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Europe et voisinnage

Les commentateurs (dont je suis: voir ici) dissertent sur le Maghreb, l'Égypte, le Porche Orient.

06_enjeux_mediterraneens

On évoque aussi les grands acteurs extérieurs et leur politique défiée : France (Tunisie), États-Unis (Égypte), Israël (tout le monde arabe), ...

Et l'Europe ?

Élargissons le spectre :

1/ Bien sûr, on constate un gigantesque échec de la politique méditerranéenne. L'UPM (Union Pour la Méditerranée) était déjà tellement mal en point qu'on avait relancé le 5+5. Et encore, relancé est un grand mot. Et pourtant, souvenez-vous, l'UPM avait été contrecarrée par toute l'Europe du nord, au motif qu'il fallait éviter un découplage....

22/ Les souvenirs (récents) des déchirures irakiennes, avaient donc incité la France à en rabattre, à faire un machin élargi, à admettre une co-présidence avec l'homme fort du sud : Hosni Moubarak . Dans le même temps, on "renforçait" la politique de voisinage, l'outil européen pour dialoguer avec ses confins. Il faut dire qu'alors, l'hypothèque turque pesait encore plus, et qu'on était à la recherche d'un moyen d'avoir des marges (si on me permet ce jeu de mots).

3/ Qu'observe-t-on aujourd'hui ?

  • une Biélorussie qui a instrumenté de belle façon les avances européennes en rompant à l'issue des récentes élections.
  • une Ukraine qui s'est déclarée non-alignée, manière d'habiller son retour dans un giron russophile.
  • une Turquie qui a tiré les conséquences des tergiversations européennes et a lancé une politique néo-ottomane, remettant en cause la laïcité européenne au profit d'une sorte de protestantisme musulman.
  • un Hezbollah qui, W. Joumblat aidant, rompt avec le gouvernement pro-occidental pour retourner dans une proximité syrienne.
  • un Israël qui n'écoute plus personne, et surtout pas les Européens, eux moins que personne.
  • et dorénavant, un Maghreb qui s'enflamme, et pas vraiment, malgré les espérances des candides, en faveur d'un Occident encore habillé d'un gros ressentiment. On remarquera au passage que les deux pays qui détonnent le plus sont ceux qui ont vu passer le plus de touristes occidentaux, et leur image individualiste et richissime.... (de ce point de vue, le Maroc présente des points comparables).

4/ Disons les choses simplement c'est toute la politique de voisinage qui est en train d'imploser. Le vide européen s'affiche aux yeux de tous, et à force d'avoir tout négligé, au motif d'un irénisme béat et d'une technocratie intelligente mais non-politique, on en arrive à cet isolement croissant, et inquiétant.

5/ Car si on pouvait encore se poser la question des frontières de l'Europe, il y a cinq ou dix ans, elle n'existe définitivement plus aujourd'hui. Il n'y a plus d'attraction européenne. Notre modèle n'attire plus. Et plutôt que de moquer les Français ou les Américains, il faut surtout constater cet affaissement collectif. Peut-être est-ce nécessaire, aller vraiment tout en bas pour forcer le sursaut.

O. Kempf

Commentaires

1. Le mardi 1 février 2011, 21:09 par

Encore une analyse hautement efficace que je mentionnerais dans mon prochain billet.

L'Union pour la Méditerranée ? Ce machin insipide qui comptait fédérer Tunis, Tripoli, Le Caire (ou plutôt leurs régimes respectifs), Madrid, Lisbonne, Paris, etc en faisant totalement fi de la moindre approche éthique. Preuve flagrante que le pragmatisme à lui seul ne peut suffire comme politique.

2. Le mardi 1 février 2011, 21:09 par

Bonjour,

Si l'on observe aussi les prévisions économiques (avec le recul qui se doit pour tout ce qui concerne le côté prédiction, que ce soit en météorologie comme en économie), la zone Euro apparait comme totalement amorphe en comparaison d'autres régions du monde (même le Japon pourtant durement touché remonte la pente légèrement mieux et à lui tout seul). Source : dernier rapport du FMI en date de janvier 2011.
De l'extérieur je ne serai pas surpris que les Européens apparaissent comme des êtres cacochymes et gras, et à ce titre le mot provocateur récent de Recep Tayyip Erdogan en évoquant l'homme robuste de l'Europe (la Turquie) censé redonner de la vigueur aux peuples Européens n'était pas sans raison fondée il faut l'admettre.

En s'obstinant à vouloir sortir de l'Histoire en se fondant dans une sorte de magma géopolitique informe, les Européens vont bien finir par y parvenir. Ce qui profitera (car la nature a horreur du vide) à des entités géopolitiques autrement moins torturées et auto-entravées. On ne fonde pas un avenir géopolitique sur la seule finance (dont on s'est enfin aperçu en 2008 que sa dissociation avec l'économie dite réelle avait causé de bien sérieux ravages tant proprement économiques que sociaux), d'autres leviers doivent être actionnés.

Merci pour cette analyse, bien que pas très réjouissante il faut en convenir.

Cordialement

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