L'acmé qui vient

Quel titre ! Mais où va-t-il chercher tout ça ?

1/ Dans le dictionnaire. Un vieux, qui donne encore des définitions qu'on comprend. Je cite : nf (1751, du grec akmê). phase de la maladie où les symptômes morbides sont au plus haut degré d'intensité. Bref, une sorte d'apogée, mais de "quand ça va mal". Le général Gambotti préférerait, j'en suis sûr, le point culminant. Mais bon. L'avantage d'acmé, c'est que c'est juste assez pompeux (en plus, c'est grec) et scientifique (ça fait médecin, comme dans Molière) et qu'en plus on évite tous les mots à quatre syllabes et plus que nos verbeux adorent utiliser, comme paradigme et procrastination et heuristique et... Non, acmé, c'est pas mal. Et vous avez même des chances que votre correcteur ne connaisse pas vraiment, et là, il sera forcément impressionné. Mais ce coup là, il faut ne le faire qu'une fois au cours de la copie. Naturel, en quelque sort, au détour d'une phrase. Sinon, il va voir que vous enflez et bluffez et marchez soufflez.

2/ Bon, si on en venait au sujet du billet, dites. Parce qu'en plus, ça va mal se passer. On sent en effet qu'on approche du moment où "quelque chose" va, nécessairement, se passer. Et c'est au Proche orient, alors que tous les esprits sont tournés vers l'Iran ou la Corée. Bref, on néglige ce Proche Orient, puisque ça fait cinquante ans que ça va mal : que peut-il encore arriver de pire ?

3/ Derrière cette réaction, il y a le sentiment qu'Israël va continuer à poursuivre le gel du conflit. C'est, au fond, ce qui explique la négligence générale. Or, toutes les pièces du puzzle (le jigsaw puzzle : qq'1 sait-il ce qu'est un jigsaw?) terminent leur mise en place. Décrivons :

4/

  • Israël a été tenu en échec en 2006 par le Hezbollah, ce qui constitue une grande première militaire. Quant à l'opération de Gaza, si Israël n'a pas perdu militairement, il a perdu médiatiquement. (voir billets : ici, ici, ici, ici, ici et ici)
  • La Turquie s'éloigne tout doucement et développe un néo-ottomanisme bon teint : avec ses ex ennemis (Kurdes, Arméniens), mais aussi des voisins plus proches (Syrie, Irak, Iran, et même Arabie). Voir mon billet. Le dernier allié musulman d'Israël dans la région s'émancipe.
  • L'Égypte se crispe (voir ici).
  • Du côté de l'autorité palestinienne, on se résout à la politique du pire. Et le pire, c'est qu'il n'y ait plus personne du côté palestinienne, laissant Israël seul. Je l'avais évoqué dans ce billet. Les choses vont encore plus vite que je ne le pensais, lire ici.
  • Au Liban, le gouvernement de M. Hariri est finalement formé après cinq mois : résultat de longues négociations libanaises ? non, de longues négociations syro-saoudiennes. Ce gouvernement est la conséquence du commencement de réconciliation entre la Syrie et le reste du monde arabe.

5/ Dès lors, la bombe iranienne, ou la brouille avec les Etats-Unis ne sont que des événements lointains, vus d'Israël. L'apparente stabilité actuelle est au contraire l'annonciation des pires dangers.

L'acmé est là. Le pire va bientôt arriver, même si on ne sait pas lequel.

O. Kempf

Haut de page