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La France peut-elle encore agir sur le monde ? Frédéric Charillon

C’est peu dire que ce livre était attendu.

La France peut-elle encore agir sur le monde ?

  • Frédéric Charillon, Armand Colin, 2010

L'auteur, en effet...

C’est peu dire que ce livre était attendu. L’auteur, en effet, est le directeur de l’IRSEM (institut de recherche stratégique de l’école militaire). Sa nomination a beaucoup surpris à l’époque, car il était parfaitement inconnu, même du milieu. Et à regarder sa bibliographie, on ne trouvait pas grand chose, sinon la direction de quelques ouvrages collectifs, et quelques articles. Bref, si on ne doutait pas qu’en sa grande sagesse, l’Etat avait désigné la personne idoine, on s’interrogeait quand même.

Voici donc qu’à la sortie de l’été surgit cet ouvrage, assez bref mais, disons le d’emblée, habilement construit et conçu. Les préparants au CID, qui persistent à se croire obligés à un plan en trois parties qui serait de rigueur (militaire), trouveront là un modèle du genre : trois grandes parties, trois chapitres chacun, trois subdivisions, trois idées, le rythme ternaire anime l’ouvrage, avec d’ailleurs le liant suffisant pour que cela ne lasse pas : on voit là beaucoup de métier que l’on crédite à l’auteur. La langue est souple, il y a des constats et des idées, des références nombreuses sans être pesantes : autant dire que l’ouvrage est convaincant et qu’il couvre le sujet.

L’auteur soutient un européisme raisonnable qui part du constat que la France a du mal aujourd’hui à avoir une politique étrangère robuste, à cause d’un environnement très versatile et de l’affaiblissement des possibilités de puissance. Il n’est toutefois pas sûr que l’Europe constitue le meilleur moyen de redonner de la raideur à cette diplomatie....

L’auteur insiste sur la notion d’influence, et déplore le manque de politique appuyée en la matière ; pour le coup, nous partageons son diagnostic : il ne s’agit pas de s’interroger si la France compte encore, « la question est plutôt de faire savoir à l’extérieur pourquoi la France compte toujours, et de faire comprendre pourquoi il est bon qu’il en soit ainsi. (...) la diplomatie française doit offrir des avantages comparatifs qui justifient le choix de la France comme partenaire plutôt que d’autres » (p. 189).

Au final, un livre agréable, qui traite son sujet de façon sérieuse et plaisante, sans être forcément novatrice. C’est un ouvrage qui fait plus le point qu’il n’ouvre de grandes perspectives, mais qui constitue la base de départ du travail plus ample et plus ambitieux que l’on attend. Si l’auteur a donc un peu calmé nos impatiences, il ne les a pas totalement rassasiées.

Qu'il reçoive donc nos meilleurs encouragements, ainsi qu'à son institut.

O. Kempf

Commentaires

1. Le mercredi 16 février 2011, 21:46 par

Il faut peut être lire cet ouvrage, alors, avec celui d'Hervé Coutau-Bégarie, "Le meilleur des ambassadeurs" (Economica, 2010, photographie de couverture par Theatrum Belli). Le résumé sommaire de cet ouvrage pourrait être, que dans le comparatif de l'activité politique des Flottes, la France est derrière les Etats-Unis, première puissance dans le genre.

A noter que si l'on considère que la puissance navale est une composante de la puissance maritime alors :
1. La France est puissance navale de second rang avec le Royaume-Uni (les deux seules marines de cette strate dans la hiérarchie de Coutau-Bégarie, l'US Navy est première, bien entendu).
2. Nous avons donc cette deuxième place sans contestation dans l'activité politique des Flottes (diplomatie navale).

La deuxième place en matière d'activité politique des Flottes (non partagée avec la Royal Navy du fait de l'abandon des places east of Suez) nous donnerait, donc, une seconde place mondiale en tant que puissance maritime.

La France, deuxième puissance maritime au monde ? Il y a donc un outil français plein d'avenir (qui ne saurait pas se passer des Armées de Terre et de Mer, bien entendu).

L'auteur de l'ouvrage présenté cherche à savoir pourquoi l'on compte ? Je résume la pensée (de façon très grossière) du théoricien français de la diplomatie navale :

1. Les alliés de la France peuvent attendre d'elle une démonstration navale pour faire savoir que la France sera à leurs côtés et le montrer à leurs rivaux. On est dans le registre de la "diplomatie de la puissance".
2. Les multiples escales de nos vaisseaux contribuent à tisser des liens avec des populations côtières. Le grand symbole c'était la Jeanne d'Arc qui était de tout les sinistres pour porter assistance, et les populations côtières le savent pour Coutau-Bégarie.

Cela nécessite une marine nombreuse, et là dessus, il ne faut pas confondre marine nombreuse et corps de bataille nombreux. Pour rebondir sur le sujet, il faut donc lire Corbett (la protection des communications contre la fausse bataille décisive) et l'amiral Elmo Zumwalt (sur la marine Hi-Lo).

Mon petit rebondissement est là pour désigner les moyens de la Marine du XXIe : une flotte nombreuse, faite de navires rustiques (frégate Floréal, BPC, etc...).

égéa : tu vas acheter de toute urgence le dernier bouquin de Joseph Henrotin, que je viens de recevoir. Il classe la France en "marine de deuxième rang", comme toi (sur un classement qui compte six rangs de marines).

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