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Green zone

Voici un film enthousiasmant : d’abord parce que ce n’est, au fond, pas un film de guerre mais un film du lien entre la politique et la guerre. Finalement, un film de géopolitique.

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Il montre en effet, ...

...aux premiers jours de l‘occupation de Bagdad lors du printemps 2003, la quête américaine pour des « Armes de Destruction massive » (puisqu’il s’agit d’un film américain, on acceptera cette expression, bien qu’elle soir par elle-même hautement idéologique). Et surtout, le constat que ces armes n’ont été qu’un prétexte à une intervention, et que les décisions qui en découlent (débaassification, mise hors la loi de l’armée) plongent le pays dans le chaos.

Autrement dit, on est au cœur d’une décision géopolitique qui aura des conséquences déterminantes : non seulement localement (l’Irak) mais régionalement (traiterait-on le cas iranien de la même façon si les Américains ne s’étaient englués en Irak ?) ou au-delà (l’irakisation du conflit afghan).

Pour le reste, il y a énormément d’invraisemblances, et tout d’abord celle de voir ce sous-officier (chic, un héros sous-officier ! ça nous change du modèle habituel) spécialisé en NRBC tenir subitement la concurrence avec les forces spéciales les plus éprouvées, puis passer à la CIA, accéder aux endroits les plus secrets, dialoguer avec les journalistes, … Toutefois, l’ambiance générale est bien rendue, et quiconque s’est déjà rendu dans ce Moyen-Orient reconnaitra l’atmosphère. De même, à la différence de bien des films de guerre, la guerre est présentée comme assez lointaine : une sorte d’environnement dans lequel on approche plus ou moins près du danger, avec des actions très fractionnées qui empêchent à l’acteur local d’avoir une vue globale de l’action (ce qui relativise, au passage, la notion de caporal stratégique qui a tant animé les stratégistes la décennie passée).

C’est bien pour cela, d’ailleurs, que ce n’est pas un film de guerre, même s’il est nerveux et haletant : car c’est un film d’action, mais qui porte un discours très affirmé, et mettant en cause la propagande d’il y a dix ans.

C’est cette distance qui en fait un film évolué, ce qui explique qu’il n’ait pas eu de succès aux Etats-Unis : d’une part à cause de cette complication du discours, mais aussi parce qu’il remet en cause les enthousiasmes majoritaires alors (dont on se rend bien compte lors de la scène où le discours de Bush sur son porte-avion est retransmis à la télé et provoque l’approbation générale) : il n’est pas si facile de se rendre compte qu’une guerre qu’on croyait gagnée a été en fait un mensonge ; et donc, qu’on a été dupé. C’est d’ailleurs pour cette même raison que le film devrait avoir du succès en Europe, où la remise en cause des fondements de la guerre a été très tôt partagée.

On risque là de tomber dans un autre simplisme : celui de croire cette guerre inutile, ce qui n’est pas, au fond, si évident que cela. Mais ceci est un autre débat. En attendant, le spectacle vaut le détour et comblera le cinéphile géopolitologue…..

O. Kempf

Commentaires

1. Le mercredi 21 avril 2010, 20:55 par

Tu me coiffes au poteau Olivier, je comptais aller le voir ce soir !
Je te dirai après ce que j'en pense mais je me permet déjà un doute :

"à la différence de bien des films de guerre, la guerre est présentée comme assez lointaine"

C'est le cas dans de plus en plus de films "de guerre" dans lesquels le combat se fait de plus en plus lointain.
L'un des premiers à avoir incroyablement réussit ce choix dans le cinéma moderne est Jarhead. Un film qui crée une grande tension jusqu'à la fin.

égéa : chic, un débat de cinéphile comme autrefois, "la masque et la plume" : c'était le dimanche soir, sur France Inter, et ça s'engueulait, et c'était sympa. D'ailleurs, mon prochain bouquin "le casque et la plume" fait implicitement référence à cette émission. Juste histoire de dire que le commandement c'est du cinéma ? lol

2. Le mercredi 21 avril 2010, 20:55 par VonMeisten

J'ai raté Agora, je ne raterais pas celui-ci.

égéa : honnêtement, j'ai préféré Agora mais celui-ci est très bon.

3. Le mercredi 21 avril 2010, 20:55 par

Bonjour,

Merci beaucoup pour cette fiche cinéma : j'avoue qu'à sa lecture, j'ai pensé à Syriana que j'ai énormément apprécié non seulement pour le jeu des acteurs mais aussi pour l'enchevêtrement complexe des situations donnant une perception plus juste et froidement réaliste de la géopolitique au Moyen-Orient.

Et sinon, moi aussi j'ai adoré Agora, à tel point que je lui ai même consacré tout un article sur un journal participatif. C'est peu dire que j'attends sa sortie sur DVD courant mai...

Cordialement
égéa : oui, j'avias aimé SYriana, je crois même avoir fait une critique sur le vieil égéa : il faudrait que je retrouve ça....

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