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Saïgon - Kaboul

Un lecteur me questionne sur la comparaison entre l'Indo et l'Afghanistan. Comme je ne suis pas un spécialiste des COIN, ni d'histoire militaire, ni d'Asie (je me demande même pourquoi je parle de tout ça....), je vous adresse cette question : je vais me sentir en vacances parce que pour une fois, c'est vous qui allez rédiger le billet.

jardin_babour.JPG source (très beau reportage photo)

Ah ! les vacances.......

O. Kempf

Ne pensez-vous pas qu'il serait intéressant de faire un parallèle entre la guerre d'Indochine et la guerre en Afghanistan .

En effet, il n'y avait pas ou peu d'appelés du contingent, l'effort reposant principalement sur des professionnels et des troupes locales.

Ensuite le manque de soutient de la population pour ces guerres alors que les militaires avaient et ont le sentiment (dans une certaine mesure et pour certains en tout cas) de lutter pour les uns contre le communisme et contre le terrorisme).

De plus, l'Afghanistan et l'Indochine sont des théâtres d'opérations éloignés de la métropole.

Enfin, on retrouve un manque de compréhension entre monde militaire et monde civil qui poussa certains, en 1954, à songer a faire un coup d'état.

D'avance merci pour votre réponse. Veuillez agréer, Monsieur, mes plus sincères et cordiales salutations. Au plaisir de vous lire.

BC (qui signe de son vrai nom, mais comme je ne lui ai pas demandé son avis, je préfère rester discret).

Commentaires

1. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par Midship

au risque d'enfoncer une énorme porte ouverte, je me permets de rappeler une différence :

Indochine, 1945 : 1954, 40 000 morts dans l'armée française
Afghanistan, 2001 : - , 64 morts dans l'armée française.

Bien sûr, il faut relativiser l'impact, la résilience, etc etc. N'empêche, le nombre de familles touchées n'est pas le même, et la relativisation a ses limites quand on parle de deux conflits qui n'ont que deux ou trois générations d'écart (une miette dans l'histoire de France).

2. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par CNE CC

Suivant pourtant assidûment votre site EGEA, je n'ai malheureusement pas trouvé d'argumentaires sur les deux points énoncés ci-dessous. Ou alors, est-ce moi qui ne suis pas suffisament sérieux...

Etant sur le point de terminé le Choc des civilisations de Huntington, deux phrases notées au cours de ma lecture ont tout particulièrement retenu mon attention:
1 - Il y a des guerres justes. Il n'y a pas d'armées justes.
2 - Dans les guerres entre cultures, la culture est toujours perdante.

Préparant l'écrit de l'EdG, je trouve ces deux phrases porteuses d'un éventuel sujet... ou alors, je me trompe.
Pourriez-vous me dire où je puis trouver une discussion sur ces deux points distintcs dans votre blog, ou alors créer un billet pour chaque et me permettre de lire les réactions de chacun?

égéa : eh! les gars, je ne suis pas une machine à corriger, un préparateur public, une alternative à la revue verte, un distributeur de colles toutes faites. Visiblement, vous vous faites des idées

Accessoirement, le concours est destiné à vous faire réfléchir perso : horrible liberté intellectuelle, risque incroyable que VOUS devez prendre... Car la plupart des mecs qui parlent de censure tout ça tout ça c'est pas bien on a pas le droit de parler,  en sont au fond très heureux : c'est vachement confortable, de ne pas parler, ça évite d'avoir à penser. Pas de pot, c'est quand même ce qu'on vous demande.

Donc, ce sont de bons sujets que vous nous proposez-là. Traitez les.

3. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par

Hello,

Petit élément de participation à ce débat, mais avec une comparaison Viêtnam/Afghanistan, et pas Indo :

http://historicoblog3.blogspot.com/...

Cordialement.

4. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par yves cadiou

Vous voulez parler de COIN et vous avez logiquement classé votre billet dans la rubrique « opérations ». Je préfèrerais pour ma part aborder la question sous un autre angle : celui de la place du Soldat dans la Société. C’est que je reste meurtri par l’antimilitarisme virulent dont ma génération fut victime dans les années soixante-dix, moins grave dit-on que celui des années cinquante mais quand-même très pénible : alors que nous étions en opérations au Tchad, la Gauche soutenait ouvertement nos ennemis.
Elle le faisait même avec virulence contre nous comme en attestent les transcriptions des débats parlementaires et les journaux que l’on peut consulter encore aujourd’hui dans les archives.

Pour ce qui concerne l’époque de l’Indo, j’ai entendu dire que c’était pire : l’antimilitarisme organisé était parfois violent, confondant la décision politique de combattre (en démocratie le citoyen a le droit de ne pas être d’accord avec une décision politique) et le Soldat, qui exécute les directives du gouvernement démocratiquement élu.

De nos jours, le désaccord politique n’agresse plus le Soldat et s’il y a encore soutien à l’ennemi (je ne sais pas) c’est plus discret, quelle que soit l’opex (Afgha, Côte d’Ivoire, Libye).

Mais ce respect de la règle démocratique pourrait ne pas durer et une telle évolution serait regrettable. Ca pourrait ne pas durer parce que notre système démocratique est bloqué dans la mesure où le Président joue le rôle de l’Exécutif sans être responsable devant le Parlement, c’est-à-dire sans autre inquiétude que sa réélection pendant son premier mandat puis, pendant son deuxième et dernier mandat, sans autre préoccupation que la préservation directe de son intérêt personnel et familial. De ce point de vue un deuxième mandat est plus dangereux que le premier mandat, le titulaire de la fonction suprême n’étant même plus tempéré par la nécessité de se faire réélire.

Ainsi beaucoup de forces politiques sont exclues des décisions : non seulement, comme toujours, celles qui ne sont pas représentées au Parlement mais aussi, désormais, celles qui sont représentées au Parlement.

Dans notre système tel qu’il est devenu (les partis politiques en avaient-ils bien conscience quand ils ont modifié la Constitution ? On peut se le demander) le Parlement est mis à l’écart pendant des périodes successives de cinq ans. Ses débats sont platoniques parce que, de toute façon, son vote sera sans conséquence sur la politique suivie, déterminée et conduite par un seul homme non contrôlé (contrôle pris au sens de votre billet du 30 mai dernier http://www.egeablog.net/dotclear/in... ).

.
La principale ressemblance entre les guerres de la Quatrième République et l’Afghanistan, si l’on veut s’en tenir à l’examen des conditions opérationnelles, c’est la contre-insurrection. Celle-ci doit se traiter (mais je ne sais pas si c’est possible en Afgha) comme on le disait ici en janvier dernier : plan Challe, asphyxie, dispersion. Il n’y a rien de nouveau non plus pour l’essentiel, qui est celui du droit international : c’est, dans tous les cas, un déni du droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes.

Rien de nouveau non plus sur le fait que ces opérations, dans les années cinquante comme aujourd’hui, sont chez nous le révélateur d’un dysfonctionnement institutionnel auquel nous allons devoir, de préférence avant une crise ouverte, remédier. Rappelons à nos jeunes camarades d’active que l’armée, c’est ce qui reste solide quand tout se délite.

Je devine, cher Monsieur Kempf, que vous ne sollicitiez pas exactement ce genre de réponse. Un personnage qui fut un gros succès comique de la télévision disait : « ce n’était pas votre question mais c’est ma réponse ». Bonnes vacances.

5. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par oodbae

bonjour,

je crois qu'on peut aussi, en suivant l'argumentaire de BC, comparer le conflit en Afghanistan avec la (re-)conquête de Saint Pierre et Miquelon par De Gaulle le 24 décembre 1941.
En effet,ce furent des professionnels, ou des volontaires, qui participèrent à cette reconquête(premier point). De plus, la population ne soutint que mollement voire pas du tout cette entreprise militaire tandis que De Gaulle et ses soldats étaient convaincus de combattre l'ennemi (fasciste, collabo), pour le deuxième point. Ensuite, Saint pierre et Miquelon fut un terrain d'opération très éloigné de la métropole, pour le troisième point. Enfin, l'incompréhension entre l'amiral Muselier, qui dirigea l'opération sur le terrain, et de Gaulle à cause de divergences politiques parallèlement à cette opération militaire faillit convaincre Muselier de remettre finalement Saint Pierre et Miquelon aux autorités vychistes (que l'on venait de déposséder), pour le quatrième et dernier point.

Voilà, désolé.

Sans vouloir être offensant, je crois qu'il vaut mieux éviter les parallèles à tout va, lesquels sont certes utiles pour briller en salon ou à table, mais reposent plus souvent sur des syllogismes plutôt que sur une connaissance du problème ( les chats mangent de la viande, Napoléon mangeait de la viande, donc Napoléon est un chat).

Ici, il serait d'après moi plus sensé de voire ce qui différencie la guerre d'Indochine de la guerre d'Afghanistan.

- la distance: afghanistan éloigné d'Indochine => cultures notablement différentes, notamment la religion.
- la motivation de l'autochtone: guerre d'indépendance-libération contre insurrection-résistance à l'envahisseur.
-nombre de morts: cf Midship
-enjeu politique pour "L'envahisseur": perte d'une colonie contre réponse à une attaque sur son sol(et solidarité pour les autres membres de l'OTAN)
-le passif de chacun: la France avait perdu contre le Japon, alors que les américains (les occidentaux) avaient soutenu les Afghans et notamment les talibans.
- les moyens déployés (pas de drônes à l'époque, armements comparables pour le viêt-cong et les francais, tandis qu'aviation et drônes et artillerie lourde pour les USA/ISAF)
- les objectifs politiques: réinstauration du pouvoir colonial contre "établissement d'un afghanistan démocratique" (lol)
- et j'en passe...

Il est possible que je raconte moi-même des âneries pour ce coup, mais répondant à la question posée, à savoir si l'on pense qu'il serait intéressant de faire un parallèle entre les conflits d'Indochine et d'Afghanistan, oui, ce serait extrêmement intéressant, au moins aussi intéressant que de faire une analyse comparée de "Sous le Soleil" avec "La grande vadrouille".

Cordialement,

6. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par

N'y a-t-il pas un marché pour les préparateurs au concours de l'école de guerre ?

égéa : ça s'appelle la Revue verte, mais comme tous les cabinets de conseil (lol) ça applique sa méthode à tout le monde.... et du coup, le client (préparant dans un cas, entreprise dans l'autre) trouve qu'on ne fait pas assez attention à sa particularité. Pourquoi, tu as envie de lancer une entreprise ?

7. Le mardi 12 juillet 2011, 22:28 par

A l’orée des vacances, je ne m’aventurerais pas à réfléchir sur la manière de rédiger tel ou tel sujet digne de la préparation à l’EdG, ce qui est pour le moins très éloigné de mes préoccupations et de mes capacités, mais d’apporter une modeste pierre à la réflexion sur un sujet passionnant : Ainsi : il y aurait des guerres justes, mais pas d'armées justes.
Cela mérite de relire l’ensemble de la citation de Malraux.. « Une guerre peut être juste quand elle sert une cause noble. Les armées ne sont animées d'aucune justice parce qu'elles sont des instruments qui préexistent aux causes. Il y a des guerres justes, il n'y a pas d'armées justes »

C’est curieux, mais relue en son intégralité, j’ai l’impression que l’affirmation est nuancée tout en étant contestable. Ah ! Si nous savions sans risque de se tromper qui détient la cause noble ? Chacun des belligérants n’a t-il pas la certitude de servir une noble cause? Quant aux armées puisqu’elles préexistent aux causes elles seraient donc des instruments d’injustice ? Ce qui donne à penser que des armées injustes servent des guerres justes ? Mais où sont les hommes dans tout cela ? Et si nous allions faire un tour du coté de Machiavel qui nous affirme que : "Une guerre est juste quand elle est nécessaire…" Autre sujet non ? Ainsi une guerre nécessaire peut servir tout autant une guerre juste qu’une guerre injuste.

Et puisque je suis en forme, je vous livre un second thème de réflexion avec Spinoza :"Quelquefois, il arrive qu'une nation conserve la paix à la faveur seulement de l'apathie des sujets, menés comme du bétail et inaptes à s'assimiler quelque rôle que ce soit sinon celui d'esclave. Cependant, un pays de ce genre devrait plutôt porter le nom de désert, que de nation!" Alors qu’en Syrie en Libye et ailleurs, des populations se soulèvent pour secouer le joug du totalitarisme, sommes-nous sûrs que la cause est réellement juste ? Que l’obscurantisme n’en sortira pas plus renforcé ? La réflexion est savoureuse… En Libye notre intervention sert-elle une cause juste ? Si oui, je laisse le soin de compléter la citation. Allez un petit effort encore avant la plage avec Mao Tsé-toung : « On ne peut abolir la guerre que par la guerre. Pour qu'il n'y ait plus de fusils, il faut prendre le fusil. Ce qui revient à résoudre l’énigme de la poule et de l’œuf…
Je laisse le dernier mot à Simone Weil « Toute violence est mauvaise, mais non pour cela condamnable : la non-violence n’est bonne que si elle est efficace » Il est temps d’aller sur la plage faire des petits pâtés de sable. N'oublions jamais, les instruments des guerres sont les hommes et eux payent le prix du sang.

égéa : bravo : belle méditation.

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