La démographie serait donc une menace contre l'environnement...

C'est du moins ce que déclare une agence de l'ONU (Fonds des Nations unies pour la population -Unfpa), juste avant Copenhague.... Heureusement, l'article du Monde qui en rend compte est plus que circonspect, et voit bien le côté propagandiste de l'affaire. Il n'en reste pas moins que ça a fait le premier titre du "grand quotidien du soir" (heureusement qu'il y a un gratuit du soir, pour que le Monde ne soit plus tout seul dans sa catégorie...).
Reprenons.
1/ Sur le versant démographique, l'humanité est en train, collectivement, d'achever sa transition. Il y a certes des zones où ce n'est pas le cas, mais globalement, on plafonnera à 9 Milliards d'habitants en 2050. Je me souviens, dans les années 1970, de projections alarmistes qui allaient jusqu'à 25 Milliards. On évoquait encore (je cite de mémoire) dans les années 1980 le chiffre de 15 milliards.
2/ Le problème démographique réside au contraire dans le vieillissement de pans entiers de la population : la chose est connue pour l'Europe, moins à propos de la Chine.
3/ On évoque également la question alimentaire : or, il semble bien que la question soit principalement une affaire d'organisation : par exemple, la conversion de productions alimentaires en productions agro-énergétiques, pour alimenter les voitures plutôt que les bouches; ou encore, la gestion de l'eau (40 % de l'eau des réseaux des pays développés serait perdue dans les fuites, plus de 50 % dans les PVD); ou enfin la question de l'alimentation carnée, excessive et polluante.
4/ Il y a donc des difficultés, mais certainement pas celles d'une surpopulation. Or, il faut bien voir les sous-jacents idéologiques de ce rapport :
- d'une part, l'instrumentalisation de la conférence de Copenhague : il y a certes du jeu médiatique, il y a aussi la volonté de présenter la question démographique comme un problème environnemental : en soi, cela est discutable (j'admets tout à fait que la question démographique soit un facteur environnemental, non un problème : il y a plus qu'une nuance derrière le changement de substantif).
- d'autre part, la profonde conviction malthusienne (et d'une certaine façon, eugéniste, et donc progressiste et moderne) qui anime les projets de l'unfpa.
5/ Or, ce malthusianisme paraît très partagé par nombre de thèses "écologistes". C'est un des dangers lorsqu'on aborde la question environnementale. Ce n'est pas le seul, mais les autres sont plus connus : sentiment que des actions individuelles (fermer son robinet ou trier ses déchets) font partie de la solution, ce qui est évidemment insuffisant ; ou croire qu'on peut marchéiser la pollution, ce que prônent les "capitalistes" pur sucre.
6/ Mais très souvent, derrière l'écologisme militant, on distingue un malthusianisme qui cache une grande méfiance envers la population : une sorte de post-rousseauisme économique, qui est bien sûr illusoire : car la notion de nature est, par elle-même, illusoire...
La notion de nature est création de la modernité. Vouloir y "revenir" est une incohérence.
O. Kempf