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Nouveau découpage régional

Je n'ai personnellement jamais été un fervent partisan des régions qui m'ont toujours semblé artificielles. Quant au discours sur leur exiguïté, souvent asséné en comparaison du voisin allemand, il ne tient pas la route quand on regarde la Sarre ou les villes-États d'Hambourg ou de Brême. Il reste que je suis désormais assez opposé aux excès de la "décentralisation" qui nous coûte horriblement cher. Que le diagnostic du pays doit admettre que la région Ile de France finance à corps perdus le reste du pays et que le désert français est une farce de 1947 qui n'a plus de sens aujourd'hui, cf mon livre.

source

Je n'entrerai donc pas dans le débat qui passionne politiciens, journalistes et quelques géographes commis d'office : était-ce le bon découpage ? fallait-il choisir ceci plutôt que cela ? était-ce le bon tempo ? Tout ceci, on s'en fiche, en fait.

Mais une décision a été prise. De toute façon, les régions n'ont pas de sens et en fait, elles n'ont pas à en avoir. C'est pourquoi la notion d’identité régionale n'aurait pas dû entrer en ligne de compte. Il est donc bon que l'Alsace soit intégrée à une grande région Alsace Lorraine, dommage que la Bretagne n'ait pas été fusionnée avec Pays de Loire, la Corse avec PACA et NPDC avec la Picardie.

Mais il ne s'agit là que de défauts véniels par rapport à de multiples qualités : d'abord, ne pas toucher à la répartition des départements. Ceci est une idée géniale et simplissime. Ensuite, de décider et d'organiser l'évanouissement à terme de deux échelons territoriaux. D'une part les départements (même si je ne comprends pas très bien le rôle résiduel du préfet : au fond, le préfet de département devra jouer le rôle aujourd’hui dévolu au sous-préfet). D'autre part en rendant l'intercommunalité de droit commun, on simplifie les choses l(es communes demeurant une circonscription d'enracinement local, sur le modèle des mairies d'arrondissement pour PLM).

Espérons qu'on en profitera pour se débarrasser de toutes les mécaniques intermédiaires dont j'ai oublié les sigles, sauf les "pays", seule appellation venant à ma mémoire. Espérons surtout que cette simplification s'accompagnera d'une diminution des budgets locaux et des impôts afférents, et que l’augmentation de la distance entre le centre décisionnel régional et les territoires permettra une juste répartition en fonction des besoins et non des lobbies de proximité.

Après, n'exagérons pas les effets de la décision : elle prend soin d'envoyer le plein effet à dans dix ans, le temps au moins de deux alternances et donc de deux séries de complications supplémentaires. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, faire aujourd'hui quand on peut renvoyer à demain ? Mais ne boudons pas notre plaisir. Toute réforme est imparfaite, forcément sujette à critiques. Celle là a le grand mérite d'être.

Alors que tout le monde critique, j'approuve.

O. Kempf

Commentaires

1. Le jeudi 12 juin 2014, 19:42 par Ph Davadie

On peut aussi le voir (remarque qui m'a été faite récemment) comme une volonté de reprise en main par l'État qui noie de fait les départements et sonne le glas des particularismes, notamment l'alsacien : concordat, régime d'assurance sociale.
Donc renaissance de l'État jacobin.
Même si on ne touche pas trop à la Bretagne, car s'ils avaient des chapeaux ronds, ils ont maintenant des bonnets rouges...
Il ne faut alors pas rêver quant à l'effacement des préfets réduits à un "rôle résiduel".

2. Le vendredi 13 juin 2014, 19:05 par yves cadiou

Deux remarques : 1) Votre billet de mars 2012 n'a pas vieilli : http://www.egeablog.net/index.php?p...
2) La suppression des doublons et autres structures devenues inutiles est (au choix du lecteur) un serpent de mer ou de la langue de bois. S'il y avait le moindre projet réel de rationalisation, l'on commencerait par fermer les trois cents sous-préfectures qui avaient leur utilité quand on se déplaçait à pied ou à cheval mais ne servent plus à rien à l'ère de la fibre optique.

egea : je peux prendre votre commentaire de deux façons  : 1/ J'ai de la suite dans les idées et je poursuis un cheminement intéressant 2/ Je commence à radoter. Bien évidemment, vous me répondrez que c'est un mélange des deux.

Quant aux sous-préfectures, j'ai constaté dans une autre vie, commandant un régiment de mille hommes dans une sous-préfecture, qu'il était tout à fait logique que ma voiture de fonction (uniquement pour les parcours officiels et non utilisable pour  mes parcours personnels, sans même penser à partir en weekend avec ou à avoir une carte essence, comme vous le signalez parfois) était une 307 quand le sous-préfet disposait d'une 407, j'ai compris beaucoup de choses. Tout d'abord, que le représentant officiel de l’État devait disposer de plus de prestige que n’importe quel autre serviteur du même État, quelles que soient ses responsabilités. Ensuite et surtout, que je m'en foutais car je trouvais mon métier beaucoup plus amusant et passionnant que le sien et que au fond, la complétude ne vient pas de la dimension de la voiture. Conclusion annexe : on économiserait trois cents 407 ou 408 soit un vague 30 Millions d'euros. Bon, les caves, frais d'habitation et autre immobilier : oui, on pourrait récupérer facilement deux ou trois milliards.

Que faire des sous-préfets, alors ? Au champ, bien sûr, mais encore ?

3. Le samedi 14 juin 2014, 08:00 par yves cadiou

Non, je ne dirais pas que vous radotez même si c'était vrai. Ce n'est pas vous qui mettez cette fois les Régions sur le devant de l'actualité, c'est notre pauvre Président.

Pourquoi “pauvre”, me direz-vous peut-être? “Pauvre” non seulement parce que désormais, depuis que le candidat à la présidence est présenté par les partis politiques qui ont bidouillé la Constitution pour ce faire (les fameuses cinq-cents signatures), la fonction présidentielle est représentative de la classe politique et non plus de la France. De ce fait la fonction concentre sur elle l'animosité que les Français portent à la classe politique.

“Pauvre” aussi parce que ce Président monte au créneau en remettant à la mode la décentralisation peu après que le TAFTA soit connu (en avril dernier) : ça ressemble fort à une manœuvre de diversion. Certes, c'est une diversion qui fonctionne effectivement parce que nous ne parlons pas, ou très peu, du TAFTA.

Mais quelque chose éveille mes soupçons sur un autre point. Les Préfets sont non seulement les représentants de l'Etat dans les départements mais ils sont surtout chargés, par l'article 72 de la Constitution, de contrôler la légalité des actes des collectivités territoriales : les décisions locales ne sont pas exécutoires sans ce contrôle et de plus c'est à cause de ce contrôle, qui permet parfois de détecter des délits donnant lieu à l'information du procureur, que certains élus se retrouvent en prison. Cette mission du Préfet, essentielle, est particulièrement urticante pour les élus locaux qui préfèreraient faire ce qu'ils veulent.

L'effacement des Préfets, s'il survient, ne sera pas une simple mesure technique mais sera la marque, hautement significative, d'une volonté de démembrement.

Cette nouvelle réforme territoriale est un nouveau pas vers la disparition insidieuse mais délibérée de l'Etat grignoté à la fois par la décentralisation (au profit des élus locaux) et par l'UE (tiens donc? Voilà que je reviens au TAFTA qui est négocié en dehors des Etats mais s'imposera à eux).

La volonté de disparition de l'Etat n'est pas nouvelle car la classe politique, faite d'élus locaux (on ne rappellera jamais assez cette caractéristique essentielle et centrifuge), a de la suite dans les idées : il faut se rappeler que cette volonté était déjà apparue dans les lois de décentralisation proposées et votées sans vergogne par la Gauche en 1982-83 nonobstant leur anticonstitutionnalité initiale.

Ce qui n'avait pas pu être fait en 1982-83 a été poursuivi en 2003 quand la modification de l'article 72 de la Constitution effaçait le département.

La version précédente de l'article 72, depuis 1958, mentionnait ainsi le département : “dans les départements et les territoires, le délégué du Gouvernement a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois.” La version du 28 mars 2003 ne mentionne plus le département. L'on doit donc se demander ce qu'est destiné à devenir le contrôle de légalité, nécessaire à la cohésion nationale mais qui agace tant les potentats locaux.

Rappelons que cet article 72 de la Constitution, pourtant fondamental, faillit être anéanti en pratique par les lois de décentralisation (lois Defferre). Mais grâce à un recours présenté au Conseil constitutionnel par Michel Debré, ce ne fut heureusement pas le cas. Dans la première version des lois Defferre, avant l'intervention du Conseil constitutionnel, les actes administratifs des élus locaux seraient devenus exécutoires sans passer au contrôle de la légalité en Préfecture.

Je crains que cette affaire de redécoupage régional soit non seulement une diversion mais aussi une tentative de faire subrepticement ce qui a été refusé en 1982, la suppression du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales avant qu'ils soient exécutoires.

4. Le mardi 9 septembre 2014, 16:20 par jean luc boeuf dgs

|Se contenter de dire merci ne serait pas suffisant, pour la grande clarte dans votre ecriture.

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