jpg" alt="" /> <a href="http://www.ouest-france.fr/ukraine-porochenko-promet-de-maintenir-lunite-du-pays-2603828">source</a></p> <p>On lira pour cela un des <a href="http://www.iss.europa.eu/fr/publications/detail-page/article/ukraine-four-crises-one-country/">meilleurs papiers</a> sur le sujet (4 pages seulement), qui réussit à s’éloigner aussi bien de la doxa bien-pensante occidentale que du pro-russisme candide et souvent manipulé qui lui est opposé, souvent d’ailleurs à cause de la guimauverie irréaliste du discours mainstream. Si tous les discours occidentaux étaient aussi justes que ce papier, ils convaincraient à l’évidence beaucoup plus. L’intelligence convainc dans la durée quand la propagande n’assomme que dans le court terme, même si elle est inlassablement répétée. Suivons donc Nicu Popescu de l’EUISS.</p>
<p>Tout d’abord, le pays a démontré qu’il était bien plus uni que beaucoup (dont votre serviteur) ne le pensait. D’accord, on ne cessait de distinguer deux Ukraine voire, pour les pointillistes (dont votre serviteur), trois. Or, constatons que les sondages comme les élections et les événements ont démontré le souhait majoritaire des Ukrainiens de demeurer un seul pays. Autrement dit encore, il n’y a pas eu de soutien populaire ni à une séparation en deux, ni à une intervention russe. Que les Russes n’aient pas trop poussé en ce sens est une chose que l’auteur ne remarque pas et qui suscite, d’ailleurs, énormément de questions (que nous n’étudierons pas ici). Il reste que les faits sont là et si l’Ukraine a des disparités régionales, comme tout pays au monde, elle demeure une « nation », malgré tout et malgré la crise qu’elle vient de traverser. La prudence incitera à ajouter « encore » à ce « elle demeure » : il ne faut pas injurier l’avenir.</p>
<p>S’agissant ensuite des séparatistes, l’auteur constate que bien sûr, Kiev n’a pas réussi son objectif maximal qui était de les réduire au silence. Pourtant, il a atteint l’objectif minimal, celui de les cantonner dans leur zone d’origine, les deux régions de Donetsk et Louhansk et d’empêcher une contagion à l’ensemble du pays. De ce point de vue, Dniepropetrovsk a constitué le centre de gravité opératif de la crise, empêchant cette contagion vers ‘l’ouest (Odessa) et le centre (Kiev). Le rôle d’Igor Kolomoisky, oligarque du cru, a été central. Sans lui, les événements auraient suivi un autre cours. Beaucoup s’attardent sur Porochenko mais le vrai médecin de la crise a été Kolomoisky.</p>
<p>Les deux points suivants sont un peu moins convaincants : s’agissant des réformes économiques, l’auteur montre la difficulté du gouvernement face au désastre auquel il fait face. Admettons sa conclusion partielle : il s’agit d’un départ décent. En fait, le gouvernement doit à la fois maintenir une unité nationale et réformer une économie oligarchique qui a été la cause de la révolution. Il ne précise pas, d’ailleurs, que ce sont les oligarques qui sont aujourd’hui à la manœuvre et qu’ils ne vont pas se réformer d’eux-mêmes.</p>
<p>Car voici le quatrième point : Kiev a co-opté les oligarques, notamment parce que la plupart d’entre eux ont leurs bases économiques en Ukraine orientale (on ne rappellera jamais assez que l’Ukraine riche est à l’est et la pauvre, très pauvre, à l’ouest). Dès lors, si cette cooptation a donné des succès de court terme, elle entrave toute réforme de grande ampleur, l’espoir ne résidant que dans des réformes parcellaires, tranche de salami par tranche de salami. On est loin de cette conversion massive à la doxa libérale en cours à Bruxelles.</p>
<p>Dès lors, quel avenir ? Une finlandisation ou une bosnisation (des entités fédérées avec beaucoup de pouvoir, au risque d’empêcher un fonctionnement régulier du pouvoir central) n’apparaissent pas, à l’auteur, comme viables. Une autre version consisterait à considérer que les deux régions de l’est deviennent des sortes de Transnistrie, pour adopter un chemin de style moldave ou géorgien qui conduit à l’accord d’association avec l’UE. Toutefois, cette solution (peut-être jouée par Moscou afin d’avoir de quoi négocier avec Kiev) omet un point décisif, celui de la concentration de la richesse productive justement dans ces régions. Il ne s’agit pas simplement de deux régions sur 28, il s’agit un peu de se séparer de la richesse productive de l’Ile de France et Rhône Alpes réunies, pour donner une image. Cette option est à l'évidence difficilement réalisable.</p>
<p>Autrement dit encore, si l’Ukraine a réussi à surmonter la crise de court terme grâce notamment à la retenue russe, son chemin n’est pas pavé de roses et elle risque de revenir au devant de l’actualité. C’est bon, cela ravira les rédacteurs en chef : « T’as du neuf, coco ? ».</p>
<p>A Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/06/07/L%E2%80%99Ukraine-%3A-et-maintenant#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2392Angélisme(s) et cheyssonismeurn:md5:999ec01260040bd6df0b79665027ba5e2014-03-04T23:13:00+01:002014-03-05T00:06:59+01:00adminUkraineAllemagneUkraine<p>Ainsi, après le coup de force russe en Crimée, on a entendu des déclarations ulcérées. Que BHL et les Femen disent du mal de la chose, cela incite somme toute le Français moyen à se dire que peut-être Poutine a des raisons... Que John Kerry explique qu'envahir un pays fasse penser au XIX° siècle et pas au XXI° nous enseigne que 2003 (l'Irak) date du XIX° siècle. Mais laissons de côté ces fariboles angéliques et allons au choses sérieuses : celles qui parlent de rapport de force et de vraie diplomatie, pas celles des déclarations émotives et moralisantes qui constituent plutôt des obstacles que des aides à la solution de la crise. Pour cela, quelques considérations méritent réflexion (cliquer sur le titre pour lire la suite).</p>
<p><img src="http://s1.lemde.fr/image/2014/03/03/534x0/4376837_5_3588_un-militant-prorusse-le-3-mars-devant-les_9bcbf90e16a293b9297f51fadd512fc0.jpg" alt="" /> <a href="http://abonnes.lemonde.fr/europe/article/2014/03/03/le-coup-de-force-de-poutine-en-crimee-s-inscrit-dans-une-volonte-de-marchandage_4376791_3214.html">source</a></p> <p>Comme <a href="http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2014/03/pour-lunion-il-faut-faire-comprendre-aux-russes-quils-ont-perdu-kiev-et-aux-ukrainiens-quils-ont-per.html">le signale Jean Quatremer</a>, les discours radicaux de certains ne sont pas la meilleure chose à faire : ainsi, entendre la Pologne ou les pays Baltes dire qu'ils se sentent menacés est un peu surjoué. Utiliser l'Otan n'est de même pas la meilleure façon de faire baisser la tension, surtout quand on n'a pas l'intention d'engager une intervention militaire, puisque les États-Unis ne le veulent pas (voir ce qui était dit sur ce blog il y a peu) et que bien d'autres Européens ne le souhaitent pas non plus. Bref, surjouer le retour à la guerre froide est déplacé et inutile.</p>
<p>Car Poutine a bien fait attention à ne pas aller trop loin : ses unités ne sont pas reconnaissables à dessein, comme <a href="http://www.guerres-influences.com/soldats-russes-ukraine-crimee-cagoules/">l'explique bien R. Mielcarek</a>. De même, s'il a fait un coup de forces, il n'a pas tiré un coup de feu <a href="http://www.affaires-strategiques.info/spip.php?article9355">ce que rappelle P. Boniface</a>. D'une certaine façon, l'affaire paraît bien moins violente que ce qui s'est passé à Kiev et rien d'irrémédiable n'a été commis. Comme si V. Poutine se gardait bien d'aller trop loin, comme s'il pensait que l'ensemble de l'Ukraine était récupérable. Ou encore : une partition serait finalement à son détriment car il n'aurait que la Crimée. Il veut plus et parie probablement sur les limites du pouvoir ukrainien qui n'a que très peu de moyens et des soutiens faibles et désargentés. Autrement dit encore, Moscou peut espérer rejouer la séquence 2004 2010 où, après avoir essuyé la révolution orange, les "pro-Russes" avaient ensuite regagné le pouvoir démocratiquement Bon, ç'avait été pour mettre en place Yanoukovitch qui est tout sauf un grand homme politique... M. Poutine choisira quelqu'un de plus habile la prochaine fois.</p>
<p>Regardons alentour : la Chine reste plutôt derrière la Russie, et la Turquie explique qu'elle n'a pas de problèmes avec la Russie (voir <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/03/03/: http://fr.ria.ru/world/20140303/200632134.html">ici</a>). Il faut dire qu'elle cogère la mer Noire avec Moscou et se satisfait très bien de ce duopole, et qu'elle nourrit quelques ressentiments envers l'UE...</p>
<p>Bref, M. Poutine est à la fois un stratège (but général : contrôler l'étranger proche avec L'Ukraine comme point pivot) et un très bon tacticien puisqu'il a du "tact", selon la définition d'Alain : il sait jusqu'où ne pas aller trop loin. Du coup quand on lit des journalistes voire des hommes politiques dire qu'il est devenu fou, on se met à penser que ce sont eux qui n'ont aucune profondeur réflexive et rationnelle et qu'ils sont emportés par leur passion. Vladimir est un joueur d'échec, qui est adepte du rapport de forces car il sait l'évaluer.</p>
<p>Dès lors, toutes les jérémiades officielles ne sont que des injonctions pour les médias. J'entends ainsi certains critiquer vertement notre ministre des affaires étrangères : c'est le prendre au pied de la lettre alors qu'il ne fait qu'animer la scène sans y jouer de rôle réel. Au fond, il fait du cheysonnisme, à la suite de cet excellent ministre de François Mitterrand, débarqué au bout de trois semaines pour avoir dit la vérité sur le théâtre d'ombres : "et à la fin, naturellement, nous ne ferons rien" (on ne lui reprochait pas un mensonge, on lui reprochait au contraire d'avoir dit tout haut la vérité : à l'époque déjà, on faisait attention au paraître, nihil novi sub sole). Bref, gardez vous de confondre l'angélisme officiel, le cheyssonisme de rodomontades et la réalité des prix qui se joue derrière les rideaux.</p>
<p>Pendant ce temps là en effet, le vrai angélisme est en action : celui d'Angela Merkel. Oserai-je le mot : il s'agit de Realpolitik. En cela d'accord avec B. Obama, Angela négocie "en vrai" avec V. Poutine, car elle sait qu'il 'est rationnel. Elle parle russe, il parle allemand et même si l'un et l'autre ne s'apprécient pas, ils savent reconnaître en l'autre l'existence d'un vrai politique. (Il y a des absents dans la photo ? oui, je sais, n'insistez pas).</p>
<p>Quel est l'objet des négociations ? Selon ce <a href="http://www.debka.com/article/23724/Moscow-will-halt-military-steps-in-Ukraine---only-after-a-US-guarantee-not-to-post-missile-shield-there-">billet</a> qui n'a pas été confirmé ni repris par la presse, il s'agit principalement de bouclier antimissile, avec quatre revendications. (1. The Kiev government whichever form it takes must sign an obligation to abstain from any ties with NATO. 2. Neither the US, NATO or any other power will deploy X-Band or BX-1 radar stations on Ukraine territory whether on land, sea or air. This guarantee would additionally cover elements of an anti-missile missile shield and ballistic missiles placing Russia in their sights. 3. Restrictions will govern the types of weapons allowed the Ukrainian army. 4. Local military bodies will be established to protect the Russian-speaking and ethnic Russian regions of Ukraine).</p>
<p>On observe (si ces revendications sont réellement celles exprimées) beaucoup de réalisme mais aussi une porte de sortie et d'interprétation dans le dernier point. Cela reste à discuter. Car il s'agit au fond d'obtenir le scénario le plus probable, qui satisferait tout le monde. J. Pinatel <a href="http://www.atlantico.fr/decryptage/crise-ukrainienne-4-scenarios-entre-lesquels-avenir-pays-se-joue-jean-bernard-pinatel-997179.html?page=0,2">suggère</a> en effet quatre scénarios : une Ukraine dans l'UE (très improbable), une partition (non désirée), une Ukraine trait d'union entre Europe et Eurasie (peu probable étant donné la faillite de l’État et la faillite financière de l'Ukraine)et une finlandisation, qui apparaît comme la moins mauvaise des solutions.</p>
<p>Ainsi, pour Poutine, une finlandisation permettrait de préserver l'avenir et de revenir au scénario post 2004 : après cinq ans de pouvoir de l'actuelle opposition, marquée par une corruption et une division exceptionnelles, le parti des régions avait gagné l'élection présidentielle en 2010 et les élections législatives de 2012 avec une vraie majorité, qu'on ne peut pas simplement attribuer à de l'achat de vote. Pour les États-Unis qui ne cherchent qu'à se désengager des anciens théâtres, pour l'Allemagne qui ne veut pas se charger d'un nouveau poids financier et qui veut maintenir de bonnes relations avec la Russie, la finlandisation apparaît également comme une bonne solution.</p>
<p>Risquons nous à dire qu'elle ne désobligerait pas les intérêts français. Être finalement en dehors du jeu présente quelques avantages. Continuons donc à clamer notre sévérité (cela plait aux Européens de l'est) en nous gardant bien d'entraver le processus de négociation en cours (autrement dit, ne refaisons pas le coup de Genève lors des négociations avec l'Iran).</p>
<p>PS : si vous regardez bien, l'Ukraine a un revenu per capita inférieur à l'Albanie. Avec plus de 40 millions d'habitants. Est-ce le moment de les intégrer dans l'UE ? Égoïstement, est-ce l'intérêt de l' UE ???</p>
<p>Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/03/03/Ang%C3%A9lisme%28s%29-et-cheyssonisme#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2356Brefs commentaires sur l'Ukraine (1er mars)urn:md5:6bb6017a8110625cd3f34c8b1ccc5f392014-03-01T22:44:00+01:002014-03-01T23:05:21+01:00adminUkraineRussieUkraine<p>Bien, les événements s'accélèrent quelque peu. Toujours pour éviter les larmoyances émotives, quelques pistes de réflexion à la suite des événements de la journée. (cliquez sur le titre pour lire la suite)</p>
<p><img src="http://md1.libe.com/photo/624426--.jpg?modified_at=1393691457&amp;width=750" alt="" /> <a href="http://www.liberation.fr/monde/2014/03/01/en-direct-des-dizaines-d-hommes-armes-autour-du-parlement-de-crimee_983807">source</a></p> <p>1/ Donc, il y a eu des manifestations "dans l'est" on cite Kharkov, Dniepropetrovsk, Donetsk et Odessa. Ah ! Odessa ? oui, ce n'est pas à l'est, c'est au sud. Entre la Crimée et la Moldavie. C'est toute la zone russe qui est visée, <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/02/28/S%C3%A9cession-ukrainienne">ainsi que je le disais hier</a>.</p>
<p>2/ Un journaliste explique que ces manifestants auraient été payés. Ben voyons.... Je suis sûr qu'il était sur place et qu'il a vu les billets circuler. Cela s'appelle de la confirmation de sources... L'usage du conditionnel est un faible barrage précautionneux.</p>
<p>3/ Le processus juridique de l'intervention russe est en place (demande du Parlement, acceptation de Poutine). Remarquez la référence à l'accord du 21 février. Ah oui, c'était qq chose qu'on a oublié car il y a eu entre temps des pressions de Maïdan... (<a href="http://www.bruxelles2.eu/zones/asie-centrale-georgie-russie-europe-caucase/les-troupes-russes-interviennent-officiellement-en-crimee.html">voir l'excellent billet de Bruxelles2</a>, qui a un bon traitement depuis le début de la crise)</p>
<p>4/ Il reste qu'on remarque la maîtrise de la communication : pas de réaction officielle de Poutine pendant quelques jours, pas de revendication officielle de troupes déployées, troupes sans badges, et très certainement pas mal d'agents russophiles en action à travers le pays (ça, c'est pour le journaliste de tout à l'heure : oui, il y a probablement tout un tas de manœuvre souterraines, tout comme il y en eut probablement de la part des Américains du côté de Maidan...).</p>
<p>5/ Il reste que la Russie a déployé en deux jours plus de six mille hommes avec quatre jours de planification. Pour des gars qu'on dit à la ramasse, je trouve ça pas mal. Cela ne signifie ps la valeur au combat mais à vue de nez, ils ont fait des progrès depuis la Géorgie 2008.</p>
<p>6/ Puisqu'on en est à évoquer des choses militaires, on parle beaucoup de navires dans la mer Noire. On annonce même un porte-avion américain supplémentaire en Méditerranée. Mais il y a un petit goulet, le Bosphore, soumis aux conventions de Montreux et surtout à la maîtrise des Turcs. Je ne suis pas du tout sûr que ces derniers verront d'un bon œil des navires américains pénétrer dans la mer Noire. Et je ne suis pas sûr que les Russes laisseraient faire...</p>
<p>7/ L'ancien Saceur rappelle l'existence de l'Otan,on entend des communiqués martiaux, et notamment la réunion à Varsovie pour prendre des sanctions, les Lettons sont très fermes, MM. Cameron et Hollande sont très inquiets. Oui, mais l'Ukraine n'est pas un membre de l'Alliance. Remember Prague, Budapest et Tbilissi... Je serai très surpris d'une ascension aux extrêmes.</p>
<p>Pour conclure, on lira le billet plein de bon sens de Jacques Sapir de ce soir : <a href="http://russeurope.hypotheses.org/2039">il y a urgence à raisonner calmement</a>.</p>
<p>Le Chardon.</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/03/01/Breefs-commentaires-sur-l-Ukraine#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2355Sécession ukrainienneurn:md5:166769d64087657871c789eba3a0263c2014-02-28T22:32:00+01:002014-02-28T22:46:41+01:00adminUkraineCriméeRussieUkraine<p>La sécession fut un mouvement artistique dans la Vienne du début du siècle. De l'autre siècle. En ce début de nouveau siècle, la sécession est un mode de résolution des problèmes : Yougoslavie, Kossovie, Érythrée, Soudan du sud pour ne prendre que les exemples les plus récents et visibles, en attendant que la Thaïlande ou la Centrafrique rejoignent le club. Pour l'instant, c'est surtout d'Ukraine qu'il s'agit. Quelques commentaires "à chaud" (même si j'ai attendu quelques jours pour ne pas réagir comme tout le monde aux "événements" de Kiev.</p>
<p><img src="http://1.bp.blogspot.com/-GJaAFj4j7ZU/UuFPj2VQkyI/AAAAAAAAHiE/nywbEdD1vbY/s1600/ukraine+2010+election+map.png" alt="" /> <a href="http://springtimeofnations.blogspot.it/2014/01/will-ukraine-crisis-become-second.html">source</a></p> <p>L'autre semaine, les médias signalaient sans s'émouvoir que la ville de Lviv avait déclaré son indépendance. Alors, il s'agissait des'émanciper de la tutelle de Yanoukovitch. Dix jours plus tard, on entend des cris d'orfraie lorsque des Criméens déclarent vouloir tenir un référendum d'auto-quelque chose. Ce n'est pas que je sois pro-russe, mais je suis un peu fatigué de la presse officielle. Soyons tout à fait exacts : je suis fatigué qu'elle célèbre ici les vertus de l'autosaisine du pouvoir par des populations en lutte et qu'elle balance la grosse artillerie de la propagande pour me faire passer des messages manichéens.</p>
<p>Certes, on entend certains spécialistes comme B. Tertrais expliquer que cette histoire d’affrontement est-ouest ne tient pas la route, malgré les réflexes pavloviens de tout un tas de gens qui se prétendent analystes et qui en sont que des agents. Ainsi, le soi-disant silence de Poutine ne servait qu'à préparer la phase suivante.</p>
<p>Poutine n'a pas changé d'objectif. L'Ukraine est très importante pour lui et lui est prêt à payer. En dollars et en sang. C'est peut-être pas bien, c'est peut-être condamnable, c'est peut-être primitif, mais il raisonne comme ça. Face à ce qu'il a interprété comme un passage en force;il répond lui aussi par un passage en force. Son objectif demeure l'Ukraine, toute l'Ukraine. A défaut, il peut se passer des aires polonohiles du nord ouest. Il fera tout pour garder Kiev, même si la ville est un isolat dans des zones qui lui sont peu favorables. Il voudra à tout le moins conserver les zones russophones, et la Crimée avant toute chose.</p>
<p>La Crimée n'est pas un grand risque pour lui. La population y est russe. Les troupes qu'il y a envoyé ne sont là que pour tenir le gage minimal. Mais il ne s'agit que d'une base de départ, ou plus exactement une base de négociation. Il sécurise ce qu'il considère comme son arrière-cour. Il ne s'agit pas de lancer une offensive militaire vers le reste de l'Ukraine, juste d'exercer la pression de force suffisante pour jouer les autres cartes.</p>
<p>Celles-ci sont nombreuses. Les populations russophones de l'est. La désunion politique du gouvernement intérimaire. La base légale douteuse du nouveau régime. L'arme du gaz. Surtout, la dramatique situation économique et financière. En face, personne n'est prêt à payer les 50 milliards d'euros : le FMI est déjà débiteur envers l'Ukraine, les États-Unis n’annoncent qu'un milliard de dollars (soit moins d'un milliard d'euros) et les Européens n'ont pas d'argent et aucune envie d'avoir de nouvelles importations de travailleurs à vil prix. Autrement dit, le soutien occidental ne pourra jouer qu'en sous-mains. Or, les possibilités de rebond du pays semblent faible : il a été effectivement pillé par l'ensemble des élites (tous partis confondus, sans parler des oligarques). On risque d'assister à un blocage économique du pays très violent conduisant au chaos.</p>
<p>Poutine avait gagné une première partie en décembre à Vilnius. Il vient de perdre la revanche à Kiev. Nous voici au prochain tour et nul ne peut dire qui gagnera.</p>
<p>Rien ne va plus et les enjeux ne cessent de monter. Ce casino commence à jouer gros jeu. Ce n'est pas très rassurant.</p>
<p>Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/02/28/S%C3%A9cession-ukrainienne#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2354Ukraine : l'affrontement des faiblessesurn:md5:3d4a8d43944093faf062005d1fbbb6b12014-02-19T22:04:00+01:002014-02-19T22:22:47+01:00adminUkraineRapport de forceUkraineÉtat<p>Regardant les infos du soir avec Mme Le Chardon, vint le moment du reportage sur l'Ukraine. Curieusement, le journaliste suggérait sa gêne en faisant un reportage sur les radicaux des protestataires, en montrant bien sûr des citoyens, mais aussi des milices d'extrême-droite. Cela signale un certain flottement de la presse internationale. Ces troubles de perception de la grande presse illustrent qu'elle a du mal à trouver son manichéisme habituel (pensez : il faut exposer des situations complexes dans des reportages de maximum deux minutes...).</p>
<p><img src="http://db3.stb.s-msn.com/i/83/42FE75F7CD2B829B64F5728C9F363A_h402_w598_m2_q90_cQViKzkuq.jpg" alt="" /> <a href="http://news.fr.msn.com/m6-actualite/monde/ukraine-5-cles-pour-comprendre-le-conflit">source</a></p>
<p>Bon, là je fais le faraud quand soudain, Mme Le Chardon me demande : "et toi, qu'en penses-tu ?". Là, il a fallu trouver quelque chose d'assez simple et en même temps assez explicatif ... Voici :</p> <p>L'observateur ne peut qu'être gêné, bien sûr, par les images de la répression qui, comme toutes répression, sont toujours difficiles à voir. L'Occidental a tellement l'habitude qu'on lui présente la révolution comme le peuple se mettant debout pour défendre sa liberté que tout maintien de l'ordre public, surtout dans les situations extrêmes comme celles de Kiev, font immédiatement penser à ces situations.</p>
<p>Dans le même temps, le même observateur s'interroge en permanence sur les motifs de ceux qui se lèvent. Quel est le programme ? Il s'aperçoit alors que les choses sont très confuses et qu'en face on a adopté une position du tout ou rien. Quelque chose comme "dehors ou dehors". Cette absence d'ouverture à toute négociation force l'adversaire (ici, le pouvoir) à passer au stade de la répression, puisque la rue ne veut pas autre chose que le rapport de force.</p>
<p>Ainsi, en début de semaine on apprenait que les négociations avaient permis de libérer l'occupation de la mairie de Kiev en l'échange de la libération d'une centaine de manifestants arrêtés. Et patatras, voici que cela part en quenouille. Autrement dit aucune partie n'a vraiment la possibilité de négocier. Mais aucune n'a vraiment les moyens du rapport de force. Et surtout du rapport de forces maîtrisé.</p>
<p>En effet, malgré les apparences et les portraits dictatoriaux faits de Yanoukovitch, celui-ci n'a finalement pas beaucoup de pouvoirs : l'armée refuse d'entrer dans le conflit, les forces de police sont en nombre limité, le parti des régions n'est pas des plus homogènes et certains oligarques hésitent et sont tout sauf des jusqu'aux-boutistes. En fait, il y a peu d'idéologie mais la volonté de conserver des leviers pour poursuivre les affaires....</p>
<p>De l'autre côté, l'opposition est au pluriel : il y a trois partis qui ne réussissent pas à se mettre d'accord entre eux, qui n'ont pas d'autorité suffisante sur leurs suiveurs pour les entraîner vers un compromis politique, et qui de plus sont en permanence dépassés par les radicaux, mélanges d'hooligans et d'extrêmes-droites. Aussi l'étiquette "pro-européen" a-t-elle du mal à être accrochée à cette opposition, ce qui explique de nombreuses hésitations de la part des Européens.</p>
<p>Voici au fond un affrontement des faiblesses. Ceci explique la violence qui se met en œuvre. Elle est le résultat d'affrontements non-maîtrisés et donc d'une escalade de la violence. La politique du pire arrive souvent à atteindre ce qu'elle ne considérait que comme un moyen mais qui devient le résultat : la politique du pire aboutit au pire.</p>
<p>Du coup, toutes les déclarations de fermeté, les condamnations morales et autres blocages de comptes bancaires aura peu d'effets : les acteurs n'ont plus les moyens de contrôler les forces qui ont été mises en mouvement. On s'achemine donc vers une aggravation du conflit et donc une séparation de facto du pays.</p>
<p>Dès lors, la prochaine question qui se pose va être la suivante : de quel côté va basculer la ville de Kiev ? et cette partition (sous une forme plus ou moins fédérative, comme proposée par la Russie) entraînera-t-elle des nettoyages ethniques ?</p>
<p>Bref, la faiblesse de l’État et l'absence de culture politique ont suscité une fragmentation délétère du pays. Ce n'est pas une bonne nouvelle, ni pour l'Ukraine, bien sûr, ni pour l'Europe. Car je crains que cela ne donne de mauvaises idées à tous les excités déçus du système... (<a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/02/07/L-Ukraine%2C-avant-garde-europ%C3%A9enne">voir ici</a>)</p>
<p>Le chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/02/19/Ukraine-%3A-l-affrontement-des-faiblesses#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2350L'Ukraine, avant-garde européenne ?urn:md5:4f210611bd0b0a513ff5cd04d1e9fafe2014-02-07T20:53:00+01:002014-02-07T21:01:03+01:00adminUkraineUkraine<p>Selon l'explication "main stream", l'Ukraine serait en attente d'Europe. D'ailleurs, l'Europe aurait une influence positive et stabilisatrice sur son voisinage, comme l'affirme <strong>Jacques Rupnik</strong> qui explique que l'élargissement a été la plus grande réussite européenne (<a href="http://abonnes.lemonde.fr/europe/article/2014/02/06/jacques-rupnik-tout-le-monde-s-est-laisse-depasser-par-les-evenements-en-ukraine_4361631_3214.html">voir ici</a>). Au fond, ce serait à cause de notre autoconfiance (non, je n'ai pas dit autosuffisance) en notre attrait que nous aurions raté la négociation du partenariat oriental. Du coup, les Ukrainiens seraient "en retard" d'Europe" mais n'ayez pas peur, bonnes gens, le sens du progrès va dans le bon sens et avec un peu de temps, il seront parmi nous. Moui. Et si on adoptait le point de vue inverse : ce qui se passe en Ukraine serait annonciateur d'une évolution plus générale ? Sans être forcément sûr de la validité de l'hypothèse, je vous propose au moins de l'explorer.</p>
<p><img src="http://actualites.sympatico.ca/wp-content/uploads/2013/12/Ukraine-Kiev-manifestations-2013.jpg" alt="" /> <a href="http://actualites.sympatico.ca/nouvelles/blogue/ukraine-crise-kiev">source</a></p> <p>Qu'observe-t-on en Ukraine en effet ? Une situation économique catastrophique, qui rappelle la situation de tous les États qui se sont écroulés ces dernières années. Un gouvernement régulièrement élu à la suite d'élections jugées assez transparentes. Un très haut niveau de corruption généralisée à tous les partis politiques. Des partis politiques désunis et sans ligne claire, notamment de la part de l'opposition sans leader, quand la majorité est sous la coupe des hommes d'affaire.</p>
<p>Cette absence d'unité générale entraîne une profonde insatisfaction de la population qui ne fait plus confiance au système politique, jugé inefficace tant pour le développement général que pour ses aspirations. Cela provoque la mobilisation de groupes radicaux et, pour certains, extrémistes. Ils décident donc un rapport de force physique assorti d’une profonde guerre de l'information, notamment à destination des médias occidentaux.</p>
<p>Voici donc des gens en colère dont les revendications excluent toute idée de négociation. Ainsi, sous le seul pouvoir de la rue, il s'agirait que le gouvernement démissionne ainsi que le président et qu'on aille immédiatement à des élections. Un programme ? aucun sinon le seul "front du refus". Un nihilisme radical et énervé qui se nourrit de son propre ressentiment pour ignorer superbement toute proposition de "transaction". Transiger : tel est en effet le lot de toute démocratie. Tel n'est pas le but de cette "faction de la rue".</p>
<p>Ce prurit s'exaspère et se propage dans une situation où personne n'est fort. Paradoxalement, ce qui frappe l'observateur est la faiblesse de chaque camp. Car si on dénonce les brutalités du pouvoir, force est de constater qu'il a finalement peu de forces fiables à mettre en action et qu'il ne peut donc pas contrôler le pays. L'armée refuse d'entrer dans le jeu et la police n'est pas assez nombreuse. Aussi voit-on des nervis hâtivement recrutés faire le coup de main sans réussir à dominer les révoltés. S'il y a donc beaucoup de violence elle ne suffit pas à forcer le retour au calme.</p>
<p>Dès lors les forces de fragmentation se répandent. Certains évoquent la partition de l’Ukraine selon une ligne Est-Ouest. Constatons d'abord que les blocs sont au nord-ouest et au sud-est : la côte de la mer Noire est plutôt russophone. Quand à la partie occidentale, si la Galicie semble très "remontée", la Ruthénie semble moins marquée.</p>
<p>De plus, le discours des opposants paraît non pas pro-européen mais pro-ukrainien. Au fond, il s'agit de refuser toute domination. L'UE est instrumentalisée au profit du seul projet qui pourrait rassembler, le projet nationaliste. Or ce projet n'est pas partagé par toute l'opposition. La minorité active déborde donc d'agit-prop. On ne peut s'empêcher de comparer la situation à la Russie de 1917. A l'époque toutefois y avait-il une idéologie et un projet alternatif. Dans le cas présent, les Occidentaux soutiendraient un mouvement qu'ils croient démocratique quand son projet serait nationaliste (<a href="http://www.theguardian.com/commentisfree/2014/jan/29/ukraine-fascists-oligarchs-eu-nato-expansion">voir par exemple cet article du Guardian</a>).</p>
<p>Tous ces éléments semblent annonciateurs de ce qui pourrait se passer en Europe :</p>
<ul>
<li>une crise économique et financière insoluble : les bons esprits bien-pensants oublient juste que l'Ukraine est en quasi faillite et que seule la Russie a accepté de prêter des milliards. L'Europe ne prêtait que quelques millions, avec autant de sujétions associées que celles des Russes. L'UE qui a déjà du mal à renflouer la Grèce n'est certainement pas prête à payer pour l'Ukraine.</li>
<li>une classe politique dévaluée, sans projet affirmé et décidée seulement à venir au pouvoir.</li>
<li>une population lasse de tout et fragmentée, désireuse surtout de manifester sa colère au risque de la fragmentation générale et d'extrémismes sans structure</li>
<li>des tendances séparatistes plus ou moins affirmées (qu'on pense à Catalogne, Flandre, Écosse, Padanie, ..)</li>
<li>un pouvoir d’État qui a perdu l'efficacité du maintien de l'ordre et qui ne contrôle plus la population.</li>
</ul>
<p>En fait, seul ce dernier point sépare encore l'Ukraine de l'Europe. En cela, peut-être est-elle en avance.</p>
<p>Comprenons-nous bien : je ne suis pas persuadé du scénario que j'avance. Il aurait un caractère inéluctable qui n'est pas encore avéré, puisque je constate que les Européens ont finalement surmonté la crise économique et politique qui les frappe depuis six ans. Toutefois, je ne peux que constater les similitudes et surtout la fragilité généralisée. Autrement dit, plutôt que de regarder les Ukrainiens avec la hauteur du bourgeois cossu qui observe supérieurement son voisin insolvable sombrer dans la violence, j'émets l'hypothèse que cette débandade pourrait tout aussi bien nous frapper. Et qu'au lieu de mettre de l'huile sur le feu pour se venger du camouflet de Yanoukovitch, l'Europe aurait intérêt à s'entremettre pour trouver une voie de sortie.</p>
<p>Le chardon.</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2014/02/07/L-Ukraine%2C-avant-garde-europ%C3%A9enne#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2346Ukraine : doxa et rébellionurn:md5:7ba924431a3b305a0fd1ae70d49dc5f22013-12-03T22:00:00+01:002013-12-03T22:07:41+01:00adminUkraine<p>Si on écoute la doxa que nous serinent les médias occidentaux au sujet de l'Ukraine, nous serions en présence d'une insurrection puisque 100.000 personnes (300.000 personnes selon les organisateurs) manifesteraient dans les rues de Kiev. En faveur de l'Europe, donc de la démocratie, contre les voleurs du gouvernement qui font des calculs d'épicier.</p>
<p><img src="http://eukraine.org/img/map-ukraine.jpg" alt="" /> <a href="http://eukraine.org/ukraine-map.htm">source</a></p> <p>Puisqu'on en est au calcul d'épicier : d'abord, cette bataille de chiffres me rappelle une autre bataille de chiffre d'une période récente, où l'on annonçait 1,5 millions de personnes pour une population de 60 Millions. Là, 300.000 pour une population de 45 Millions.</p>
<p>A l'époque, un pouvoir était légitime puisqu'il avait été démocratiquement élu et que la réforme contestée par le peuple était à son programme et qu'il l'avait mise en œuvre. Et bien <strong>Yanoukovitch</strong> a été démocratiquement élu, et il n'avait pas mis le rapprochement avec l'Europe à son programme.</p>
<p>Accessoirement, il a choisi un accord qui rapporte à son pays plusieurs milliards d'euros, quand le prêt européen ne s'élevait qu'à 640 M d'euros.</p>
<p>C'est donc un mauvais dirigeant, anti-démocratique, et il est juste que les foules en colère s'élèvent contre cet abus de pouvoir manifeste.</p>
<p>Au passage, l’opposition qui avait perdu les élections il y a trois ans n'est pas plus unie qu'à l'époque : aucun projet politique en face...</p>
<p>La vraie conclusion est donc : le soft power européen a vécu. Surtout quand il se heurte à un hard power russe. Brutal et pas fin, mais efficace. Et vouloir rejouer dans la rue ce qu'on n'a pas su gagner par la négociation n'est pas des plus fairplay.</p>
<p>Mais il est vrai qu'il s'agit de géopolitique. A tout le moins n'est-on pas forcé de marcher dans la combine du story-telling : la ficelle est trop grosse.</p>
<p>Le Chardon</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2013/12/03/Ukraine-%3A-doxa-et-r%C3%A9bellion#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2329