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Scénario noir (n°2)

Le précédent scénario noir partait de l’économie. L’attaque des marchés contre le Portugal semble le valider. Il y a toutefois un autre scénario noir, pas seulement économique.

1/ La victoire du Fidesz d M. Orban, en Hongrie, semble sonner le grand retour des nationalités en Europe centrale. On croyait la question résolue après les transferts de population décidés à l’issue de la deuxième guerre mondiale ? oui, mais il reste encore à solder les errements de la première. Et c’est la Hongrie qui peut servir de détonateur. Par exemple en pratiquant une politique de passeport qui attribuerait un passeport hongrois à tous les Hongrois de l’extérieur, un peu à la manière des Russes (en Abkhazie ou en Estonie ou au Kazakhstan). Sauf que les minorités hongroises peuvent devenir très agissantes, que ce soit en Slovaquie, en Serbie, en Roumanie voir en Ukraine.

2/ Cette agitation des nationalités s’appuierait simultanément sur les séparatismes d’Europe Occidentale : la Belgique qui explosera d’ici peu lancera le mouvement : la Catalogne suivra aussitôt, puis, peut-être, la Padanie ou la Corse.

3/ Cette fièvre indépendantiste s’articulerait alors avec les populismes européens qu’on a déjà signalés. L’UE ne pourrait rien faire, puisqu’il s’agit d’affaires intérieures. Avez-vous d’ailleurs entendu une réaction européenne à la crise belge ? non, c qui est normal.

Si ce scénario est bon, les géopolitologues auront bientôt du travail, car l’orogénèse (traçage des frontières) va être une discipline fort utile d’ici peu. Je fais vaguement la collection des guides touristiques des pays disparus (Yougoslavie, URSS, ...) : à mon avis, cette collection va s’enrichir de nouveaux volumes.

O. Kempf

PS : Le nationalisme allemand de retour (voir ici) : Le tribunal de Karlsruhe aurait fait un "coup d'état"...

Commentaires

1. Le vendredi 30 avril 2010, 18:25 par

Bonjour,

J'interviendrai uniquement sur le "coup d'Etat" du Tribunal Constitutionnel Allemand de Karlsruhe (Bundesverfassungsgericht).

Ledit tribunal, composé de sommités du monde juridique national Allemand, loin de monter une insurrection (quoique dans la rue avec leurs robes rouges et cravates blanches cela aurait de la "gueule" si je puis me permettre), a surtout rappelé des principes fondamentaux en matière de gérance de l'Etat et de son nécessaire contrôle par les citoyens en lieu et place d'autorités tierces. Mais en aucune façon il n'a bloqué le processus de ratification du Traité de Lisbonne (dont on voit que finalement il ne résout rien sur le fond). Il s'est surtout fait l'écho d'une inquiétude sourde.

La juridiction faisant très bien les choses puisqu'une partie de la décision (ses principaux points) est même disponible en français! http://www.bundesverfassungsgericht...

Cordialement

égéa : certes, Yannick. Ce n'est pas moi qui parle de coup d'état. IL reste que le simple fait que la chose puisse être mentionnée suscite l'intérêt... et on comprend l'idée : le juridisme a des avantages.... c'est même son principal avantage. On le sait depuis Philippe le Bel et les templiers, par exemple.

2. Le vendredi 30 avril 2010, 18:25 par Françoise

Merci, monsieur Kempf, ce billet m'accroche encore plus que les autres. Bon , horogenèse, je crois, le lecteur a corrigé de lui-même. C'est un cauchemar que vous décrivez, vraisemblable car ce n'est plus le nationalisme qui formate pour le bien et pour le mal les pensées (les gens ici ne savent pas ce qui s'est passé le 14 juillet 1789, donc comment ?) -le nationalisme, c'est déjà de la pensée complexe, et on avait pris l'habitude (jadis, comme disent les étudiants) qu'il soit dans sa version constructive le socle de l'Etat . Le régionalisme est plus cool (voire le pâté de maison, pourquoi pas?) et, parfois, le départementalisme : les jeunes gens disent qu'ils sont du 77, du 94, et moi je me demande où c'est (à ma courte honte). Heureusement, l'écartement des voies de chemin de fer reste le même, et les marques de lait en poudre ou de lessive. Les 2 mouvements vont ensemble, régionalisme folkloriste et chauvin et alignement en ordre de la pensée et du goût (important pour un monde de consommateurs), d'ailleurs, pendant que les gens affirment que les chtis sont à Dunkerque, que la Saint Patrick est une fête bretonne, et que la Bretagne a résisté par celtitude à l'intégration linguistique et culturelle. Parce que la celtitude, c'est photogénique.
Bref, un mouvement d"humeur pour vous approuver, en moins sérieux, en plus soucieux et morose . Ce que vous dites est hautement vraisemblable et n'est pas une Europe puissante que cela profile. Heureusement il nous restera les mercenaires suisses (si les Suisses changent leurs lois).
Dans un tout autre monde (mutatis mutandis on dit) l'Union indienne connaît depuis trois décennies une ascension des "régionalismes" (bien sûr rien à voir avec les régions de toutes genèses et sortes de l'Europe), manifestée par les redécoupages successifs d'Etats (voir le Nord-Est et la pulvérisation de l'Assam), qui procèdent de logiques d'ajustements post-décolonisation et de revendications identitaires et économiques, contre le centre fédéral, contre les Etats plus pauvres, contre les langues du Nord, contre les peuples du Sud, contre les immigrés bengalis, contre l'allocation de l'eau des barrages. Tout cela accompagne le déclin , depuis les années 1970, du consentement à la Nation indienne telle que le combat pour l'indépendance l'avait construite : un Etat séculariste, multiple (difficilement, mais dans l'idéal et dans le droit), progressiste, social, auto-suffisant. Les progrès du marché, de la consommation dans une part de la population , l'enrichissement d'une classe "moyenne" (je n'ai pas de meilleur terme) ont étrangement replié les horizons des groupes constituant l'immensité sociale indienne, réactivé les identités religieuses, et tout cela s'est superposé aux fractures traversant l'unité nationale depuis le début, donnant des failles cisaillantes (ça c'est pour l"orogenèse, pas pu m'empêcher).
Bien sûr, ceci est un résumé partiel et peut-être partial. Mais je suis frappée que la montée des revendications de nationalités, de régions, d'appartenances, quelles que soient leurs raisons plus fournies que le tableau que j'en fais, aboutisse toujours, en même temps que d'autres forces convergentes, à décrédibiliser davantage les Etats -et donc la loi, dont la frontière fait partie. On n'a vraiment pas besoin de cela , vraiment pas en ce moment. Mais bon , je m'égare peut-être loin de votre propos.

égéa : horogénè,e bien sûr : je le disais de mémoire, à la suite de l'indispensable bouquin de M. Foucher.J'apprécie beaucoup votre passage sur l"'Inde, qui est très éclairant, et je vais en faire un billet. Mais est-ce à dire que l'Inde est au programme des Khâgnes l'an prochain ?

3. Le vendredi 30 avril 2010, 18:25 par

Bonjour,

Non, non je ne visais pas le sympathique taulier de ce blogue ;-)
Je m'interrogeais en revanche fortement sur l'emploi d'un terme qui ne m'apparaît pas être un polysème. En réalité ça me semble inapproprié sur deux plans : premièrement du fait que l'Union Européenne n'est pas un Etat au sens formel (bien que disposant de la personnalité juridique avec l'article 47 du récent traité) et deuxièmement que la juridiction n'a pas voulu renverser un régime existant mais prévenir tout bouleversement qu'elle estimerait indésirable envers la population nationale.

Il est vrai que le juridisme a été un des moyens les plus probants pour les monarques des temps féodaux pour mettre au pas les seigneurs ou ordres récalcitrants voire menaçants. Les Templiers comme déjà énoncés mais aussi par exemple pour renverser des situations particulièrement mal engagées comme celle de Péronne où Louis XI dut non seulement désavouer les actions de ses propres alliés Liégeois mais aussi céder via un traité imposé de façon comminatoire par le Duc de Bourgogne de précieux territoires. Sitôt remis en liberté, ses légistes œuvreront comme une armée de l'ombre pour dépecer point par point le traité et le faire annuler in fine. La plume s'étant révélée à terme plus forte que l'épée...

Cordialement

égéa : mon seul propos consiste à dire que le droit est d'abord affaire d'interprétation et que c'est pour cela qu'il y a des juris consulte. J'ajouterai que des modifications constitutionnelles sont possibles (il n'y a qu'à voir ce que nous pratiquons, nous, Français)

4. Le vendredi 30 avril 2010, 18:25 par DanielB

Bonjour ,
J'adhère à ce scénario .
C'est aussi celui de Vyachestlav Nikonov le 28 aout 2008 à la Télévision Russe .
http://www.polity.ru/engl/nik-eng.h...
" Après le précédent du Kossovo et la reconnaissance de l'Ossétie du Sud
et de l'Abkhazie il faut s'attendre à de nouveaux changements territoriaux en Europe , je parle ici de l'Union Européenne qui connaîtra le sort de l'URSS . Par là je veux dire que l'Ue éclatera en une confédération centrale- Européenne qui défendra ses intérêts et une " extrême - Europe " ou " Vieille Europe " . Au sein de ces états il faudra s'attendre , comme pour l'ex- Yougoslavie , à des modifications de frontière et après les vociférations , ces modifications de frontière devront être acceptées au nom du * principe de réalité *"

Il existait les " accords d'Helsinki " qui gravaient dans le marbre l'intangibilité des frontières issues de la SGM .
L'agression de la Serbie en 1999 a montré que ces frontières peuvent être modifiées par la force au delà du " consentement mutuel " [ Allemagne , Tchécoslovaquie ] , un exemple que la Russie n'a pas oublié en aout 2008 .
C'était pitoyable au possible de voir Dick Cheney agiter le " chiffon de papier " d'Helsinki lors de sa tournée Européenne et Caucasienne de septembre 2008 , il s'y accrochait comme un noyé essaye de se raccrocher à un fétu de paille .
Très Cordialement
Daniel BESSON

égéa : Daniel, d'abord, vous faites partie des happy few qui respectez les règles françaises d'orthographe et écrivez donc Kossovo avec deux s. Parfois, je me mets à rêver de "Kossovie", mais le principe de réalité, comme vois dites.... Pour le reste, ce que vous suggérez revient à donner une sort de réalité à la prédiction rumsfeldienne entre vieille Europe et nouvelle. La vraie question, alors, sera celle de la place de' Allemagne : Europe centrale, comme elle y est encline en ce moment ? ou Europe occidentale, comme l'histoire des cinq décennies passées l'y incite ?

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