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Surprise et renseignement

Les événements du Proche Orient sont une surprise : cette surprise signifie qu’ils n’avaient pas été prévus, et que les renseignements étaient mauvais.

Qu’on pense à la colère d’Obama envers ses services de renseignement, que les journaux ont évoquée. Même si cela a moins fait de bruit, je devine qu’il a dû en être de même à Paris. Au point que des ministres ont été voyagé dans des zones de crise, sans appréhender l’intensité de ce qui était en train de se dérouler. Mais, et je l’ai déjà dit, chacun a été surpris.

Cela pose donc la question des renseignements. Trop souvent, on considère le renseignement sous son aspect tactique, et très opératoire : qu’il soit directement tourné vers les opérations (DRM, deuxièmes bureaux d’état-major) ou vers des affaires d’espionnage ou de contre espionnage.

Mais il semble qu’on n’a pas vu les « signaux faibles », ni les données structurantes (démographiques, économiques et sociologiques) pourtant annoncées (cf Todd et Courbage, Le rendez-vous des civilisations).

En fait, cet échec du « renseignement » stratégique ne tient probablement pas à un accès déficient à des informations : celui qui voulait voir aurait vu, même en sources ouvertes. Non, la déficience tient au filtre qui a empêché de voir. Et ce filtre, en l’espèce, est idéologique avec l’obsession de la menace islamiste.

Il ne s’agit pas de nier cette menace en bloc : juste de montrer que le renseignement (une information confirmée, analysée et mise en perspective) d’une part n’arrive pas forcément à appréhender la complexité dune situation, d’autre part à parvenir à l’intelligence du décideur, si celui ne veut pas voir. On pense souvent au biais humain de la source du renseignement : ion évoque rarement le biais humain du récepteur final.

O. Kempf

Commentaires

1. Le dimanche 13 février 2011, 18:34 par

Olivier,

Il y a bien sûr la gesticulation occidentale depuis le 11 septembre 2001 autour du terrorisme islamique que nos intellos néocons style BHL continuent d'ériger en sur-déterminant de l'Histoire, mais aussi et surtout le dogme comme quoi l'Islam n'est pas soluble dans la démocratie, ce qui est sujet à débat, et sa soi-disant conséquence, totalement absurde et fausse, que la démocratie ne serait pas adaptable au monde arabo-musulman. C'est ce dogme qui a aveuglé ceux-là même qui nous servent la démocratie libérale comme Fin de l'Histoire depuis 20 ans, et qui continue de gouverner notre politique. Le recours, très prévisible depuis deux semaines, de l'Amérique à l'armée égyptienne pour résoudre la crise va sans doute entraîner la Maison Blanche à n'offrir au monde arabe qu'un modèle dégradé de démocratie, autrement dit juste ce dont les "Bougnoules" ont besoin. Pour éviter des Nasser-de Gaulle, et le recours à des urnes toujours improbables (cette emmerdante incertitude de la démocratie), on imposera des Darlan-Giraud en solde et de seconde main. Et on n'aura pas avancé d'un pouce.

JPhI
égéa : sur la démocratie, il y a un retour du débat en ce moment, si j'en lis mon frère....

2. Le dimanche 13 février 2011, 18:34 par AD

Il faut toujours appuyer son propos par les idées des autres donc je vais citer le Livre Blanc de 2008 : la bible quoi... inattaquable!
"Le renseignement a pour objet de permettre aux plus hautes autorités de l’État, à notre diplomatie, comme aux armées et au dispositif de sécurité intérieure et de sécurité civile, d’anticiper et, à cette fin, de disposer d’une autonomie d’appréciation, de décision et d’action.
En présentant de façon aussi exhaustive et fidèle que possible l’état des risques, des menaces et des opportunités dans les domaines les plus variés (politique, militaire, économique, énergétique, etc.), le ren- seignement éclaire la décision autant qu’il précède, appuie et suit l’action."

Remarque : il n'est marqué nul part que le renseignement a pour mission de savoir des choses cachées (ie, l'espionnage). Le renseignement est donc moins lié au secret de la source qu'à la capacité d'analyse... Or nos organisations ne sont pas forcément conçues / pensées pour cela... : ce qui compte (à commencer pour le "client" qui adore jouer au James Bond de salon), c'est de savoir des choses très secrètes... plus que des choses utiles et surtout comprises et mises en perspective !

Back to basics... du bon vieux temps de la guerre froide les analystes savaient extrapoler à partir de peu (je pense notamment aux photos et images des défilés sur la place rouge qui donnaient lieu à des analyses incroyables (et souvent justes a priori) sur l'équilibre des pouvoirs en URSS, à partir du simple placement de tel ou tel dignitaire...

donc l'espionnage a son rôle clé à jouer : chercher des informations non accessibles. Mais le renseignement c'est la capacité à comprendre et anticiper. Pas à se reposer sur tel ou tel rapport (bien entendu hautement classifié...)

3. Le dimanche 13 février 2011, 18:34 par

Pour comprendre les surprises, il faut comprendre les hasards. Pour cela, il faut lire Taleb : http://lignestrategiques.blogspot.c...

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