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« Il y a un avant et un après Snowden »

Petit interview donné à l'Huma sur l'affaire Snowden, deux ans après.

Deux années au compteur. Le 6 juin 2013, les premières révélations du lanceur d’alerte Edward Snowden concernant la surveillance de masse conduite par l’Agence nationale de sécurité (NSA) des États-Unis, étaient publiées. Aujourd’hui, quel bilan des avancées et reculs peut-on dresser ? Entretien avec Olivier Kempf, chercheur à l’Institut de Relations internationales et stratégiques (IRIS) et co-auteur de « L’affaire Snowden, une rupture stratégique », publié le 4 décembre dernier.

Comment jugez-vous l’état du débat mondial, que ça soit au niveau étatique ou des citoyens, à propos de la surveillance de masse, à deux ans des révélations ?

Il y a un avant et un après Snowden. Une prise de conscience est apparue dans le débat public avec de multiples réactions. Un processus de « balkanisation du cyberespace » s’est amorcé. On considérait auparavant le cyberespace simplement comme un grand espace transparent et ouvert, indépendant des Etats. Dorénavant, le cyberespace est au cœur des souverainetés : les citoyens et les Etats veulent avoir le contrôle de leur espace numérique.

Les effets de cette démarche sont visibles en Allemagne. La chancelière Angela Merkel a de grosses difficultés à gérer la colère des citoyens concernant le Service fédéral de renseignement (BND), accusé d’avoir collaboré avec l’Agence nationale de sécurité (NSA). Outre-Atlantique, le Sénat états-unien a récemment adopté le USA Freedom Act, qui restreint la collecte des données téléphoniques des États-uniens. De plus, un débat s’est engagé sur la place publique mondiale. Des associations françaises, telles la « Quadrature du Net », qui alertaient depuis longtemps du danger d’une surveillance de masse, ont fait beaucoup de bruit à ce sujet et ont mené des batailles citoyennes.

Précisément, la Quadrature du Net, association de défense des libertés sur Internet, s’est aussi battue contre le projet de loi Renseignement en France, voté mardi prochain au Sénat. N’est-ce pas un recul pour la vie privée et une défaite pour Edward Snowden ?

C’est en fait un débat qui oppose la liberté et la protection des citoyens. D’un côté, on demande aux Etats de protéger le bien commun, de l’autre il y a leur vie privée. C’est un dilemme qui traverse toutes les sociétés.

Le USA Freedom Act, qui succède au Patriot Act adopté sous George Bush, est-il aussi protecteur des citoyens qu’on a pu l’entendre ?

C’est une première étape très importante. On a restreint le USA Patriot Act, adopté en 2001 à la suite des attentats du 11 septembre, et qui a autorisé la NSA à surveiller les États-uniens. En revanche, le Freedom Act ne tient compte que des données téléphoniques. Or, de nos jours, il y a convergence de tous les types de données. En d’autres termes, les données téléphoniques peuvent être numérisées et conservées.

Il serait donc toujours possible de traquer les données téléphoniques numérisées ?

Tout à fait.

L'Affaire Edward Snowden, de Quentin Michaud et Olivier Kempf (Edition Economia, 19 euros)

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