J.-Ph Immarigeon me faisait remarquer, tout à l'heure au colloque de défense nationale (remarquable, j'y reviendrai), les mots du président Obama lors de son discours du Caire d'aujourd'hui (on peut le lire dans son intégralité ici) :
"Ceci dit, il est également indéniable que le peuple palestinien, qui regroupe des musulmans et des chrétiens, a souffert en quête d’un territoire. Depuis plus de soixante ans, il connaît la douleur de la dislocation. Beaucoup attendent dans des camps de réfugiés en Cisjordanie, à Gaza et dans des terres voisines de connaître une vie de paix et de sécurité à laquelle ils n’ont jamais eu le droit de goûter".
Soixante ans. Sous entendu, la question de l'occupation ne date pas de 1967 et de la seule Cisjordanie, mais de 1948. Ce qui légitime un peu la revendication palestinienne au "droit au retour", même si les Américains savent qu'il n'est plus question de cela. Toutefois, cela augmente la pression sur le gouvernement israélien. Il est probable que ce discours n'a pas dû vraiment plaire du côté de Tel-Aviv. Même si les responsables déclarent le contraire (voir ici). Pour un aperçu des réactions, voir ici.
Faut-il pour autant chercher la petite bête ? Derrière le discours, et alors que les signes se multiplient en direction de l'Iran (tandis que la France paraît, quant à elle, demeurer sur une ligne plus dure envers Téhéran), le président américain maintient la pression diplomatique sur Israël et cherche à décorréler le cas Perse du cas israélo-palestinien.
Le timing est bon, avec un discours au monde arabe juste avant les élections de ce week-end et de la semaine prochaine (voir mon billet ici). On lira avec le plus grand intérêt le compte-rendu du débat télévisé entre les deux principaux candidats iraniens
Il faut au moins constater la cohérence de la ligne diplomatique américaine, qui est aujourd'hui très lisible. En effet, au contraire de la construction d'un "grand Moyen-Orient", le nouveau gouvernement sépare bien les choses : Proche-Orient, Moyen-Orient, Asie centrale et Asie du sud. Il y a certes des passerelles entre chacun de ces théâtres, mais qui ne justifient pas leur "globalisation". C'est d'une certaine façon le pied de nez au discours de la "globalisation" qu'on nous a seriné depuis quinze ans. Et ça, c'est nouveau. Et surtout, géopolitiquement très pertinent.
Pour juger de son efficacité, rendez-vous dans un mois.
O. Kempf