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Politique chinoise de la France

Une étudiante chinoise, en fac à Lyon, rédige son mémoire de master sur la politique chinoise de la France durant la présidence de Sarkozy. Elle me dit : "j'ai lu votre livre Géopolitique de la France entre déclin et renaissance, dans lequel vous avez parlez de la relation franco-chinoise, je voudrais donc vous poser quelques question là-dessus". Voici ci-dessous ses trois questions et mes réponses. Car du coup, j'ai relu les quelques paragrpahes que j'avais écrits sur le sujet dans GP de la France, et me suis aperçu qu'il y avait évidemment encore plein de choses à dire.

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1. Dans votre livre vous dites que la France a des relations ambiguës avec la Chine : à la fois relations d'affaires et argument moraux. Est-ce que cette équilibre entre l'idéalisme et le pragmatisme est une tradition de la politique chinoise de la France?

Je me demande s'il y a seulement une tradition de politique chinoise de la France. J'ai l'impression que l'affaire a toujours été traitée au cas par cas, en fonctions de considérations extérieures. Volonté coloniale au XIX° siècle au moment des "traités inégaux", lutte contre le communisme lors de la guerre de Corée (la France envoie un bataillon dans le conflit), confrontation par procuration au moment de la guerre d'Indochine, pragmatisme gaullien au moment de la reconnaissance de la RPC en 1964 (cela n'avait pu être fait en 1949 à cause justement de l'Indochine, à la différence des Britanniques), fascination des intellectuels français pour le maoisme dans les années 1960 et 1970, considération lointaine au moment du livre de Peyrefitte en 1973.

Rien de bien marquant au cours des années 1980 ou 1990. En fait, une nouvelle fascination chinoise intervient en France à partir des années 2000 lorsqu'on prend conscience du formidable bond de développement initié depuis 20 ans. Alors, les chefs d'entreprise rêvent tous de Chine. Il reste que la question tibetaine, orchestrée par l'Occident, a aussi des effets en France et suscite un discours sur les droits de l'homme, au risque de déplaire les autorités, cf les incidents au moment des JO de Pékin à la fin de la décennie.

Mais en termes de puissance classique, constatons que la Chine et la France ne se heurtent pas trop. La France a peu d'intérêts dans tous les conflits chinois, qu'ils soient intérieurs (Xinjiang, Tibet) ou extérieurs (Corée du Nord, Japon, Taiwan, mer de Chine méridionale). Les possessions asiatiques françaises dans cette région sont situées trop loin, en Océanie, pour avoir des conséquences directes sur les Français. En revanche, la concurrence économique demeure latente, avec les accusations d'espionnage régulièrement lancées.

En fait, le seul endroit où la France et la Chine se heurtent est en Afrique, puisque Pékin y a développé depuis une quinzaine d'années une "Chinafrique" qui a mis en cause les intérêts traditionnels français dans la zone. Là encore, le débat est plus géoéconomique que politique.

Dans les grandes conférences internationales, la France cherche régulièrement à discuter avec Pékin, cf les récentes dicussions autour de la COP 21 qui ont permis à Pékin d'avancer et donc à la conférence d'être un succès.

Au final, on pourrait qualifier la relation de dépassionnée et donc jaugée à l'aune des seuls intérêts, princpalement économiques.

 

2. Du point de vue géographique la Chine est une terre loin de la France, et ces deux pays n'ont pas des conflits directs sur les territoires, mais leurs interdépendances sont multiples sur le plan économique avec le développement de la mondialisation. Pourquois, la Chine et l'Asie ne se trouvent toujours pas parmis les priorités de la politique extérieure de la France?

La distance est la raison principale (outre les raisons évoquées ci-dessus). Surtout, la France est en limite de capacités. Tenir ses intérêts dans ses zones prioritaires lui demande suffisamment d'efforts, cela l'empêche de consacrer plus d'énergie à d'autres zones.

Toutefois, les grandes options de la "diplomatie économique" qui animent les deux derniers quinquennats français sont clairement tournées vers l'Asie orientale, particulièrement la Chine. Disons que la diplomatie traditionnelle et l'engagement militaire sont affectés à d'autres zones, la CHine n'étant l'objet que d'une diplomatie économqiue (avec de vraies priorités qui ont été affichées et des ressources qui y furent allouées).

 

3. D'après vous quelles sont les facteurs qui pourraient influencer l'orientation de la politique chinoise de la France et existe-il une ligne conductrice pour cette politique?

Une des grandes questions du moment est celle d'un "basculement du système international". On en voit de multiples effets partout. La Chine et la France sont assez solides et influentes, chacune dans leurs zones, pour essayer de définir de nouvelles règles du jeu en réponse à ce basculement. Leur présence permanente au CSNU est un atout commun. Mais encore faudrait-il que la Chine ait plus d'ambition que son actuelle position de "non ingérence dans les affaires intérieures" qui n'est pas organisateur d'un nouvel ordre mondial.

Voilà une brève réponse qui mériterait probablement plus de travail et de développement.

Bien à vous

O Kempf

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