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En réponse à Stent : fin de l'histoire, fin de la guerre et autres lieux communs....

Stent (La plume et le sabre) réagit vigoureusement à mon billet sur l'allocution du général Le Borgne, au colloque de la RDN (ce qui prouve, soi-dit en passant, que les colloques en général, et ceux de la RDN en particulier, peuvent provoquer encore des débats utiles...)

Voici mon commentaire au commentaire de Stent.

EGEA : bravo pour ces remarques fortes. Il me semblait intéressant, en effet, d'évoquer le discours du général Le Borgne que j'apprécie par ailleurs. Ce discours revêt en effet une cohérence séduisante et "d'époque". Je rendrai compte demain d'un ouvrage que je viens de lire et qui pousse à son extrême les conséquences de l'attitude Fukuyamesque évoquée ici.

Juste une précision : je ne suis pas sûr que le Gal LB soit totalement convaincu de son discours, car j'ai cru déceler une part de provocation dans ses paroles : un peu comme un vieux poète qui vient chercher confirmation de son pessimisme et de sa misanthropie....

L'absence de réaction et de dénonciation, l'assentiment de la salle confirmaient la prévalence de ces idées, désormais quasiment reçues, comme si même des stratégistes ne voyaient pas très bien comment sortir de la lénifiance ambiante.

Rencontrant l'autre jour un "responsable politique de premier plan", je lui disais qu'il ne s'agissait pas en Afghanistan d'opérations, mais bien de guerre, et qu'il fallait cesser de verser dans la négation de cette réalité. Qu'à force de masquer les mots par bien-pensance communicante, on évitait le débat stratégique au fond et qu'on risquait de prendre des vessies iréniques pour des lanternes pacifiantes. Que surtout on affaiblissait le politique.

La guerre oppose bien sûr les doux contre les barbares, comme constate LB : mais ne dire que cela, c'est demeurer dans la morale. Or la guerre n'est pas affaire de morale mais de politique. On sait maintenant qu'il faut aussi inverser le théorème clausewitzien : la politique, c'est la continuation de la guerre par d'autres moyens. La modernité stratégique impose d'avoir une compréhension politique des conflits : c'est d'ailleurs un des objectifs de ce blog que de ne pas limiter la géopolitique à la seule géographie politique, ou aux seules relations internationales, mais d'y incorporer la dimension militaire de la lutte de puissance. Et de l'autre côté, de ne pas limiter l'analyse stratégique aux seules affaires militaires.

Il ne s'agit pas d'être "pour" la guerre, ce qui serait la caricature de la position ici énoncée : juste de constater que la guerre est une réalité, que la guerre industrielle a peut-être fait son temps, qu'elle emprunte désormais d'autres voies (contre-insurrectionnelles ? au milieu des populations ?) et qu'elle en empruntera d'autres demain (conflits pour la domination de ressources ? conflits de pauvres contre riches ? conflits séparatistes - Texas, Belgique, ...?).

L'avenir du débat stratégique tourne probablement autour de ces notions là : l'histoire n'a pas de fin.

O. Kempf

Commentaires

1. Le lundi 8 juin 2009, 21:33 par

Et donc, relisons "Achever Clausewitz" de R. Girard qui pose une alternative:
-soit s'inscrire dans "le retour"(???) de l'Histoire
-soit en rester à notre monde 'post-héroïque"
En réalité, il y en a une troisième, celle que tu défends avec Stent: admettre la réalité de la guerre mais chercher l'apaisement des mouvements mimétiques entre "eux" et "nous" (en nous méfiant de ne pas trop les "démoderniser" non plus: notre attitude spirituelle est aussi source de cette violence
Stéphane

EGEA : oui, bien sûr, il y a l'interprétation mimétique.... ou l'interprétation theillardienne.

2. Le lundi 8 juin 2009, 21:33 par Corentin

Je vous rejoins totalement sur l'importance de reconnaître qu'il s'agit bien de "guerre" en Afghanistan.

Par contre, concernant votre phrase "il faut aussi inverser le théorème clausewitzien : la politique, c'est la continuation de la guerre par d'autres moyens".

S'agit-il d'un "faut" affirmant le besoin de soumettre la politique à la guerre pour notre salut à tous (du Ludendorff, en somme...) ou d'un "faut" rappelant que parfois, comme le soulignait Clausewitz, la guerre devient une fin en soi ? Je pencherais bien sûr pour la seconde...

EGEA : une troisième compréhension est possible (peut-être rejoint-elle une des deux vôtres) : la nécessité est intellectuelle et elle permet de renverser la perspective habituelle. Adopter un autre point de vue. Qui comprend nécessairement une part de vérité....

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