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La chronique d'avril de Jérôme Pellistrandi

Je publie encore une fois avec plaisir la chronique de Jérôme Pellistrandi. O. Kempf

Chronique Internet avril 2009

Le sommet de l’OTAN s’est tenu à Strasbourg-Kehl et Baden-Baden en ce début avril. A cette occasion, l’Albanie et la Croatie sont devenues officiellement membres de l’Alliance. Pour ces deux pays, c’est une étape supplémentaire dans la normalisation de leur situation géopolitique et un signe d’une amélioration de la sécurité dans les Balkans. Mais la route est encore longue notamment avec le Kosovo. Ce jeune Etat n’a pas encore atteint ses objectifs d’une pleine reconnaissance internationale. C’est ainsi que la décision -plutôt inattendue- du retrait du contingent espagnol, annoncée ce printemps, n’a guère été appréciée par les partenaires de l’Alliance et traduit la précarité politique du gouvernement de Pristina dans l’espace balkanique, où les progrès nécessitent d’être consolidés. Il faut cependant souligner que cet élargissement de l’Alliance n’a pas rencontré un écho médiatique très fort car l’enjeu diplomatique de ce printemps était autre avec le G 20 de Londres et surtout le premier déplacement du Président Obama sur le « vieux continent ».

Strasbourg a donc également été marqué par le retour officiel de la France dans la structure militaire. De fait, ce choix politique traduit une réalité militaire entamée il y a déjà près de vingt ans. La nouvelle étape devrait permettre à Paris de participer plus pleinement au processus décisionnel. Le pari est cependant risqué car il suppose que l’Alliance sera plus européenne. Le chantier est donc à peine ouvert avec simultanément, la transformation et la réduction des états-majors, trop nombreux et trop gros, la redéfinition du concept stratégique de l’Alliance autour des missions avec des approches contradictoires entre certains états membres soucieux d’abord de leur sécurité et d’autres plus tentés par une coalition des valeurs. A ces chantiers internes s’ajoute la redéfinition des relations avec la Russie. L’administration Obama semble plus favorable à un rapprochement avec Moscou et le gouvernement russe, subissant le contre-coup de la crise économique avec une baisse de ses ressources financières, agit avec plus de modération qu’au cours de l’été 2008.

Enfin, le principal défi de l’Otan est l’Afghanistan. Les mois à venir avec l’échéance des élections présidentielles du mois d’août constituent un défi majeur pour l’Alliance. Une victoire militaire semble improbable et une défaite politique est interdite. Les partenaires européens ont annoncé un renforcement de 5000 hommes, mais les réticences sont fortes pour aller au-delà de l’effort actuel. Pour la France, seul l’envoi de 150 gendarmes a été décidé. Il n’est cependant pas exclu de projeter deux systèmes d’armes récemment arrivés en unité : l’hélicoptère de combat Tigre et le canon Caesar. L’intérêt est à la fois opérationnel mais aussi industriel avec la possibilité de mettre en avant le « combat proven », indispensable pour l’exportation.

3 des 5 véhicules Buffalo destinés à l’ouverture d’itinéraires viennent d’arriver sur le théâtre afghan. Ces véhicules blindés ont été acquis en urgence aux Etats-Unis au printemps 2008 et ont été testés à l’ETAS d’Angers à partir de la fin novembre. Le plan de relance français commence à avoir un impact en terme de commandes de matériels militaires auprès de PME nationales. Fin mars, la DGA a ainsi commandé 25 kits de tapis anti-sable pour les hélicoptères pour un montant de 25 millions d’euros auprès d’une entreprise charentaise. Ces tapis permettant de stabiliser la zone de poser seront livrés dès cet été.

Un autre volant – plus spectaculaire- sera la commande imminente du troisième Bâtiment de Projection et de Commandement (BPC) auprès des chantiers de St Nazaire. Ce BPC permettra d’éviter la chute du plan de charge des ateliers qui n’auront plus de coques de paquebot à construire à partir de l’été 2010. Par contre, il semble peu probable que Brest tire un gros bénéfice de cette commande d’environ 400 millions d’euros, au grand dam des employés de la DCNS. De l’autre côté de la Manche, le programme des deux nouveaux porte-avions se poursuit avec trois nouveaux contrats de 80 millions de Livres pour l’acquisition d’équipements.

Après la collision du sous-marin HSS Vanguard avec le SNLE Triomphant, le Parlement britannique a souhaité avoir plus d’informations sur les accidents de sous-marins nucléaires. Ainsi, depuis 1987, 12 incidents ont été répertoriés avec 9 échouages et 3 collisions, dont celle avec le SNLE français.

Après une longue période d’indisponibilité (IPER), le porte-avions Charles de Gaulle, avait repris ses entraînements à la mer avant de connaître fin mars une avarie importante de son système propulsif, obligeant à un nouvel arrêt de plusieurs mois. Le diagnostic semble complexe avant de pouvoir définir les réparations nécessaires. De fait, le problème de l’entraînement des pilotes du groupe aérien est posé avec l’absence non prévue du porte-avions. Cette nouvelle difficulté relance une fois de plus le débat sur le projet du deuxième porte-avions.

Les fortunes de mer ne sont pas l’apanage des marines britanniques ou françaises. L’US Navy a failli perdre au large du Golfe un sous-marin nucléaire d’attaque lors d’une collision avec un autre navire de l’US Navy. Le kiosque du SNA a ainsi été tordu sous l’effet du choc et en partie arraché.

Le tir avorté d’une fusée nord-coréenne, censée mettre en orbite un satellite de télécommunications, a provoqué une montée des tensions en Asie. La date de ce tir – lors du sommet de l’OTAN- avait un caractère de provocation notamment à l’égard du Japon. Il faut souligner que Tokyo a de bonnes raisons d’augmenter son budget de la défense pour se doter des moyens de protéger son territoire, La question du bouclier anti-missiles se pose avec acuité. C’est également une opportunité pour les industriels américains au moment où le Pentagone entame une révision drastique des grands programmes d’armements lancés auparavant par l’administration Bush.

Le prochain sujet de préoccupation pour la communauté internationale va être l’élection présidentielle en Iran. En effet, d’ici l’été, la surenchère nationaliste à Téhéran risque d’accroître les tensions au Moyen-Orient et autour du Golfe Persique. Le sommet de Strasbourg ouvre donc la voie à de nouvelles perspectives tant pour l’Europe que pour les Etats-Unis. Il est cependant dommage que les images d’émeutes urbaines et de destruction de bâtiments aient occulté le débat stratégique. Il importe désormais pour nos armées de réussir ce retour au plus haut niveau du commandement de l’Alliance. Premières réponses dans les mois à venir.

Jérôme PELLISTRANDI

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