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Géopolitique du Japon, par Barthélémy Courmont

A la suite de Fukushima, il paraît utile de s’intéresser aux fondamentaux du pays, partant à sa géopolitique. Pour cela, le petit ouvrage de Barthélémy Courmont est arrivé à point. L’auteur est un spécialiste de l’extrême Orient et il a enseigné à l’université de Montréal.

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J’apprécie ce document complet de 250 pages, avec cartes (incluant un cahier central de cartes en couleur), tableaux, bibliographie, chronologie, …. : impeccable pour appréhender le pays, grâce à une articulation en six chapitres.

Le premier commence heureusement par la géographie (dire qu’il y a des livres de « géopolitique » qui oublient la géographie ! mais dire aussi qu’il y a des livres de géopolitique qui ne sont que de la géographie !) et l’histoire, même si l’on peut regretter une description un peu courte : je note que c’est le typhon (le vent divin, ou kamikaze) qui en 1281 sauve l’île de l’invasion mongole : symboliquement, les forces de la nature protègent l’archipel, et cela explique aussi l’acceptation contemporaine des ravages du tsunami.

Le 2ème chapitre traite d’histoire contemporaine, puisqu’il parle du Japon depuis 1945, entre géant économique et nain politique. Ce renouveau (renaissance ?) du Japon a surpris à l’époque, au point qu’au lendemain immédiat de la guerre froide, le Japon était présenté aux Etats-Unis comme le challenger qui allait tout dévorer… juste avant l’éclatement de la bulle immobilière et du marasme économique qui s’ensuivit jusqu’à aujourd’hui.

Le 3ème chapitre évoque l’environnement régional, et donc les difficiles relations tout d’abord avec la Chine, mais aussi les Corées ou Taïwan. En fait, le Japon a encore à payer l’héritage historique de son impérialisme d’avant-guerre, d’autant plus qu’il manifeste peut de remords pour les actions passées, ce qui handicape ses possibilités de mener un jeu diplomatique très ambitieux.

Ceci explique l’importance du lien avec les Etats-Unis, le vainqueur et le premier pays à avoir occupé le Japon, dans toute son histoire. C’est l’objet du 4ème chapitre, qui évoque à la fois la question nucléaire, celle des bases militaires, mais aussi le curieux jeu triangulaire Washington Pékin Tokyo.

Cet environnement compliqué permet ensuite de poser la question des défis sécuritaires actuels, dans le 5ème chapitre : terrorisme, prolifération, pays du seuil (même si l’auteur nous en dit finalement peu), nationalisme, autant de possibles qui s’ouvrent et qu’il faut examiner. Le dernier chapitre évoque la société japonaise en mutation, qui est une façon de reposer la question de la représentation à la japonaise : peu incessante du déclin (en cela, je retrouve un cousinage français), vieillissement de la population avec une jeunesse en manque de repère, une culture forte et paradoxalement très mondialisée (du karaté au sumo, du judo aux mangas), enfin une élite politique très décriée, à cause peut-être d’un système institutionnel déficient.

Au total, voici donc un excellent livre d’initiation à la question du Japon. J’ai quelques regrets (même si je comprends que la brièveté de l’ouvrage nécessite de faire des impasses) : on aperçoit mal les rapports sino-japonais avant le 20ème siècle, tout comme la dimension religieuse ou celle de l’écriture. J’aurais aimé quelques aperçus sur cette extrême-Orient qui est en même temps un extrême-Occident. On a de trop longues pages sur le transfert Okinawa Guam, qui appartiennent plus aux RI qu’à la géopolitique, alors que j’aurais apprécié qu’on parle une peu plus de la caractéristique de pays du seuil nucléaire.

Il reste que ce sont des petits reproches par rapport à la qualité générale de l’ouvrage, qui demeure d’abord un livre d’initiation et remplit fort bien cette mission. Pour 16,5 euros, il ne faut pas se priver.

O. Kempf

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