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Talleyrand, le prince immobile (E. de Waresquiel)

Remarquable biographie de ce personnage fascinant. L’époque n’en a pas été avare, mais quelqu’un qui a réussit à faire carrière sous l’Ancien Régime, la Révolution, le Directoire, l’Empire, et la Restauration est forcément quelqu’un de fascinant…

Talleyrand, le prince immobile

  • Fayard, 2003, nouvelle édition de 2006.

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Je le prenais au départ pour le modèle des diplomates, l’homme qui avait réussi à retourner le Congrès de Vienne. Il est bien sûr beaucoup plus compliqué que ce simple « trait de caractère ». C’est d’abord un homme politique et un affairiste, les deux étant indissolublement liés à l’époque. On est stupéfait de l’absence absolue de repères et de croyance : pas simplement religieuse, mais même de croyance politique.

Tout juste peut-on constater l’orgueil des grandes familles (même s’il n’est probablement pas d’aussi noble extraction qu’il le prétend) et son goût pour la manière de vivre de l’ancien temps, ses convenances et son extrême élégance.

Politiquement, le plus surprenant réside dans son absence totale de conviction. Mais du coup, sert-il la France ? Régner sur la diplomatie n’a-t-il pour seul objectif que la passion du pouvoir, le goût des intrigues, les accessoires du pouvoir et notamment les recettes de la corruption ? Pourtant, on discerne une sorte d’option pour le système anglais, libéral : voici pour l’organisation intérieure qui servira de relative boussole à travers tous les régimes servis ; à l’extérieur, une sorte d’équilibre des puissances y compris pour brider les débordements de la France, en ce qu’ils menacent l’équilibre européen.

Pour le reste, un sang froid, un à-propos, une patience et une habileté exceptionnels sont les ingrédients de la réussite.

Ce parcours individuel à travers les incroyables tourments de l’époque constitue une lecture fascinante. « La haine dont tout le monde a parlé n’explique pas tout. Elle suppose la passion alors qu’en politique Talleyrand est le plus dépassionné des hommes. Plus que le ressentiment, le calcul et la mesure exacte des chances de chacun vont déterminer sa conduite » (p. 433) : cette phrase dit tout de Talleyrand. Il fascine et ne plaît pas.

Il demeure l’archétype du diplomate, apparu dans les temps de la manifestation absolue de l’ère westphalienne et du triomphe de l’individu souverain. Il répond au génie militaire de Napoléon. Les circonstances exceptionnelles suscitent des hommes exceptionnels. Talleyrand en est un.

L’auteur, E. de Waresquiel, a le mérite de reprendre toutes les anciennes biographies à charge et à décharge, ainsi que la lecture de bien des pièces nouvelles d’archive. Il propose une œuvre importante aussi bien d’un point de vue historiographique que littéraire.

O. Kempf

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