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Euro, une affaire politique

Encore un sommet européen. Je n'ose dire qu'il est historique : ou alors, cela signifierait une nouvelle acception de l'histoire, une caricature de la méthode des petits pas qui est, paraît-il, dans le logiciel de la construction européenne. Car effectivement, depuis deux ans, on a vu beaucoup de gagne-petit (et de perd-gros) et pas beaucoup d'histoire. Du moins au sens mythique et plein de panache tel que nous l'aimons en France, ce moment où l'on sent le frisson épique du "Grand" moment. Le goût français pour la grandeur n'est pas européen, constatons le. Ce qui explique peut-être beaucoup des incompréhensions des uns et des autres et la lenteur des résultats. Car si les pas sont petits, la pente est aiguë et même si nos dirigeants n'aiment pas "décider", ils approchent du moment où il faut bien se résoudre à faire quelque chose. Quelque chose qui n'est pas simplement "technique" ou "économique", qui n'est pas seulement politique, mais qui est Politique.

source

1/ Cela fait quelque temps que j'explique que la mutualisation de la dette entraîne un "fédéralisme" et donc une dimension politique : si on entre dans le fédéralisme, qu'on lui ajoute bancaire ou budgétaire comme épithète importe peu, puisqu'on est dans une démarche politique. Nous y voici, et le discours allemand (Kein deutsche euro ohne politische Einbindung) vient conclure ce que j'explique depuis de longs mois.

2/ Je rappelle le lien entre l'impôt et le processus démocratique qui est essentiel. Nous voici revenus aux réalités, et c'est, au fond, la grande utilité de la crise où nous sommes.

3/ Car effectivement, les théoriciens économiques ont raison : l'euro ne pouvait fonctionner puisque ce n'était pas une ZMO : une zone monétaire optimale. Ce que les économistes ne disaient pas, c'est qu'il ne s'agissait pas d'une décision "technique" et que les exemples qu'ils donnaient, et notamment l'exemple américain, sont le résultat de décisions politiques. Par exemple, l'unité américaine a été acquise au moyen d'une guerre de Sécession qui est peu représentée dans l'imaginaire militaire US, ce qui n'est d'ailleurs pas un hasard non plus.

4/ Tiens : j'ai évoqué Allemagne puis les États-Unis : comme me le répète depuis maintenant plusieurs mois l'ami Patrick, là réside peut-être l'antagonisme fondamental de cette crise. Selon cette analyse, les "pauvres" sud-européens ne seraient que les agents d'influence d'une ligne politique décidée à Washington, qui vise à "casser" l'euro pour redonner sa préséance au dollar (le benign neglect de vos cours) et donc de regagner un moyen de pression sur "le reste du monde", Chinois et pétro-monarchies mêlées.

5/ Cela étant, derrière cet antagonisme d'arrière-plan, occupons nous de nos affaires, et pensons localement (j'entends déjà Jean-Phi dire que j'ai raison : agir local pour avoir des effets globaux, voici la seule façon de faire). Ainsi donc, les gazettes vous l'expliquent à satiété, on échangerait de la croissance contre du fédéralisme . Ou plus exactement : une dose de mutualisation européenne (une sorte de "l'Allemagne paiera" qui n'est pas forcément du meilleur goût, même si l’argument a aussi des parts de vérité) contre une dose d'intégration politique.

6/ Ces notions de doses sous-entendent des pesées de milligrammes de potion, ce qu'on appelle des calculs d'apothicaires, qui nous renvoient à la petitesse politique (p minuscule) suggérée en introduction. Il reste que la "potion" ne guérit pas, et qu'il faut un effet structurant. Autrement dit, arrive un moment où l'on change vraiment de système.

7/ Laissons les solutions économiques de côté pour élaborer les réponses politiques. Un président européen ? illusoire à court terme. En revanche, renforcer les pouvoirs du parlement existant ne serait pas idiot. A une double condition, me semble-t-il :

  • d'une part, puisque l'Europe constitue une "fédération d'Etats-nations", il faut une deuxième chambre, représentant les États. Actuellement, c'est le conseil européen qui en fait office, mais sans donner satisfaction. Il faut une deuxième chambre législative, désignée par les parlements nationaux, un Bundesrat pour reprendre le modèle allemand. Au passage, cela pourrait plaire à la chancelière : n'a-t-elle pas, pour faire voter le récent mécanisme de stabilité, accepté que l’État Allemand garantisse les dettes des Länder ? (je devine qu'oodbae nous donnera des précisions utiles).
  • d'autre part, dire "chiche" à la chancelière : OK pour l'échange que vous proposez (économie contre politique), mais à condition que vous aussi vous donniez des gages politiques, et que donc vous dominiez votre cour constitutionnelle de Karlsruhe, qui sous couvert de dire le droit entrave cette construction européenne. Cela veut dire : une révision constitutionnelle de la Grundgesetz qui s'impose à la Cour !

8/ Fichtre, voici des choses qui engagent. Mais ces abandons politiques allemands sont les seuls qui permettront de vaincre la réticence française : en effet, on dit partout que c'est elle qui pose problème. Je n'en suis pas sûr, car on n'a jamais posé le problème ainsi. Le référendum constitutionnel était tellement technocratique (donc non politique) qu'il a été logiquement refusé. Ici, on irait à l'essentiel :

  • conserver l'euro, mais avec donc ce saut politique qui prend acte de la fin du modèle westphalien classique, mais en perpétuant le modèle initié à Bretton Woods, transformé par Nixon en 1973, et prolongé par l'incroyable échafaudage de dette accumulé depuis ces deux décennies de mondialisation + dérégulation
  • refuser le saut politique, mais donc abandonner l'euro, avec les énormes conséquences que cela aurait, mélange des expériences de 1922 et de 1945. Hyperinflation, tickets de rationnement, chute du standard de vie, troubles de tout ordre....

Dans les deux cas, il s'agit d'un choix, entre deux mauvaises solutions, avec des sacrifices.

Mais nous revenons à l'essence du politique. La France, nation foncièrement politique, devrait le comprendre.

Références

O. Kempf

Commentaires

1. Le jeudi 28 juin 2012, 19:59 par

Je suis également d'accord sur le fait que le conseil des ministres, le conseil de l'Union européenne, le conseil européen (à distinguer de l'autre conseil européen, celui des chefs d'Etat et de gouvernement)qui réunit les ministres de l'UE évolue. Il s'agit d'un organe qui cumule les fonctions législatives et exécutives.

Oui, comme EGEA, il me semble nécessaire que cela devienne une chambre fédérale à part entière, uniquement détentrice d'une partie du pouvoir législative européen, et avec un mode d'élection de ses membres directement dérivé du principe d'une chambre fédérale. Cela pose la question du mode de scrutin, et si ce n'est pas le sujet du jour, imaginez les enjeux s'il fallait choisir une élection traduisant le poids des Etats, ou une qui représenterait à égalité tout les Etats de l'Union, avec, par exemple, deux sénateurs par pays. Ce serait assez logique que la deuxième logique l'emporte puisque si ce sont des Etats qui sont représentés, alors, dans la société internationale, ils sont tous égaux et comptent pour une voix. Mais il faut souligner que si le Parlement européen représente les peuples, il le fait en tenant compte du poids des Etats puisque le nombre de députés par Etat est le fruit de savants calculs.

Je tiens à attirer l'attention sur le fait que si l'on retirait la parcelle du pouvoir Exécutif au conseil de l'union européenne, alors où va donc aller cette parcelle ? Il faut bien qu'on la retrouve autre part, puisque ce conseil a un rôle essentiel aujourd'hui. Et si elle n'est plus rattachée au pouvoir législatif, alors je ne vois que la solution d'un conseil rattaché au près de l'autre conseil européen (celui des chefs d'Etats et de gouvernements).

Il y aurait, alors, d'un côté, la présidence (le conseil européen des 27 chefs) qui, selon les traités, définit la politique générale de l'UE et lui donne son impulsion politique. De l'autre côté, il y aurait ce conseil des ministres de l'Union dirigeait la présidence tournante de l'Union qui travaillerait... comme un gouvernement.

Une Présidence, un gouvernement.

Mais il demeure une autre opposition fondamentale dans l'Union : si les pouvoirs législatif et exécutif souffrent d'une certaine confusion, il ne faut pas oublier que le seul gouvernement de l'Union responsable devant le Parlement européen est la Commission européenne ! Elle est gardienne des traités, c'est-à-dire qu'elle porte la politique inscrite dans les traités (ce qui pose bien des difficultés).

Il demeurerait donc une certaine opposition, confrontation entre les instances des Etats membres de l'UE (les deux conseils) et les instances fédérales (Commission, Parlement européen).

2. Le jeudi 28 juin 2012, 19:59 par

Bonjour,

Le point de vue est intéressant : la mutualisation de la dette entraînerait le fédéralisme. Ce faisant, ça me fait surtout penser à une mauvaise reprise du Seigneur des Anneaux et de son exorde :
« Une dette pour les gouverner tous. Une dette pour les neutraliser. Une dette pour les amener tous et dans la crise les lier. »
Car fondamentalement si l'on s'extériorise à la situation pour avoir une vue d'ensemble de l'édifice, l'on essaie de corriger le manque de bonne tenue du toît alors que ce sont les fondations qui sont déficientes.

Ensuite, pour l'heure l'Union Européenne c'est plutôt l'impuissance commune. Politique, économique et encore plus militaire. Même les États-Unis enjoignent vigoureusement l'Union à se bouger le train pour faire émerger et appliquer des solutions à son apathie qui plombe la croissance mondiale : un comble!
D'ailleurs le terme de « construction » est matois puisqu'il signifie : « ne vous inquiétez pas braves gens, tout continue, ça prend du temps, c'est normal, faut qu'on avance... »
LOL si je puis me permettre. Le procédé est un peu grossier et ne masque plus les dysfonctionnements criants qui ne sont pas résorbés au fil des traités arrachés de plus en plus de haute lutte aux États-membres.

Tiens les traités parlons-en : des textes qui sont passés désormais en force et lorsque la vox populi s'exprime à leur encontre, l'on use de procédés retors (l'épuisement électoral, le saucissonnage législatif, l'emploi d'annexes abscons, l'adoubement par voie parlementaire) qui ne font guère remonter dans mon estime ce système inique.
Or il est un fait : jamais une telle construction ne pourra s'effectuer sans le plein accord des peuples.

Car c'est moins d'une Fédération que d'une Confédération que nous avons besoin eu égard à l'essence des nations qui composent cette aire géographique, à peine de donner naissance à une infâme prison des peuples. Sans le respect et l'assentiment des individus issus de ces nations, jamais la construction Européenne n'aura de chance d'aboutir et s'effondra telle une nouvelle tour de Babel.

Quant à l'Euro, vaste sujet qu'il n'est guère possible d'épuiser en un seul commentaire.
Néanmoins une question : pourquoi avoir voulu imposer une monnaie unique en lieu et place d'une structure plus souple qu'est la monnaie commune?

Cessons de considérer les personnalités qui nous gouvernent comme des Dieux omniscients, ce ne sont que des Hommes. Et en tant qu'Hommes ils sont faillibles, sujet à bien des tares consubstantielles à l'espèce. L'on peut par ailleurs se demander utilement quelle est leur marge de manoeuvre politique réelle? Ainsi que leur compréhension globale du problème? Certains donneraient même à penser que leur statut proviendrait moins de leurs qualités intrinsèques que d'une forme de consensus mou.
« Face à l’événement, c’est à soi-même qu’a recours l’homme de caractère. Son mouvement est d’imprimer à l’action sa marque, de la prendre à son compte, d’en faire son affaire » : Le fil de l'épée, ouvrage peu cité mais toujours actuel du général de Gaule.

Cordialement

égéa : merci Yannick. Mais une confédération, je veux bien, mais ça veut dire quoi ? concrètement, je veux dire ?

3. Le jeudi 28 juin 2012, 19:59 par

Par Confédération, j'entends un ensemble de pays souverains décidant de s'associer librement à des projets communs. Libre consentement par conséquent, même pas de veto puisque pas d'obligation. Cela a très bien fonctionné pour Schengen politiquement ou Airbus techniquement sans que l'UE n'en soit en quoique ce soit responsable (alors que Galileo et Nabucco sont des preuves criantes de l'impéritie Bruxelloise).
La Fédération implique un centre décisionnel unique et centralisé ayant supériorité sur les instances nationales et/ou régionales. C'est ce vers quoi tend l'Union Européenne, et ce qui causera sa perte du fait d'un raidissement progressif dans ses modalités d'application.

Je ne veux pas passer pour un atrabilaire monomaniaque sur ce point, juste que je prends acte que ce système original (on ne peut le constater) souffre de déficiences multiples et que de grands projets à l'horizon, point...

4. Le jeudi 28 juin 2012, 19:59 par Patrick Saint-Sever

quelques modestes pistes complémentaires, en forme de questions ou remarques :

- si dans politique il y a souvent demi-vérité, et le débat sur une construction européenne qui joue à cache-cache avec le fédéralisme depuis 60 ans semble s'y prêter particulièrement, on ne saurait exclure que dans "fédéralisme contre cash" de la chancelière il n'y ait ... manoeuvre dilatoire ? La soudaineté de sa
« proposition » comme son isolement (et les pressions états-uniennes…) justifient le questionnement

- « fédéralisme contre cash » ? Mais non justement, ouvrons les yeux toutes les "solutions" consistent à "régler" une dette par émission d'autres dettes par les mêmes et d'autres quand les premiers sont dans l'impossibilité de le faire. Le "plan" du 29 juin n'y fait pas exception au contraire: il n'y a pas de cash

- en 2007/2008 il fallait sauver les banques sur ressources fiscales pour qu'elles continuent à financer l'économie qui ainsi ne ralentirait pas; désormais il faut sauver les états qui ont sauvé les banques lesquelles ont dû les sauver en retour par l'achat de leurs émissions de titres d'état pour éviter "la colle" et la hausse des taux trop prononcée (combien paierait l'Italie ou l'Espagne sans les massifs achats contraints par leurs banques locales ?). Bref il faut sauver le camion de pompiers pris dans l'incendie, puis les pompiers venus sauver les pompiers

- le plan du 29 n'a rien de neuf non plus versus la semaine précédente où déjà l'Espagne obtenait que France et Allemagne sauvent ses banques sans dire que cela représentait de manière induite un sauvetage de l'état espagnol, donc sans une comptabilisation de ces sommes dans la dette publique qui pourtant gonfle dangereusement l’actif desdites banques espagnoles. La seule nouveauté est donc qu'en plus de cela, l'Espagne a obtenu de n'accompagner ceci d'aucune mesure publique contraignante supplémentaire, sans tutelle du FMI (que vont dire les Grecs...?) et sans super garantie pour le prêteur...

- par contre, ce plan présente des nouveautés: on a parlé de "plan de croissance" -avec des chiffres tellement falsifiés que personne n'est dupe- mais la veille le pays demandeur de ce concept, le nôtre, mettait en place le début d'une série de plans de grande rigueur: les choses derrière les choses... Antiphrase on se dit allègre on agit austère

- autre nouveauté: si j'ai parlé d'Espagne, nous avons de facto appris que l'Italie est passée dans la situation espagnole, grecque, irlandaise etc., elle a demandé le secours européen: telle est la raison des amodiations évoquées supra. Personne n'a relevé ce point majeur...

- autre nouveauté non relevée : la BCE prend du pouvoir et dans le même temps a obtenu de ne plus gonfler son bilan de créances dangereusement « roll over » qui mettent son intégrité en danger : ce sont les MES/FESF qui financeront les achats sur les marchés des titres italiens ou espagnols, pas la BCE. Bien joué Mario (Draghi), bien joué Mario (Prodi) mais votre camarade est retors : vous risquez manquer de munitions quand les vrais marchés réagiront (pas le Cac 40 chéri des journalistes, les marchés obligataires)…

- dernier point technique: "union bancaire", pendant de "union budgétaire" ou "fédéralisme". Mais il suffit d'une part de considérer qu'un régulateur existe déjà (très efficace pour effectuer des stress tests connivents), EBA (et CEBS): si on en créée un substitut n'est-ce pas pour continuer comme on le fait depuis toujours à éluder toute régulation ? De surcroît, hormis une totale incompétence puisque ce n'est pas la mission de la BCE de surveiller les banques (ne surveillerait-elle pas mieux les états...? Bonne question), relevons que la BCE au total c'est 1.200 salariés, contre plus de 50.000 dans les banques centrales de l'UE, notamment 13.000 à la BdF, 10.000 à la Buba etc. En réalité les contrôleurs de la BCE seront ... les mêmes qu'avant! L’EBA sur son site indique déjà fonctionner ainsi (hub and spoke des organes nationaux).

Cybernétique (magnifique table ronde du 27 juin RDN/EGEA): ce n'est pas seulement le vecteur du message qu'il faut surveiller, mais le véritable message, parfois caché derrière le message apparent, qui peut même être controuvé.

Ici on ne déroge pas à cette règle, l'important est dans la première phrase du communiqué officiel. "Il est impératif de briser le cercle vicieux qui existe entre les banques et les états ". Chiche, reparlons comme autrefois de l'effet d'éviction du financement public au détriment du financement productif, mettons à plat un mécanisme dans lequel des banques, privées et cotées en bourse, gagnent de l'argent sur le dos du contribuable même quand elles ne savent plus analyser le risque de prêt, tout en déstabilisant les marchés. Car si l'Italie et l'Espagne appellent au secours pour leurs banques, en fait leurs Trésors, c'est aussi parce que les banques et assurances françaises, allemandes, britanniques etc. ont tiré le tapis sous les pieds du voisin... avec la complicité de leurs états/partenaires, ravis de bénéficier de ce retour de financement au bercail national même si c'est pour ... finir par refinancer Italie et Espagne via les FESF ! Harmonia Mundi.

Car, cela n’est jamais relevé, la France subit aussi ce retour du protectionnisme financier : de 70,6% de sa dette négociable, les non-résidents sont revenus à 63,8% en dix-huit mois.

Dernier constat: si la dette française s'est profondément creusée au premier trimestre 2012 (rien moins que + 72 milliards, dans l'indifférence générale, où sont les commentaires du gouvernement ? ), c'est pour une part non négligeable du fait du surplus de dettes contractées pour sauver la Grèce de sa dette : 9 milliards d’euros au premier trimestre, soit le tiers du budget consacré à la défense de la Nation. Le discours sur la solidarité va désormais passer dans la dure réalité: ce montant est d'ailleurs précisément celui que le gouvernement recherchait la veille dans son premier plan de rigueur...

Maintenant on peut parler politique, car la science économique est une économie politique.

Bravo donc pour ce papier, qui situe le débat là où il doit l’être.

5. Le jeudi 28 juin 2012, 19:59 par oodbae

Bonjour,

Suite à l'appel du pied, j'ai voulu me renseigner sur le sujet des dettes des Länder. Je suis désolé de ne pouvoir apporter beaucoup d'informations. Récemment, l'article 109 de la constitution allemande a été modifié, après vote du "Bundesrat". L'article 109 en allemand est lisible là: http://www.juraforum.de/gesetze/gg/... (>clic droit> new window) . Je vous propose une traduction approximative.

1) la fédération et les états établissent leur budget de manière autonome et indépendamment les uns des autres.
2) La fédération et les états répondent ensemble des obligations de la république fédérale d'Allemagne découlant des lois de l'UE, sur la base de l'article 104 du traité de fondation de l'Union Européenne , quant au respect de la discipline budgétaire et tiennent à cet effet compte des contraintes de l'équilibre économique global.
3) Les budgets de la fédération et de l'état ne peuvent être équilibrés au moyen de recettes issues d'emprunts.La fédération et les états peuvent prévoir d'une part une structure de contrôle afin de prendre en compte les effets de développements conjoncturels s'écartant de la situation normale, selon que l'on se trouve en période de croissance ou de récession, et d'autre part des mécanismes d'exception applicables en cas de catastrophe naturelle ou d'états d'urgence imprévisibles, qui échapperaient au contrôle de l'état. Dans le cas d'un mécanisme d'exception, il est aussi un mécanisme d'échéance [des remboursements] à prévoir. L'article 115 régule plus précisemment la formation du budget fédéral dans la mesure où le paragraphe 1 n'est réalisé que tant que les rentrées financières issues de crédits ne dépassent pas 0,35% du PIB nominal. Les états décident des détails de leur budget selon leurs compétences constitutionelles dans la mesure où le paragraphe 1 n'est respecté que tant qu'aucune rentrée d'argent ne peut provenir de crédits.
4) Des réglementations budgétaires pour la fédération et les états peuvent être établies sur vote d'une loi fédérale, qui devra être confirmée par le "Bundesrat", concernant la discipline budgétaire et la planification financière sur plusieurs années.
5) La fédération et les états supportent conjointement, dans un rapport de 65 à 35, les sanctions financières de l'UE en respect des dispositions de l'article 104 du traité de fondation de l'UE. L'ensemble des états supporte solidairement, en mesure de leurs populations respectives, 35% de la charge échue aux états . Les états supportent 65% des charges leur échoyant, en mesure de leur responsabilité. Une loi fédérale régule en détail la répartition des charges et celle-ci doit être votée par le Bundesrat.

A présent, mon commentaire personnel.
1) je ne vois pas trace de garantie portée par l'état fédéral sur les dettes des états (mais j'ai peut-être regardé au mauvais endroit)
2) Le PESD prévoyait 3% de dette par rapport au PIB... on a baissé ce taux limite à 0.35 % pour l'état fédéral et à 0% pour les états...
3) Les états peuvent être solidaires entre eux (paragraphe 5) pour payer les amendes. L'état fédéral supporte, avec les états, les amendes concernant la république allemande, mais l'état fédéral ne semble pas garantir les dettes de chaque état.

Un article 109a a été ajouté, qui prévoit la création d'un conseil de surveillance ("Stabilitätsrat").
Un article 143 d prévoit encore le temps de mise en place de cette discipline jusque 2020, étant connues les situations financières variables de chaque état.

Évidemment, en 2020, Madame Merkel ne sera probablement plus chancelière, donc il est facile de faire porter par d'autres les contraintes des lois votées aujourd'hui, mais cela serait aussi vrai pour des lois dans l'autre sens...on connaît ca avec les lois de programmation militaire...
Steinmeier, le chef du SPD ( les sociaux-démocrates) commenta: "évidemment, de loin, cet article a l'air juste et prévoyant, mais lorsqu'on y regarde de plus près, c'est de la bouffonnerie". Est-ce une opposition de facade ou une vraie opposition? difficile à dire.

En tout cas, il semble que l'Allemagne ne profite pas de sa situation dominante pour laisser filer mais au contraire se prépare à des perturbations [financières, monétaires, économiques] encore plus fortes. Mais l'avis d'un économiste serait plus détaillé.

Si vous avez de nouvelles infos sur le sujet...

Cordialement, et bonnes vacances,

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