Egeablog - Mot-clé - Donnée2023-06-28T12:43:19+02:00Olivier Kempfurn:md5:fc9dfa5de5fd9856c4c7bdd45e8ff3c1DotclearL’énergie de la première moitié du 21e siècle, c’est la donnéeurn:md5:1df8fc725d9f9d8549d61fff579c33b42018-01-04T21:48:00+00:002018-01-04T21:48:00+00:00Olivier KempfMaitrise stratégique de l'informationDigitalDonnéeStratégie<p>L'autre jour, un journaliste m'appelle pour un article que j'avais publié il y a quelques mois sur la géopolitique de la donnée (avec Th Berthier, <a href="https://www.cairn.info/load_pdf.php?ID_ARTICLE=RINDU1_163_0013">ici</a>, voir aussi <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2017/06/18/Vers-une-g%C3%A9opolitique-de-la-donn%C3%A9e">sur egea</a>). Il avait travaillé le sjet, du coup la discussion a été passionnante, du coup il en a tiré quelques éléments écrits, que je reproduis avec plaisir sur ce blog. Car la donnée revêt uen dimension stratégique très forte, ce qui est peu soupçonné. Merci à Romain Ledroy (voir ses articles <a href="http://www.letudiant.fr/educpros/enquetes/donnees-personnelles-reglement-europeen-oblige-universites-pencher-sur-data.html">ici</a> et <a href="http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/european-universities-boost-data-protections-in-light-of-new-regulation.html">ici</a>).</p>
<p><img src="https://www.redsen-consulting.com/wp-content/uploads/2014/03/qualit%C3%A9-donn%C3%A9es-timq-1024x768.jpg" alt="" /> <a href="https://www.redsen-consulting.com/wp-content/uploads/2014/03/qualit%C3%A9-donn%C3%A9es-timq-1024x768.jpg">source</a></p> <p><strong>Vous parlez de géopolitique de la donnée, pouvez vous expliquer cette notion ?</strong></p>
<p>Olivier Kempf : Depuis l’entrée dans l’ère contemporaine, les conflits sont à coupler avec les intérêts pour l’énergie. Au 19e siècle, l’énergie est le charbon, et il joue un rôle crucial dans les conflits de l’époque, comme la guerre de 1870. La question à laquelle on s’affaire pendant la guerre : comment organiser les déplacements de troupe grâce au train, et donc grâce à l’énergie ? Plus tard, pour la première moitié du vingtième siècle, le pétrole et donc le moteur à explosion seront au cœur de la seconde guerre mondiale avec le couple « char et aviation », les forces blindées mécanisées, etc. Après la guerre, l’énergie nucléaire et sa maîtrise permettent la dissuasion nucléaire, l’armement nucléaire et entraînent le monde dans une nouvelle époque. Le fond du problème, c’est que l’énergie de la première moitié du 21e siècle, c’est la donnée. Nous avons de facto une course à l’armement, une course à la technologie. Cette course à la technologie est encouragée par deux facteurs propres au développement de la donnée. Le premier est un effet quantitatif, ce que je qualifie de « tsunami du big-data ». Les systèmes d’information actuels dans de grandes organisations traitent des données en « dix puissance onze, dix puissance douze », soit des téraoctets de données. Dans quelques années, les prévisions s’accordent à dire que l’on passera à des ordres de grandeur de « dix puissance vingt », soit une multiplication par un milliard des données traitées par les organisations. Toutes les structures vont devoir y faire face : les grandes entreprises, les collectivités, les états. Il est avant tout question d’absorber le choc, et pouvoir répondre à cette démultiplication de la donnée. Le second effet est qualitatif. Ces données produites en masse doivent être analysées, valorisées, exploitées dans l’intérêt de l’organisation. C’est dans ce cadre que fleurissent des innovations technologiques décisives dans le traitement qualitatif de la donnée : le big-data, la blockchain, les intelligences artificielles… Ce contexte amène donc à considérer une approche politique de la donnée.</p>
<p><strong>En quoi la donnée représente une valeur aujourd’hui, et pour longtemps ?</strong></p>
<p>Olivier Kempf : Il suffit de regarder la valorisation boursière des GAFAM ! Autre exemple, comment expliquer la valorisation boursière de AirBnB, qui n’a aucun hôtel dans le monde et environ 3000 salariés, et le groupe Accor qui a 4200 hôtels dans le monde et 250 000 salariés ? (NDLR : AirBNB a une valorisation boursière de 31 milliards USD contre 12 milliards d’euro pour le groupe Accor). La différence : l’adaptation des acteurs aux nouveaux marchés ouverts par la profusion de données. Sur le marché, les challengers dynamitent les barrières à l’entrée grâce à l’exploitation des données des utilisateurs, et ce big-data se monnaye. De toute façon, soit les organisations, publiques comme privées, comprennent cette transition et s’adaptent, soit elles subiront de plein fouet cette évolution structurelle. La collecte de données est une chose, mais sa valorisation en est une autre. Elle doit permettre aux entreprises, aux collectivités, aux états d’anticiper la prise de décision, de minimiser les inconnues et donc les risques afférents. En tant que tel une donnée a une certaine valeur, mais elle a surtout une valeur que l’on ne soupçonne pas, celle d’être croisée avec d’autres données. La création de richesse viendra de ce croisement de données parfois étrangères pour corréler, prédire et donc, concrétiser une stratégie politique, économique (NDLR : cette notion fait écho à la data-driven architecture).</p>
<p><strong>Vous semblez nuancer la thèse selon laquelle l’Europe souffre d’un retard permanent, vis-à-vis des États-Unis, dans la prise en considération de cette ère de la donnée ?</strong></p>
<p>Olivier Kempf : Très honnêtement, on assiste en ce moment à une réelle prise de conscience, et en ce sens la perspective du Règlement européen sur la protection des données est un signal fort. Nous pouvons convenir qu’il n’y a pas un dirigeant européen qui est étranger aux concepts du Big-data et de l’importance des données des citoyens. Dans le même sens, les récentes amendes liées à l’évasion fiscale de certaines grandes firmes nord-américaines témoignent d’une volonté d’un plus grand contrôle du cyberespace. Cela dit, nous sommes quand même en retard par rapport au gigantisme nord-américain, qui a su créer un nouveau modèle économique, avec des masses de capitaux liées à la mondialisation financière, en créant de la richesse, et de l’économie virtuelle. Pour autant, là où l’Europe est en difficulté, c’est dans la création d’ETI, les Entreprises de taille intermédiaire pouvant devenir des fleurons de l’industrie numérique. Il faut pouvoir encourager la constitution d’organisations à même d’imposer des modèles européens, créer des valeurs et une culture au sujet des données.</p>
<p><strong>Le Règlement général sur la protection des données, le RGPD, insiste sur un autre point : les libertés fondamentales numériques. Ce point incarne cette volonté de l’Europe de créer un référentiel culturel.</strong></p>
<p>Olivier Kempf : Oui, et c’est essentiel. Le mot protection des données peut contenir une ambiguïté. Il ne s’agit pas pour moi en premier lieu d’organiser la souveraineté, mais de veiller aux libertés individuelles. On reconnaît ici l’influence de la Commission nationale informatique et libertés, la CNIL, sur ce point. À ce titre, ce que le RGPD crée est tout à fait différent de la conception nord-américaine sur les données, mais c’est aussi différent de ce que proposent certains états dans l’emballement sécuritaire actuel. Ce cadre législatif est innovant. Quand bien même le RGPD est perçu comme une contrainte, un obstacle par beaucoup d’organisations, une application habile de ce texte entraînera un autre effet, celui de la confiance. Rappelez-vous le cas d’Apple qui refuse d’ouvrir ses données au FBI : certains félicitent l’entreprise dans leur volonté de protéger les données. Sans en être dupes, nous voyons ici que la question de la confiance est essentielle et le RGPD permet aux organisations d’affirmer une vision des données personnelles.</p>
<p>O Kempf</p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2017/11/19/L%E2%80%99%C3%A9nergie-de-la-premi%C3%A8re-moiti%C3%A9-du-21e-si%C3%A8cle%2C-c%E2%80%99est-la-donn%C3%A9e#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2153Vers une géopolitique de la donnéeurn:md5:31ca0762acfd14fd7d8c1011d0895f992017-06-21T17:13:00+01:002017-06-21T17:13:00+01:00Olivier KempfLivres et écritsData numériqueDonnéeGéopolitiquepuissance<p>Rangeant mes affaires, je m'aperçois que je ne vous ai pas signalé un article paru l'été dernier dans "Réalités industrielles", une revue des Annales des Mines (<a href="https://www.cairn.info/revue-realites-industrielles-2016-3.htm">voir ici sur Cairn le numéro en question</a>). Nous l'avons rédigé avec l'excellent Thierry Berthier. (<a href="https://www.cairn.info/revue-realites-industrielles-2016-3-p-13.htm">Lien vers la présentation de l'article</a>).</p>
<p><img alt="Annales des Mines - Réalités industrielles 2016/3" class="big_coverbis" src="http://www.cairn.info/static/includes/vign_rev/RINDU1/RINDU1_163_L204.jpg" /></p>
<p>Résumé</p>
<p style="text-align: justify;"><span>La donnée est présentée par certains comme une ressource, quand d’autres voient en elle le prélude à une nouvelle monnaie. Alors que l’Internet des objets qui s’annonce prévoit des volumes de données démultipliés par rapport à ceux que nous connaissons aujourd’hui, nul ne doute que la donnée sera demain l’élément central de nos sociétés, que ce soit sur le plan économique ou sur le plan politique. Nous nous proposons ici de décrire succinctement ce phénomène pour montrer qu’il est principalement le fait d’acteurs privés, les acteurs publics (en France et en Europe, en particulier) semblant être largement impuissants face à cette nouvelle dynamique. Si la donnée devient un instrument central de la puissance, il nous manque encore une grille d’analyse pour pouvoir mesurer la puissance data-numérique d’une nation.</span></p> <p style="text-align: justify;"><span><span>Plan de l'article </span></span></p>
<ul>
<li style="text-align: justify;"><span>La data-économie en quelques chiffres</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span><span>Le pouvoir politique n’a que peu de pouvoir sur la donnée</span></span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>Un retard de la France et de l’Europe</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>Sur la puissance data-numérique d’une nation</span><span> </span>
<ul>
<li style="text-align: justify;"><span>La capacité nationale en termes de data-infrastructures</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>La capacité nationale en termes de data-traitement</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>La capacité nationale d’attractivité vis-à-vis des grands acteurs internationaux de la donnée</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>La capacité nationale de formation de scientifiques des données</span><span> </span></li>
<li style="text-align: justify;"><span>La capacité nationale à « prioriser » une politique numérique ambitieuse</span><span> </span></li>
</ul>
</li>
<li style="text-align: justify;"><span>Pour conclure</span></li>
</ul>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;"><u><span>geopolitics of data</span></u><span> : </span><span>Some pundits present data as a resource, whereas others see it as the prelude to a new currency. The Internet of objects will foreseeably multiply the volume of data in comparison with what we now know. Data will undoubtedly become the key element, economically and politically, in our societies. As this succinct description shows, this trend mainly arises out of private parties’ actions, since public authorities (in France and Europe) seem powerless before this new driving force. Although data are becoming the key instrument of power, we still lack an analytic grid for measuring a nation’s power in terms of its digital data.</span></p>
<p style="text-align: justify;"><u><span>Geopolitik der Daten</span></u><span> : </span><span>Manche betrachten Daten als eine Ressource, während andere in ihnen das Vorspiel zu einer neuen Währung sehen. Da das sich ankündigende Internet der Dinge Datenmengen verarbeiten wird, die ein Vielfaches dessen darstellen, was wir heute kennen, bezweifelt heute niemand, dass Daten das zentrale Element unserer Gesellschaften sein werden, sei es auf wirtschaftlicher oder auf politischer Ebene. Wir stellen dieses Phänomen kurz dar, um zu zeigen, dass es hauptsächlich private Akteure betrifft, während die öffentlichen Akteure (insbesondere in Frankreich und in Europa) dieser neuen Dynamik weitgehend ohnmächtig gegenüberzustehen scheinen. Wenn Daten im Begriff sind, zu einem zentralen Instrument der Macht zu werden, so fehlt uns noch ein Analysesystem, das die digitale Datenmacht einer Nation messen könnte.</span></p>
<p style="text-align: justify;"><u><span>Hacia una geopolítica de los datos</span></u><span> : </span><span>Muchas personas presentan los datos como un recurso, mientras que otras ven en ellos la aparición de una nueva moneda. En el momento en que el Internet de los objetos, que llega poco a poco, anuncia volúmenes de datos increíbles en comparación con los que conocemos actualmente, nadie duda que los datos serán el elemento central de nuestras sociedades, ya sea tanto en el plano económico como en el plano político. En el artículo se describe brevemente este fenómeno para demostrar que el campo de los datos es principalmente un campo de actores privados, los actores públicos (en Francia y en Europa, en particular) parecen impotentes frente a esta nueva dinámica. Aunque los datos se estén convirtiendo en un instrumento central de poder, todavía nos falta un modelo de análisis para medir la potencia </span><span>dato-digital</span><span> de una nación.</span><span> </span></p>
<p style="text-align: justify;"><span>O. Kempf</span></p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2017/06/18/Vers-une-g%C3%A9opolitique-de-la-donn%C3%A9e#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2138La donnée n'est pas donnée : le livre !urn:md5:ecc7535e72f74a60bdac1e2abfef1fb22016-07-26T17:01:00+01:002016-07-26T17:01:00+01:00Olivier KempfLivres et écritsColloqueCyberconflitDonnéeEchoradarLivrePublication<p style="text-align: justify;">L'an dernier (mars 2015), EchoRadar avait organisé un <a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2015/03/03/Colloque-La-donn%C3%A9e-n-est-pas-donn%C3%A9e-23-mars-2015">colloque sur "La donnée n'est pas donnée"</a>, en partenariat avec Keyrus. Après un long travail de recueil des différents textes (la plupart des intervenants plus des contributions extérieures), voici les actes enfin publiés, sous la direction de Philippe Davadie, Bruno Teboul et moi-même. Vous trouverez ci-dessous l'avant-propos qui présente les thèmes et les auuteurs traités. Bonne lecture ! OK</p>
<p style="text-align: justify;"><img alt="donnee_pas_donnee.jpg" class="media" src="http://www.egeablog.net/public/.donnee_pas_donnee_m.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="donnee_pas_donnee.jpg, juil. 2016" /></p>
<p style="text-align: justify;"><a href="https://www.amazon.fr/donn%C3%A9e-nest-pas-Strat%C3%A9gie-Data/dp/2367780986/ref=sr_1_3?s=books&ie=UTF8&qid=1469548431&sr=1-3">La donnée n'est pas donnée</a>, Ph. Davadie, O.Kempf, B. Teboul (direction), Kawa éditions.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p> </p>
<p> </p> <p style="text-align: justify;">Le monde et son économie ont tourné autour d'axes successifs. À la fin du XX° siècle et à l'aube du XXI°, les autoroutes de l'information ont constitué un axe majeur de leur transformation. Des travaux d'infrastructure ont été nécessaires pour construire les réseaux par lesquels transiteraient l'abondance d'information que chaque personne allait émettre, sans oublier celles qu'elle allait devoir assimiler et analyser afin de prendre la décision la plus pertinente.</p>
<p style="text-align: justify;">Puis, de même que les sciences du vivant se sont tournées vers les nanotechnologies, les sciences de l'information et de la communication se sont tournées vers leur <em>nano-élément</em> : la donnée, tant il est vrai qu'une information ne peut se construire que sur des données, quelle que soit la valeur de chacun de ces nano-constituants.</p>
<p style="text-align: justify;">Petit à petit, l'infrastructure, bien qu'en perpétuelle amélioration avec l'augmentation des capacités de calcul des ordinateurs et des débits des réseaux, a laissé la place à la donnée comme axe de développement de l'économie.</p>
<p style="text-align: justify;">Or noir du XXI° siècle, carburant des entreprises, Big Data, la donnée a pris une place centrale dans les termes du débat.</p>
<p style="text-align: justify;">En poursuivant la comparaison entre le cyberespace et les sciences du vivant, nous constatons qu'à l'instar du monde réel, le cyberespace est lui aussi guetté par des pathologies modernes : l'infobésité en est la plus emblématique. Allons-nous pouvoir digérer toutes les données produites ou sommes-nous condamnés à les stocker de manière disgracieuse jusqu'à ce que nous sachions quoi en faire ou comment les éliminer ?</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Évoquer ces questions nous amène à prendre en compte la place centrale de la donnée dans le monde qui se construit. Est-elle une ressource que l'on peut traiter comme on le veut ? Le gisement de données est-il, contrairement aux richesses fossiles de notre planète, inépuisable ? À qui appartiennent les données produites en quantité de plus en plus importante chaque jour ?</p>
<p style="text-align: justify;">Nous le remarquons, ces questions sont proches de celles qui sont évoquées lorsqu'on aborde l'avenir de notre planète.</p>
<p style="text-align: justify;">Allons-nous donc assister prochainement à un développement de l'écologie des données ? À la naissance de droit à émettre des données pour éviter la data-pollution ? À la mise en place d'une bourse d'échange des données ? À un recyclage des données ?</p>
<p style="text-align: justify;">Il est important de ne pas perdre de vue ces questions, sachant qu'un marché noir des données fait déjà florès dans la partie obscure de l'internet.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Toutes ces questions ne peuvent avoir de réponse que si l'on se penche, au préalable, sur la définition précise de la donnée. Qu'est-ce qu'une donnée ? Un économiste considère-t-il une donnée comme le fait un informaticien ? Comment s'effectue la transition de la donnée (émise) aux données (traitées) ? La donnée, ou les données, influencent-elles nos stratégies, étatiques et privées ?</p>
<p style="text-align: justify;">Il est indispensable de répondre, ou de tenter de le faire, à ces questions, car on ne peut travailler correctement un objet que si l'on connaît bien ses caractéristiques. Travailler (sur) les données sans savoir précisément ce qu'elles sont peut conduire à des impasses.</p>
<p style="text-align: justify;">Et d'ailleurs, peut-on travailler (sur) les données ? Sont-elles des choses dont chacun peut disposer comme il veut ou sont-elles le reflet d'un ensemble plus important qu'elles qui mérite qu'on s'y arrête avant de lancer tout type de travaux ?</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Toutes ces questions, qui demeurent sans réponse univoque, ont poussé à l'organisation du colloque <em>la donnée n'est pas donnée</em> à l’École Militaire en mars 2015. Son titre était sciemment un jeu de mots, car il se voulait une interpellation de ce qui est considéré comme acquis : actuellement, la data est donnée, car soit on ne paye pas pour l'acquérir afin de la travailler, soit sa valeur vénale (déclarée) est fort peu élevée<a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2016/07/26/La-donn%C3%A9e-n-est-pas-donn%C3%A9e-%3A-le-livre-%21#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[1]</a>. Les travaux en cours pour estimer la valeur d'une donnée ne parviennent d'ailleurs pas encore à résoudre cette question de façon univoque.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">C'est à partir de ces questions fondamentales que l'architecture du colloque a été conçue. Il semblait indispensable d'interroger d'abord la donnée, de tenter de la définir avant de considérer divers ensembles de données, puis d'étudier leur influence sur les stratégies privées et publiques. Ces interrogations ont tout naturellement construit les quatre tables rondes du colloque.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">La première, <em>qu'est-ce qu'une donnée ?</em>, ne pouvait qu'être le socle du colloque. Nous l'avons dit, on ne peut travailler un objet que si l'on connaît ses propriétés et qu'on sait qu'il peut être façonné. Esquiver cette question ne peut mener qu'à des déconvenues.</p>
<p style="text-align: justify;">Les données changent la donne comme l'expose <strong>Jean-Paul Pinte</strong>, car l'environnement des données ne cesse de croître, rendant nos vies de plus en plus numériques. Puisque la donnée, or noir du XXI° siècle, a manifesté son importance dans un monde informatisé, il était logique d'interroger tout d'abord un informaticien et un économiste, afin qu'ils expliquent ce que représentait une donnée. Comme l'a expliqué <strong>Christian Schmidt</strong>, la donnée est au cœur de l'économie qui en produit et en consomme, l'un des défis de cette science étant de transformer des données immatérielles en éléments matériels ; <strong>Jean Rohmer</strong> rappelant quant à lui que les données précèdent l'informatique et qu'elles sont partout sauf dans l'ordinateur. Ainsi, la donnée était immédiatement observée sous les deux angles les plus en vue actuellement. Mais une vision de la donnée que l'on pourrait qualifier d'utilitariste ne peut suffire. Parce qu'elle est émise par l'Homme ou par un artefact conçu par celui-ci, il est fondamental de passer la donnée au tamis de la philosophie. Que nous apprend la donnée sur l'Homme qui en est son principal émetteur et utilisateur ? <strong>Emmanuel Brochier</strong>, estime que la donnée est une perte d'information et que considérer l'Homme comme une somme de données revient à le mathématiser. Mais mathématiser la nature conduit à son épuisement.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">La deuxième <em>de la donnée aux données</em>, avait pour objet de préciser les conséquences d'un passage du singulier au pluriel. Une fois un certain regard posé sur la donnée, en la considérant d'une certaine manière, puis-je encore la considérer de la même façon si je l'appréhende comme élément d'un groupe de données ? Le vrai problème du Big Data n'est-il pas de travailler sur des cibles <em>a priori</em> inconnues, sans aucune hypothèse de départ ?</p>
<p style="text-align: justify;"><strong>Jean-François Soupizet</strong> a passé ce questionnement au crible de la ville intelligente (ou connectée, ou encore <em>smart</em>), mise en perspective avec la désertification numérique de nos territoires. Dans la mesure où une ville connectée ne peut fonctionner que si ses habitants lui fournissent chaque jour leur lot de données, <strong>Éric Hazane</strong> a évoqué la multiplication des données <em>via</em> les objets connectés qui ne cessent de se développer et soulevé la question de la pertinence des chiffres pour rendre compte de leur volume. Tous ces travaux, toutes ces questions, présupposent que la donnée, vue comme une matière première, est fiable. <strong>Thierry Berthier</strong> et <strong>Bruno Teboul</strong> ont justement posé les questions pertinentes de la valeur et la véracité de la donnée, expliquant qu'une des tâches du data scientist de demain sera d'évaluer la probabilité de la véracité de la donnée. Enfin, <strong>Gérard Haas</strong> a évoqué la protection juridique des données, faisant remarquer qu'un droit de propriété entièrement confié à l'émetteur des données pourrait le placer dans une situation inconfortable, car il serait alors seul responsable de leur protection.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Ces indispensables éclairages ont alors permis d'envisager la place de la donnée (ou des données) au sein de stratégies, qu'elles soient privées ou publiques.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">La stratégie d'entreprise a été le premier sujet de débat. <strong>Yannick Harrel</strong> a invité l'assistance à considérer la donnée comme une nouvelle devise. À la différence notable que si l'entrepreneur allait auparavant au devant de l'information, actuellement c'est elle qui vient à lui, modifiant ainsi les rapports entre une potentielle devise et ses utilisateurs. L'introduction du Big Data vient également défier les pratiques d'intelligence économique adoptées par les entreprises. <strong>Jean-Pierre Vuillerme</strong> nous détaille ces impacts, se demandant si l'on peut parler d'innovation disruptive à son sujet. L'observation du Big Data nous montre que la majorité des acteurs de ce phénomène sont majoritairement étasuniens. Il convient alors de se poser la question, avec <strong>Laurent Bloch</strong>, de l'émergence d'une industrie nationale du Big Data afin de réfuter les propos selon lesquels l'Europe serait une colonie du monde numérique.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Une réflexion sur les stratégies induites par le Big Data n'aurait pas été complète sans l'évocation des stratégies publiques. En évoquant les relations entre le Big Data et le renseignement, <strong>Axel Dyèvre</strong> soulève la question des métadonnées, sous-famille de données inséparables des données produites et émises au sein du cyberespace. Du renseignement aux opérations militaires, il n'y a qu'un pas qu'<strong>Olivier Kempf</strong> franchit en exposant ce que le cyber, et la multitude de données induite, peut changer dans la façon de faire la guerre et de mener des batailles. Le passage du front extérieur à l'éventuel front intérieur est assuré par <strong>Patrick Perrot</strong>. Si l'utilisation du Big Data dans la lutte contre la criminalité apporte des pistes nouvelles, il ne faut pas pour autant faire abstraction de ses limites. Sinon, nous risquons de glisser dans une société où, comme l'écrit <strong>Philippe Davadie</strong>, nos données risquent de se trouver en garde à vue perpétuelle. Ces potentialités conjuguées aux interrogations amènent alors à évoquer avec <strong>Thibault Lamidel</strong> une éventuelle régulation internationale du Big Data qui pourrait conduire à une redistribution de la puissance des États dans un avenir assez proche.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Vous tenez entre vos mains les actes de notre colloque. Si nous n'avons pu retranscrire les échanges avec la salle, nous ne nous sommes pas restreints aux verbatim des participations. Chaque intervenant a pu en effet mettre l'accent sur des points que son temps de parole lui interdisait. En sus des contributions de chaque orateur et afin d'enrichir encore les débats, vous trouverez le mot introductif du général <strong>Watin-Augouard</strong> ainsi que les contributions de modérateurs de tables rondes.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Puisse cet ouvrage vous aider dans votre réflexion sur la donnée et le Big Data, c'est ce que tous les contributeurs de ce colloque vous souhaitent.</p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;">Bonne lecture !</p>
<div>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<hr align="left" size="1" width="" />
<div id="ftn1">
<p style="text-align: justify;"><a href="http://www.egeablog.net/index.php?post/2016/07/26/La-donn%C3%A9e-n-est-pas-donn%C3%A9e-%3A-le-livre-%21#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[1]</a>Sa valeur au marché noir pouvant cependant atteindre des sommets.</p>
</div>
</div>
<p style="text-align: justify;"> </p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2016/07/26/La-donn%C3%A9e-n-est-pas-donn%C3%A9e-%3A-le-livre-%21#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2110Colloque "La donnée n'est pas donnée" 23 mars 2015urn:md5:005fd9da98918933ec3974aaa7da26632015-03-03T21:11:00+00:002015-03-04T09:06:23+00:00Olivier KempfColloques et conférencesBig dataColloqueCyberstratégieDonnée<p>Il y a quelques mois, l'ami Philippe (<a href="http://informatiques-orphelines.fr/">blog</a>) me propose d'organiser un colloque sur le Big Data. Pour décentrer un peu le sujet, nous avons voulu nous intéresser à la donnée, sous-jacente au BD et rarement étudiée en tant que telle (voir l’argument scientifique ci-dessous) ; de même, notre tropisme stratégique nous a poussé à regarder l'aspect stratégique de la chose, tant en stratégie publique qu'en stratégie économique. Ceci donne lieu à un beau colloque, qui réunit des gens de tous horizons (par exemples : Ch. <strong>Balagué</strong>, Th <strong>Berthier</strong>, F. <strong>Douzet</strong>, O. <strong>Hassid</strong>, A. <strong>Rouvroy</strong>, K. <strong>Salamatian</strong>, Ch. <strong>Schmidt</strong>, M. <strong>Watin-Augouard</strong>) pour donner lieu à échanges et discussions. Cela aura lieu à l’École Militaire le lundi 23 mars. Inscrivez vous vite ! Argument, programme et détails ci-dessous.</p>
<p><img src="http://cyberland.c.y.pic.centerblog.net/f66b124f.jpg" alt="" /></p>
<p>Le colloque est organisé par <a href="http://echoradar.eu/">EchoRadar</a> et le Centre d’Études Supérieures de la Gendarmerie (et l'école d'officiers de la gendarmerie). Le partenaire principal est <a href="http://www.keyrus.fr/">Keyrus</a>, acteur central du BD en France. Sont partenaires la <a href="http://www.defnat.com/">Revue Défense Nationale</a>, <a href="http://www.lettrevigie.com/">la Vigie</a>, la <a href="http://www.cyberstrategie.org/">chaire Castex de cyberstratégie</a>, la <a href="http://www.chaire-cyber.fr/">chaire Saint-Cyr de cyberdéfense</a>. L'inscription au colloque est gratuite et s'effectue à partir du <a href="http://formulaire.keyrus.com/index/index/formulaire/170">lien suivant</a></p> <p><strong>Argument</strong></p>
<p>La « donnée » est devenue une valeur centrale de nos sociétés : manipulée à l’origine dans des « bases de données » où elle était cantonnée, elle a pris son autonomie et suscité des exploitations nouvelles, qu’il s’agisse de « données ouvertes » (open data) ou de « données massives » (Big data).</p>
<p>Le mouvement n’est pas fini : la révolution cyber va se poursuivre avec la production et l’utilisation de nouvelles quantités astronomiques de données émises et produites par l’Internet des objets, la robotique massifiée ou le corps connecté.</p>
<p>Parmi toutes ses caractéristiques, l'Internet des objets sera un producteur massif de données. Cette production massive, couplée aux capacités de calcul importantes de l'informatique actuelle et à venir, augure d'un traitement massif de données récoltées, quand bien même elles ne seraient pas ordonnées selon les schémas de bases de données.</p>
<p>Les premières mises en œuvre apparaissent déjà, de nombreux professionnels étant intéressés par les utilisations potentielles de ces données : urbanistes, médecins, sportifs, forces de sécurité mais aussi assureurs.</p>
<p>Tous cherchent à améliorer la performance de leur organisation grâce à une approche scientifique des phénomènes qu'ils génèrent ou auxquels ils sont confrontés, en laissant le moins de prise possible au hasard et à l'incertitude.</p>
<p>Dès lors, pour appréhender ce monde extrêmement mouvant, il convient de s’interroger non seulement sur les données mais sur la notion même de donnée. Vient un moment où leur nombre devient tellement élevé que la quantité ne signifie plus par elle-même. Passer du pluriel au singulier permet ainsi de poser un meilleur diagnostic, étape essentielle et première de toute démarche stratégique. À l’issue seulement peut-on envisager les objectifs et esquisser les chemins pour les atteindre, dans une double perspective de stratégie d’entreprise et de stratégie étatique.
Cette démarche préside au déroulé de ce colloque autour de la donnée.</p>
<p>Après avoir examiné ce que peut signifier la donnée (ce qu’elle est et son sens) et comment elle peut être utilisée de façon agrégée, il s’interroge sur les conséquences stratégiques qu’elle peut produire, aujourd’hui et demain : celles de l'entreprise (producteur et utilisateur du big data) comme celles de l’État (gardien de l'ordre public mais aussi des libertés publiques) tout en les mettant en regard du droit actuel et de ses évolutions envisageables.</p>
<p><strong>Programme</strong></p>
<ul>
<li>08h45 //Introduction /Général Marc Watin-Augouard, Directeur du Centre de Recherches de l'EOGN</li>
</ul>
<p>Matinée : <strong>La donnée, singulière et plurielle</strong></p>
<p>09h00 //Table ronde 1/ <ins>Qu’est-ce qu’une donnée ?</ins> Modérateur Jean-Paul Pinte (Université Catholique de Lille, Dr en Information Scientifique et Technique )</p>
<ul>
<li>♦ Pour un informaticien : Jean Rohmer (Pole Universitaire De Vinci)</li>
<li>♦ Pour un économiste : Christian Schmidt (Paris Dauphine)</li>
<li>♦ Pour un philosophe : Emmanuel Brochier (IPC)</li>
<li>♦ Pour un sociologue : Antoinette Rouvroy (Université de Namur)</li>
</ul>
<p>10h00 //Débat - 10h45 //Pause</p>
<p>11h00 //Table ronde 2/ <ins>De la donnée aux données</ins> Modérateur Christine Ballagué (Institut Mines Télécom Paris – Vice-Présidente du Conseil National du Numérique)</p>
<ul>
<li>♦ Données de masse (Big Data) aujourd'hui : Jean-François Marcotorchino (Thalès)</li>
<li>♦ Données et ville intelligente : Jean-François Soupizet (Futuribles)</li>
<li>♦ L’Internet des objets et le décuplement des données : Eric Hazane (EchoRadar)</li>
<li>♦ Véracité de la donnée ? : Thierry Berthier Université de Limoges, EchoRadar</li>
<li>♦ Qui possède les données ? Gérard Haas (avocat)</li>
</ul>
<p>12h00 //Débat - 12h45 //Pause Cocktail</p>
<p>Après midi : <strong>La donnée au cœur des stratégies</strong></p>
<p>14h00 //Table ronde 3/ <ins>Donnée et stratégie d'entreprise</ins> - Modérateur :Général Watin-Augouard (EOGN)</p>
<ul>
<li>♦ Données de masse (Big Data) aujourd'hui : Jean-François Marcotorchino (Thalès)</li>
<li>♦ Les données, nouvelle devise ? Yannick Harrel (EchoRadar)</li>
<li>♦ Transformer l’entreprise autour de la donnée : Bruno Teboul (Keyrus)</li>
<li>♦ Des acteurs français ou européens du Big Data, est-ce possible ? : Laurent Bloch (IFAS)</li>
<li>♦ Intelligence économique et Big Data : Jean-Pierre Vuillerme (ADIT)</li>
</ul>
<p>15h00 //Débat
15h45 //Pause</p>
<p>16h00 //Table ronde 4/ <ins>Donnée et stratégie de l’état</ins> Modérateur : Olivier Hassid (CDSE)</p>
<ul>
<li>♦ Le Big Data, le RoSO (Renseignement d’origine Source Ouverte) , et la transformation de la fonction renseignement Axel Dyèvre (CEIS)</li>
<li>♦ Les militaires et l’utilisation militaire opérationnelle des données Olivier Kempf (La Vigie, EchoRadar)</li>
<li>♦ Sécurité intérieure et Big Data Philippe Davadie (CESG)</li>
<li>♦ Peut-on réguler internationalement le Big data ? Thibault Lamidel, EchoRadar</li>
<li>♦ Cadre national ou européen ? Frederick Douzet (Chaire Castex de Cyberstratégie)</li>
</ul>
<p>17h00 //Débat</p>
<p>17h45 //Conclusion générale par Olivier Kempf</p>
<p>Pour plus d'informations
Nathalie Floc'h : +33 (0)1 41 34 11 48 - colloque-bigdata@keyrus.com</p>
<p><img src="http://cyberland.c.y.pic.centerblog.net/essai-baniere-colloque.jpg" alt="" /></p>http://www.egeablog.net/index.php?post/2015/03/03/Colloque-La-donn%C3%A9e-n-est-pas-donn%C3%A9e-23-mars-2015#comment-formhttp://www.egeablog.net/index.php?feed/atom/comments/2010