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vendredi 20 mars 2009

La Chronique de Jérôme Pellistrandi

Voici la chronique de mars de l'ami Jérôme Pellistrandi. Grand merci à lui.

La trêve de Noël a été de courte durée et l’actualité internationale a vite repris son rythme dramatique, accentué par une récession économique aux conséquences encore sous-évaluées.

Certes, l’investiture, en janvier, aux Etats-Unis du Président Obama a ouvert une nouvelle ère que tout le monde espère moins unilatérale et plus ouverte vers les partenaires de Washington. Mais les nuages noirs continuent à s’amonceler en ce printemps, notamment avec la crise économique qui se transforme en crise sociale dans de nombreux pays.

L’Irak semble enfin sortir du cycle infernal de la violence. La reconstruction de l’administration et l’accroissement de la sécurité permettent (...) Lire la suite

lundi 16 février 2009

La chronique de Jérôme Pellistrandi (février 2009)

Voici, chers amateurs, la chronique mensuelle de Jérôme Pellistrandi, que j'ai encore une fois le plaisir d'accueillir.

La trêve de Noël a été de courte durée et l’actualité internationale a vite repris son rythme dramatique, accentué par une récession économique aux conséquences encore sous-évaluées. Certes, l’investiture aux Etats-Unis du Président Obama ouvre une nouvelle ère que tout le monde espère moins unilatérale et plus ouverte vers les partenaires de Washington. Mais les nuages noirs s’amoncellent en ce début d’année. La piraterie maritime au large de la Somalie focalise actuellement l’attention avec des attaques plus fréquentes et des prises spectaculaires obligeant les grandes puissances à y déployer des navires de guerre. L’Union européenne a lancé l’opération Atalante, tandis que d’autres marines contribuent à la surveillance de cette route maritime essentielle du commerce mondial. La Russie, l’Inde mais également la Chine y ont envoyé des escadres. Pour Pékin, c’est la première expédition navale en dehors de ses eaux littorales depuis six siècles !

L’Afghanistan ne connaît plus de pause hivernale et les attaques et attentats se succèdent à un rythme quotidien. Le décès au combat d’un capitaine particulièrement chevronné du 35° RAP montre que l’engagement français n’est pas une simple opération de maintien de la paix mais bien une opération de guerre. Depuis le début de l’année, une trentaine de soldats de la coalition sont ainsi morts sur ce théâtre.

L’accident d’un de nos hélicoptères Cougar au Gabon, en janvier, avec huit tués, nous rappelle également que l’entraînement et l’aguerrissement restent des missions exigeantes et toujours difficiles mais indispensables pour garantir l’efficacité opérationnelle de nos forces.

La défense française engagée dans un processus important de restructurations et de réduction de son format continue sa modernisation et les dernières semaines ont vu des projets se concrétiser.

Ainsi, pour l’armée de terre, une nouvelle commande de VBCI a été passée pour 116 engins. 298 véhicules ont donc déjà fait l’objet de commandes et 41 ont été réceptionnés.

De plus, la chaîne de montage de Nexter passera à 96 engins par an, au lieu de 75, grâce au plan de relance. Simultanément, les derniers AMX 10 P rénovés ont été livrés au 92° RI de Clermont-Ferrand. Au total, 108 AMX 10 P ont fait depuis septembre 2005 l’objet de ce programme de rénovation pour un montant de 60 millions d’euros. Il faut souligner ici que son homologue américain, le M 113, plus ancien, fait lui aussi l’objet de reconstructions régulières. Produit à partir de 1960 à plus de 80 000 exemplaires, le M 113 est toujours en service y compris dans l’US Army qui en déploie encore 10000 dont plus de 500 en Irak.

Prenant en compte le Retex (Retour d’Expérience) du théâtre afghan, l’EMAT a décidé de mettre en place sur ses VAB, des tourelleaux téléopérés depuis l’intérieur du véhicule afin d’éviter d’exposer le tireur. Les 6 premiers engins viennent d’être livrés pour partir en opération tandis que les 54 autres VAB le seront au cours de ce trimestre. L’artillerie entame elle aussi sa mutation avec l’arrivée très prochaine du canon Caesar au 93° Régiment d’Artillerie de Montagne de Varces.

A la fin 2008, la DGA a commandé au profit de l’ALAT, 22 nouveaux hélicoptères de manœuvre NH 90 TTH. 12 avaient déjà été commandés en 2007, ce qui représente désormais un total de 34 engins. Avec les 27 destinés à l’Aéronavale, la défense française doit recevoir 61 appareils sur une cible prévue de 160. Les livraisons attendues avec impatience ne débuteront cependant pas avant 2011 avec un premier exemplaire, puis six l’année suivante. Théoriquement, si le programme ne connaît pas de difficultés techniques, l’ALAT devrait ainsi disposer de au mieux 23 NH 90 en 2014. Pour la marine, la première livraison n’interviendra désormais que début 2010, obligeant ainsi à louer des hélicoptères belges pour assurer les missions de sauvetage en mer. Le retard pour la version navale est de plus de quatre ans en raison de difficultés techniques. Le NH 90 a été acheté à 529 exemplaires par 14 pays.

La prise en compte du besoin de protection en déplacement s’est traduite par le programme du Petit Véhicule Protégé (PVP). En ce début d’année, 232 PVP ont été ainsi commandés pour atteindre 546 PVP en cours de fabrication. 218 PVP ont déjà été livrés aux forces et certains ont été déployés en OPEX, en Georgie, au profit de la gendarmerie. La cible est de 933 PVP d’ici 2012 et 1500 pour 2015. Le plan de relance de l’économie doit permettre au constructeur, Panhard d’augmenter sa production pour atteindre 300 PVP par an.

Ces programmes étaient attendus avec impatience par l’armée de terre et permettent de concrétiser enfin cette modernisation indispensable.

Le plan de relance de notre économie présente un volet important pour notre défense avec l’accélération de certains projets. Ainsi, pour pallier la baisse inquiétante du plan de charge des chantiers navals de St Nazaire, un troisième Bâtiment de Projection et de Commandement devrait y être construit à partir de la fin de cette année pour une mise en service en 2012. Le contrat en cours de négociation prévoit même une option pour un quatrième exemplaire qui pourrait suivre. Ces deux nouveaux BPC permettraient ainsi de remplacer les deux TCD du type Foudre qui seraient alors proposés à la vente. 2012 sera ainsi une année décisive notamment pour le deuxième porte-avions qui pourrait utilement sauver St Nazaire pendant deux ans. En effet, hormis le BPC acquis, les cales seront vides à l’été 2010, faute de paquebots en commande. Dès à présent, la DGA va notifier dans les semaines à venir des commandes de batellerie et de bateaux de servitude pour maintenir l’activité dans les petits chantiers navals.

Notre dissuasion nucléaire a connu une étape importante avec le début, fin janvier, des essais à la mer du quatrième SNLE de nouvelle génération, le Terrible. Ce sous-marin a nécessité 800000 heures d’études et 15 millions d’heures de construction pendant 8 ans. Il sera admis au service actif en 2010 et mettra en œuvre le nouveau missile stratégique M51. Pour Cherbourg, désormais, ce sont les sous-marins Barracuda qui vont occuper l’actualité pour les vingt ans à venir.

Très récemment, le caisson sous-marin Cétacé qui avait servi aux essais du missile M 51 a été mis sous cocon. Il pourrait servir pour des essais complémentaires du M 51 mais surtout pour préparer à l’horizon 2025 les futurs sous-marins de troisième génération.

Le concept de dissuasion reste donc d’actualité en ce trentième anniversaire de la révolution islamiste en Iran, qui, en mettant en orbite le satellite Omid de 27 kg avec le lanceur spatial Safir 2, dérivé du missile Shahab-3B, est devenu la dixième puissance spatiale. Cette réussite inquiète en raison des menaces permanentes que fait peser Téhéran sur Israël. La campagne présidentielle iranienne qui va débuter pour les élections de juin pourrait conduire à des surenchères nationalistes dangereuses.

La Grèce va entamer des négociations avec Paris pour l’acquisition de six frégates FREMM ainsi que de quinze hélicoptères Super Puma. Par contre, pour le Rafale, la proposition française vient d’être rejetée. Restent en concurrence l’Eurofighter et le F 16 D. La principale chance d’exportation du Rafale semble être la Suisse qui annoncera son choix cet été. Il faut rappeler que le démonstrateur du Rafale a effectué son premier vol le 4 juillet 1986. A ce jour, 120 avions ont été commandés et 64 avions ont déjà été livrés dont les 13 premiers destinés à l’Aéronavale et qui ont été arrêtés de vol en 2008. C’est un avion en constante évolution technologique, suivant de fait ce qui se passe pour les avions de l’US Air Force et de l’US Navy.

Le 12 février, à l’heure prévue depuis plusieurs semaines, le 187° vol d’Ariane a permis de mettre en orbite deux micro-satellites de 117kg, destinés au programme d’alerte avancé Spirale. Ces deux engins ont une durée de vie courte, 14 mois, mais qui devrait permettre la collecte de données indispensables pour le futur. C’est une étape décisive pour la défense française, mais également européenne, qui devrait permettre de surveiller les risques de prolifération balistique. Spirale est une première étape qui devrait être suivie par un satellite en orbite géostationnaire lancé vers 2018-2019.

EADS est confronté à une nouvelle tempête avec le fiasco industriel autour de l’avion militaire A 400M. Le pire n’est malheureusement peut être pas encore arrivé. Rien ne va plus mais il n’y a pas d’autre choix que de poursuivre le programme. Renoncer à l’A 400M viendrait à renoncer définitivement à l’autonomie stratégique de l’Europe. Ce serait un échec majeur. D’ici là, il faut tout revoir notamment l’organisation industrielle et l’avion lui-même, trop lourd, trop compliqué et trop novateur. Le premier vol du prototype – en partie démonté- n’est pas prévu avant 2010 et les livraisons ne commenceraient pas avant 2014. D’ici là, il faudra trouver des solutions palliatives pour le transport de nos forces. Air France- KLM confrontées à la crise économique, proposeraient leurs avions cargos en panne de fret civil actuellement. La Brigade Franco-Allemande (BFA) a été au cœur des annonces faites début février par les autorités françaises et allemandes à Munich. Lors de la présentation de la carte militaire, la BFA avait suscité l’inquiétude de nos partenaires allemands qui craignaient un retrait pur et simple des derniers régiments français stationnés sur le territoire allemand. La symbolique de la BFA est trop sensible pour envisager un tel choix. Par ailleurs, se posait la problématique de l’abandon de garnisons de l’Est dont Bitche qui se sentait sacrifiée sans réelle contrepartie viable. Au final, l’arrivée d’un bataillon allemand à Illkirch-Grafenstaten, à la place du 1° Régiment du génie qui sera dissous, marque une étape décisive. Il faut cependant souligner que de nombreux militaires allemands sont déjà stationnés en France, à l’Eurocorps de Strasbourg ainsi qu’à l’Ecole de l’hélicoptère Tigre, au Luc en Provence.

Les 3 et 4 avril, l’OTAN fêtera son soixantième anniversaire lors d’un sommet exceptionnel organisé conjointement par la France et par l’Allemagne, à Strasbourg, Kehl et Baden Baden. A cette occasion, Paris devrait formaliser son retour dans la structure militaire intégrée. Le dossier est assez complexe car cela oblige l’Alliance à revoir la répartition de ses postes importants pour permettre à la France d’accéder aux responsabilités qu’elle est en droit d’attendre. Cela signifie aussi que les autres membres doivent accepter de rendre des postes, ce qui est toujours difficile au moins sur le plan politique. Par ailleurs, il sera intéressant de voir quelle sera la place accordée aux officiers français dans la chaîne de commandement des opérations, celle qui compte.

La crise économique mondiale à laquelle nous sommes durablement confrontée est-elle propice à la violence et à la guerre ? Le ralentissement des industries et des échanges commerciaux peut-il trouver un exutoire dans le nationalisme et la fuite en avant ? Le partage inéquitable des matières premières et des richesses est-il vecteur de conflit ? A ces interrogations se rajoutent la question environnementale et le changement climatique dont les conséquences sur les populations les plus fragiles pourraient être dramatiques.

Jérôme PELLISTRANDI

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