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Sécurité en Europe

Ci-joint, ma chronique parue dans le Conflits n° 13 d'avril 2017... Je vous la donne avec un peu de retard, désolé...

Conflits n°13, avril-mai-juin 2017

L’administration Trump est à peu près en place et mi-février, l’Europe a connu une succession de rencontres qui ont permis d’y voir un (tout petit) peu plus clair. Ministérielle défense à l’OTAN réunion du G20, conférence pour la sécurité de Munich, autant de rendez-vous où les cénacles atlantistes se sont parlé. On attendait surtout le général Mattis, nouveau Secrétaire à la défense, ainsi que Rex Tillerson, le nouveau Secrétaire d’État.

Ceux-ci ont rassuré les Européens en disant les choses qu’ils attendaient sur la « robustesse » de l’alliance transatlantique. Du coup, on pouvait croire que personne n’avait entendu D. Trump affirmer il y a peu que celle-ci était obsolète.

Bien sûr, le général Mattis a rappelé que les contribuables américains n’allaient pas continuer à payer pour la défense de l’Europe.  Chacun s’en est félicité, promettant plus que jamais qu’il allait s’y mettre et qu’effectivement, l’objectif des 2 % était tout à fait raisonnable. On entendit ainsi Mme Merkel opiner en ce sens et si Mutti l’avait dit, c’est que cela adviendrait. Certains esprits chagrins notaient qu’augmenter brutalement les dépenses allait renforcer le complexe militaro-industriel américain et que c’était au fond ce que cherchait Trump. Ce qui est vrai également.

Croire pourtant que les choses vont en rester là constitue cependant un vœu pieux. Pour trois raisons.

La première teint à l’Europe : celle-ci est plus que jamais divisée, le Brexit l’affaiblit durablement notamment en matière militaire et il est totalement illusoire de penser que la défense peut constituer une politique publique comme une autre qui va permettre de la relancer politiquement. Les liens entre défense et politique sont trop intimes pour penser qu’il ne s’agit que d’un « secteur d’activité » comme un autre. Les différends politiques, les divergences d’appréciation stratégique sont trop prononcées pour qu’on s’accorde sur une défense commune. Une telle vue vient de technocrates qui n’ont jamais réfléchi sérieusement à la stratégie.

La deuxième tient à Trump : celui-ci a en effet axé sa politique étrangère sur la lutte contre le djihadisme. Cela fut peu entendu mais les émissaires américains l’ont signifié : il faut faire effort au sud. Or, compte-tenu des divergences à l’instant évoquées, on voit mal comment. Surtout, beaucoup d’alliés ne veulent pas de l’Alliance au sud, soit qu’ils préfèrent d’autres cadres, soit qu’ils préfèrent cantonner l’alliance à l’est. Les 2% sont un moyen commode de se réconcilier en apparence, cela ne règle rien au fond.

La troisième raison tient à Poutine. En effet, avec les ministres américains vinrent tout un tas de conseillers qui en profitèrent pour discuter en aparté avec les envoyés russes. Or, il est fort possible que les paroles apaisantes envers l’OTAN soient un moyen de réunifier le camp au moment de la négociation. Autrement dit, de hausser les enchères. Venir à la table en disant qu’on veut un accord à toute force n’est pas le meilleur moyen de faire valoir ses intérêts. La règle numéro un dans tout marchandage consiste à ne pas marquer son intérêt pour l’objet de la discussion. Peut-être est-ce l’arrière-pensée des équipes américaines. Car à considérer le nouveau président pour un homme inexpérimenté et non-préparé, on oublie également qu’il sait négocier, qu’il a l’habitude des rapports de force et qu’il peut être tout à fait matois. L’avenir nous le dira.

O. Kempf

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