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Rapport Albright (II)

Suite de ma lecture du rapport Albright, après ce billet.

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O. Kempf

7/ Ce chapitre est d’ailleurs assez volumineux, puisqu’il court de la page 24 à la p. 32.... Pour dire les choses d’un mot, il s’agit de la mise en œuvre de l’article de Z. Brzezinski, paru à l’automne dans Foreign Affaires et cet hiver dans Politique étrangère. L’alliance « pourrait bien fonctionner dans le cadre d’un vaste réseau de partenaires de sécurité ». Car « l’approche globale, ce n’est pas une question de hiérarchie, c’est reconnaître que la sécurité a des dimensions militaires, politiques, économiques et sociales ». On comprend mieux alors la « quatrième tâche » : l’alliance doit devenir un acteur majeur (central ?) de l’approche globale. D’où une politique qui permette « une différenciation accrue des partenaires dans leurs relations avec l’Otan » (p. 25). Notons au passage la notion, nouvelle, de « partenaires d’opération » qui n’ont pas vocation à intégrer l’Otan, même s’ils partagent des valeurs communes. C’est une sorte de coalition permanente, une sortie par le haut de la doctrine Rumsfeld (la mission fait la coalition) qui est adaptée aux circonstances, mais aussi au cadre allié.

71/ PPP : Le rapport fait une distinction entre le Partenariat pour la Paix et le Conseil de partenariat euro-atlantique : il faudrait renforcer le rôle de celui-ci. La distinction paraît toutefois assez spécieuse : est-ce à dire que le Partenariat n’est que la somme de relations bilatérales, entre l’Otan et chacun des partenaires ? et qu’il n’y a pas d’instance plus collective ? alors que chaque sommet de l’alliance, de niveau chef d’Etat ou ministériel, prévoit systématiquement des réunions en format élargi, et notamment celui du CPEA ? On voit mal comment une déclaration d’intention, annoncée par un concept, pourrait réellement affecter une pratique jugée décevante. A tout le moins appréciera-t-on la lucidité, même si le remède proposé relève du vœu pieux.

72/ Partenariat avec l’UE : cette partie est attendue. Le rapport reconnaît que l’UE dispose de moyens aujourd’hui fort utiles dans les crises actuelles, et admet, sans le dire, que la PESD (car il faut bien comprendre qu’on ne doit comparer l’Otan qu’à la PESD) a moins besoin de l’Otan. Du coup, il faut « reconnaître que le traité de Lisbonne de l’UE a pour objectif entre autres de renforcer les capacités militaires et les structures de commandement de l’Europe » (p 26) : de commandement ! C’est la porte ouverte à un état-major de niveau stratégique et, au fond, à une « duplication » (même si Mme Albright, dans la conférence de presse du rapport, estime qu’il ne faut pas payer deux fois, renvoyant ici à son opposition ancienne à l’émergence d’une Europe de la défense : on sent qu’elle a dû être très entourée pour accepter de rédiger ces lignes là). Il reste que ce qui suit (« participation conjointe régulière aux réunions ») n’est pas très convaincant : se confirme l’idée que j’ai déjà exposée, selon laquelle dorénavant, l’Otan a plus besoin de l’UE que l’inverse.....

73/ Il en est de même avec l’ONU. Cela fait maintenant des années que l’Alliance veut signer un accord institutionnel avec l’ONU, et que celle-ci s’y refuse : ce serait traiter l’Alliance sur un pied d’égalité, ce qui est impensable vu de New York.

74/ OSCE : « L’Otan doit tirer pleinement parti de la boîte à outils que peut offrir l’OSCE » notamment dans les négociations sur la maîtrise des armements conventionnels : la question est à peine évoquée, mais il s’agit bien de la question du traité FCE qui est ici évoquée, sans insister. Car tout dépend de la Russie.

75/ Russie. Or, « interrogés sur la Russie, les Etats membres de l’Otan n’en donnent pas forcément la même description, alors qu’ils s’entendent tous pour dire qu’il faut s’engager avec elle » (p. 28). Quant aux propositions Medvedev : « les « propositions en faveur d’un autre ordre de sécurité en Europe semblent conçues en partie pour limiter les activités de l‘Otan ». Il faut donc « à la fois rassurer tous les membres de l’Alliance et aller vers un engagement constructif avec la Russie ». Chacun aura compris que dans l’esprit des Américains, c’est surtout le deuxième point qui est nécessaire. En effet, soit l’Otan devient la matrice des relations de sécurité pan-européenne avec la Russie, soit ces relations trouveront un autre cadre. Mais il faut pour cela convaincre à la fois certains Européens et les Russes : l’objectif est ambitieux.

76/ Géorgie et Ukraine : on ne peut manquer de noter que rien n’est dit sur l’éventuelle adhésion de ces deux pays.... On est loin du sommet de Bucarest, où la question posait problème. Cela signifie que l’élargissement n’est plus une politique centrale, et qu’on admet, sans le dire, la politique des confins russes : très clairement, il s’agit de mettre en œuvre l’ambition énoncée au paragraphe précédent.

77 Méditerranée et Moyen-Orient : les résultats sont « modestes », constate le rapport. Il faut donc faire preuve de « patience stratégique » ! Là encore, on est loin des discours fracassants sur l’arc de crise et le Grand Moyen-Orient. La zone n’est plus prioritaire.

78/ Les partenaires dans le monde : le rapport mentionne les partenaires d’opération (Nouvelle Zélande, Corée, Japon, Australie) mais aussi l’Afghanistan et le Pakistan, la lutte contre la piraterie dans le golfe d’Aden, ou enfin l’Asie centrale avec mention de l’OTSC et de l’OCS : il faut donc étudier la « possibilité de créer de nouveaux sous-groupes régionaux », ou « formaliser les liens avec d’autres organisations (UA, OEA, CCG, OCS, OTSC). Cette ouverture à l’OTSC et à l’OCS est novatrice, et marque encore une bonne manière faite à Moscou.

(à suivre)

O. Kempf

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