Un livre à ne pas lire !

Eh ! oui, ça existe parfois. D'habitude, on leur trouve toujours quelque chose, et on en tire toujours un truc de bon. Mais là, vraiment, non. C'est dommage, le sujet paraissait intéressant : "La fin des empires : accident ou destinée ?" (de Gabriel Wackermann, "professeur émérite à la Sorbonne", chez Ellipses (collection transversale débats).

Projet intéressant qu'une réflexion sur les empires : en effet, en s'intéressant à leur fin, cela pouvait être l'occasion de s'interroger sur la notion d'empire. Puisque tout empire périra, ainsi que l'expliquait (avec talent, lui), JB Duroselle.

Or, il manque dès l'abord une définition : qu'est-ce qu'un empire ? S'agit-il seulement de la forme politique, ou faut-il également comprendre les empires bénins, impériaux par leur influence plus que par leur souveraineté ? Cela commençait mal.

ça commençait tellement mal que les premiers mots sont : "a priori, le titre du présent ouvrage annonce une réflexion... etc." : A-t-on idée de commencer un livre par "a priori" Cela dénote un style qui, il faut bien le dire tout de go, est lourd. L'accumulation d'adjectifs tient lieu de démonstration (chers préparant du CID et d'autre examens, souvenez-vous de ceci : méfiez-vous comme de la peste des adjectifs, supprimez en un maximum, cela allégera votre copie). Notre auteur, bien que professeur "émérite" à la Sorbonne, n'a pas dû passer le CID. Ainsi : "La culture, portée par d'imposantes forces religieuses, intellectuelles, scientifiques, techniques, littéraires, artistiques, urbanistiques... est en soi une extraordinaire puissance géopolitique, structurante de territoires cohérents, organisés en ensembles susceptibles de peser sur une partie importante du globe, directement ou indirectement, et de rayonner à l'échelle internationale, voire mondiale". (p. 28).

Oui, vous avez bien lu. Ce n'est pas seulement lourdingue, prétentieux, engoncé, bouffi, mais en plus ça ne veut pas dire grand chose. D'ailleurs, méfiez vous des amphigouris et autre baragouins pratiqués par un certain nombre d'universitaires : très souvent, trop souvent, il ne s'agit que de masquer la déficience de la pensée. Par conséquent, évitez les mots à la mode : paradigme, impacter, solutionner. Mais notre auteur a donc vu des "forces urbanistiques", et j'en suis encore à m'interroger : qu'est-ce à dire ?

ça vous fait rire ? Allez ! deux autres exemples, pour la route : il nous invente un "réseautique" (p. 10) du meilleur effet : le pôvre, il ignore réticulaire, le vrai adjectif correspondant à la caractéristique du réseau. Mais il y a mieux, si, vraiment : voici donc, en sus de l'Europe centrale, une "Europe centrale de l'Est" (p. 36) : impayable.

J'ai arrêté au bout de 40 pages. SI quelqu'un veut me l'acheter, qu'il me contacte, je lui cède à vil Prix.

A déconseiller d'urgence.

O. Kempf

NB : pour entretenir votre bonne humeur et vous récompenser d'avoir lu jusqu'ici, je vous en donne un dernier : " la grande aventure institutionnelle de l'humanité" (p. 10). Il ose tout, je vous dis.

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