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Un bilan du salon Euronaval 2012

Jérôme Pellistrandi a pu visiter le salon Euronaval : heureux homme ! Comme il n'est pas égoïste, il nous fait part de ses impressions : merci Jérôme ! ET sii vous aussi vous assistez à des salons ou des colloques, et qu'ils vous inspirent des réflexions, envoyez et partagez.

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O. Kempf

Le salon Euronaval qui vient de fermer ses portes au Bourget est devenu le rendez-vous incontournable du secteur maritime militaire avec une hausse importante des participants. En 2010, 76 délégations étrangères avaient foulé les stands. En 2012, ce sont 85 délégations qui sont venues, avec 370 exposants et près de 35 000 visiteurs. Ces chiffres traduisent l’importance croissante de ce salon et le positionne en première place. C’est donc un atout, tant pour les industriels que pour la défense française. En effet, c’est bien la synergie DGA - marine nationale – industriels et équipementiers qui permet à l’industrie navale française d’être le premier exportateur d’armement, devant l’aéronautique et l’armement terrestre.

Ce constat est également le reflet de la maritimisation croissante de la « planète bleue ». Paradoxalement, derrière ce terme, se reflète une réalité déjà ancienne mais qui visiblement était peu perçue par les faiseurs d’opinion. Il serait en effet très réducteur de croire que ce phénomène est récent. Bien au contraire, il est la résultante d’une évolution géographique, stratégique, économique, commerciale, … qui a débuté il y a de nombreuses décennies. Aujourd’hui, près de 90 % des marchandises transportées dans le monde le sont par voie maritime.

Le changement stratégique actuel, impactant les marines militaires, est donc l’accroissement des incertitudes : terrorisme maritime, piraterie et pas uniquement au large de la Corne de l’Afrique, trafics en tout genre, menaces de blocus comme au large d’Ormuz, pillage des ressources halieutiques… L’éventail des missions des marines ne cesse de s’élargir, demandant des navires plus polyvalents et plus performants, mais également plus compacts et plus économiques pour contrôler les espaces maritimes.

Euronaval illustre bien cette dichotomie croissante dans laquelle l’industrie navale française dispose d’atouts majeurs.

DCNS en est le leader. En l’espace d’une décennie, les arsenaux –en changeant de statut- sont devenus une entreprise en pleine croissance, qui, de surcroît, réembauche. Les programmes nationaux sont connus et ont été à cette occasion confirmés comme les onze frégates FREMM lors de la mise à l’eau de la Normandie le 18 octobre. La poursuite du programme des SNA Barracuda semble sur de bons rails, malgré le retard de quelques mois annoncé pour la commande du n°4. Il faut souhaiter que le 6° SNA figure bien sur la future loi de programmation militaire.

En dehors de ces deux programmes majeurs et structurants pour notre marine nationale, se profile le remplacement des actuels pétroliers-ravitailleurs. DCNS travaille avec STX St-Nazaire sur le projet Brave dont une maquette proposait une approche innovante avec une étrave inversée et un mât antenne intégrée.

source mer et marine

Cependant, un autre volet est essentiel avec les besoins en navires pour la surveillance et le contrôle de nos espaces maritimes alors que la France possède la deuxième Zone économique exclusive (ZEE) au monde. Il ne s’agit pas seulement de remplacer les vénérables BATRAL et les patrouilleurs P 400. Il s’agit de se doter de véritables outils polyvalents mais adaptés aux espaces océaniques français et à un coût d’exploitation le plus modéré possible en liaison avec les autres administrations de l’Etat concernées.

A noter également sur le stand de DCNS, la maquette d’un porte-avions à propulsion classique. A défaut du programme PA2, il importe désormais que DCNS conserve l’expertise industrielle pour pouvoir entamer à la fin de la prochaine LPM les travaux de conception du successeur du porte-avions Charles de Gaulle.

Si DCNS est bien le fleuron du naval militaire français, d’autres constructeurs nationaux –de taille bien plus modeste- ont pu à cette occasion montrer leur savoir-faire et également annoncer quelques contrats à l’exportation. Ainsi, Ocea doit construire 2 navires de 60 m pour une marine asiatique. Couach achève avec brio une série de vedettes pour l’Inde capables de tenir une vitesse de 50 nœuds, tandis que Piriou, en liaison avec DCI, construit son premier bateau « gris » qui sera basé à Lanvéoc Poulmic pour la formation d’élèves-officiers de pays partenaires et amis.

De même, CNIM qui vient d’achever la construction de 4 engins de débarquement, les EDA-R- pour nos BPC, propose de nouveaux produits à vocation amphibie et qui semblent intéresser les Etats-Unis.

Innovation, performance, simplicité d’utilisation, faible coût de possession, tels sont les paramètres que doivent maîtriser les chantiers français pour gagner des parts de marché à l’exportation. Euronaval constitue donc une plateforme d’opportunité absolument unique. Il faut cependant souhaiter que nos industriels puissent mieux se parler entre eux pour ne pas aller en ordre dispersé chercher des clients et en offrant une démarche globale –du gros navire à la vedette, en passant par la formation et le maintien en condition-.

Autre point nouveau par rapport à l’édition 2010, c’est la présence d’un stand « armement terrestre » autour des constructeurs français Renault Truck Industrie-Panhard-ACMAT, soulignant le fait qu’action maritime et engagement terrestre sont souvent très complémentaires.

Une nouvelle tendance était également notable avec l’augmentation de la robotisation et l’emploi de drones marins. Ainsi, la DGA montrait les résultats du PEA D2AD visant à la mise au point de drones à voilure tournante capable de décoller et d’apponter depuis un bâtiment à la mer.

L’autre PEA concerne la lutte contre les mines avec le programme Espadon qui pourrait permettre le développement des futurs moyens anti-mines devant succéder aux actuels chasseurs de mines du type Eridan.

Ce salon est donc un succès, même si les temps d’incertitude sont désormais là avec la baisse drastique des budgets militaire en Europe et en France également. On peut souligner la quasi absence d’une approche industrielle européenne commune, à part EADS, mais dont le rôle reste limité dans le champ naval. Si la coopération militaire bilatérale avec le Royaume-Uni fonctionne bien, il n’y a pas de vrais projets industriels communs. L’Italien Fincantieri et l’Espagnol Navantia sont de redoutables concurrents, sans parler de l’Allemand TKMS pour les sous-marins. Quelles seront les recompositions industrielles d’ici Euronaval 2014 ? La France conservera-t-elle les capacités industrielles de STX St-Nazaire dont le carnet de commandes est presque vide ? Quelles ambitions maritimes seront exprimées dans le futur Livre blanc ?

Autant d’interrogations qui vont se poser au fil des mois à venir, avec un prochain grand rendez-vous industriel, économique et politique en juin 2013 avec le Salon du Bourget. A cette date, les jeux seront en partie faits.

Jérôme Pellistrandi

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