Clausewitz (III, 6) La hardiesse

1/ La hardiesse est une vertu guerrière. Toutefois, c’est une vertu individuelle et on a un peu de peine à suivre Clausewitz qui se proposait d’évoquer les « vertus guerrières de l’armée » : on s’attend à des ressorts collectifs, nous voici devant une qualité personnelle. Est-ce à dire que la somme des hardiesses individuelles forme une hardiesse collective ? Non, ce n’est pas ce que CVC veut nous dire. Dès lors, il étudie principalement la hardiesse du général.

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2/ « Ce noble élan (...) doit être considéré comme un principe actif et indépendant » (p. 189). Car « à la guerre », la hardiesse « a ses propres prérogatives », « au-delà des calculs » (p. 190). « Quand la hardiesse rencontre la crainte, c’est elle qui l’emporte à tout coup ou presque ». La hardiesse serait-elle donc l’équivalent de la volonté, dont le choc définit la guerre pour CVC ? voilà qui serait intéressant, car justement, CVC ne nous a pas tellement parlé de cette volonté (qui, d’ailleurs, peut être à la fois politique et militaire). Ou encore : la hardiesse serait-elle la « volonté militaire » ? cela reste à démontrer.

3/ Voici alors venir l’agglomération des vertus individuelles : « Transformée par la discipline en seconde nature dans la masse de l’armée, la hardiesse du chef doit être régie par la réflexion, tant une action hardie peut se muer tantôt en erreur ». La discipline (dans son sens d’éducation) permet donc d’insuffler la hardiesse à la troupe. Dès lors, CVC s’interroge aussitôt sur la qualité propre de la hardiesse du chef, qui se distingue de celle de sa troupe. Comme s’il y avait une hardiesse de direction, et une hardiesse d’exécution.

4/ Toutefois, Clausewitz donne la prime à la hardiesse : « à lumières égales, la peur causera à la guerre mille fois plus de dommage que la hardiesse » (p. 191). Le courage est donc une vertu guerrière, il incite à oser. Toutefois, l’intelligence fructifie cette vertu. « La lucidité de la pensée (...) endigue la puissance des diverses émotions. La hardiesse se raréfie donc d’autant que l’on s’élève dans le grade ». Plus on est gradé, moins on est courageux ? « Tel brille au second rang qui s’éclipse au premier ». C’est que la hardiesse du chef n’est pas de même nature que celle du soldat, ou du subordonné. « La hardiesse guidée par une intelligence supérieure est le sceau du héros » (p. 192). Mais il ne faut « jamais oublier qu’avec l’ampleur du dessein croissent les périls ».

5/ Enfin, « l’esprit de hardiesse peut se rencontrer dans une armée soit parce qu’il est infus dans le peuple, soit parce qu’un chef hardi lui a fait gagner une guerre. Dans ce cas, la hardiesse manquait au départ. Or, à notre époque, la guerre est le seul moyen de former en ce sens l’esprit du peuple, encore fait-il un commandement hardi » (p. 193). « Rien d’autre ne peut contrecarrer la mollesse et le désir de confort qui abaissent un peuple dont augmente le bien-être et s’accroît le commerce ».

Fichtre : les nations riches ne savent plus faire la guerre ? ou n’en ont-elles plus envie ?

O. Kempf

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