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Aspects géopolitiques des élections régionales

Quand on est géopolitologue, on est forcément un peu politologue. D'où ce billet qui veut repérer quelques éléments épars mais qui prennent une grande signification, surtout en variant la focale, et permettent de comprendre en partie les résultats des élections de ces deux derniers dimanches.

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Populisme ? ou défiance envers la mondialisation ? Les commentateurs ont ainsi longuement parlé du populisme, remarquant qu'il se répandait à travers l’Europe (mais pas seulement, regardez Trump aux États-Unis). Une des explications les plus simples tient au rejet de la mondialisation telle qu'elle est perçue (peu importent en l’espèce ses avantages et défauts réels : en termes de choix d'électeur, seule compte la perception, ce qui est de bonne analyse géopolitique). De même, le rejet de l'Europe est plus dû à ce qu'elle n'est pas perçue comme protégeant de la mondialisation. De ce point de vue, la crise financière puis la crise des migrants apparaissent pour beaucoup comme les signes de cette incapacité. Cela entraîne un repli national, fondé sur le souhait que l’État y pourra quelque chose.

Toutefois, à l'intérieur, les choses ne sont pas aussi simples. Il suffit d'entendre candidats et reportages pour entendre que derrière "l'insurrection froide" (Mélenchon) ou la jacquerie électorale, il y a un rejet des élites et "de Paris".. En France, les élites sont forcément perçues comme parisiennes. Aussi, le rejet de l'Europe s'accompagne d'un rejet des élites. Le parisianisme est de plus assimilé à de la complicité avec la mondialisation, ce qui augmente le ras-le-bol.

Ainsi, la solidarité du corps social est-elle mise à l'épreuve ce qui pousse nombre d'électeurs soit à s'abstenir, soit à voter contre. La cohésion territoriale et politique est mise en question. Il n'est pas anodin que toutes les récentes élections soient des élections locales, allant toutes dans le même sens : montée du Front National et victoire sans éclat, au finish, des partis de gouvernement, désignés par défaut (par sursaut, cette nouvelle pirouette gymnastique très en vogue ces derniers temps).

Aussi faut-il pointer deux élections qui, en d'autres moments, auraient fait la une de nos journaux : l'élection de deux directions indépendantistes en France. L'une en Corse où l'alliance entre "nationalistes" et "indépendantistes" (fichtre, quelle distinction) l'emporte largement ; l'autre en Martinique où la liste indépendantiste, ayant fusionné avec la liste LR, gagne également. Qu'il me soit permis de considérer que si les grands médias se sont largement émus du haut score du FN, il apparaît au moins aussi inquiétant de voir cette montée des listes séparatistes qui n'augurent rien de bon (on aurait pu aussi bien mentionner, au premier tour, la persistance de la liste bretonnante en Bretagne). Elles manifestent également la perte de cohésion politico-territoriale de la nation.

Or, la géopolitique moderne insiste sur l'analyse des perceptions : celles-ci sont structurantes dans la construction des cohésions territoriales (je n'ose parler d'identité). Voici poindre en France également les pousses d'indépendantismes vivaces, dont on a déjà eu l'aperçu en Belgique, en Espagne ou au Royaume-Uni. Même la France, souvent présentée comme l'archétype de l’État-nation, voit donc ses marges flagoler. C'est dire à quel point l'état du pays est inquiétant.

O. Kempf

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