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Que reste-t-il de l’Occident ? (Debray Girard)

Voici un petit opuscule de petit format et au nombre limité de pages (140). Il s’agit d’une sorte de dialogue entre Régis Debray, essayiste réputé, et Renaud Girard, journaliste au Figaro. La discussion porte sur l’Occident et elle est aisée (les deux sont normaliens et savent écrire)et en même temps intéressante. Disons les choses d’emblée : on est loin du catéchisme habituel qu’on nous sert à longueur de journée et qui est, convenons-en, particulièrement indigeste. Ici, le doute est roi – trait fort occidental, on l’a compris.

La discussion commence par un long texte de R. Debray qui reprend la conférence qu’il avait prononcée il y a quelques mois, en contrepoint de Brochand et dont j’avais rendu compte avec enthousiasme (surtout les propos de Brochand, souvenez-vous). Disons les choses simplement : intervenir après Brochand n’était pas chose aisée et Debray n’avait pas été à son avantage, ses propos me paraissant assez convenus. Avouons qu’à la lecture, quelques mois plus tard, cette sévérité n’apparaît plus justifiée.

Il développe son propos en cinq points positifs et cinq points négatifs. A quoi R. Girard répond par un « mémoire en défense » en neuf points, tous fort géopolitiques. Un ultime dialogue entre les deux permet au livre de se conclure.

L’ensemble est fort stimulant, avec énormément d’idées comme peuvent en émettre des intellectuels français quand ils évitent l'abus des codes du milieu. Au fond, on apprécie surtout cette liberté de ton qui est fructueuse.

On peut être surpris par certaines affirmations (Debray affirmant que l’OTAN est symbole d’unité montre qu’il ne s’est pas très bien renseigné, j’ai des livres à lui conseiller).Le diagnostic est valable, notamment concernant les handicaps (l’hubris du global, le complexe de supériorité, et des lacunes qu’il faut bien nommer « stratégiques » (prison du temps courts, dispersion du perturbateur, déni du sacrifice). Girard lui répond en partant es opérations extérieures, confites de bonnes intentions (la responsabilité de protéger) même s’il se concentre surtout sur les opérations alliées ou américaines, omettant celles de l’UE voire de l’ONU. On l’approuve quand il dénonce le manichéisme de la politique étrangère mais on reste circonspect lorsqu’il évoque une « difficile édification d’une troisième voie dans le monde arabe » : la notion même de « troisième voie » nous paraissant typiquement occidentale – donc inadaptée au monde du moment. Du coup, sa « désignation de l’ennemi » (ici, l’islamisme international) tombe à plat ou, plus exactement, elle tombe parfaitement bine pour flatter le public ciblé. On le retrouve plu sconvaincant lorsqu’il décrit la maladresse occidentale dans l’affaire ukrainienne et on le trouve très gentil quand il évoque l’inquiétant déclin de l’Union Européenne. Ce n’est pas un déclin, c’est une disparition, très cher !

Voici donc un livre plaisant, stimulant, rapidement lu, avec les avantages du genre (brièveté) et les inconvénients (manque de profondeur).

Que reste-t-il de l’Occident ?

  • Régis Debray et Renaud Girard
  • Grasset, 2014

O. Kempf

Commentaires

1. Le lundi 15 décembre 2014, 12:28 par Spurinna
On peut sans doute se faire sa petite idée du livre (que je n'ai pas lu ...) en regardant les assises 2014 du CSFRS : http://oxygenstream.fr/vod/csfrs/2014/ J'ai trouvé le duo assez décousu, et plus encore R. Debray que R. Girard. Mais peut-être que les organisateurs le savaient déjà, vu que les deux auteurs sont labélisés "témoins" ... Egea :A coup sûr, des têtes d'affiche

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