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Sommet de Strasbourg : finalement bien terne

1/ L’inflation des déclarations alliées à la suite des sommets de l’Alliance est patente : 19 articles lors de l’important sommet de Prague de 2002, 46 articles à Istamboul en 2004, 46 articles à Riga en 2006, 50 articles à Bucarest en 2008, 62 articles lors de ce sommet de Strasbourg. Un esprit malin pourrait presque en tirer la conclusion que la déclaration est d’autant plus longue que le sommet est peu important. Mais, bien sûr, nous n’adopterons pas une telle assertion ..... Je regrette juste que l’augmentation du rythme des sommets (puisqu’on nous annonce le prochain à Lisbonne en 2010) entraîne mécaniquement leur affadissement. Car c’est quand même la conclusion majeure qu’il faut tirer de celui-ci.

2/ Regardez ce que la presse en a retenu : l’envoi temporaire de 5000 hommes européens en Afghanistan, et la nomination de M. Rasmunssen comme secrétaire général. C’est bien la première fois que la nomination d’un SG appelle l’attention des médias (au moins depuis lord Ismay, en 1952 : c’était le premier !). Encore heureux que les Turcs ont fait des difficultés, pour que les journalistes puissent raconter les coulisses des négociations ......

3/ Le retour de la France ? ainsi que l’écrivait Le Monde, ainsi que je ne cesse de le dire à longueur de billets ici-même à EGEA, c’est un non-événement. Conséquence de la discrétion voulue par les autorités françaises (pour des raisons de politique intérieure), et surtout de la perception de la chose par les Alliés.

4/ Alors ? alors, il faut aller creuser la déclaration et les déclarations annexes pour trouver sa pitance, et extraire les évolutions à la pique à bigorneau.... Qu’on en juge :

5/ A regarder l’organisation générale de la déclaration, on distingue, après les quelques articles introductifs, plusieurs parties : sur les opérations (art. 6 à 15), sur la diplomatie publique (art. 16 à 20), sur les élargissements (art. 21 à 32), sur la Russie et les différents partenariats (art. 33 à 41), sur la transformation (art 42 à 49), sur le nucléaire (art. 50 à 58), et sur divers points (art. 59 à 61).

Chacune de ces parties fera l’objet d’un billet séparé.

6/ Jetons toutefois un œil à l’introduction, qui « résume » la déclaration : on y discerne ainsi ce que l’Alliance juge importante dans ce sommet.

Le premier article annonce le lancement des travaux pour un nouveau concept stratégique, dans les brisées ouvertes par une « déclaration sur la sécurité de l’alliance » : celle-ci est importante, car elle constitue l’architecture du prochain concept, et elle méritera donc une analyse particulière.

Le 2ème note l’entrée de l’Albanie et de la Croatie, attendues depuis Bucarest.

Le 3ème article rappelle l’importance de la « défense collective » (comprendre l’article 5 du traité) et l’utilité de la transformation. Cela peut paraître anodin, mais il y avait eu des inquiétudes cet été au moment de l’affaire géorgienne. Rappeler la défense collective a donc une utilité symbolique. Même si chaque déclaration alliée y fait systématiquement référence.

Le 4ème évoque la réconciliation franco-allemande, quand le 5ème note en deux lignes (sur 600) le retour de la France dans le commandement intégré. Profil bas, vous dis-je !

Le 6ème évoque les opérations et donne le chiffre de 75.000 hommes engagés. Le 7ème évoque la sécurité euro-atlantique et mentionne diverses organisations (ONU, UE) dont, et c’est une grande surprise, l’OSCE. D’ailleurs, le huitième article revient sur l’OSCE, « cadre inclusif approprié » à la sécurité euro-atlantique. L’OSCE n’était pas mentionnée à Bucarest, évoquée dans le seul cadre du Kossovo à Riga, mais citée à plusieurs reprises à Istamboul. Ce retour en grâce de l’OSCE n’est pas très étonnant, car il s’agit de trouver les voies d’une dialogue avec les Russes. On y reviendra.

7/ Ainsi, malgré les efforts de mise en scène, malgré les photos, malgré les violences (visuelles, elles aussi), on a le sentiment d’une grande opération de communication, marquée surtout par la présence du président Obama. Encore celui-ci a-t-il été en retrait, n’attendant visiblement pas grand chose de la réunion.

Le sommet a donc été assez terne : malgré les efforts de B. Obama (dialogue, écoute, fermeture de Guantanamo), les Alliés n’ont pas fait vraiment les efforts qu’il leur demandait. Est-ce donc un hasard si les déclarations géopolitiques de la semaine n’ont pas eu lieu à Strasbourg, mais dans d’autres enceintes : bilatérales à Londres (déclaration Obama-Medvedev), et européenne à portée mondiale à Prague (discours sur le désarmement nucléaire) ?

La longueur de la déclaration de Strasbourg n’y changera pas grand chose....

O. Kempf

Commentaires

1. Le mercredi 8 avril 2009, 22:13 par anonyme

L'évènement c'est le refus populaire contre cette alliance inutile aux Français, mais bien uitle aux Etasuniens

2. Le mercredi 8 avril 2009, 22:13 par

La raison pour laquelle la presse (française) a porté tant d'attention à la nomination du nouveau SG est, à mon avis, le fait que Nicolas Sarkozy a fait un gros lobbying pour que cette annonce soit perçue comme une décision importante. Aussi le fait que la Turquie y était opposée.

Concernant la multiplication des sommets, je ne sais pas dans quelle mesure cela est synonyme d'affadissement. J'ai tendance à adopter le raisonnement inverse (au même titre que pour l'UE) qui est que l'on voit une multiplication depuis la fin de la Guerre froide, car il n'y avait pas de raison de se rencontrer autant pendant la GF, les enjeux étaient beaucoup plus statiques. Aujourd'hui, passez deux ans sans sommet est une hérésie diplomatique et médiatique, d'autant plus que l'OTAN est mal connue et qu'elle essaie justement de faire connaître ses activités à un plus large public pour la débarrasser de cette étiquette d'alliance militaire de la GF, structure qu'elle n'est plus, mais un label que beaucoup lui confèrent toujours.

EGEA : argument intéressant. Les sommets avaient pour but, dans les années 1990 jusqu'à mi 2000, de rassembler les grands décideurs face aux évolutions du monde et de forcer la prise de décision dans la structure. D'où le rythme triennal. La partie médiatique venait après. AUjourd'hui, c'est l'inverse : le médiatique à tout prix, et moins la prise de décision. Non qu'il n'y ait de décision à prndre, en fait... mais c'est un autre débat. Cela étant, l'apparition de la "diplomatie publique" vient officiellement à l'appui de votre thèse (c'est en fait LA nouveauté), même si on peut aussi l'interpréter comme le moyen de cacher la vacuité. Plus on communique, moins on va au fond, en quelque sorte.... OK

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