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Discours de J. de Hoop Scheffer à l'Assemblée Nationale

Le secrétaire général de l'Otan, JHS, a prononcé aujourd'hui un discours à l'AN (ici, car pas encore en ligne sur le site de l'AN)). Si, bien sûr, il a évoqué le retour de la France dans l'organisation intégrée (débat en France, mais pas débat à l'OTAN), il a évoqué quelques autres points qui méritent d'être relevés.

1/ Le terrorisme, la prolifération des armes de destruction massive, les trafics transnationaux, la piraterie, les cyberattaques sont autant de nouvelles menaces pour les membres de l'OTAN.

La question des menaces ne cesse d'agiter l'alliance, car c'est à partir de celles-ci qu'elle trouve sa justification. SI le terrorisme et la prolifération sont des grands classiques de puis 8 ans pour le premier, et 1989 pour le second, on notera l l'apparition de nouvelles menaces : trafics, piraterie et cyberattaques. SI pour ces deux derniers, l'alliance a fait des choses (une mission maritime et un centre de cyberguerre), on voit mal son action contre les trafics. Enfin, on note l'absence de la question de la sécurité énergétique, qui était THE menace les deux dernières années.

2/ l'OTAN a une conscience aiguë de la nécessité de s'intégrer dans un ensemble plus vaste d'organisations internationales et régionales, dans une « approche globale ». D'où l'exemple afghan : la mission de l'ONU, de l'UE, du gouvernement afghan lui-même, de la Banque mondiale, des ONG.

Approche globale : c'est bien sûr au niveau politique, comme ici (préoccupation logique du leader politique qu'est JHS) mais cela a des conséquences militaires également, qui agitent les travaux de l'EMI et du SHAPE : comment intégrer sur le terrain le travail inter-agence ?

3/ Un rappel : Les forces intégrées n'existent plus: les forces sont mises à disposition de l'OTAN pour une mission donnée par les nations (seules quelques forces dédiées demeurent, pour des raisons pratiques de cohérence, comme en matière de défense aérienne).

4/ Un dossier technique, mais ambitieux : Ainsi, je proposerai aux 26 ministres de la Défense dès la semaine prochaine, à Cracovie, un nouvel ensemble de réformes du fonctionnement du siège de l'OTAN et du Secrétariat international.

En fait, il s'agit de savoir si on va vers une fusion du Secrétariat International (aux mains du SG, politique) et de l'EMI (à la disposition du Comité Militaire) sous couvert d'une réforme technique : et donc, si on s'engage dans une civilation de la structure. Bref, il faudra suivre cela avec attention.

5/ A propos du retour de la France et de la question européenne : Une Europe de la défense est dans l'intérêt de l'OTAN. Je dirais même que pour l'OTAN, l'enjeu, ce n'est pas moins d'Europe, comme certains pouvaient le croire il y a dix ans, au contraire, c'est plus d'Europe, en particulier en ce qui concerne les capacités militaires. N'allez pas croire qu'il s'agit d'une simple position de principe : il s'agit de la réalité et l'Otan a vraiment besoin des capacités civiles de l'UE. Aujourd'hui, malgré les apparences et compte-tenu des crises en cours, l'Europe paraît avoir plus de moyens adaptés que l'Otan. Ce qui justifie la promotion d'un "Berlin + à l'envers", permettant à l'Otan d'utiliser les moyens civils de l'UE. On lira avec intérêt mon dernier article (voir ici). Pour l'Otan, c'est la seule question du retour de la France, c'est la seule chose qui intéresse les alliés : favoriser l'accès aux moyens européens.

6/ A propos de la Russie, on est assez loin des déclarations outrées de l'été : La sécurité et la stabilité de la zone euro-atlantique sont directement liées à une coopération saine et équilibrée entre l'OTAN et la Russie.

7/ Point sensible, et message important adressé publiquement, la question de la planification de défense, qui était, concrètement, le lien d'intégration autrefois utilisé par l'OTAN au temps de la guerre froide, et refusé par De Gaulle à partir de 1966. Les amateurs croient que la seule question de la sortie de la structure intégrée tient à la non participation au comité des plans de défense et comité nucléaire : erreur : ces comités ne servent pas à grand chose. Le vrai moyen d'intégration, outre les forces affectées (qui n'existent plus depuis les années 1990), c'est la planification de défense.

Voila ce que dit JHS : Si je prends le domaine de la planification de défense, par exemple, la France participerait complètement à la définition du niveau d’ambition de l’Alliance, c'est‑à‑dire le nombre et le type de missions que l’Alliance doit être en mesure de conduire. Ce faisant, elle pourrait assurer une concordance entre les niveaux d’engagement de l’UE et de l’OTAN. Elle pourrait aussi contribuer à la définition des besoins capacitaires des Alliés à moyen et à long terme, ainsi qu’à celle des capacités dont l’Alliance a besoin collectivement

8/ Allusion à la place future et à la probable place de SACT accordée à un général français : La présence des experts français à tous les échelons des structures militaires permettrait à la France d’être concrètement impliqué tant dans la préparation de l’avenir (ce sont les travaux d’ACT), que dans la rédaction des scénarios de gestion de crise, la préparation des plans d’opérations et la conduite de l’opération sur le terrain (c’est le rôle d’ACO et des commandements subordonnées).

9/ Enfin, en conclusion, le but officiel du sommet de Strasbourg-Kehl : Ce sommet ne sera cependant pas que l’occasion de fêter un anniversaire, et d’accueillir au sein de la communauté transatlantique un nouveau président des Etats-Unis. Ce sera aussi l’occasion pour l’Alliance d’exprimer des choix pour son avenir, pour le XXIe siècle. Les Chefs d’Etat et de gouvernement adopteront une Déclaration sur la sécurité de l’Alliance, qui devrait manifester cette vision. Ils devraient aussi, je l’espère, lancer les travaux pour l’élaboration d’un nouveau concept stratégique de l’OTAN – l’actuel remonte à 1999.. Le nouveau concept sera adopté donc au sommet de 2010 (puisqu'il semble établi qu'il y aura un sommet dès l'an prochain, cette répétition posant évidemment un problème de fond : mais on y reviendra dans un autre billet)

Bref, ce discours est très intéressant car on y comprend les vraies préoccupations alliées, qui sont bien éloignées du débat sur le retour de la France : celui-ci, ainsi que je l'ai déjà écrit à de nombreuses reprises, est un faux débat, tourné vers le passé, qui ne prend en compte ni la situation actuelle, ni les questions futures.

O. Kempf

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