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Révision du LBDSN

On l' appris en cette fin d'été, les travaux de révision du Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité Nationale (LBDSN) ont repris. Il s'agit pour l'instant de faire un diagnostic et quelques propositions (d'ici Noël) et ce sera au président choisi et à la future majorité de décider la révision proprement dite, puis la LPM conséquente. En attendant, l'exercice nouveau est bon, et d'abord prévu par le LB lui-même : dans les temps..

En effet, comme le dit drôlement Philippe Chapleau "personne n'ayant émis de critiques ou de réserves, c'est qu'il était donc parfait." Mais il est vrai qu'il y a eu deux trois petites choses depuis (crises de 2008 puis 2011, Libye, Fukushima, ...) qui peuvent susciter quelques interrogations, diagnostics, propositions..... Quatre thèmes sont retenus.

1/ les grandes évolutions stratégiques :

  • c'est probablement le domaine où le diagnostic sera le plus facile : on attend en effet des aperçus sur les révoltes arabes (et donc : quelle pertinence de l'arc de crise?), la croissance africaine (quelle action dans le continent ?), la notion d'émergence, l'arctique.
  • de même, il y aura des aperçus sur l'espace européen : aussi bien l'UE que les relations avec les voisinages : à l'Est (quid de l'architecture de sécurité européenne, des relations avec Russie et Turquie?), à l'Ouest (le transatlantisme s’essouffle-t-il ?) ou au sud (Méditerranée).

2/ les alliances (UE, Otan Onu)

  • Il faudra faire le diagnostic de l'OTAN après Lisbonne (tiens, je vous en reparlerai bientôt), de l'UE après Benghazi et le SEAE, de l'ONU après la responsabilité de protéger....
  • au-delà, c'est la question de l’alliance par rapport à la coalition qui devrait être interrogée : avez vous noté que le successeur de l'US JFCOM s'intitule Joint and Coalition Warfighting ? Même les Américains n'envisagent que de la coalition....

3/ les menaces "transverses":

  • je ne sais pas s'il y aura beaucoup de surprises : on ronronnera sur le terrorisme, les mafias, les zones grises, la notion de sécurité, ....
  • on pourrait s'intéresser, de façon plus prometteuse, sur la notion de "sphères stratégiques" : matérielles (Terre, air, mer, nucléaire) et immatérielles (électromagnétique, espace, cyber, perceptions) et leurs intersections
  • là-dedans, peut-être aura-t-on des aperçus sur dissuasion, DAMB, stratégie spatiale, ...

4/ les questions économiques et financières. C'est une question qui avait été négligée par le précédent LB (où est donc passée la notion de défense économique ?)

  • à l'évidence, la question sous-jacente sera celle de la "souveraineté économique" : en matière budgétaire, quelle est aujourd’hui la souveraineté de la Grèce ?
  • ça parlera bien sûr de la crise, de la mondialisation, de scénarios : j'espère qu'on ne sera pas trop "techno"...
  • j’espère surtout qu'on évoquera de vrais sujets stratégiques : maîtrise des approvisionnements, stratégie industrielle (qui n'est plus celle du temps de De Gaulle), privatisation de la guerre, déflation stratégique européenne et baisse des budgets de défense (le monde réarme l'Europe désarme, répète partout le CEMA), gestion des ressources rares (économiques et écologiques), ....

5/ On aimera aussi qu'il y ait des précisions données aux notions, finalement peu claires, de surprise stratégique ou de résilience : beaucoup reprises mais peu débattues, elles méritent plus.

Voilà ce que je dirais si on me demandait de travailler sur le LBDSN. Mais, n'est-ce pas.....! En fait, tout ça, je vous en ai déjà parlé Cent six mille fois sur égéa : vous savez, vous... Rien de neuf sous le soleil, comme dit l'Ecclésiaste. Un vrai stratégiste, lui....

O. Kempf

Commentaires

1. Le jeudi 8 septembre 2011, 21:57 par yves cadiou

Ce qui frappe, c’est la faible légitimité démocratique d’un tel document, sans même parler de son manque de légalité formelle. Certes, comme vous le dites, il sera légalisé (ou non) par la future majorité.

Un aspect positif, c’est sa date de parution à quatre mois de la Présidentielle. On peut espérer que cette date nous épargnera de subir encore l’indigence conceptuelle, l’ignorance, la négligence dont ont fait preuve les candidats en 2007 (et je suis gentil). A moins que ces messieurs-dames voient dans l’existence de ce nouveau document, en faisant la supposition que la question est ainsi réglée, un motif de continuer à n’avoir pas de connaissances ni d’opinion sur le sujet : actuellement c'est ce que laissent craindre la plupart des blogs des partis politiques et des élus.

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Tout autre chose : vous écrivez « même les Américains n'envisagent que de la coalition ». On pourrait conclure un peu vite qu’ils ont besoin de supplétifs, mais ils ont plutôt besoin de justificatifs. C’est vraisemblablement à des fins de politique intérieure qu’ils n’envisagent que de la coalition. Agir en coalition permet de justifier la guerre et ses dépenses auprès de l’opinion intérieure en faisant valoir que d’autres Nations, plus petites mais prestigieuses, accompagnent les opérations : un tel argument est utile pour le gouvernement fédéral parce que déjà plusieurs Etats américains, et non des moindres, ont fait allusion au droit que leur donne le 10ème amendement de ne pas payer les dépenses fédérales.

On considère généralement les Etats-Unis comme monolithiques mais ils ne le sont pas et n’auront probablement, dans un avenir plus ou moins proche, le choix qu’entre l’isolationnisme ou la désunion. L’hypothèse de la désunion est trop impolie pour figurer dans un document officiel, mais nous ferions bien d’en tenir compte. http://pointdebasculecanada.ca/arch...

2. Le jeudi 8 septembre 2011, 21:57 par Nono

@ YC : "Ce qui frappe, c’est la faible légitimité démocratique d’un tel document, sans même parler de son manque de légalité formelle."

Franchement, je ne vois pas pourquoi un tel document devrait être "légitimement démocratique" (déjà, je ne vois pas ce que ça veut dire). Est-ce à dire que le Parlement devrait superviser sa relecture? Parce que sans vouloir être forcément méchant, quand on voit la faible hauteur de vue de nos parlementaires sur le sujet des niches fiscales, je me pose la question de les associer à des travaux qui demandent une vision à long terme!!

Il n'est qu'à voir les débats démocratiques qui ont été le sujet des universités d'été des principaux partis: la défense a-t-elle été abordée (j'en doute) ? En a-t-on parlé quelque part dans les médias (nullement) ?

Bref, à quoi bon, la défense n'est plus vue que comme un domaine de seconde zone (avec un ministre de second rang: et encore, heureusement qu'il y a eu Juppé pour remonter provisoirement le niveau!!) qui manifestement n'intéresse personne, sauf le 14 juillet. A part ça..

(mais non, je ne suis pas aigri ni désabusé, mais non..)

3. Le jeudi 8 septembre 2011, 21:57 par fred

Je pense qu'il convient, d'une manière ou d'une autre, d'impliquer davantage nos parlementaires quant aux réflexions sur ces sujets .Dynamiser l'intérêt de nos concitoyens pour ces questions passe par ce truchement....qu'on le veuille ou non.

4. Le jeudi 8 septembre 2011, 21:57 par oodbae

+1 pour nono ( mais non, je ne suis guère plus désabusé).
Néanmoins, le Parlement est la représentation du peuple. Une relecture par le Parlement ressemble donc bien à une légitimation démocratique.

5. Le jeudi 8 septembre 2011, 21:57 par yves cadiou

@ Nono. Merci de vous intéresser à ce que j’écris.

Par « faible légitimité démocratique », je veux dire que ce document a été commandé par une autorité supposée représenter la Nation mais dont la représentativité est incertaine aujourd’hui.

Certes cette autorité fut élue au suffrage universel direct il y a cinq ans mais depuis lors rien n’a confirmé cette légitimité. Je ne parle pas des sondages défavorables : ils n’ont aucune valeur car ils peuvent être bidouillés par les instituts spécialisés ; je parle de la fonction présidentielle qui aujourd’hui consiste à diriger l’Exécutif au mépris de la Constitution. En Démocratie ce n’est pas acceptable parce que l’Exécutif doit être responsable devant la représentation populaire, chez nous devant le Parlement. Nous sommes dans la situation où un homme décide à sa guise pendant cinq ans de la politique intérieure et extérieure du Pays : de ce fait on n’est plus en Démocratie. Voilà pourquoi je dis que ce document, jusqu’à ce qu’il soit approuvé par la Représentation Nationale, s’il est approuvé, souffre d’une « faible légitimité démocratique ».

Je suis malheureusement tout à fait d’accord avec vous quant à « la faible hauteur de vue de nos parlementaires ». Sur le sujet des niches fiscales que vous évoquez, je ne sais pas, mais sur les sujets que je connais c’est affligeant. Les travaux en commission sont rarement percutants : les inscriptions des élus dans les commissions, un député de mes connaissances les qualifiait (en privé) de « distribution des sucettes », explicitant ainsi le fait que les membres des commissions parlementaires ont brigué cette charge plus pour les avantages qui s’y attachent que pour les responsabilités d’intérêt général qu’elles comportent. C’est regrettable mais c’est ainsi.

C’est regrettable mais ce n’est pas un motif suffisant pour abandonner au pouvoir d’un seul homme, surtout si cet homme n’a ni passé, ni œuvre, ni prestige, le destin de la Nation.

Je ne souscris pas du tout à votre « à quoi bon, la défense n'est plus vue (…) que comme un domaine qui manifestement n'intéresse personne, sauf le 14 juillet ». C’était peut-être vrai dans les dernières décennies du XX° siècle, ce ne l’est plus. Soyons tenaces car rien n’est perdu si l’on veut tenir, c’est le meilleur moyen de n’être ni aigri ni désabusé.

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