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Clausewitz (Livre II, chap. 6) Des exemples

Dans ce chapitre, Clausewitz s'interroge sur la valeur des exemples, et leur caractère démonstratif. Rappelons que ce Livre II constitue la démarche épistémologique qui fonde l'approche de CVC. Ce chapitre est le dernier du livre.

1/ Car l'exemple est souvent assimilé à la preuve. C'est le cas dans les sciences dures, ce que rappelle CVC : "Les exemples historiques rendent tout plus clair. Dans les sciences empiriques, ils apportent les preuves les plus solides" (p. 164). La question induite est la suivante : un exemple, dans une "science" comme la stratégie, a-t-il valeur de preuve?

2/ CVC a tendance à considérer que l'exemple historique est une preuve : car "il n'est pas de science empirique, y compris la théorie de la conduite de la guerre, qui ne puisse toujours agrémenter ses raisonnements d'exemples historiques. Les démonstrations n'en finiraient plus" (p. 166)

Clausewitz démonte bien le mécanisme : à la guerre"quand une manière de faire a été efficace, on l'utilise à nouveau. L'un imite l'autre (...et cela) finit par prendre place dans la théorie". "Au contraire, quand il faut s'appuyer sur l'expérience pour déraciner un vieil usage (...) il faut puiser des exemples dans l'histoire pour servir de preuves".

Ainsi, l'exemple serait une preuve, utile aussi bien pour construire la théorie que pour la réfuter (et l'améliorer).

3/ CVC distingue ainsi quatre utilisations de l'exemple historique : - celui qui explicite l'idée

- celui qui applique l'idée et permet de détailler les effets, et permet de lier la théorie à l'expérience

- celui qui appuie une thèse et qui permet de constater "qu'un fait ou un effet est possible"

- celui qui, par la représentation détaillée d'un événement, permet de tirer une doctrine.

J'avoue que cette catégorisation me paraît obscure.

4/ Au final, on remarquera le souci de la preuve chez Clausewitz, et le souci de théoriser cette preuve. A nos yeux d'homme du XXI° siècle, tout cela paraît bien sûr un peu pauvre. Karl Popper a permis des avancées certaines en ces matières.

5/ Pourtant, malgré les limites de ce chapitre, on sait gré à Clausewitz de l'avoir écrit et d'avoir conçu ce livre II qui traite de la théorie. Car je ne suis pas sûr que beaucoup de nos stratèges, civils ou militaires, aient profondément réfléchi aux conditions de véracité de leurs arguments. Il est très facile d'argumenter, mais il est infiniment plus difficile de prouver. Notamment dans ces disciplines humaines, où l'empirisme (et donc la reproduction de l'expérience) est extrêmement difficile.

Il semble d'ailleurs qu'une des conditions du succès soit justement la méditation sincère par le chercheur des conditions épistémologiques de sa recherche.

En cela, Clausewitz est une fois encore prophète. Nul doute que le génie de ses réflexions ne soit dû, aussi, à son inquiétude épistémologique.

O. Kempf

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