Qui a dit que le Moyen-Orient n'était pas prêt pour la démocratie ? Personne? et pourtant, on entend (ou sous-entend) cette antienne dans maints cercles occidentaux, l'air de dire : de toute façon, ils n'en sont pas capables. Et l'on s'était gaussé des néo-conservateurs qui avaient cru qu'il était possible d'apporter les valeurs américaines dans ce Moyen-Orient.

1/ D'abord, il est probable que cette justification n'est intervenue qu'après l'intervention en Irak, et qu'elle n'est jamais venue à l'esprit d'un décideur ou conseiller de l'administration Bush, au moment de la décision de la guerre.
2/ Ensuite, si les néo-cons sont critiquables à bien des égards, ils présentent quand même des arguments qui méritent réflexion. Et on a eu tôt fait de les assimiler à G. W. Bush ou aux républicains croyants, alors que les choses sont bien plus compliquées que cela; par ailleurs, le bouquin de Kagan "la force et la faiblesse" demeure toujours une œuvre pertinente, même si je n'en partage pas toutes les conclusions.
3/ Ces déclarations étant données, qu'il soit bien clair que je ne suis pas neo-con (éventuellement vieux-con, mais c'est un autre débat).
4/ Or, j'observe un certain nombre de faits :
- - lors des élections au Kurdistan, une opposition récente parvient à secouer le duopole du PDK et de l'UDK, deux partis arc-boutés depuis des années sur l'indépendance hors d'Irak.
- - les élections iraniennes sont apparues, pour les Iraniens d'abord, comme un trucage insupportable, au point que les plus fervents khomeynistes dénoncent la main-mise du pouvoir par le "guide suprême" et qu'on assiste à la persistance des manifestations, et à la rupture des radicaux entre les khameynistes et les ahmadinedistes (selon une ligne de partage que personne n'explique aujourd'hui clairement, d'ailleurs).
- - enfin, rappelons que les élections au Liban (même si le Liban n'appartient pas au Moyen-Orient) se sont déroulées correctement et dans des conditions démocratiques convenables (même si le système électoral est fondé sur des circonscriptions claniques, et même si le résultat a du mal à produire une majorité de gouvernement)
5/ Conclusion : contrairement à ce qui vient à l'esprit de beaucoup d'occidentaux, et peut-être le vôtre, cher lecteur, le Moyen-Orient paraît mûr pour la démocratie, puisque chaque fois qu'on lui en donne la possibilité, le "peuple" exprime clairement sa volonté sans tomber systématiquement dans les écueils radicaux ou islamistes (même si, je sais, il y a aussi des contre-exemples : le FIS en Algérie en 1990, ou le Hamas à Gaza il y a trois ans)..
Cela méritait d'être dit. Il faut le garder à l'esprit quand on raisonnera à l'avenir sur la région.
Réf :
O. Kempf