Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

OTAN 21 : fiche lecture par J Le Dauphin

Jacques Le Dauphin, qui anime l'Institut de Documentation et de Recherche sur la Paix, me fait parvenir cette fiche de lecture sur "L'OTAN au 21ème siècle" qui est parue dans la dernière livraison (trimestrielle) de "Recherches internationales".

O. Kempf

L’ouvrage d’Olivier Kempf, publié quelques semaines à peine après le sommet de Lisbonne, est d’actualité. Mais son intérêt réside surtout dans une synthèse de l’Otan, des origines à nos jours.

L’auteur, Maitre de conférence à Sciences Po Paris,conseiller éditorial de la revue « Défense Nationale », est considéré, fort justement, comme un spécialiste de la question. Le livre est impressionant, non seulement par son volume, mais surtout par la multiplicité des thèmes abordés. Il comporte quatre parties autonomes : « L’état présent de l’Alliance » ; Les alliés et l’Alliance » ; » « Les quatre élargissements de l’Alliance » ; « Les défis de l’Alliance ».

Le premier chapitre traite de l’histoire de l’OTAN, des origines jusqu’à la fin de la guerre froide, vaste programme car couvrant quarante années. Bien évidemment les approches de cette activité peuvent être diverses. Il reste que le rappel des principaux jalons de la création de l’Organisation, et de ses premiers pas est fort utile, car depuis l’histoire a suivi son cours. Ainsi Olivier Kempf souligne que le traité de l’Atlantique Nord fut signé le 4 avril 1949, donnant naissance au Conseil de l’Atlantique Nord, dans un contexte qui était celui de la guerre froide. L’alliance regroupait alors douze pays, et fut présentée comme une Organisation défensive vis-à-vis d’une possible menace soviétique. Dans cet esprit , il est judicieux de rappeler que dix Etats européens remettaient leur sécurité extérieure entre les mains des Etats-Unis, considérés comme les garants de la sécurité européenne. Le livre rappelle la présentation qu’en fit le premier secrétaire général, Lord Ismay : un tryptique « inclure les Américains, exclure les Russes, soumettre les Allemands ».C’était l’ouverture de l’OTAN numéro 1.

Le deuxième chapitre ouvre une nouvelle phase, que l’on peut baptiser OTAN numéro 2. Il est consacré à l’état présent de l’Alliance Atlantique. Ainsi lorsque L’URSS et le Pacte de Varsovie s’éffondrent, une nouvelle période s’ouvre. Ces bouleversements de type coperniciens imposent à l’Alliance, ne souhaitant pas se dissoudre, une réflexion sur sa place dans le nouvel environnement international. Olivier Kempf offre, à ce sujet, une lecture spatiale géopolitique. Depuis les années 90 on assiste aux tentatives de l’Otan de se fonder une nouvelle crédibilité. Tentatives partiellement réussies ou vaines, les avis divergent. Il reste que du nouveau concept de 1991 à celui de 1999, les résultats ne furent pas très concluants. L’auteur évoque le positionnement des divers partenaires. Pour les Américains l’essentiel demeure, en priorité, la préservation de leurs intérets, que permet le leadership exercé sur l’Organisation.Côté Européens, malgré la docilité manifestée et l’enthousiasme pro-américain des nouveaux membres d’Europe centrale et orientale, d’autres pays tendent à se dégager quelque peu de l’emprise américaine.

L’auteur utilise l’image’ « d’amoureux qui parfois se lassent l’un de l’autre ». Mais la réalité impose de dépasser tout aspect superficiel. Ce qui est en cause, c’est un référent conceptuel diversifié. Certes aucun des pays membres ne souhaite voir disparaître l’Organisation, mais en son sein se manifestent des tendances, à la fois centripèdes et centrifuges. On aurait souhaité que Olivier Kempf accorde plus de place à cette situation. Car le débat sur l’avenir de l’OTAN apparaît de brulante actualité ; Les questionnements portent sur, dans quelle mesure les alliés sont convaincus de la pertinence du maintien de l’OTAN, en tant qu’outil militaire et politique, pour défendre leurs intérets ? Le maintien de l’OTAN, en tant que cadre institutionalisant la coopération et le dialogue transatlantique est-il utile ? Que penser d’une transformation majeure de l’Otan en une Organisation de sécurité afin de lui donner un rôle globalisé ?

A Lisbonne des interrogations se sont fait jour sur la perception américaine qui entend donner à l’OTAN, une mission globale, sans aucune limite géographique, et dotée de plus larges compétences. Toutefois Olivier Kempf évoque ces questions et constate que l’Otan traverse une crise existencielle. Alors l’Otan parviendra-t-elle à se transformer pour être compatible aux enjeux de sécurité ? C’est ce qu’on peut appeler « le dilemme sécuritaire » pour l’Alliance. Doit-elle en cela passer d’une posture défensive à une posture offensive ? Cela semble le cas avec le nouveau concept stratégique. C’est sans aucun doute le nœud des contradictions qui se sont manifestées au sommet de Lisbonne.

Enfin Olivier Kempf s’interroge :Que sera l’OTAN en 2025 ? Sera-t-elle radicalement différente de ce qu’elle est aujourd’hui ? Il convient dit-il « d’inclure l’incertitude de son avenir : N’est-ce pas quand au fond une grande nouvelle , bien loin des certitudes normatives, quasi théologiques, qui ont longtemps baigné les discours au sujet de l’Alliance ? » L’auteur répond à cette question en indiquant « la seule certitude concernant l’avenir, c’est qu’il nous surprendra et que l’Alliance 2025 sera radicalement différente de ce qu’elle est aujourd’hui « .On notera que ce raisonnement tend sous une forme ou sous une autre, à pérénniser l’OTAN. On ne le suivra pas dans ce sens, alors que grandit la remise en cause de cette organisation, qui doit laisser place à une nouvelle et réelle architecture de sécurité européenne et internationale.

Cette note ciblée dans les sujets abordés, risque de faire l’impasse sur d’autres questions pourtant importantes traitées dans un livre de 564 pages. Elle a pour objectif d’inciter à la lecture de l’ouvrage. Sans doute certaines approches ne seront pas partagées, mais il constitue une somme de références précieuses. C’est un livre incontournable.

Jacques Le Dauphin

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

La discussion continue ailleurs

URL de rétrolien : http://www.egeablog.net/index.php?trackback/991

Fil des commentaires de ce billet