Asymétrie des enjeux plus que des méthodes

Je reviens sur un billet que Stéphane Taillat à fait paraître en février dernier, sur AGS et sur "En vérité", son blog stratégique. Il discutait alors la notion de stratégie de coercition, en se penchant sur la lecture américaine d'icelle.

Une belle asymétrie : source

En effet, dans son texte, Stéphane se place d'un seul côté : moi, A, veut mener une action contre B, dans le cadre du conflit qui nous oppose. J'ai plusieurs stratégies à ma disposition, dont la stratégie de coercition. Celle-ci ne passe pas forcément par la bataille, puisqu'il s'agit d'obliger l'autre à faire quelque chose. Toutefois, très souvent (et notamment dans la culture militariste américaine), cela conduit à la bataille.

Il est curieux que Stéphane n'ait pas évoqué la notion d’intérêt vital. Pourtant, tout le texte tourne autour des enjeux, et notamment des points clefs de l'adversaire, sur lesquels il faut peser (d'ailleurs, la notion de centre de gravité n'est pas mentionnée non plus). Ces omissions (que je ne reproche pas) suggèrent qu'on se place en conflit limité. Or, assez rapidement, Stéphane (le sujet est bien la stratégie américaine) mentionne la théorie des cinq cercles de Warden, et il en montre rapidement les limites. En effet, la stratégie de coercition telle qu'elle est pratiquée par les Américains est mécaniste, souvent militaire et technologique, et les cinq cercles concentriques sont trop schématiques pour réellement distinguer les enjeux militaires des enjeux politiques.

Ou plus exactement, comme il le souligne, elle ne voit pas la distinction entre des effets militaires (contrôlables) et les effets politiques (qui le sont beaucoup moins).

On oppose souvent la dissymétrie à l'asymétrie : la dissymétrie étant celle des moyens, l'asymétrie celle des méthodes. Or, ce que suggère Stéphane, c'est qu'il y a également une asymétrie des effets, donc des enjeux. Qu’elle est probablement plus importante dans le raisonnement stratégique, du moins le raisonnement concret face à une situation donnée.

Enfin, nous ne sommes là que dans une vision de A vers B, sans jamais évoquer les possibilités de rétorsion de B sur A.

O. Kempf

Haut de page