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45ème Wehrkunde : suite des discours

Je clos ici la lecture des discours (liste des discours) donnés à la 45ème conférence de sécurité de Munich, début février, et enfin mis en ligne. Voir mon précédent billet.

Discours de N. Sarkozy (ici en français)

Tout d'abord, l'affirmation d'un concept : non pas unipolaire ou multipolaire, le monde est autre : "Nous sommes dans un monde de « puissances relatives ». Du coup, l'unilatéralisme américain a vécu : Une seule puissance ne peut pas régler les grands conflits du monde. Et le président d'ajouter : Quand il y a « des puissances relatives », alors il faut la solidarité et la coopération. Le XXIe siècle sera le siècle de la coopération et de la solidarité. C’est pourquoi, d’ailleurs, je suis tellement attaché à l’amitié avec les Etats-Unis d’Amérique. L’amitié en alliés indépendants et respectueux chacun de ses valeurs. Je trouve que pour un atlantisme, c'est une déclaration d'amour fort distante. Le modèle américain a-t-il vécu ?

Vient la question des élargissements : "devenir membre de l’Union européenne ou devenir membre de l’OTAN, ce n’est pas un droit. Et plus loin : parce que quand on rentre dans l’OTAN, on assume sa part de responsabilités. Dès lors, N. Sarkozy rappelle (avec un style... oral) le ciment actuel franco-allemand : J’ajoute : le partage du fardeau, chacun a du prorata. Je partage ce qui a été dit s’agissant de l’Ukraine et de la Géorgie. Nous avions avec Angela au Sommet de Bucarest, partagé la même conviction et dit les mêmes choses.

A propos de la Russie, à cause du gaz et de la guerre géorgienne, il convient qu' il y a une méfiance croissante entre l’Union européenne et la Russie.Mais aussitôt, il estime qu'il n'y a pas de risque : Il faut restaurer la confiance. (...) Je ne crois pas que la Russie d’aujourd’hui soit une menace militaire pour l’Union européenne et pour l’OTAN. J’ajoute qu’il serait quand même invraisemblable, avec tous les problèmes que porte le monde, que d’organiser une confrontation entre la Russie et l’Europe.

Alors arrive la vraie nouveauté de ce mois de février, l'annonce d'une nouvelle perspective : je pense qu’un objectif serait qu’un jour, entre l’Union européenne et la Russie, nous construisions un espace économique et humain commun. A mon sens, il y a plus là que le simple suivisme de la proposition Medvedev : il y a une profonde émancipation vis-à-vis des Etats-Unis. Non pas que M. Sarkozy n'ait pas été sincère, au début de son septennat, dans son américanophilie. Mais la crise est passée par là, et la désillusion économique traduit peut-être la fin d'un rêve. On lira mon billet où je présentais cette évolution, qui se trouve ici confirmée.

Et immédiatement, il lie la question pan-européenne à l'océan du nord, sujet "brûlant" (si on me pardonne ce mauvais jeu de mot) et que j'évoque régulièrement dans ce blog. A propos de l’Arctique. Le réchauffement climatique conduit à quoi ? L’ouverture de la route du Nord. ''On ne va pas faire de l’Arctique le nouveau territoire d’un conflit entre les Etats-Unis, la Russie et l’Union européenne, cela n’aurait absolument aucun sens''. Ainsi, le président ne se range pas derrière l'Amérique dans l'opposition actuelle qui la confronte à la Russie.

Au sujet de la dissuasion, je note ses paroles, qui expriment un rapprochement avec la Grande-Bretagne : Cela posera d’ailleurs, dans l’avenir, la question de la complémentarité entre ces puissances nucléaires, forcément indépendantes, et la sécurité de l’Europe dans son ensemble. Il y aurait ainsi un partage des rôles : avec la GB, les affaires militaires et nucléaires (dont ne veulent pas les Allemands) ; avec l'Allemagne, la direction du dialogue avec la Russie et l'écriture d'un nouveau modèle de sécurité pan-européen.

Je remarque enfin l'expression de la doctrine bruxelliste, que j'avais été le premier à déceler il y a deux ans (voir mon article dans DNSC en nov 2007), et qui n'a jamais été aussi nettement exposée par le président : Dans mon esprit les choses sont claires : c’est l’Europe de la Défense et l’Otan, pas l’Europe de la Défense ou l’OTAN. Les deux ensemble.

Discours de J de Hoop Scheffer (voir ici)

Tout d'abord, JHS explique qu'il ne va pas parler de l'Afghanistan, contrairement à l'habitude : symboliquement, cela illustre un certain désengagement psychologique. C'est que chacun pressent qu'il y a bien d'autres sujets à évoquer, même si l'Afghanistan demeure essentiel.

IL note d'abord le besoin de parler à l'est : I believe that there are two partnerships that need to be fundamentally strengthened: the relationship between Russia and the West; and the relationship between the United States and Europe. Toutefois, ce dialogue est une négociation? Répondant aux Russes qui appellent à une négociation sur les traités de limitation des armements, il dit : But I cannot see how we can have a serious discussion of such a new architecture, in which President Medvedev himself says “territorial integrity” is a primary element, when Russia is building bases inside Georgia, which doesn’t want them. IL n'accepte pas le principe d'un veto russe à des élargissements de l'Otan, et déplore la fermeture de la base khirghize de Manas.

A propos des relations avec les US, il explique son inquiétude d'une sorte de découplage, les Européens abandonnant les Américains : I am frankly concerned when I hear the US planning a major commitment for Afghanistan, but other Allies already ruling out doing more Il ajoute donc : in the transatlantic relationship as well, our aspirations for a healthier, more sustainable partnership can only work if both parties do their share. C'est le partage du fardeau qui revient. A ceci près que cette expression (burdensharing) désignait autrefois les dépenses de défense inégales entre les deux rives del'Atlantique. Le nouveau fardeau se paye désormais en hommes sur le terrain.

Car si l'administration Obama, explique-t-il, fait des choses que les Européens ont demandé (climat, Guantanamo, il sera normal que les Européens fassent, eux-aussi, un pas en avant.

Il donne ensuite quelques précisions sur le processus d'écriture d'un nouveau concept, processus qui sera lancé à Kehl-Strasbourg (et adopté au sommet suivant). Le concept devra déterminer le rôle du Conseil OTAN-Russie, la relation OTAN-UE (vers un Berlin + à l'envers), le dialogue avec les autres OI, et notamment les Nations-Unies, et enfin et surtout : Enfin, le nouveau concept stratégique doit aussi élargir la manière dont nous comprenons le "cœur de métier" de l'OTAN, comme je l'exposais au début de mon intervention: rendre plus sûr et plus stable l'espace euro-atlantique, et y promouvoir la démocratie. Nous ne devons pas nous limiter à la défense collective, mais réfléchir aussi à la sécurité collective, et à la dimension humaine de la sécurité. On ne sera pas surpris qu'il précise que le nouveau concept devra évoquer la défense contre les cyber-attaques, en matière de sécurité énergétique - sur les mers, par exemple, ou en protégeant les goulets d'étranglements des flux énergétiques, et aux conséquences du changement climatique.

Ce discours est très complémentaire de celui qu'il a prononcé jeudi devant l'AN (voir mon billet ici).

Le discours d'A. Merkel est toujours en allemand. On pourra en lire un TB compte-rendu chez Victor, ici. Merci Victor !

ON lira enfin les interventions de MM. Holbrooke (ici) et Petraeus (ici)

O. Kempf

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