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Piraterie maritime : Atalante, Allied Protector, CTF 151 et les autres

J'avais déjà brièvement évoqué EUNAVFOR. Approfondissons un peu le sujet de la piraterie maritime, notamment sous le prisme de l'Otan.

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Le développement de la piraterie au large de la Somalie à partir de 2007 a poussé la communauté internationale à réagir. Le Conseil de Sécurité a pris, au long de l’année 2008, une série de résolutions prises dans le cade du chapitre VII afin de contrer cette menace . Ces résolutions abolissent dans la pratique la distinction entre la haute mer et les eaux territoriales et autorisent les marines étrangères effectuant des opérations dans le cadre de la lutte contre la piraterie à intervenir dans l’ensemble de la zone. Une première autorisation a été accordée pour six mois par la résolution 1816 du Conseil de sécurité du 2 juin 2008, elle fut prorogée de douze mois par la résolution 1846 du 2 décembre 2008. « La résolution 1851 du 16 décembre 2008 a introduit une autre mesure toute aussi exceptionnelle, autorisant les Etats qui coopèrent à la lutte contre la piraterie dans la région, pour une période de douze mois à compter du 2 décembre 2008, à « prendre toutes les mesures nécessaires et appropriées en Somalie », c’est-à-dire à intervenir sur terre dans le cadre des actions menées pour lutter contre la piraterie », cf. Lord Jopling, « La piraterie : une menace croissante contre la sécurité régionale et mondiale », Rapport de l’assemblée parlementaire de l’Otan, n° 023 CDS 09 F, 2009. Voir également Ch. Ménard, « rapport d’information sur la piraterie maritime », n° 1670 de l’Assemblée Nationale du 13 mai 2009.

1/ La première intervention fut sous direction américaine, dans le cadre de la CTF 150 de novembre 2007 à juin 2008, prorogée depuis et transformée en CTF 151 (avec des navires américains, auxquels se sont joints les Turcs). Puis, alors que l’UE se préparait à mettre en place l’opération EU NAVFOR Atalante, l’alliance se décida rapidement (9 octobre 2008) à lancer sa propre opération de circonstance en détachant le Groupe maritime permanent n° 2 (SNMG 2) dans la zone. Certains y voient le signe d’une « concurrence » entre les deux organisations, voir par exemple N. Gros-Verheyde,

2/ « L’opération Allied Provider, lancée le 24 octobre 2008, était placée sous le contrôle opérationnel du Commandement allié de composante maritime à Naples sous la direction du Quartier général de commandement des forces interarmées de l’OTAN à Naples. Les bâtiments de l’OTAN ont escorté 8 convois du PAM, et ont effectué des missions de patrouille et de surveillance aérienne. L’opération a pris fin le 12 décembre 2008 lorsque l’OTAN a passé le relais à l’opération Atalanta de l’UE » (rapport Jopling). EUNAVFOR a été approuvée par le conseil de l’UE le 8 décembre 2008 pour un mandat d’un an (prorogé en juin 2009) . Pour une analyse du début de mandant d’EUNAVFOR, voir N. Gros-Verheyde, « Atalante six mois après, : premier bilan », cinq billets du 29 et 31 mai, 1er, 4 et 14 juin 2009

3/ De mars à juin, le groupe maritime permanent n° 1 (SNMG 1) a conduit un deuxième mandat « Allied Protector » dans la zone. Toutefois, cette opération pose problème, car il s’agit d’utiliser le transit des groupes maritimes dans la zone pour les habiller de lutte anti-piraterie. « D'autant que certains Etats (comme l'Allemagne) quittent le SNMG quand il est au large de la Somalie pour passer sous commandement de l'UE (autorisation du Bundestag oblige) » (voir N. Gros Verheyde).

4/ Lors du sommet de Strasbourg, les Alliés ont évidemment mentionné la question : « À la demande du secrétaire général de l'ONU, et sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l'ONU, l'OTAN a pris des mesures contre la piraterie et les vols à main armée en mer. Nous avons lancé l’opération Allied Protector, qui vise à mener des opérations maritimes au large de la Corne de l’Afrique pour contribuer à la lutte contre la piraterie et les vols à main armée en mer, parallèlement aux efforts d’autres pays et organisations, en particulier la Combined Task Force 151 et l’opération ATALANTA de l’UE, qui sont tous complémentaires. Le Groupe de contact sur la piraterie au large de la Somalie joue un rôle important pour ce qui est de faciliter la coordination entre tous les acteurs concernés. Le traitement des causes profondes de la piraterie exige de la communauté internationale qu’elle adopte une approche globale. Nous examinons diverses options concernant la possibilité d’un rôle à long terme pour l’OTAN dans la lutte contre la piraterie, notamment en tenant compte, comme il conviendra, de demandes régionales portant sur le développement de capacités maritimes » .

5/ L'alliance a récemment décidé un élargissement de son action, par la mise enpalce de l'opération "Ocean Shield". « un nouvel élément a été introduit dans le cadre de l'opération Ocean Shield, à savoir le développement des capacités de lutte contre la piraterie des États régionaux. Il a pour but de permettre à l'OTAN d'aider les États régionaux qui en feront la demande à développer leur propre capacité de lutte contre la piraterie. Cette composante de l'opération doit compléter les efforts internationaux en cours et contribuer à améliorer la sécurité maritime au large de la Corne de l'Afrique ». Le commandement opératif est assuré par le Commandement de Lisbonne, le commandement tactique par le Commandement de composante maritime à Northwood

6/ Nul doute que le prochain concept évoquera la question, et surtout le rôle que l’Alliance peut y jouer. Les Etats-Unis semblent pousser un engagement plus appuyé, afin de renforcer la dimension maritime de l’alliance. Toutefois, face au succès d’Atalante et à la multiplication des acteurs, le positionnement n’est pas aisé à définir, et le consensus politique semble difficile à trouver. En effet, plusieurs problèmes se juxtaposent :

  • - les missions « Allied Protector » ne sont pas des opérations permanentes et structurées, comme peut l’être EUNAVFOR. D’une certaine façon, la PESD a été plus efficace au cours des deux dernières années dans le traitement des crises émergentes, que ce soit au Tchad, en Géorgie ou au large de la Somalie.
  • - le cadre juridique est étriqué, puisque les navires alliés peuvent certes escorter les bateaux du Programme alimentaire mondial, mais ne peuvent pas appréhender de pirates (pas d’accord d’intervention) ;
  • - enfin, le fondement conceptuel de l’opération est flou : il ne s’agit pas de lutte contre le terrorisme, éventuellement d’ordre public, face à des organisations criminelles et mafieuse : on est bien loin de la spécialisation militaire qui est au cœur du métier de l’alliance, quelles que soient ses efforts pour élargir ces fonctions dans le cadre de l’approche globale.

O. Kempf

Commentaires

1. Le vendredi 28 août 2009, 20:56 par

Il serait également intéressant de savoir comment se passe la coopération ou la cohabitation de l'OTAN avec des marines qui ne sont pas otanniennes : notamment les marines des pays de l'OCS.
Cette question concerne indirectement un autre terrain, l'Afghanistan, où l'OTAN est engagée et au sujet duquel un commentateur compétent (René Cagnat) préconise une coopération avec l'OCS, voire une relève par l'OCS.

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