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Crise : zone monétaire optimale, euro, déflation et hyperinflation....

La crise qui s'annonce est bien plus sérieuse et radicale qu'on ne le pensait au mitan de 2008. Depuis, les pessimistes ont toujours eu raison. On voit mal comment il pourrait en être autrement, du moins pendant un certain temps. On se reportera à quelques billets du vieil Egea :

sur l'année 2009 : ici

sur la nouvelle bulle : ici

sur le risque keynésien : ici

et surtout, sur la confiance à l'envers : ici

un des plus anciens (30 septembre), sur la crise financière : ici

Ajoutons quelques considérations.

1/ Le bouclier de l'euro vacille. Souvenez-vous des débats d'il y a dix ans qui s'interrogeaient : l'UE est-elle une zone monétaire optimale ? (ZMO). Les analystes américains expliquaient que c'était impossible, quand les politiques disaient "ça ne se fera pas, et si ça se fait, ça ne marchera pas". Or, ça c'est fait, ça a marché, et on a curieusement oublié le débat sur la ZMO. Comme si le débat théorique ne servait plus à rien, puisqu'il était contré par la réalité. Or, une des hypothèses du débat était celle d'un choc asymétrique sur un des pays de la zone.

La crise des derniers mois est, l'avez-vous remarqué, aussi monétaire. Logique, puisque la monnaie, c'est du crédit et de la dette. Quand les banques prêtent, elles créent de la monnaie qu'elles refinancent auprès de la monnaie banque centrale, banque de dernier ressort. Par conséquent, une crise du crédit et de la dette a, mécaniquement, des répercussions sur les monnaies. Soit à coup de dévaluations rampantes (la livre), soit à coup de faillites (l'Islande), sans même parler des sous-évaluations structurelles qui ont porté le miracle chinois, lui aussi manipulé (tout comme les phénomènes de titrisation et de financiarisation de l'économie ont constitué des manipulations : mais on n'est qu'au début de la faillite du 'modèle' chinois).

Oui, mais l'euro ?

Eh bien il va mal, l'euro.

Car la cohésion monétaire implose sous les différentiels de taux entre les pays, validant 'ex post' (comme disent les économistes) les prédictions critiques des opposants de la première heure. A ceci près qu'à l'époque, ces mêmes opposants raisonnaient comme si le reste du système monétaire international demeurait stable, ce qui n'est assurément pas le cas. L'euro vacille parce que tout le monde vacille (livre, dollar, yen, yuan, ...).

Conclusion partielle :

  • 1/ L'euro nous a appris que la volonté politique peut corriger des 'règles' économiques qui s'appliqueraient dans le cas d'un marché parfait. Or, comme chacun sait, le marché n'est pas parfait : cela laisse la place à l'action politique.
  • 2/ Il existe toutefois des cas où la politique ne suffit plus; ou du moins, où les règles usuelles de la politique ne suffisent plus. Pour relancer l'action politique, il faut donc comprendre les nouvelles conditions.

2/ Dette publique, dette privée. Nous avons vu que la crise est d'abord une crise de confiance. Un petit rappel : les billets de banque sont désignés par le terme de monnaie fiduciaire - à laquelle on fait foi-. Pour que le système marche, il faut avoir la foi et croire au système, ou à défaut à son voisin. La crise actuelle est une crise de foi. Une crise de foi économique.

Tout vient donc d'abord de la microéconomie : les acteurs, entre eux, ne se font plus confiance. Le maire d'une petite ville que je croisai cet après-midi me confiait que la moitié des permis de construire déposés étaient annulés, parce que les banques ne prêtaient plus. La contraction du crédit des banques affecte le fonctionnement normal de l'économie. Or, les banques ne prêtent plus à cause d'une augmentation radicale de leur ratios prudentiels (d'allergie au risque). Cela entraine mécaniquement une baisse générale de l'activité, qui peut déboucher au mieux sur une dépression, au pire sur une déflation (baisse continue des prix). Des économistes nous ont dit récemment qu'ils n'y croyaient pas. Fort bien, mais les économistes se sont assez largement trompés ces dernières années pour qu'on puisse douter de leurs oracles (ou du moins, en discuter les motifs) ; or,on a vu une crise du même genre perdurer pendant dix ans, au Japon des années 1990, dont l'effondrement du système bancaire a provoqué une langueur déflatée tout au long de la décennie.

Dès lors, pour apurer les comptes des banques et soutenir l'activité économique, les États dépensent des sommes folles. On passe d'une dette privée, malade, à une dette publique, qui ne l'est pas moins. elle est malade et porteuse de risque pour deux raisons : parce que les prêteurs ont moins d'argent à prêter, puisqu'eux-mêmes pâtissent du ralentissement général ; et parce que la signature des États commence à faire peur (Islande, Hongrie, Grèce, Espagne, États baltes, ...). C'est le risque de faillite massive d'emprunteurs publics qui se fait jour, comme je l'ai signalé déjà. On remarquera au passage que c'est cette question de la signature qui introduit des différences au sein de la zone euro, qui se lézarde, quoiqu'on en dise.

3/ Vers l'hyperinflation ?

Comment en sortir ? Tout d'abord, en acceptant que la purge aille à son terme, ce qui entrainera d'ailleurs des troubles : le syndrome grec risque de s'étendre (voir le cas actuellement en Islande, États baltes, Bulgarie, ...). Ce n'est, malheureusement, qu'un début. A terme, les émeutes sont souvent contenues. Mais après cette période de purge (qui consistera en fait à payer, d'une façon ou d'une autre, les excès de consommation effectués pendant vingt ans), le problème financier demeurera. La seule façon d'en sortir sera, pour les États qui ne trouvent plus à emprunter, de faire marcher la planche à billet. La création monétaire artificielle (c'est-à-dire non gagée par des crédits privés) risque alors de faire passer brutalement d'un épisode de déflation (ou de stagnation continue des prix) à un épisode de radicale hyperinflation.

4/ Repasser d'une économie de patrimoine à une économie de travail En fait, tous ces processus permettront de rééquilibrer le partage des revenus entre le travail et le capital. Bref, on appauvrira artificiellement les patrimoines. Pour une raison simple : ils avaient été artificiellement augmenté. Et on reviendra à un rapport équilibré entre capital et travail.

5/ Pour s'amuser, risquons nous à quelques conseils patrimoniaux : restez éloignés de la bourse, puisque dès qu'elle passera la barre des 3300 (pour le CAC), les gens prendront leurs bénéfices. Faites le gros dos, et endettez vous d'ici deux ans, au début du processus d'hyperinflation. Encore faudra-t-il trouver un établissement qui veuille bien vous prêter pour dix ans....

O. Kempf

Commentaires

1. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par VonMeisten

"Repasser d'une économie de patrimoine à une économie de travail "... Cela me semble une vision optimiste des choses. Ca sous entendrais que ceux qui possèdent le patrimoine (et donc qui ont une influence forte sur la société via les relais habituels de type lobbies) permettent ce genre de chose, ou du moins ne s'y opposent pas trop fortement. Pourquoi le permettrait-il ? Ce n'est pas leur intérêt (en fait, si, a plus long terme), et ce n'est pas leur culture. Seul la pression d'évéments graves changerait la donne selon moi. Peut être suis-je trop pessimiste en ce qui concerne le genre humain...

Réponse d'OK

La question des événements graves est cruciale, et géopolitique. C'et pourquoi j'ai  écrit ce billet. Je crois qu'on est en train de changer radicalement d'époque, et que les anciens schémas (éco planifiée d'un côté, éco finaciarisée de l'autre) ont vécu. Il faut passer à autre chose.

OK

2. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par

Evénement grave. Oui, je crois au role majeur des catastrophes notamment en géopolitique mais aussi afin de mieux comprendre le comportement humain. Les exemples sont légions : Nakba, Guerres Mondiales, etc... mais aussi au role majeur des catastrophes qui ne sont jamais arrivées (3e Guerre Mondiale, version Pacte de Varsovie vs OTAN).

3. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par JYR

Economie de patrimoine / économie de travail : vision peut-être un peu schématique. On doit s'attendre, sur une période longue, à des ajustements de toute sorte entre agents économiques, en fonction des forces en présence, via une hyperinflation sélective. Période nécessairement troublée, conduisant à une nouvelle donne économique qu'il est actuellement bien difficile d'imaginer. Les plus malins sentirons le vent, les plus faibles souffriront.

4. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par HMK

C'est un vieil (aux sens propre et figuré) eurosceptique qui prend ici la parole pour contester l'affirmation que "l'euro a marché". Ce point est controuvé: l'euro n'a marché que pour permettre aux états faibles d'entrer plus profondément et plus surement dans un processus de faillite accélérée: on en voit la preuve dans les situations macro économique de l'Espagne, de l'Irlande, de la Grèce etc...
L'euro n'a réussi a "tenir" que grâce au financement allemand et à la faillite industrielle de la France.
Rappelez-vous les promesses des "copains à Trichet" (quel nom prédestiné!). Or, depuis bientôt dix ans, le niveau de vie a au mieux stagné, nous avons subi de plein fouet les effets néfastes de la mondialisation et j'attends toujours le grand soir où l'on rasera enfin gratis.
Non. L'euro n'a été qu'un grand pas en avant au dessus du vide: comme dans les dessins animés où le coyote continue à courir au delà du bord de la falaise jusqu'à ce qu'il se rende compte que... BOUM!
En ce qui nous concerne nous sommes en train de tomber, notre chute est accélérée par ce boulet imbécile de la monnaie unique et nous n'avons pas encore accepté de nous rendre compte que nous avions dépassé le bbord de la falaise.
Aïe, aïe, aïe!

5. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par

HMK
Vous vous présentez comme quelqu'un de l'ancienne génération. Il me semblait que l'on apprenait à l'époque, à l'école de la République, qu'il était non seulement impoli mais encore civiquement douteux de se moquer du patronyme de quelqu'un.
Sinon, concernant l'euro, votre conclusion est donc : revenons au franc ?

6. Le samedi 24 janvier 2009, 21:53 par HMK

J'ai beau relire mon message, je n'y vois aucune occurrence où je me serais "moqué" du patronyme de qui que ce soit. J'en conclus que nous ne devons pas parler la même langue.
Sur le fond, je ne sais pas s'il convient de revenir au franc. Je suis par contre persuadé que nous n'avons eu aucun des bénéfices promis par l'€. Je suis également convaincu que la création d'une monnaie unique et non pas simplement commune a été une erreur.

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