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Indépendance écossaise

La possible indépendance de l’Écosse (le referendum sur l’indépendance aura lieu en 2014) aura des conséquences stratégiques sur la Grande-Bretagne, l'Otan mais aussi l'équilibre européen en matière de sécurité. Et bien que personne n'y pense, il est tout à fait opportun de réfléchir à cette question, alors qu'on envisage de dessiner une nouvelle politique de défense. Merci à GL pour avoir initié cette réflexion (et bon vent à Rome, l'ami).

source

1/ Tout d'abord, l'indépendance de l’Écosse amoindrirait considérablement les forces armées britanniques. A vue de nez, elles perdraient un cinquième de leur effectif ! Surtout si on regarde le projet de réorganisation à la suite de la dernière SRSR qui prévoit cinq brigades dont l'une basée en Écosse. Autrement dit, après avoir subi une cure diététique renforcée, la British army devrait subir par une amputation.

2/ Au sujet de la base de Farlane, il y aurait forcément des négociations. Certes, les Gallois ont annoncé qu'ils étaient tout à fait disposés à accueillir une base de sous-marins nucléaires : mais le coût du déménagement serait tel que le gouvernement de Sa Majesté ne pourra pas envisager sérieusement l'option. Alors, il faudra soit maintenir (et négocier, et payer le double prix : maintenir l'équipement nucléaire,e t louer aux Écossais, à la manière des Russes à Odessa) soit abandonner le nuc. Aïe ! la conséquence serait que la France demeurerait la seule puissance nucléaire en Europe, ce qui ne rendra pas les choses faciles dans un environnement très "global zero". N'oublions pas que les Accords de Lancaster ciblent principalement la collaboration sur le nucléaire, comme je l'ai expliqué à de nombreuses reprises sr egea.

3/ En revanche, la diminution de l'armée britannique fera de la France la puissance militaire majeure du continent : comme au temps de Louis XIV ou de Napoléon ! Comme il est évident que nous ne l’utiliserons pas contre nos voisins et amis et alliés, la question pendante sera la suivante : comment réorganiser le schéma de défens européenne ? Certes dans un processus collaboratif, mais comment jouer le rôle du "décideur en dernier ressort" que notre position amènera (même si nous ne serons qu'un demi borgne au milieu de plein d’aveugles). Autrement dit encore, il faudra être sacrément à l'écoute, ce qui n'est pas dans nos habitudes... Car si les Américains sont intrusifs, ils sont loin et ont d'autres choses à s'occuper, ce qui laisse finalement pas mal de latitude aux Européens pour resquiller tranquillement...

4/ Dernier point, l'Otan. Un débat a eu lieu fin août au sein du parti indépendantistes écossais, (le Scottish National Party, SNP). Il connaît actuellement des dissensions à propos du plan de défense élaboré par le président du groupe SNP au Parlement britannique, Angus Robertson, qui propose, dans l’éventualité de l’indépendance de l’Écosse, une possibilité d’adhésion à l’Otan. Or, cette proposition vient à l'encontre de la ligne traditionnelle qui depuis trente ans plaidait pour une sortie de l'Otan.

5/ Si l'Otan perd l’Écosse et ne garde qu'une Angleterre diminuée, deux questions se posent : celle de son rôle résiduel (surtout si l’Écosse choisit l'UE, avec une PSDC mécaniquement renforcée) et celle du partage de responsabilité au sein de la structure (le DSACEUR ne pouvant logiquement plus être britannique : belle option pour les Français, soit en revendiquant le poste, soit en appuyant les Allemands). Si l’Écosse reste finalement dans l'Otan, la question de la répartition des postes se posera de toute façon.

Bien sûr, tout ceci suppose que l’Écosse devienne indépendante. Cela reste de l'ordre de la conjecture...

Réf :

  • Précédent billet sur l’Écosse
  • Celui de Mars Attaque, détaillant les conséquences de partage militaire.
  • Sur les divisions intra SNP au sujet de l'Otan, ici.

O. Kempf

Commentaires

1. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par Bertrand Quiminal

Partition et nucléaire.....nucléaire et fusion.
Pourquoi plusieurs puissances très puissantes -dont certaine porte haut la démocratie, les droits de l'homme et la démocratie universelles- mettent tout en oeuvre pour maintenir une Corée du Nord "Libre" et indépendante?
Un empressement modéré à voir apparaître une Corée réunifiée et militairement nucléaire peut-être...

2. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par

En réponse à B. Quiminal :

C'est surtout que la Corée du Sud ne le souhaite pas si fortement que cela. Après avoir vu le processus allemand de réunification, la Corée du Sud juge qu'une réunification ou au minimum, une ouverture des frontières, créérait des besoins qui mettrait au tapis l'économie du pays.

La Corée du Nord est loin derrière la RDA en terme de développement. On ne mourrait pas de faim en RDA ...

Après, il y a des volontés contraires de pays tiers, c'est évident, mais ce n'est pas le premier obstacle.

3. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par

Bonjour,

Si mécaniquement la France pourrait se retrouver la principale puissance militaire du vieux continent, en revanche diplomatiquement et activement quelle serait sa position pendant et après l'indépendance si celle-ci devait avoir lieu?
Certes elle pourrait relancer l'Auld Alliance, ce qui serait un beau témoignage de fidélité à travers les siècles et les régimes, mais elle pourrait aussi se braquer en raison de la crainte de mouvements sécessionnistes sur son propre sol, à moins d'une politique dissociée comme celle de Richelieu à son époque (aide aux protestants à l'extérieur du royaume, chasse à ceux-ci à l'intérieur).
Si l'on regarde la position de la France vis à vis des velléités souverainistes Québecoises, on peut déjà présumer que ça sera très ambigu...

Quant à la base de Farlane, malgré les gisements gaziers de la Mer du Nord je crains que cela ne plombe conséquemment le budget Anglais. Quant à l'analogie avec la base navale en Crimée, les Russes ont été assez roués pour la louer... en descendant le prix du gaz à destination de l'Ukraine. Et renouveler le bail dans la foulée pour quelques années encore. Je ne sais si l'Angleterre dispose de tels moyens de pression sur l'Écosse pour arriver à pareille solution acceptable.
Et sinon dans le même ordre d'idée, l'Ukraine aussi avait un arsenal nucléaire hérité de l'Union Soviétique. N'ayant ni les capacités techniques et logistiques pour s'en occuper, ni par ailleurs l'envie d'en assumer le coûteux entretien, elle s'en débarrassa au profit de la Russie. Peut-être bien que l'Écosse serait tenté de procéder de la même manière?

Cordialement

4. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par Fyd

Cela pourrait faire renaître l'Auld Alliance :)

egea : oui, je n'ai pas évoqué cet aspect là des choses...

5. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par Bertrand Quiminal

Merci Spurinna.
Si telle est la volonté des Sud-Coréens, tant mieux! La question de pouvoir choisir ne se pose donc pas...
Et tant pis pour la solidarité avec les cousins "germains" nord-coréens.
Quant au coût économique de la réunification allemande, il a reposé sur la décision politique d'adopter la parité "d'achat": 1 Deutsche Mark = 1 Ostmark.

6. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par

Mea culpa pour le passage de la base de Farlane : il fallait lire « Quant à la base de Farlane, sauf hausse fortement improbable des revenus issus des gisements gaziers en Mer du Nord je crains que cela ne plombe conséquemment le budget Anglais en cas de loyer. Quant à l'analogie avec la base navale en Crimée, les Russes ont été assez roués pour payer une location au rabais en descendant en contrepartie le prix du gaz à destination de l'Ukraine. Et de renouveler dans la foulée le bail jusqu'en 2017 minimum (2042-2047 au maximum). De quoi leur laisser au pire le temps de terminer leur nouvelle base à Novorossiisk. Je ne sais en revanche si l'Angleterre dispose de tels moyens de pression sur l'Écosse pour en arriver à pareille solution acceptable. »

7. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par ST17

Pardon d’être pointilleux, mais il s’agit de la base de FaSlane (qui accueille les SSBN en cycle opérationnel ou en entretien de courte durée, mais aussi des SSN, des patrouilleurs et des chasseurs de mine).
Cette base, qui accueille déjà les deux premiers SSN de classe Astute, se prépare - paradoxalement?- à recueillir l'ensemble des sous-marins brits, et à devenir le "Submarine center of specialisation", maison mère des forces sous-marines.
Par ailleurs, l'installation beaucoup stratégique, et beaucoup plus complexe à déplacer, est située un peu a l’écart (sur le loch voisin), sur le site de Coulport. On y assemble les têtes britanniques, les « embarque » à bord des Tridents US puis des SSBN.

Cordialement,

Un sous-marinier exilé.

egea : merci des infos. Bref, les SM brit sont en Écosse (Farlane et Colport) et l'indépendance poserait de toute façon la question de la base, non ?

8. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par ST17

Effectivement, je ne vais pas contre votre point 2/. La question se pose évidemment en cas d'indépendance.
Cependant, vu d’ici, elle ne semble pas inquiéter outre-mesure les sous-mariniers brits, qui continuent leur projets d’extension de la base (avec des investissements en terme d’infrastructure devant lesquels on ne peut que rêver…). Les officiers écossais ne sont en majorité pas favorables à l’indépendance et les commandants des forces sous-marines la jugent hors de propos.
Concernant la crédibilité d’une indépendance, si le Times du jour publie un article sur le caractère non fantaisiste des estimations économiques de Salmond (en particulier sur la capacité à maintenir un système de sécurité sociale qui coûte déjà 6% de plus pour un écossais que pour un « britannique » alors même que la population ici vieillit plus vite que la moyenne), la ligne éditoriale appuie beaucoup plus sur le quasi-caractère de bluff de la revendication d’un referendum (Salmond qui cherche a gagner du temps, en contestant la date, essayant d’imposer une seconde question, discutant l’âge des votants).
Il semble évident pour beaucoup ici que, si elle est obtenue, cette indépendance, dont la revendication constitue le véritable ciment du SMP, ne pourra aboutir qu’à la fragmentation de la majorité et à une véritable difficulté à gouverner.
J’imagine que Salmond peut redouter de se retrouver dans cette situation. Lui qui comme vous le faisiez justement remarquer a gagné beaucoup de paris, a cette fois tout à perdre.

9. Le mardi 18 septembre 2012, 21:22 par Midship

Pour revenir au commentaire de ST17, puis-je signaler qu'un pays qui n'a qu'une seule base capable d'accueillir ses sous-marins est quasiment comme un pays qui n'a pas de sous-marins ? La France, elle, a trois pôles (gros et crédibles) capables d'accueillir des sous-marins nucléaires...

10. Le samedi 27 septembre 2014, 20:47 par Ph Davadie

L’Écosse n'est donc pas devenue indépendante, elle reste dans un Royaume qui se veut uni.
Mais ce referendum n'a-t-il pas fait exploser la (relative) unité du royaume de Sa Majesté ? Entendre Cameron proposer la création d'un parlement anglais est amusant. Car cela revient à dire que l'Angleterre va prendre son indépendance.
Que restera-t-il alors du parlement britannique ? A quoi servira-t-il ?
Cameron est-il un véritable chef de gouvernement ou ne serait-il pas guidé que par des ambitions bassement électoralistes, comme nos élus gaulois ?

égéa : Réponses : oui. Rien. Rien. Euh, là, c'est quasiment ad hominem...

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