Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Les prochaines élections de juin

Des élections importantes se tiendront en juin. Non, je ne parle pas des élections européennes, même si ce sont effectivement des élections importantes. Je parle des élections qui se tiendront au Proche et au Moyen-Orient.

1/ Il s’agit en effet de la réplique des élections israéliennes de février. Réplique au sens de riposte, mais aussi au sens des tremblements de terre : il s’agira probablement d’un autre tremblement de terre, différent mais lié au premier.

2/ Les élections israéliennes de l’hiver ont vu le succès des radicaux : l’aile droite du Likoud, avec Netanyahou, et le parti improbable de Lieberman, encore plus extrême dans sa négation du problème palestinien. Peu importe que Kadima ait viré en tête : ce parti était dans l’impossibilité de réunir une coalition de gouvernement ; Comme s’il fallait aller jusqu’au bout d’une ligne dure, avant de se rendre à l’évidence, celle de la négociation. Le gouvernement israélien est donc aujourd’hui animé d’un projet au sens propre jusqu’au-boutiste.

3/ On aurait pu s’attendre à ce que la riposte politique passe par les élections palestiniennes. Or, ce n’est pas ce qui est advenu. Car les déterminants de la question proche-orientale se trouvent bien ailleurs que dans un Proche-Orient circonscrit au duo Israël – Autorité palestinienne. D’une certaine façon, en déniant à l’AP un quelconque rôle politique, Israël force à trouver une solution ailleurs. C’est d’ailleurs ce que ne cesse de dire M. Nétanyahou : la plus grande menace contre Israël ne se trouve pas à Ramallah, mais à Téhéran.

4/ C’est là qu’on en vient aux élections de juin. Elles revêtent une importance croissante à cause du sens que le nouveau gouvernement américain, celui de M. Obama, leur donne. En effet, on comprend bien la ligne américaine, manifestée lors de l’entrevue accordée cette semaine à M. Netanyahou à Washington : non, la question palestinienne n’est pas négligeable car elle est d’abord locale et impose une solution à deux Etats ; et non, l’Iran ne peut plus être considéré comme le principal problème de la région.

5/ Du temps de G. W. Bush, les Etats-Unis ne pouvaient menacer sérieusement l’Iran d’une attaque contre lui, car ils étaient englués en Irak et en Afghanistan : la marge de manœuvre militaire était quasi nulle. Israël était alors présenté comme l’instrument d’exécution des menaces américaines contre Téhéran : « certes, je ne peux intervenir directement contre vous mais Israël le peut, lui :modifiez donc votre comportement, sinon je ne le retiendrai pas ». Dès la fin du deuxième mandat de G. Bush, le discours évolua : d’une part à cause de l’amélioration de la solution irakienne, d’autre part à cause de la vacuité de la menace israélienne. Malgré toutes les démonstrations de force, chacun comprit que les choses avaient changé, qu’il n’était plus possible de détruire d’un coup l’ensemble des installations nucléaires iraniennes comme cela avait été fait contre l’Irak ou contre la Syrie : à la différence de ces deux précédents, l’Iran était à la fois trop avancé et avec un dispositif trop dispersé pour qu’une telle menace fisse effet.

6/ Le gouvernement israélien a donc beau faire, personne ne croit plus qu’il soit capable de mener une attaque efficace contre le dispositif iranien. Surtout, il n’a plus le soutien de Washington. Celui-ci a trop besoin de l’Iran, tant en Irak qu’en Afghanistan ; il croit désormais aux vertus d’une solution négociée, en laissant à l’Iran un statut de pays du seuil. Enfin, l’aplanissement du différend iranien permettra de mettre Israël en face de la réalité, qui consiste à trouver une solution viable à la question palestinienne. Ainsi, M. Obama est-il l‘allié objectif de tous les réformateurs de la région, en Iran, au Liban ou en Israël. C’est ce qu’il a dit clairement à Israël cette semaine.

7/ Toutefois, cette stratégie n’a de chance de réussir que si elle rencontre des gouvernements prêts au dialogue dans deux pays de la région. Et cela dépend des élections qui se tiendront en juin.

8/ Le 7 juin, il y aura ainsi des élections au Liban. Si le Hezbollah gagne la majorité absolue, cela raidit considérablement la donne et ferme la voie à une résolution négociée au sujet du Golan (et des fermes de Chebah) ; si au contraire, la ligne sunnito-druzo-chrétienne gagne, (ce qui est aujourd’hui possible), l’hypothèque est levée. Mais cela n’empêche qu’une fermeture, cela ne fabrique par une ouverture. Celle-ci se trouvera ailleurs.

9/ Car le plus important réside dans les élections du 17 juin en Iran. En envoyant depuis le début de l’année de multiples signaux d’apaisement, M. Obama a tout fait pour empêcher la réélection de M. Ahmadinedjad. Si un candidat plus conciliant est élu, alors le dialogue sur la question iranienne sera possible. Ce qui aura les conséquences les plus positives sur les théâtres environnant (Irak et Afghanistan) et, par ricochet, sur la question palestinienne.

Ainsi peut-on affirmer, sans manier le paradoxe, ces élections de juin permettront de contrer l’alliance objective qui existe aujourd’hui entre MM. Netanyahou et Ahmadinedjad.

O. Kempf

Commentaires

1. Le samedi 23 mai 2009, 22:00 par

Bonsoir,

Je crois que les élections iraniennes ont lieu le 12 juin (http://www2.irna.ir/fr/news/view/me...). J'ai vu également le 17 juin sur d'autres sites.

Sur le fond, une victoire du Hezbollah et de ses alliés du AMAL (N. Berri) et du CPL (M. Aoun) pourrait tendre la situation sécuritaire au Proche-Orient. Depuis la déclaration ministérielle libanaise du 4 aout 2008, les autorités israéliennes n'ont cessé de clamer dans la presse que l'État libanais était responsable des agissements du Hezbollah (soutenu ouvertement par l’Iran et la Syrie). Ce dernier a déjà proposé à plusieurs reprises de former un nouveau gouvernement d'union nationale (GUN), en cas de victoire du bloc du 8 mars aux prochaines élections. Un nouveau GUN (sans F. Siniora) rendrait plus difficile une action israélienne car le bloc du 14 mars serait plutôt soutenu par les États-Unis et l’Égypte.

En résumé, vous avez raison, les élections de juin seront cruciales pour la paix au Proche-Orient, notamment au Liban.

Egea : oui, je ne sais plus si la date est le 17 ou le 12.....

2. Le samedi 23 mai 2009, 22:00 par

Cher Olivier bonjour,
Peut-être serez-vous intéressé par une interview de René Girard à propos de son livre "Achevez Clausewitz" (à la fin de mon nouveau post). Non qu'elle apporte des éléments vraiment nouveaux aux spécialistes de défense, mais la vision girardienne du théoricien prussien est toujours bonne à lire.
A bientôt

EGEA : cher menestrel, je le lirai avec attention car je suis un girardien de la première heure, même si son dernier opus m'a un peu déçu, pour tout dire.

3. Le samedi 23 mai 2009, 22:00 par Toto

Bonsoir,
je ne peux me retenir de conseiller un ouvrage qui date un peu mais reste un complément très "éclairant" sur le moyen-orient : "La poudrière du Moyen-Orient " par Noam Chomsky et Gilbert Achcar édité en 2007 chez Fayard (ISBN 978-2-213-63168-4).

EGEA : Merci : il faudra effectivement que je lise un jour Noam Chomsky, même si sa virulence apparente m'a toujours laissé réservé.

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

La discussion continue ailleurs

URL de rétrolien : http://www.egeablog.net/index.php?trackback/198

Fil des commentaires de ce billet