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Toujours se méfier des décrets de juillet

Bien. Ou plutôt mal. Les "gens intelligents et responsables" ont décidé d'agir, par exemple en réformant Saint-Cyr. C'est vrai, cette école fonctionne, forme des officiers qui donnent satisfaction à tous, réussit à de diversifier. Ça fonctionne, donc il faut réformer. Logique imparable. La "cause première", si je comprends bien les débats, consiste à "rentabiliser". Vous comprenez, une école qui forme 120 officiers par an (on oublie au passage de mentionner tous les autres officiers qui sont formés à Saint-Cyr), ça coûte cher. Ce n'est pas rentable (l'école nationale supérieure de police a des promos de 40, au fait). Donc il faut "faire quelque chose". C'est ce qu'on explique à l'Assemblée Nationale comme le signale le site de la Saint-Cyrienne.

source

Le quelque chose, c'est "augmenter les volumes". Quand on est contrôleur, on pense qu'il faut parler en termes d’efficience, ce genre de trucs qui font bien dans le civil. Du coup on imagine qu'il faut recruter un plus grand volume d'élèves et en envoyer la moitié dans le civil à l'issue de la scolarité. Car n'est-ce pas, Saint-Cyr est une école d'ingénieur et on manque d'ingénieurs.

Ben non, Monsieur le contrôleur général, Saint-Cyr est une école d'officier. C'est marqué à l'entrée. Son vrai nom, c'est École Spéciale Militaire. C'est donc à la fois Spécial et Militaire. Si, c'est marqué dessus. Il n'y a pas marqué "central" ou polytechnique" ou "arts et métiers" ou "supaéro" ou ce genre de trucs. Spécial, et militaire.

On pourrait en rire s'il n'y avait eu ce décret publié le 18 juillet, lui aussi signalé par la Saint-Cyrienne.

Par le biais de convention avec d'autres établissement, il s'agit donc d'accueillir des volontaires qui en fait n'auront pas vocation à servir dans les armées (comme rappelé dans l'article 1) mais qui pourront bénéficier du "diplôme militaire de l'ESM" comme précisé dans l'article 6 qui organise les modalités dérogatoires à l'article 1.

Bref, monsieur le contrôleur n'a pas perdu son temps entre son entretien du 24 juin et son décret du 18 juillet.

Ce billet au cœur de l'été a deux ambitions :

  • signaler l'existence de cette "réforme"
  • donner le temps à qui de droit pour déposer un recours en illégalité dans les deux mois, c'est-à-dire avant le 17 septembre, devant le Conseil d’État, en trouvant des arguments de fond et de forme pour pouvoir plaider sur les deux registres. On aura toujours le temps de discuter après mais ce recours est bien évidemment suspensif et empêche le "fait acquis".

En ce centenaire de 14, je relisais l'ouvrage du colonel Camus sur "L'histoire des Saint-Cyriens" et notamment les passages portant sur cette période. Le casoar et les gants blancs n'existent que par le feu. Peut-être est-ce à la portée d'un gestionnaire...

O. Kempf

Commentaires

1. Le vendredi 1 août 2014, 23:09 par Ph Davadie

Ce qui est étonnant, c'est qu'on pourra maintenant avoir le diplôme militaire de l'ESM (article 5) sans être appelé Saint-Cyrien (art 1° cas des volontaires qui ne sont pas soumis à l'art 3).
Les rédacteurs ont dû profiter de la stabilité annoncée du tarif réglementé du gaz pour nous faire une belle usine toute neuve.
Quant au feu, au casoar et aux gants blancs, ce sont les ornements d'un monde auquel ceux qui ne célèbrent ni le bicentenaire d'Austerlitz ni les huit siècles de Bouvines sont totalement étrangers.

2. Le samedi 2 août 2014, 12:16 par korrigan_22

Quand on met un **** sur la touche au motif qu'il a osé dire tout haut devant des parlementaires ce que tout le monde pense ... sauf les socialistes, on peut s'attendre à tout de la part du pouvoir en place.

PS : attention aux fautes d'orthographe ;-)

3. Le samedi 2 août 2014, 15:25 par egea

Oups... Désolé, j'ai effacé par mégarde deux commentaires : que leurs auteurs m'en excusent.
Le premier (un ancien cyrard) signalait que pour être cyrard, il fallait être prêt à donner sa vie, ce qui ne serait pas le cas a priori des volontaires. Le second expliquait qu'un recours n'est pas forcément suspensif.

4. Le samedi 2 août 2014, 16:53 par Aurel

Il manque une partie du quelque chose (si la démarche est la même qu'aux Arts et Métiers) : c'est augmenter les volumes d'élèves mais à volume enseignant constant (et budget de fonctionnement en diminution bien sur).
allez comprendre...

5. Le samedi 2 août 2014, 17:20 par Corvette

Alors , contrôleurs , beaucoup de pertes chez vous ?

( d après : " alors, gendarmes, .... )

6. Le samedi 2 août 2014, 18:23 par CDt JOHN JOHN

Cet article me fait penser à "l'insulte" suprême que notre commandant de cie en première année nous adressait lorsque cela allait mal (entendez par là un micro retard, un faux pli sur le GU... ou un décalage dans le maniement d'armes...) : étudiant militaire !!!...

Le couperet tombait (avant d'être décliné en kms à parcourir sur l'axial à une heure indue) net... et il y a fort à parier que désormais nous n'ayons que des étudiants militaires sous le shako... mais à l'heure où l'on re-ventile vers le civil des dizaines de jeunes venus là suite à des lectures d'un autre temps...après un parcours professionnel court (termes du gestionnaire) faut il s'étonner de ce choix... ?

Les gens sont toujours venus du civil ou de corniche......
Sauf pendant ou après les 2 grandes guerres.............

Ce décret ne fait que valider une chose qui s'est toujours un peu produite : le retour dans le civil apres avoir fait son temps .....
Ce dernier équivalent au prix de la formation............

Il reste un autre choix à l'élève : démissionner après ses 3 ans d'école et rembourser sa formation de sa poche...............
On continue à le voir ............
5 ou 6 démissions à la fin de la " Tom Morel " 87-- 90 , cela avait fait grand bruit !!!!!!

7. Le samedi 2 août 2014, 20:02 par Ph D

La réponse à la première partie du commentaire n° 3 est facile : dans quel texte réglementaire est-il écrit que l'acceptation du don de soi était une condition d'entrée à Saint-Cyr ?
Quant au recours, qui aura les cerises de le faire ? Je ferai grâce au lecteur de la liste de tous les "défenseurs" de Cyr qui feront passer leur cours de piscine, de poney, voire d'aqua-poney avant la rédaction puis le dépôt d'un recours. "Quand nous chanterons, le temps des cerises..." j'en prendrais presque ma carte au NPA.

Le CGA gestateur du décret a déclaré "J’ai récemment rencontré un jeune capitaine d’artillerie recruté dans une banque. J’imagine qu’il n’a pas été embauché pour sa maîtrise de la technique de l’artillerie. Ce sont ses compétences génériques qui ont intéressé l’entreprise."
Fort bien, monsieur le CGA. Mais vous dites qu'il a été recruté pour ses compétences. Donc pas uniquement grâce à sa formation, mais aussi grâce à ce qu'il a développé par la suite.

Dernier point que personne n'a relevé. Le dit CGA est un dolo (oui, je sais, ce n'est pas politiquement correct de le dire). Pourquoi n'a-t-il pas proposé une réunion de St Cyr et de l'EMIA pour reformer l'ESMIA et tenter d'atteindre une taille critique ? Un peu comme a fait l'ENSP qui regroupe sous un même nom l'école des commissaires proche de Lyon ;-) et celle des officiers de police de Cannes-Ecluse. Aurait-il une dent (ou une corne) contre les cyrards ? (Ok, pas politiquement correct, 2°).

8. Le samedi 2 août 2014, 20:06 par Savapamaletoi

Il y a eu l'interdiction du bahutage, et certains ont prédit que c'était la fin de la Spéciale.
Il y a eu le passage de 2 à 3 ans, avec intégration d'élèves en 2ème et 3ème année, et certains ont dit que c'était la fin de la Spéciale.
Il y a certainement eu beaucoup d'autres fins de la Spéciale, mais je manque de références.
Cette fois encore, ce sera sans doute la fin de la Spéciale.
Mais la Spéciale vivra !!!

9. Le dimanche 3 août 2014, 10:24 par yves cadiou

Arithmétiquement abaisser le coût de la formation par élève en augmentant le nombre d'élèves. Pour cela y inclure des élèves sans le moindre projet de carrière militaire. L'idée est tellement simplette que l'on est obligé de se demander ce que ça cache.
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Idée simplette parce qu'elle néglige complètement ce qui fait la qualité de Saint-Cyr. Cela se passe en trois temps :
1) L'ESM intéresse des jeunes doués d'un fort caractère, qui veulent se préparer à “décider dans l'incertitude” et dans les circonstances tragiques qui sont celles du combat, jeunes qui sont de toutes origines sociales grâce à la gratuité des Corniches militaires.
2) ensuite bien sûr la pédagogie développée à Coëtquidan.
3) enfin la mise en application opérationnelle de l'enseignement de l'ESM, dans les régiments, par les jeunes officiers que des sous-officiers aguerris soutiennent solidement.
Or ce décret s'appuie sur l'idée fausse que l'on pourrait se dispenser des phases un et trois (c'est-à-dire l'avant et l'après) pour obtenir le même résultat : selon ce décret il suffirait de passer quelques mois à Coëtquidan où Merlin l'Enchanteur se chargerait de tout. Mais l'on ne peut pas transformer, comme par magie, des élèves qui n'ont pas du tout la force de caractère nécessaire au saint-cyrien avant, pendant, et après l'Ecole.
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Par conséquent l'on est obligé de se demander ce que cache ce décret. Le président de la Saint-Cyrienne, qui s'exprime toujours de façon pondérée, pose clairement la question que se posent les anciens élèves de l'ESM de Saint-Cyr : “le problème est-il ailleurs ? Veut-on profiter de difficultés de gestion des ressources humaines et financières pour affaiblir une école qui répond à son objet ? Je n’ose le croire !”
Pour ma part, ma conviction est faite : nous sommes gouvernés par des soixante-huitards en fin de parcours qui essaient de régler leurs comptes avant de partir. Le loyalisme de l'armée, qui les empêcha de déstabiliser le pouvoir le 29 mai 68, leur est “resté en travers”.
C'est pourquoi la présente manoeuvre n'est pas menée dans la transparence.
Indices du manque de clarté de l'opération : nonobstant l'importance de l'affaire le ministre n'est pas venu en personne devant la commission parlementaire pour expliquer son décret ; le conseil de perfectionnement de l'ESM n'a pas été informé. Quant à la parution du décret en juillet, c'est un procédé classique pour les actes adminisratifs dont la légalité est fragile.
Heureusement la Saint-Cyrienne a détecté la manoeuvre, en a informé ses adhérents par mail et l'a fait connaître sur son site.
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Se pose maintenant la question de demander l'annulation de ce décret au Conseil d'Etat. Bien sûr on pourrait se dispenser de cette démarche et attendre que l'Exécutif annule lui-même ce décret quand il aura retrouvé la raison. Cependant un tel attentisme constituerait une prise de position qui n'est pas souhaitable.
Il faut donc demander l'annulation de ce décret selon les procédures prévues à cet effet. Voyons l'aspect juridique de l'affaire.
Toute “personne ayant intérêt à agir” peut saisir le Conseil d'Etat pour faire annuler un décret. En droit administratif “l'intérêt à agir” est une notion plutôt élastique et son utilisation est donc aléatoire, mais dans le cas présent l'intérêt à agir d'un membre du conseil de perfectionnement de l'ESM de Saint-Cyr, créé par arrêté ministériel et qui existe depuis plusieurs décennies, pourra difficilement être contesté.
Quant à l'argumentaire il porte selon moi sur la forme ET sur le fond.
Au regard de la forme, le Conseil de perfectionnement de Saint-Cyr n'a pas été consulté.
Au regard du fond, la loi (1972, article repris identiquement en 2005 et en vigueur actuellement) définit la mission des armées : "la mission des armées est de préparer par la force des armes la défense de la patrie et des intérêts supérieurs de la Nation". Or l'ESM de Saint-Cyr fait partie des Armées et ce décret n'est pas conforme à cette mission. Le décret n'est donc pas conforme à cette loi que je cite.
A ceci l'on peut tenter de nous opposer deux contre-arguments :
1) le décret est conforme à une autre loi (je ne vois pas laquelle) et la loi citée ne s'applique pas dans ce cas ; ce contre-argument ne fonctionnera pas parce que le décret fait expressément référence au Code de la défense qui contient cette loi que je cite ;
2) depuis longtemps les armées acceptent d'être chargées de missions annexes qui ne sont pas conformes à l'article cité (POLMAR, poubelles, VIGIPIRATE, etc) et par conséquent la règle de la coutume permet de charger Saint-Cyr d'une mission non conforme à l'article cité.
On verra si le Conseil d'Etat accepte ce contre-argument et pose ainsi une jurisprudence selon laquelle un article de loi qui n'est pas appliqué depuis neuf ans et plus (2005 et même 1972) est caduc, mais ce serait une étonnante nouveauté.
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Ce qui est sûr dans tout ça en définitive, c'est que ce décret bizarre sera bientôt annulé, abrogé, ou profondément modifié. Bien qu'on soit en période de vacances, de nombreux mails circulent à ce sujet parmi les anciens élèves de l'ESM.
La Toile change tout et même ce vieux procédé qui consiste à faire passer les actes administratifs en catimini au mois de juillet ne fonctionne plus. Pour les membres du conseil de perfectionnement, l'alternative est simple : on attend benoîtement ou l'on passe par la procédure du recours devant le Conseil d'Etat.

10. Le lundi 4 août 2014, 16:53 par yves cadiou

Je veux répondre au dernier § du commentaire de Ph D (n°7). Non que son propos ne serait pas ”politiquement correct” mais parce que, Cyrard moi-même (il y a longtemps : 68/70), je pense sincèrement qu'il ne faut pas soupçonner tous les élèves de l'EMIA d'avoir une dent contre Saint-Cyr. Seulement certains d'entre eux, à une certaine époque. Ceci montré, je conclurai que recréer l'ESMIA est une bonne idée, à creuser.
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Tout ceci porte à l'optimisme parce que l'on va donc désormais pouvoir parler du recrutement et de la formation des officiers sans les arrière-pensées politiciennes qui ont insidieusement orienté les décisions depuis quarante ans. L'attaque actuelle contre l'ESM de Saint-Cyr est un combat d'arrière-garde qui marque la fin d'une époque.
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Comme annoncé plus haut, je conclus que recréer l'ESMIA est une idée à creuser. Surtout si l'on cherche à faire des économies mais pas seulement.

L'on peut, encore une fois et à condition de ne pas en reproduire les excès, se référer à ce qui est fait dans les services civils de l'Etat : pour l'accès aux écoles de formation, il existe un concours externe (s'adressant aux candidats qui ne sont pas encore fonctionnaires) et un concours interne (s'adressant aux candidats qui sont déjà fonctionnaires). Par conséquent le concours de Cyr (externe) pourrait être ouvert aux candidats qui sont déjà militaires (interne). Ce serait le même concours pour les uns et les autres mais pour compenser la limite d'âge de 22 ans imposée aux candidats externes, cette limite d'âge serait, pour chaque candidat interne, repoussée du nombre d'années qu'il a déjà passées dans l'armée. L'on pourrait également ajouter, aux points obtenus par le candidat pendant les épreuves du concours, des bonifications prenant en compte ses états de service. Lors de l'intégration à Cyr, ces candidats d'origine « interne » seraient dispensés des premiers mois qui consistent en instruction militaire de base.

Ainsi les promotions de ce qui serait désormais « l'ESMIA de Saint-Cyr » atteindraient les effectifs voulus par les gestionnaires et en même temps l'on mettrait fin aux frustrations et bisbilles dont on voit, avec ce décret du 18 juillet, les dernières conséquences.
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Addendum pour Ph D : les « défenseurs de Saint-Cyr » ne sont peut-être pas empêchés par des séances d'aqua-poney. Mais ils peuvent considérer, de bonne foi et peut-être à juste raison, qu'il est urgent d'attendre. Penser que le gouvernement ne sera plus le même dans trois ans n'est pas un pronostic électoral mais une certitude constitutionnelle. L'on peut préférer se dispenser d'un geste procédurier certes parfaitement légal mais qui pourrait être interprété comme une prise de position partisane.

11. Le mardi 5 août 2014, 16:04 par oodbae

@cadiou: pourquoi " préféreriez vous vous dispenser d'un geste procédurier certes parfaitement légal mais qui pourrait être interprété comme une prise de position partisane." alors que vous protestez régulièrement contre l'interdiction d'engagement politique à l'encontre des militaires ? (article xy du code zz)

12. Le mercredi 6 août 2014, 08:54 par Jean-Luc Cotard

Visiblement, le saint-cyrien, ou du moins celui qui se fait entendre sur ce site, est fâché avec l'argent. Beurkhh rentabiliser! Moi qui suis cyrard et entrepreneur, je puis vous assurer que pourtant la rationalisation, la recherche d'économies est fondamentale pour la survie de l'entreprise. Car je crois qu'il s'agit de survie de l'Ecole en tant qu'école spécifique pour former des officiers dont il s'agit. La même question se pose pour Salon et la Baille.
Bon il est vrai que l'institution militaire et l'armée de Terre en particulier ont beaucoup donné ces derniers temps et qu'il serait bon de partager le fardeau.
Mais arrêtons de parler de valeurs, de défense. Même si pour toutes les circonstances provoquant le changement les terriens, et leur élite constituée en majorité de saint-cyriens, se sont fait une spécialité de mourir au fond de la tranchée. Le décret est là, la question prioritaire serait plutôt de voir si d'une contrainte on ne peut pas tirer une force, et quelles sont les conditions pour réussir. Sur ce blog dédié à la stratégie et à la géopolitique, la question serait comment manœuvrer et surtout pour quoi.
Au delà de la mesquinerie de l'appellation de saint-cyrien, (oui je trouve cela médiocre et indigent) je pense qu'il convient de conserver les fondamentaux de l'Ecole; tous égaux. Celui ou celle qui rejoint l'Ecole doit porter l'uniforme, (le statut de réserviste existe) et suivre les mêmes activités que ses camarades qui veulent devenir officier. Et il ne faut pas que les futurs officiers soit "civilianisés".
Au contraire, je pense qu'en terme d'image cela serait très performant et très efficace en terme de compréhension de l'armée et de relations entre les élites civiles et militaires. Quand on parle à un DRH d'entreprise, celui-ci a beaucoup de mal à évaluer les compétences d'anciens officiers, cette évolution permettra peut-être de changer les choses. Elle permettra peut-être au cyrard de perdre aussi son complexe de "supériorité infériorité" vis à vis des élites.
Lors de l'arrivée de la promotion Monsabert (1° promo à trois ans) en régiment, certains colonels et capitaines craignaient les officiers intellectuels. C'est l'un d'entre eux qui a commandé, avec le succès que l'on connaît, l'opération Serval. N'ayons pas peur du changement. Le changement c'est la vie. Il n'y a que les cadavres qui ne bougent plus. Et surtout ayons confiance en nos bazars.
Arrêtons de dire avant c'était mieux. Réfléchissons et aidons plutôt par des réflexions positives et pro-actives, le commandement de l'école à continuer à former de jeunes officiers bien dans leur peau, durs à la peine et innovateurs.
Arrêtez de vous lamenter! Avancez!
Appliquons la devise du 9°RG: "allons-y on passera!"

13. Le mercredi 6 août 2014, 17:38 par oodbae

C'est marrant ce débat. Ca me rappelle le débat qui agité les milieux universitaires en Allemagne pendant des années, à savoir de discuter de la pertinence d'introduire le système LMD (Licence, Master, Doctorat) à l'unversité en lieu et place du traditionnel DD (Diplomarbeit, Doktorarbeit). Cette transition s'appelle ici le "Bolognaprozess", à savoir le processus de Bologne. Celui-ce a touché toute l'Europe, la France notamment dès 2004 à un an près.
Arguments pour:
- harmonisation des diplômes au niveau européen => meilleur reconnaissance des diplômes nationaux à l'international,(en fait des universités charchant une aura internationale mais chut!)
- harmonisation des diplômes au niveau européen => meilleur comparabilité des universités à l'international
- possibilité de faire des études en 3 ans ´=> et donc moins d'interruption d'études donc plus de gens qualifiés
- possibilité de faire des études en 3 ans => et donc plus d'étudiants qui peuvent se satisfaire de trois ans d'études, mais pas de cinq.

Arguments contre:
- infantilisation des étudiants qui doivent un rythme scolaire plus contraignant et plus encadré . Dans le système Diplom-Doktorarbeit, les étudiants organisaient leur cursus librement. Une seule échéance, le "Vordiplom", qui n'avait pas de valeur de diplôme mais qui regroupait les enseignements fondamentaux, quelque soit la discipline (artistique ou scientifique).
- infantilisation des étudiants, car dans le systéme DD, il était fréquent que les étudiants travaillent à coté, interrompent une ou deux années pour travailler à temps plein ou voyager, bref deviennent adultes avant de terminer leurs études (ce qui est par ailleurs avantageux pour les entreprises).
- infantilisation des étudiants car dans le système DD, l'étudiant est laissé à lui seul et il doit trouver sa voie, d'après les principes de Von Humboldt, le fondateur de l'université allemande sous Bismarck. Donc sa force d'esprit le fait reussir, et non sa soumission à un système pédagogique.
- baisse du niveau, car les contenus sont raccourcis pour correspondre à l'échelle de mesure des compétences fixée au niveau européen (afin justement de permettre la comparabilité à l'international).

Il y a bien sûr des raisons plus ou moins dissimulées car pas forcément dans l'intérêt direct des étudiants ou des universités, à savoir que des étudiants rentrant plut tôt sur le marché du travail côtisent aussi plus tôt et plus longtemps.

A la fin du débat, on voit que les deux avis se valent et que le choix est une affaire de convictions. En ce qui me concerne, j'ai étudié sous les deux systèmes LMD et DD en Allemagne et je peux dire que le système DD était meilleur car il correspondait à une mentalité qui dépassait le simple cadre administratif. Par exemple, en Allemagne, l'engagement social est bien mieux mis en valeur qu'en France. Un étudiant pouvait s'engager d'abord sporadiquement puis à fond pendant un an dans une association [généralement bénévole, sinon on appelle cela un emploi, même si sous-payé] et acquérir des compétences extrascolaires comme la capacité de mener un groupe, d'entreprendre des projets, des compétences techniques ou humaines en général. Aujourd'hui, c'est bien moins fréquent ou plus précisemment, l'engagement est moins important, ce qui met à terme en péril ces associations si personne ne les gère à temps plein.
C'est donc tout un environnement social qui est chamboulé, mais la réforme, elle ne le prend pas en compte. C'est d'ailleurs un phénomène assez fréquent suivant la plupart des réformes administratives, juridiques et politiques en général.

Par conséquent, et en considérant cette expérience en Allemagne et sans être malheureusement moi même un militaire, je crois effectivement que cette réforme de Saint-Cyr est une grosse bouse qui est le fruit de raisonnements négligeant les intérêts de l'école spéciale militaire, qui comme le rappelle egea, est spéciale et militaire.

Qu'on me permette une analogie. Si vous incluez dans une école d'ingénieur un cursus littéraire sous le prétexte que les étudiants littéraires acquéront le pragmatisme scientifique, vous crééz simplement des doublons administratifs (création d'emplois irrationelle), froissez les étudiants ingénieurs qui sont après gênés quand on leur parle de leur école comme d'une école de philosophes, gênez les étudiants littéraires qui seront probablement l'objet d'un mépris de la part de beaucoup de scientifiques si ils sont en minorité ou qui remettront en question l'appellation école d'ingénieur si ils sont en majorité, détournez encore plus d'étudiants ingénieurs de leur carrière scientifique car plus attirés par les lumières de l'art et de la politique.
Bien sûr, les ingénieurs ont alors la possibilité de se faire des contacts avec de futurs politiques (parmi les littéraires) et il y a d'autres avantages. Mais ces avantages leur manquaient ils vraiment comme si ils ne pouvaient rencontrer ces personnes ailleurs....

Remplacez ingénieur par militaire et littéraire par civil, et je crois qu'on a le tableau.

Et l'agressivité du commentaire précédent (Jean-Luc Cotard) contre les méchants conservateurs arriérés qui croient à une spécificité de leur école, alors qu'il s'agirait de débilité consanguine, n'argumente pas pour cette réforme.

J'ai lu le lien d'egea et je n'arrive pas à bien cerner les avantages de la réforme. S'agit il de rentabiliser? Mais il y aura création de postes donc augmentation des coûts. Ou augmentation des effectifs d'étudiants donc baisse de la personnalisation des enseignements, donc baisse de la performance de l'école dont baisse de la rentabilité, soit le contraire de l'effet recherché.
S'agit il de lutter contre le sectarisme de Saint-Cyr? (si il existe, probablement). Je crois qu'un projet obligatoire de 6 mois ou un an intégré au cursus où l'étudiant doit organiser un service pour la société civile (cours du soir pour écoliers, défavorisés ou non d'ailleurs, site internet sur les perspectives technologiques dans l'armement avec objectif de visiteurs uniques, forum public de discussion dans une ville sur quelque thème, etc) où il s'affiche clairement comme étudiant de l'armée serait largement plus efficace et je dirais même nécessaire si cela n'existe pas déjà.
S'agit il de former des cadres civils? On a assez de HEC, SUpDeCo, et autres masters d'éco-socio-management et autres Science Po. Et même ces écoles n'arrivent pas à remplir leurs effectifs. Et de toute facon, la réduction des budgets de la défense envoie nombre de ces officiers dans le civil, comme évoqué dans les commentaires.

En vérité, il y a derrière ce projet des raisons non avouées et néfastes.

Cordialement.

14. Le dimanche 12 octobre 2014, 19:46 par PhD

Quelques mois après, qu'en est-il ? Le décret a été pris, et personne n'a protesté. Étonnant ? Non, aqua-poney à haute dose sûrement...

"Les défenseurs de Saint-Cyr (...) peuvent considérer, de bonne foi et peut-être à juste raison, qu'il est urgent d'attendre." Je le verrais différemment.
Après qu'une frange de l'échiquier politique a assumé son anti-militarisme durant toutes les guerres menées par la France (au fait, d'accord pour qualifier officiellement la guerre d'Algérie de guerre, mais il faut aller jusqu'au bout de la logique et qualifier les partisans de l'ennemi d'alors de traîtres - rigolo, non ?), l'autre bord de l'échiquier a assumé ces dernières années un anti-militarisme de nature différente mais tout autant ostentatoire. Personne ne s'est révolté, ni émis le moindre étonnement parmi les aqua-ponistes.
Tout ceci pour dire que les armées n'intéressent plus personne, d'autant plus qu'elles brillent par leur absence de remontrances.
Alors ? On ne change pas une équipe qui gagne et on continue de mépriser ceux qui se laissent mépriser.

A propos, le Val de Grâce va fermer. Centre de Paris, belle localisation. Vous allez voir que dans quelque temps un groupe quelconque, et pas forcément du Qatar se portera acquéreur de l'emprise pour une bouchée de pain (sans croûte, c'est mieux pour les sans-dents).

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