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La guerre de Gaza, vu du Hamas

Essayons de voir la guerre en cours avec les yeux de l'autre belligérant, ceux du Hamas. Et en sortant de la vision larmoyante et morale que les partisans de la cause palestinienne emploient à l'excès, la desservant par la même occasion. J'y suis incité par la lecture de l'excellent billet de Zeus Irae (ici), qui vient régulièrement commenter mes billets ces derniers temps, et je le remercie au passage de sa contradiction fructueuse. On lira aussi avec intérêt l'article de M. Dalhan dans le Monde d'hier soir (ici).

1/ Le Hamas, présenté comme croquemitaine par Israël, suivi en cela par les Occidentaux, ne dispose finalement que de très peu d'armes : - les quelques roquettes qu'il fabrique (visiblement seul, avec peu de soutien extérieur). Militairement, il a cessé les attentats suicide qui l'ont fait ranger dans les organisations terroristes. - la non reconnaissance d'Israël - sa survie aux coups - le constat par les Palestiniens que la voie de la négociation ne mène à rien (l'Autorité palestinienne, ayant choisi le dialogue avec Tel-AViv, n'a rien apporté aux Palestiniens depuis... des années). - quelques réseaux extérieurs, avec les Frères musulmans égyptiens, avec la Syrie, avec Téhéran (de loin). Tous plus fragiles les uns que les autres. Par conséquent, le Hamas domine la bande de Gaza (D'ailleurs, sa disparition entraînerait une anarchie dont il n'est pas sûr qu'elle soit préférable à sa présence qui régit la population gazaenne).

2/ Quels que soient les coups frappés par Tsahal en ce moment, sa survie me paraît assurée car il y aura toujours des "jeunes" pour remplacer les militants qui sont tombés ces jours passés. Et la disparition d'un ou deux responsables politiques à Gaza favorisera l'émergence de nouvelles têtes. Les roquettes continuent de partir, marquant symboliquement la volonté d'en découdre.

3/ Les roquettes pourront cesser ou dimiuner, provisoirement. Et les tunnels ne seront vraisemblablement jamais contrôlés en totalité. Il y aura donc persévérance de l'affrontement.

4/ Or, cet affrontement est existentiel. Pas seulement pour le Hamas, même si c'est d'abord le cas du Hamas. On a l'impression que les deux parties n'existent que parce qu'il y a affrontement. C'est évident s'agissant du Hamas. Mais cela semble également le cas de la part d'Israël.

5/ La conclusion est simple : le Hamas perdurera à l'opération en cours. Il n'y a pas de solution militaire. Celle-ci est fondamentalement politique. Et elle est entre les mains d'Israël, car c'est le seul à avoir l'initiative.

6/ C'est ici que l'on peut évoquer un scénario différent du 3ème scénario que je vous ai proposé avant-hier : A cause de leur fermeté alors qu'ils sont atuellement au pouvoir, les tenants d'une politique de négociation (Livni et Barrack) réussissent à former une coalition : ils ont donné à l'électeur israélien le sentiment que le camp de la paix ne braderait pas la sécurité d'Israël. En ce sens, la guerre en cours est un bien (insoupçonné) si elle les conduit au pouvoir. D'autant que cette fermeté n'empêchera pas le constat qui existera à l'issue des élections : le Hamas existe toujours. Une voie de négociation est alors possible, non seulement avec la Syrie, mais aussi avec les Palestiniens. Il y a à ce moment une alternative, selon le résultat des élections palestiniennes de février (à supposer qu'elles se tiennent) : soit la Fatah, soit le Hamas. Ce sera plus facile avec le Fatah. Pour le reste, chacun connaît les voies du réglement : retour aux frontières de 1967, partage de Jérusalem, abandon par les Palestiniens du droit au retour. Si cette initiative politique réussit (favorisée, on s'en doute, par le gouvenrement Obama), on assiste à un incroyable retournement de situation. Le Fatah gagne a légitimité qu'il a perdue. Les régimes arabes modérés soupirent de soulagement, et la voie extrémiste à Téhéran est subitement affaiblie, puisqu' Hamadinedjad n'a plus de fonds de commerce pour faire campagne : les voies d'une négociation générale au Moyen-Orient s'ouvrent alors avec d'excellentes perspectives. Avouons que ce scénario est plausible : c'est-à-dire envisageable, avec des chances de se réaliser. Mais 1/ que ces chances sont faibles. Et 2/ que surtout elles reposent sur le sort des élections israéliennes de février, dont on ne peut préjuger actuellement, malgré les sondages. Tout ceci pour dire que si l'on veut une victoire des réalistes (donc des opposants à Netanhyaou), il faut s'accommoder de la conduite actuelle des opérations. Ce qui est tout sauf une garantie, d'ailleurs.

Mais l'intérêt (et le défaut) des scénarios prospectifs, c'est qu'ils aident à penser la réalité future por mieux comprendre la réalité actuelle. Ce n'est pas de prévoir l'avenir.

O. Kempf

Commentaires

1. Le vendredi 16 janvier 2009, 18:32 par Robert

A Propos du point 4:
Israël existe, et existe bien autre que par ses affrontements militaires avec la Palestine.
- Sportivement: participe et gagne dans de nombreuses disciplines (foot, basket, etc.)
- Scientifique: Israël participe aux programmes cadres de l'Union Européenne, seul pays hors zone européenne !
- Militairement: Israël est membre de l'ONU bien comme presque le monde entier, mais à la différence près que la Palestine non !
- etc .
Non, je pense réellement que ce conflit n'est pas pour Israël une finalité ni une fin en soi. Mais plutôt, l'expression d'un ras-le-bol. Certes, la défense (transformée en attaque) n'est pas proportionnelle, qu'avant l'action militaire, l'action diplomatique aurait pu être tentée, mais est-ce que cela aurait été efficace sinon déjà fait ? Je pense qu'Israël a assez de cartes à jouer sur le plan International autre que la guerre pour exister. Mais bon ...

2. Le vendredi 16 janvier 2009, 18:32 par Chaps

Israel a-t-elle vraiment quelque chose à gagner avec la Paix?

De part son statut de "seule démocratie du Proche-Orient" et de pays "en état de siège", Israel reçoit au moins 1 milliard de dollars des USA en aide militaire et environ un milliard via la diaspora (si un expert pouvait préciser ces chiffres, j'ai vu trop d'estimations différentes).

Avec ces afflux d'argent, elle a pu consacrer ses propres ressources à d'autres projets et notamment à construire une industrie de l'armement très florissante (presque au niveau des exportations militaires françaises ; 10% du marché mondial?) et créatrice de milliers d'emploi hautement qualifiés (en Israel il y a 140 ingénieurs pour 10 000 travailleurs; 85 aux USA ; 60 en Allemagne selon Wikipédia).

Or, l'économie israelienne est fragile. Le taux de chomâge est assez haut (10% en 2003, 8% en 2006) et la balance commerciale est bénéficiaire depuis quelques années seulement.

Donc la situation de guerre permanente est bénéfique sur certains points.
En diabolisant ou en mettant les palestiniens dans des positions qui les poussent à la violence (humiliation, terrorisation des populations en tuant régulièrement quelques civiles - snipers sur tours d'observation - bulldozers, destruction des infrastructures économiques - électrique-téléphone-conduits d'eau et d'égout-habitations civile - routes - blocus généralisé empêchant tous développement économique et donc toute pacification), il s'assure d'avoir un prétexte (la capacité de nuissance du Hamas est relativement réduite) au statut quo qui assure sa relative prospérité économique actuelle pour un coût humain réduit (10 tués entre 2004 et 2007 + 13 morts récemment dont 10 militaires).

Dans un contexte de paix, Israel risque de voir les aides américaines réduites, les dons de la diaspora se tarir puisque le pays ne risque plus de disparaitre et les perspectives de commerce avec ses voisins seraient faibles. Ces pays sont plus pauvres qu'Israel et les populations sont de fait hostiles à la consommation de produits israeliens. Bref, beaucoup d'incertitudes sur son économie.

Et un tien vaut mieux que deux tu l'auras comme dit le dicton.

3. Le vendredi 16 janvier 2009, 18:32 par

merci pour l'artclle, si seulemment vous etiez un peu pluss precis dans votre analyse!!!

4. Le vendredi 16 janvier 2009, 18:32 par

Bonjour,
"En diabolisant ou en mettant les palestiniens dans des positions qui les poussent à la violence"... Il me semble que, si l'on veut bien y regarder de près, les pays arabes, bien avant Israel, ont quelques raisons non formulées de maintenir les palestiniens dans ces positions. C'est bien souvent Israel qui est diabolisé en premier lieu dans nos médias européens.

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