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Economie et RI

Je suis en train de lire "Introduction à l'histoire des relations internationales", de Pierre Renouvin et Jean-Baptiste Duroselle : un classique de 1964, qui parle de Ratzel et MacKinder quand ce n'était pas du tout à la mode..... Dernière édition (4ème ?) de 1991. Le troisième chapitre traite des forces économiques (les concurrences et les conflits). Et surprise, ça n'a pas trop vieilli.

source

" "L'économie mondiale ne s'est pas développée par la concurrence de partenaires égaux, mais par l'apparition et l'influence de grandes économies nationales successivement dominantes". Cette observation de François Perroux l'a conduit à jeter les bases d’une théorie de l'effet de "domination" dans les relations économiques internationales et à chercher quelles conséquences peut exercer sur l'équilibre économique une "économie dominante". " (p. 66 de l'édition de poche Pocket Agora).

Cela faisait longtemps que je n'avais pas entendu parler de François Perroux. Grenoble, l'UPMF, ça te dit qq chose, Charles ?

Plus sérieusement, notons qu'au cours des années 1960, on était en pleine influence marxiste. Voir des réalistes trouver la façon la moins idiote de prendre en compte les "infrastructures" sociales, ce n'était déjà pas mal. Et relier une approche braudélienne à l'économie, 25 ans avant Paul Kennedy, et plus de 30 ans avant qu'on ne nous parle de géoéconomie et de guerre économique, cela avait de la classe.

Vous allez me dire que rien n'a donc changé. Pas faux. A ceci prêt qu'à l'époque, l'influence intellectuelle dominante était marxiste. Aujourd'hui, je ne dirais pas qu'elle est capitaliste (!), mais à tout le moins beaucoup acceptent l'existence des "marchés" comme un fait sinon souhaitable, du moins incontournable.

De plus, Perroux comme Renouvin et Duroselle ne voient que l'Etat dans les RI, y compris dans les relations économiques : un peu plus loin, on lit des lignes sur "la lutte économique entre les Etats" et la nécessité "d'établir des liens entre les rivalités des intérêts matériels et les oppositions des intérêts politiques".

C'est ne pas voir l'apparition d'autres acteurs économiques, "privés", qui ont des influences sur les relations internationales : spéculateurs, donc, mais aussi firmes ou acteurs gris ou noirs (mafias, crime organisé, piraterie, ...). Ils viennent compliquer cette guerre économique.

Réf : une fiche de lecture de 1966 dans la Revue française de sciences politiques, qui constate (déplore?) que les auteurs ne voient que la "volonté de puissance" (entre guillemets, un vrai gros mot) en lieu et place de philosophie de l'histoire.... A l'époque, on mettait un an à rendre compte d'un livre de plusieurs centaines de pages : au moins avait on l'assurance que le critique avait lu le livre !

O. Kempf

Commentaires

1. Le mercredi 21 décembre 2011, 22:03 par yves cadiou

« 1964, plus de trente ans avant qu’on nous parle de guerre économique », je conteste cordialement ce point d’importance secondaire.

Dans les années soixante-dix, le binôme Giscard-Barre invoquait la guerre économique en toute occasion. Dans cette guerre économique qui appartenait au discours, nous avions une stratégie et des alliés. C’était la grande époque de la nécessité d’un « franc fort », l’époque du « serpent monétaire européen » puis du « système monétaire européen ». Les monnaies de la CEE, la communauté économique européenne, étaient liées par des taux de change régulés par les Etats qui avaient encore autorité sur leur banque centrale. C’était l’époque de « l’indépendance dans l’interdépendance », formule giscardienne typique, mi-chèvre mi-chou.

En fait le bon peuple, pas bête, comprenait que l’appel à la mobilisation économique pour cause de guerre économique sous-entendait « ce n’est pas le moment de nous enquiquiner avec votre pouvoir d’achat ». Discours d’autant plus maladroit qu’on était en crise économique (réelle celle-là, pas comme aujourd’hui) à cause des restrictions pétrolières qui avaient été anticipées trop tardivement par la construction de centrales nucléaires impossible à bâcler.

La guerre économique dans le discours politique français date de 1974 avec la crise pétrolière qui nous a pris au dépourvu.

égéa : oui, mais est-ce que ça a été théorisé ?

2. Le mercredi 21 décembre 2011, 22:03 par yves cadiou

Très insidieuse, votre question à la fin du commentaire n°1 : vous n’insinueriez quand-même pas qu’il y aurait eu, parmi le personnel politique, des gens qui auraient parlé de guerre sans réfléchir ?

égéa : VGE ? il réfléchissait tout le temps. Je parlais de "théoriser" : on peut réfléchir pragmatiquement, ce me semble. Enfin, il s'agit de "guerre économique", pas de guerre tout court. Mais il est tout à fait poissible que dans les années 1970, l'inflation ne touchait pas seulement aux prix à la consommation, mais aux mots utilisés dans tous les sens : ce fut aussi l'époque où l'on inventa la Comm', et où Seguela triompha et acheta des ROlex.

3. Le mercredi 21 décembre 2011, 22:03 par Midship

cela m'inspire une question subsidiaire : quel lien peut-on aujourd'hui établir entre les individus et les entreprises, d'une part, et les Etats, de l'autre ? Communauté ou divergence d'intérêt, loyauté, patriotisme ?

égéa : nationalité d'entreprise... patriotisme économique.... autant de questions.

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