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Marges et marginalités dans le cyberespace

La revue en ligne Res Militaris, animée par B. Boëne, vient de publier un numéro spécial cybersécurité (Sommaire) avec tout plein d'auteurs (les habituels et plein de nouvelles plumes). J'y signe un article "Marges et marginalités dans le cyberespace" que je vous donne en lecture ci-dessous.

Résumé : Le cyberespace est entré dans toutes les dimensions de nos vies, privées ou publiques : sa centralité devrait donc a priori l'exclure des marges. À cause justement de ce mouvement de fond, la notion de marge se trouve bouleversée. De plus, le cyberespace suscite l'apparition de nouvelles marges et favorise la naissance de mouvements nouveaux et massifs permettant des expressions insoupçonnées, car longtemps restées marginales. En ce sens, le cyberespace serait un révélateur de marginalités destinées à devenir rapidement plus centrales.

Marges et marginalité dans le cyberespace

Le mot “marges” recèle de multiples sens : géographique, social, technique, politique, comportemental... Ces diverses acceptions constituent autant de clefs d’analyse pour comprendre la nature des pratiques sur le cyberespace. Lui qui était à l’origine marginal est devenu désormais un outil central du fonctionnement de nos sociétés. Il n’est plus désormais un aspect de nos vies qui ne soit confronté à cette nouvelle réalité. Le cyberespace est un espace social et comme tel, il pose la question de la permanence des marges anciennes et de leur renouvellement.

Ainsi, après avoir questionné cette notion de marges, le présent article montrera que le cyberespace a permis l’apparition de nouvelles marges – de comportements déviants qui lui sont intrinsèques – avant de permettre, grâce à sa diffusion générale, la naissance de mouvements nouveaux et massifs permettant des expressions insoupçonnées car restées longtemps marginales. En ce sens, le cyberespace serait un révélateur de marginalité.

Questionner les marges

Les marges peuvent être géographiques, sociales ou liées à la mobilité. L’apparition du cyberespace les modifie en profondeur.

Marge géographique

La marge peut d’abord être “géographique”. Elle se rattache à un autre terme, proche, celui de “marches”, qui revêt pourtant une signification politique immédiate. Sont particulièrement éclairants ici les travaux de Michel Foucher,1 qui distingue la frontière linéaire et le front marchant. Aujourd’hui, en effet, nous concevons “naturellement” la frontière comme une ligne séparant deux territoires. Cette perception est toutefois le résultat d’un processus historique né à l’occasion des traités de Westphalie, au 17e siècle. Peu à peu au cours de l’histoire moderne, la frontière s’est rapprochée de ce modèle linéaire au point de devenir, pour beaucoup, la seule façon de la concevoir. Ainsi, la fin du 19e siècle et le 20e siècle virent de nombreuses frontières tracées à travers le monde, selon un processus d’orogénèse dû notamment aux puissances coloniales. Toutefois, ce modèle oublie les marges d’autrefois, frontières larges qui permettait d’avoir des étendues non appropriées, des no man’s lands qui ménageaient des espaces poreux entre territoires.

  • 1 M. Foucher, Fronts et frontières : un tour du monde géopolitique, Paris, Fayard, 1991.

Ce début de 21e siècle voit la remise en cause de ces frontières linéaires, et l’admission de leur porosité. C’est évident dans le monde réel et le sujet a été abondamment discuté. Il apparaît également dans le cyberespace : tout un courant d’analyse questionne la notion de frontières dans le cyberespace et constate une apparente balkanisation qui passe par l’érection de ces limites.2 Toutefois, celles-ci sont floues et larges. Elles sont structurellement perméables et laissent “de la marge” pour que des acteurs déterminés puissent les franchir. Il s’agit plutôt de nouvelles “marges”, assez profondes pour permettre un certain niveau de sécurité à ceux qui les mettent en place.

Marge sociale

La marge peut aussi être sociale et désigner celui qui est “en marge” de la société. Cette marginalisation peut être choisie pour des motifs philosophiques (Diogène), religieux (moines et ermites) ou en réponse à des aspirations à la liberté (nombre d’“autonomes” motivent ainsi leur mode de vie). Elle peut surtout être subie, à la suite d’accidents de la vie ou pour des raisons économiques ou sociales (SDF et exclus, mais aussi populations migrantes). Force est de constater que ces marginaux n’ont pas une utilisation particulière du cyberespace. Cela ne signifie pas qu’ils en sont totalement absents (les monastères ont des sites Internet ; beaucoup de SDF ont des téléphones portables avec un accès minimal au réseau ; des mouvements politiques radicaux ont des façades sur Internet ; il existe de nombreux cybercafés qui permettent de se connecter au cyberespace), mais l’observateur ne remarque pas une interaction significative entre le cyberespace et ces marginaux “traditionnels”. Celui qui choisit d’être en marge de la vie sociale sera aussi en marge de ses évolutions, fussent-elles cybernétiques.

Marge et mobilité

La mobilité a souvent été un attribut de la marge. Les chemineaux d’autrefois qui parcouraient les campagnes étaient souvent perçus, par les populations enracinées dans la terre, comme des menaces. On y voyait l’étranger, la différence, le danger. Outre ces chemineaux civils, les guerriers de hasard et autres bandes armées ont longtemps été considérés comme des menaces encore plus directes, amenant le danger de la guerre et de la violence sur les biens et les personnes. Enfin, les Roms continuent de nos jours de faire face à l’hostilité de bien des populations, tant ils sont souvent perçus comme des voleurs et des menaces à la sécurité publique. Ainsi, la mobilité est traditionnellement perçue comme l’expression de la marginalité par rapport à un ordre social territorialisé. Avec la mondialisation et le cyberespace, cette perception évolue. Tout le monde devient de plus en plus mobile, et le cyberspace est pour chacun le facilitateur de cette mobilité accrue. Les ordinateurs “portables”, les téléphones “mobiles”, les tablettes et autres

  • 2 O. Kempf, “Cyberespace et dynamique des frontières”, Inflexions, printemps 2015.

ardoises électroniques, l’accès permanent à ses réseaux sociaux où que l’on soit, constituent autant de signes de l’inversion des perceptions. Là où la mobilité était considérée comme exceptionnelle et potentiellement dangereuse, elle devient une norme partagée par tous. La mobilité n’est plus une marge. Le cyberespace modifie donc la perception traditionnelle des marges. Par ailleurs, il révèle de nouveaux types de marges.

Le cyberespace, facteur d’émergence de nouvelles marges

Le cyberespace a en effet produit de nouveaux types de marginalité.

Technique cyber et marginalité : le hacker

Le cyberespace est un espace artificiel, construit par l’homme et sa technique. La maîtrise de cette technique entraîne des comportements marginaux. Le premier exemple qui vient à l’esprit est celui des hackers, dont le grand public a souvent une perception négative. Ils sont pourtant des spécialistes de la sécurité informatique et leurs intentions ne sont pas systématiquement malignes, loin de là. On les distingue ainsi selon leur “couleur” : les “blancs” sont juste des professionnels qui effectuent des tests d’intrusion au profit de leurs clients, les “gris” n’hésitent pas à entrer dans des systèmes sans y être autorisés, sans forcément avoir de mauvaises intentions (souvent à la recherche de l’exploit informatique qui assoira sa réputation), les “noirs” enfin créent des maliciels et autres dispositifs d’intrusion illicites, pour des motifs personnels (nuire, faire du profit, obtenir des informations sensibles). Ils sont des “pirates informatiques” qui agissent pour leur propre compte, en marge des lois existantes. Hackers gris et plus encore noirs sont donc des marginaux, qui profitent de leur connaissance pointue des systèmes informatiques pour franchir les bornes des entreprises ou organisations qu’ils ciblent. Évoluant en marge de la loi et des règles, ils sont à l’évidence des marginaux d’un nouveau type.

Pourtant, leur marginalisation n’est qu’apparente, car ils sont souvent “réintégrés” dans le monde “normal” au fur et à mesure de la diffusion généralisée du cyberespace, qui est désormais au cœur de nos organisations sociales. Nombre de cyberpirates sont ainsi recrutés par des compagnies tout à fait officielles, même si beaucoup d’autres se mettent en lien avec des réseaux criminels traditionnels. La nature marginale des hackers reste floue.

Assiduité cyber et marginalité sociale

Toutefois, sans aller jusqu’à ces extrémités, le cyberespace favorise l’émergence de nouveaux comportements qui font vite apparaître des catégories neuves de marginaux au sein de la société normale. Le geek est cette personne passionnée par un domaine (science fiction, jeu vidéo, fantastique). Une catégorie particulière de geek est celle du nolife : sa passion devient alors une dépendance qui va jusqu’à constituer un frein à ses relations humaines et sociales. Il sort peu à peu de la société, ne vivant que dans le monde virtuel de sa passion. Force est de constater que ces nolife sont apparus avec le cyberespace : la question n’est pas tellement celle des jeux vidéo mais de leur mise en réseau et donc de la participation à une communauté particulière, inaccessible au commun des mortels. Cet isolement est permis par le cyberespace qui produit donc des cas nouveaux de marginalité. Ces marginaux “habitent” au cœur du cybermonde qu’ils sont en train de construire.

Mais à l’opposé, la non-fréquentation du cyberespace ne devient-elle pas une nouvelle marginalité ? Un individu non connecté n’est-il pas marginal ? Constatons ainsi que cela constitue l’un des critères de recherche des services de renseignement. Ceux-ci observent l’activité numérique d’un individu et paradoxalement, celui qui n’en a pas attire l’attention et devient un suspect potentiel. Cela fait penser aux difficultés rencontrées par les sous-marins nucléaires : ceux-ci ont tellement réussi à réduire leur niveau de bruit que la poche de silence qu’ils créent constitue, dans le bruit de fond sous-marin ambiant, une signature de leur présence. Ainsi se pose la question de l’usage “normal” du cyberespace. Par rapport à sa pratique “moyenne”, les comportements extrêmes (pas d’usage, ou trop d’usage) constituent des marges. Cependant, le comportement “normal” sur le cyberespace évolue lui-même au cours du temps, à mesure du développement rapide du cyberespace. Les marges comporte-mentales évoluent en conséquence.

Marges scientifiques : à la pointe du progrès ?

Ces nouveaux comportements posent un certain nombre de questions entourant leur régulation sociale. Ainsi, le comportement marginal sur le cyberespace peut-il le rester longtemps ? Est-il lié à la notion d’isolement ? Le marginal n’est-il pas le moteur de nouveaux progrès ? C’est ce que clament par exemple nombre de hackers, qui affirment que leur recherche des failles de sécurité permet, au final, d’améliorer la robustesse générale des systèmes informatiques, donc le bien collectif.

Dans cette optique, on peut également s’interroger sur la notion de progrès informatique. L’innovation numérique et technologique peut-elle naître de comportements initialement marginaux ? Le statut de marge a-t-il un rapport avec la topologie de l’Internet (avec ses parties peu ou pas connectées3) ? Doit-on chercher la marge sur le Dark Web ? Dans le cyberespace, quel lien existe-t-il entre marge et audience ? Existe-t-il un hacking “mainstream” et un autre “de marge” ou marginal ? Enfin, la notion de marge a un sens pour le code lui-même : existe-t-il des codes marginaux dans l’ensemble des codes ? Comment en donner une définition ?

Le lecteur l’aura compris, la notion de marge scientifique est cruciale pour comprendre le développement du cyberespace.

  • 3 En théorie des graphes, on parle de composantes fortement connexes. Sur le graphe du Web, il existe des composantes disjointes et non connectées : abrite-t-elle les “marginaux” du réseau ?

Ainsi, la question des marges techniques du cyberespace suscite des questionnements à la fois en termes de régulation sociale et de progrès scientifique.

Apparition de mouvements de “révolte” permis par le cyber : révélation de nouvelles marges

Outre de nouveaux comportements techniques, le cyber permet l’apparition de comportements politiques révélant de nouvelles marges.

Militantisme citoyen en faveur de la régulation politique du Web

Le comportement “politique” vient en premier lieu de mouvements propres au Net (Quadrature du Net, Piratebox, …) et qui interrogent la structuration même du cyberespace. Ces débats posent la question de l’Internet ouvert et libre, de la neutralité du Net, du logiciel libre, de la protection des droits individuels et de la vie privée... Ils sont souvent regroupés sous la thématique de la gouvernance du Net. Celui-ci est alors perçu comme un espace commun de l’Humanité. Y accéder constitue un nouveau droit de l’Homme qui doit être préservé des appétits monopolistiques des grandes compagnies.

Face à ces militants qui défendent les droits individuels, on observe deux types d’acteurs : les États et organisations étatiques ou paraétatiques d’une part, les entreprises d’autre part. La controverse s’est articulée autour de quelques grands sujets : celui de la régulation d’Internet (sommet de l’Union Internationale des Télécommunications à Dubaï en 2012), celui du modèle dit “multi-parties prenantes”, celui de la tutelle de l’ICANN,4 celui enfin de la surveillance généralisée assurée par certains États (cas du scandale PRISM). Cette attitude est donc d’emblée politique et considère le cyberespace comme un espace politique. Toutefois, seuls certains militants promeuvent une telle prise de conscience, fort éloignée de la conscience politique de leurs contemporains. En ce sens, ils sont marginaux comme souvent les militants politiques les plus avancés d’une cause, selon l’idéal-type bien établi de l’avant-garde politique.

“Hacktivisme”

À côté de ces mouvements publics, d’autres militantismes apparaissent avec le cyberespace : il s’agit de ce qu’on a appelé les “hacktivistes” – spécialistes du cyberespace qui utilisent leurs connaissances pour promouvoir un message politique plus ou moins construit, mais portant sur l’organisation sociale du monde et pas simplement du cyberespace. Ils peuvent être plus ou moins organisés : qu’on pense aux exemples de Wikileaks,5 d’Anonymous

  • 4 L’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) est l’organisation (de droit privé, à but non lucratif) chargée d’allouer l’espace des adresses de protocole Internet (IP), d’attribuer les identificateurs de protocole, de gérer le système de noms de domaine de premier niveau, et de préserver la stabilité opérationnelle d’Internet.
  • 5 Pour Wikileaks, l’information qui était secrète, donc à la marge, doit être révélée.

ou d’Intercept,6 emblématiques de nouveaux comportements qui veulent établir un lien entre cybermonde et monde social, et servir de truchement révélateur de “scandales politiques”. Toutefois, ces nouveaux mouvements ne sont possibles qu’à partir d’une culture geek d’origine.

Un type particulier d’hacktivisme est apparu il y a quelques années : il s’agit du “hacker patriote”, qui décide de participer à une action de masse dans le cadre d’une conflictualité organisée. L’un des premiers exemples connus est celui de l’agression contre l’Estonie en 2007, à l’occasion de laquelle de nombreux internautes russes participèrent à la surcharge des sites estoniens. Le système s’est répété, de façon organisée et semble-t-il préméditée, lors de la guerre russo-géorgienne en 2008. Désormais, il n’est pas de conflit où les parties ne tentent de mobiliser leurs partisans afin d’influencer l’opinion mondiale (guerre entre Israël et Hezbollah de 2006 au Liban ; conflits successifs entre Israël et le Hamas ; guerre des tweets en Afghanistan, etc.). Le cyberespace permet donc l’apparition de nouveaux comportements politiques, initialement marginaux mais qui deviennent de plus en plus normaux.

Du point de vue géopolitique, le cyberespace peut être instrumentalisé par les terroristes et djihadistes, structurellement marginaux.7 Le cyberespace permet par ailleurs une certaine égalisation des puissances, au moins temporaire. La Syrian Electronic Army peut ainsi faire chuter le cours du Dow Jones,8 un groupuscule iranien casser le système interne de la compagnie pétrolière Aramco pendant six semaines. En fait, le marginal géopolitique obtient une visibilité certaine qu’il n’aurait pas eue auparavant.

Nouveaux mouvements sociopolitiques

Enfin, il y a désormais de nombreux exemples de mouvements politiques “marginaux” qui réussissent à percer grâce au cyber. Outre les grands cas habituellement décrits (révoltes arabes), on observe pléthore de mobilisations réussies et entretenues grâce au cyber, forçant élites et instruments habituels de médiation (médias, partis politiques, syndicats) à répondre à ces nouvelles demandes : Indignados espagnols, “révolte des tentes” israélienne, “printemps érable” québécois, “manif pour tous”, “bonnets rouges” et autres “pigeons”... Il ne s’agit pas simplement de la “guerre de l’information”, mais de nouvelles mobilisations rendues possibles par le cyberespace. Au fond, on voit apparaître des “cyber-révoltes” où le cyber permet de nouvelles formes de mouvements collectifs.

  • 6 Nouveau média en ligne créé par Glen Greenwald, le journaliste qui a rendu public et diffusé le scandale Snowden.
  • 7 O. Kempf, “Tours et détours du cyberjihadisme”, Revue Défense Nationale, décembre 2014 ; et “Le cyberterrorisme : un discours plus qu’une réalité”, Hérodote, mai 2014.
  • 8 T. Berthier & O. Kempf, “L’Armée électronique syrienne : entre cyberagression et guerre de l’information”, Revue Défense Nationale, mai 2014.

Le cyberespace permet non seulement l’expression d’opinions marginales mais aussi leur diffusion et leur partage, donc leur agrégation, prémisse à de nouvelles mobilisations. Alors que les intermédiations traditionnelles étaient hiérarchisées à partir d’un noyau qui diffusait la ligne politique, le cyberespace favorise des modèles horizontaux où la ligne s’établit par partages successifs. Les marges d’autrefois qui n’avaient pas, ou avaient peu, accès aux moyens d’expression publics réussissent désormais à trouver une audience générale.

Conclusion

Les marges étaient ces anciennes marches, frontières étendues aux confins des empires et permettant de séparer par une bande de terre des territoires souverains. Peu à peu pourtant, la frontière était devenue linéaire. Cette linéarité s’efface depuis peu, grâce notamment au cyberespace qui favorise porosité et flou. Les lignes redeviennent des marges et, expression de la modernité du moment, le cyberespace redonne vie à des pratiques pré-modernes. Les marges qui étaient établies aux limites des comportements sociaux médians sont elles-mêmes modifiées. La mobilité est désormais un attribut partagé par tous, tandis que la pratique du cyberespace devient universelle. Paradoxalement, celui qui s’en abstrait devient marginal tandis que des marges propres au cyberespace surgissent : hackers de tout type ou chercheurs informatiques en sont des exemples.

Le cyberespace est un espace structurellement social. Il permet l’émergence de mouvements politiques marginaux, mais dont la place grandit de plus en plus : aux avant-gardes habituelles s’ajoutent les “hacktivistes”, les hackers patriotes ou de nouvelles cyber-révoltes. La marge d’autrefois trouve une nouvelle centralité. Le cyberespace renouvelle ainsi en profondeur la notion de marges, selon ses multiples acceptions. Non qu’il n’existe plus de marges : simplement, elles s’expriment différemment et surtout évoluent à grande vitesse. Or, la marge d’antan supposait une certaine stabilité, une déviance continue par rapport à une position établie. La marge nouvelle apparaît dès lors non plus comme une séparation ou un extrême, mais comme le front marchant de l’évolution sociale, selon le sens américain du mot frontier, bien mis en évidence par M. Foucher. La frontier marque le point d’où l’on peut avancer et progresser. La cybermarge y ressemble fortement : la marge n’est-elle pas ce qui donne précisément au système “de la marge” (d'ajustement, d'innovation, d'adaptation), en favorisant objectivement sa survie ?

O. Kempf est docteur en science politique, chercheur associé à l’IRIS (Paris), et directeur de publication de la lettre d’analyse stratégique La Vigie (https://www.lettrevigie.com). Il dirige la collection "Cyberstratégie" chez Economica. Derniers ouvrages : Alliances et mésalliances dans le cyberespace (Economica, 2014) et Introduction à la cyberstratégie (Economica, 2015, 2e édition).

Commentaires

1. Le lundi 10 août 2015, 11:07 par Gof

Bonjour, petite coquille sur le lien à destination de RES MILITARIS (il s'agit là d'un lien Atlantico qui n'a rien à voir).
=> http://resmilitaris.net/index.php?I...

EGEA: Merci... je corrige

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