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Nation, Europe, etc.....

Les élections récentes en Espagne et en Italie ont été interprétées, la plupart du temps, comme l'expression d'un rejet envers les partis au pouvoir, qu'ils soient de droite (Berlusconi) ou de gauche (Zapatero).

source

Il y a peut-être d'autres clefs de compréhension....

1/ En effet, ce qui compte aussi, ce n'est pas la défaite des leaders, mais le recul de leurs alliés. En Italie, on voit la Ligue du Nord en retrait. En Espagne, si les partis autonomistes n'ont pas reculé, on observe que l'opposition (le PP) a remporté 19 régions sur 21 : à cette occasion, elle dénonce des déficits nombreux dans ces régions : cela pose la question de la contribution de ces déficits régionaux au déficit public, ce que les marchés n'aiment pas du tout. Même une région riche comme la Catalogne se fait discrète.

2/ Dans les deux cas, j'observe un début de tendance : celle de la remise en question des tendances autonomistes ou séparatistes. Signal faible, je le concède, et il est plus que possible que je surinterprète.

3/ Mais les menaces financières qui pèsent en ce moment posent durablement la question de la solidarité budgétaire : c'est l’État qui garantit le système en dernier ressort, et plus il est important, plus il a de l'assise, plus il peut résister aux marchés, du moins les rassurer.

4/ D'ailleurs, ce retour de l'Etat est particulièrement sensible en Europe depuis 2008 et cette crise financière : d'une certaine façon, et malgré le traité de Lisbonne, on observe moins de solidarité. La zone euro symbolise cette mise sous tension de la cohésion continentale.

5/ De même, les succès électoraux des partis populistes partout en Europe sont la face émergée de l'iceberg de ce retour de la nation et de l’État.

6/ Enfin, l’État avait subi depuis les années un double affaiblissement : par le haut (les transferts de souveraineté, la mondialisation) et par le bas (la décentralisation) : ne nous y trompons pas, il y avait un lien logique entre les deux mouvements. Tout aussi logiquement, à partir du moment où la dilution par le haut s'interrompt voire change de sens, on retrouve la même inversion à l'autre bout, c'est-à-dire au niveau local.

7/ Il est donc logique de déceler un affaiblissement électoral des partis séparatistes : la seule exception séparatiste tiendrait aux solidarités ethniques qui peuvent se renforcer (par exemple les Hongrois de Roumanie, qui ont établi une représentation à Bruxelles ce qui a provoqué l'ire de Sofia).

Beaucoup d'hypothèses, je le concède : mais s'il faut rechercher les signaux faibles, cela nécessite d'aller en-dessous de ce qu'on dit habituellement..... On risque bien sur de se tromper. Mais même ceux qui répètent le consensus se trompent, regardez l'Algérie.....

O. Kempf

Commentaires

1. Le vendredi 10 juin 2011, 22:13 par frédéric ferrer

Plutôt d'accord avec vos observations, mais pas complètement avec votre lecture optimiste du retour de l'Etat-Nation, notamment en Espagne.

Les dernières élections, dont vous rendez compte fidèlement, mettent le PP en posture favorable en vue de 2012, tout en maintenant les partis autonomistes en embuscade. Mais que se passera t'il si le PP ne sort pas l'Espagne du marasme ?

Comment reclasser cette jeunesse surqualifiée et endettée à vie, formée pour une société de services et de loisirs mais qui n'a plus le sou, condamnée à occuper des logements achetés trois fois le prix, invendables voire « inlouables » aujourd'hui.

Si le PP passe en 2012 et ne résout pas cette équation complexe, en étant détenteur à la fois du pouvoir central et du pouvoir régional, je ne crois pas que catalans, basques, galiciens ni même madrilènes ne donnent une nouvelle chance à la gauche en 2015. Cette transition risque alors d’être la dernière.

En fait de retour, l’Etat-Nation espagnol serait plutôt selon moi en sursis.

La vraie question en temps de crise n’est plus de savoir s’il faut plus ou moins d’Etat. Mais bien quelle taille donner à la Nation.

égéa : lecture, certes, mais je ne crois pas qu'elle soit "optimiste".... Attention ensuite à ne pas confondre Etat et Nation.... Je souscris dans votre commentaire à un autre hiatus, qu'on a bien vu l'autre soir en écoutant GF Dumont : celui des générations, et l'émergence d'un pouvoir gris qui entrave les évolutions : le mouvement des indignés n'est pas politique, il est générationnel. En cela, il ressemble vraiment à ce qui se passe en Tunisie. Toutefois, en Tunisie, il était majoritaire alors qu'en Espagne, il est minoritaire, et le sera de plus en plus (natalité à 1,3 enfants/femme). Enfin, la période de risque 2011 -2015 est valable pour tous les partis au pouvoir en Europe : nous vivons une époque formidable, et risquée. Incroyable, nous autres Européens qui avons tellement voulu bannir le risque, le voilà qui revient par la fenêtre.....

2. Le vendredi 10 juin 2011, 22:13 par

J'attends avec impatience les conséquences du petit sursaut patriotique (ou identitaire) qui a eu lieu en Hongrie sous l'impulsion de Viktor Orban, quelles qu'elles soient. Le Traité de Trianon, malgré ses 71 ans, n'en finit pas de faire des remous.

Si Bucarest n'apprécie pas trop, je doute que ça fasse bien plaisir à Belgrade non plus, avec un débat sur l'autonomie de la Voïvodine qui dure depuis des décennies.

Le point positif de tout ceci, c'est que cela nous rappelle que le nettoyage ethnique des Balkans n'a touché qu'une partie de ceux-ci mais que cela rend plus aigüe les problèmes qui reviennent sur l'avant de la scène avec la réaffirmation de l'Etat suite à la crise de 2007-2008.

3. Le vendredi 10 juin 2011, 22:13 par yves cadiou

Si « la question de la contribution des déficits régionaux au déficit public » se pose en Espagne et dans les autres pays européens avec lesquels nous sommes associés, elle se pose aussi chez nous.

J’hésite à continuer parce qu’Olivier Kempf va croire que je cède à « la propension des Français à s'autodénigrer », mais pas du tout : je signale un problème que je connais un peu (je dis « un peu »).

Chez nous, on est finalement très discrets sur les budgets des collectivités territoriales : régions, départements, intercommunalités, mairies, et les nombreux établissements publics financés par l’Etat ou par ces collectivités. Il existe quelques dizaines de milliers de ces budgets (je ne sais pas combien : parmi vous qui lisez mon modeste commentaire, quelqu’un connaît-il le nombre exact de ces budgets ?) formés d’argent public et alimentés par des prélèvements obligatoires. Leur montant cumulé représente un flux d’argent public non négligeable.

Il y a cinq principes budgétaires : annualité, unité, universalité, spécialité, sincérité, qui sont développés sous ce lien http://www.vie-publique.fr/decouver... Avec les budgets des collectivités territoriales, qui sont tous alimentés par le même contribuable que le budget de l’Etat, on contrevient en toute légalité au principe d’unité budgétaire.

Mais au-delà de cette question de forme, il faut s’inquiéter de l’endettement total de ces budgets, c’est-à-dire de ce que les spécialistes (dont je ne suis pas, on l’aura compris) appellent « le déficit public », différent du « déficit budgétaire ». En France, tous les budgets que j’ai cités ne sont en équilibre que par recours à l’emprunt. Ce n’est pas nécessairement de la mauvaise gestion : l’emprunt permet de bénéficier dès maintenant de l’équipement (la piscine, le carrefour aménagé… : l’emprunt n’est autorisé que pour les investissements, non pour le fonctionnement) et de faire payer le contribuable plus tard. Mais quelques uns de ces budgets locaux se rapprochent d’une situation de surendettement, les recettes escomptées n’ayant pas eu lieu (fermetures d’entreprise imprévues, donc perte de taxe professionnelle et de taxe d’habitation, augmentation des dépenses de solidarité).

Trouvé ici http://www.vie-publique.fr/decouver... : « si l’on tient compte de la dette des collectivités territoriales, de celle des administrations de Sécurité sociale et de celle des divers organismes d’administration centrale, la dette de l’ensemble des administrations publiques calculée selon les règles de comptabilité européennes atteint 63,7 % du PIB en 2003. Il s’agit là d’un niveau supérieur au plafond prévu par les critères de Maastricht (60 %), proche de la moyenne des pays de l’Union (63,2 %), mais inférieur à celui de l’Allemagne (64,2 %) et de la moyenne des pays de la zone Euro (70,4 %). » Ce sont des chiffres de 2003 : il y avait déjà « tension de la cohésion continentale » et ça ne s’est certainement pas détendu depuis lors.

L’affaiblissement des partis séparatistes (à différencier des « autonomistes ») y compris chez nous, notamment dans nos dom-com, peut s’expliquer par la crainte d’être pris au mot par le pouvoir central pour des motifs d’économie budgétaire et donc de se retrouver dans une situation financière difficile. Vos hypothèses sont plausibles.

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