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Choc et feu

Je retrouve cette expression, entendue depuis 25 ans sans l'avoir jamais vraiment comprise. C'est chez De Gaulle (Le fil de l'épée), qu'on m'a offert pour Noël. Mais DG passe, comme bien d'autres, comme ci chacun savait ce qu'est le choc, ce qu'est le feu. Or, derrière ces onomatopées, derrière le "le feu tue", qu'y a-t-il ? Cela a-t-il encore un sens aujourd’hui ?

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Qu'est le choc ? le face-à-face physique de la masse contre la masse, des deux énergies qui s'entrechoquent, la plus puissante étant supposée emporter l'autre, à tout le moins la faire vaciller. Le choc est le duel antique, l'affrontement premier, comme les deux cerfs qui s'opposent pour emmener la harde.

Qu'est le feu ? L'arme de jet qui permet d'affaiblir à distance et d'éviter - ou préparer - l'affrontement. Le feu est second par rapport au choc. Le feu vise à modifier le rapport de forces, surtout si le feu converge en un point donné du dispositif ennemi.

Le feu est l'arme indirecte : lance contre épée, arc contre fantassin, arbalète contre chevalier, arquebuse contre château-fort, puis bombarde, mousquet, fusil, mitrailleuse, canon de 75, avion, grosse Bertha, stuka, forteresse volante, bombe H....

A mesure des progrès des armes indirectes, on a forci les armes de choc, notamment par une protection (cuirasse) et une énergie (cheval puis moteur) accrues. Sauf pour la dernière !

Le feu ultime, le feu nucléaire, a mis un terme à la dialectique du choc et du feu. Il n'y a plus de choc aujourd’hui : que du feu. IED ou drones, toujours violents, toujours à distance. Il n'est que l'attentat suicide qui, par son extrémité même - le suicide - vienne rappeler l'inanité du choc.

Aujourd'hui, le feu triomphe. Mais sans lever son paradoxe. Car le feu est indirect : peut-on contrôler à distance ?

Le succès de l'indirect n'est pas une solution. Il ne tranche pas les problèmes - comme l'épée résolut autrefois le nœud gordien. Nous sommes trop empêtrés aujourd’hui dans nos nœuds gordiens, trop complexes pour nous... et nous sommes trop faibles pour décider.

La guerre n'est plus une solution, paraît-il. Donc, les conflits restent ouverts et ils purulent incessamment. Comprenez-vous quelque chose à ce qui se passe au Mali ? L'indécision est la règle, la règle du feu.

Le feu frappe sans danger, mais sans permettre la victoire, donc la cicatrisation.

O. Kempf

Commentaires

1. Le mercredi 26 décembre 2012, 20:41 par Bertrand

Oui, j'ose le mauvais jeu de mots "... et feu le choc".
D'ailleurs, je me disais... "feu" n'aurait-il pas le sens que je lui donne ci-dessus? i.e : après le choc, la mort ?
J'extrapole; après le choc des 2 guerres mondiales, la mort stratégique, le pêché de faiblesse - bien compréhensible - que vous évoquez ? Mais je suis certain que la force reviendrait, dans le malheur mais bien heureusement ("du caractère"... dans des circonstances exceptionnelles...), et que la possibilité de chocs est bien réelle - il suffirait d'un retour de feu "malheureux".
Le fil de l'épée, quel beau cadeau!(cf. liens avec Bergson pour mémoire!)
Un joyeux Noël docteur, et tous mes voeux de bonne continuation pour ce blog en 2013!

egea : merci pour vos vœux ! Acceptez les miens en retour, avant le billet consacré de dans trois jours !

2. Le mercredi 26 décembre 2012, 20:41 par Laurent

Sur le feu et le choc, lire la série des fascicules rédigés par le colonel suisse Reichel. De petits bijoux ! Et tout particulièrement celui sur le choc, rempli de considération anthropologiques d'une immense richesse. Malheureusement, c'est introuvable... Cela fut édité dans les années 70 par le service historique de l'armée suisse, à Berne.

égéa : au CDEM ? en fac similé ? pourquoi ne pas les recontacter ?

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