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Trump, les États-Unis et l’Europe

CI-joint, ma dernière chronique dans Conflits, le numéro 12, qui vient de paraître... Bonne lecture.

Trump Source

L’élection de Donald Trump n’a pas seulement surpris les élites européennes, elle les a sidérées. Mais au-delà de la remise en cause de l‘établissement politique, cette nouvelle a sonné comme la remise en cause d’un monde que l’Europe croyait, malgré tous ses discours, globalement stable. En effet, elle se pensait depuis la Deuxième guerre mondiale comme appartenant à l’Occident, conjointement avec les États-Unis. Cette perception avait traversé la fin de la guerre froide et perdurait. Les bouleversements récents (crise de l’euro, crise migratoire, crise ukrainienne, guerres moyen-orientales) ne l’avaient pas psychologiquement affectée : au fond, les dirigeants européens pensaient que toujours, l’Amérique serait là. Ce n’est donc pas simplement une affaire d’argent : augmenter les budgets de défense au-delà de 2% ne suffira peut-être pas à satisfaire le nouveau POTUS.

D’une certaine façon, Trump remet en cause cette certitude et déstabilise beaucoup plus le système. Il va en effet plus loin que G. W. Bush et B. Obama qui depuis quinze ans, déjà, demandent aux Européens de dépenser plus en matière de défense. Obama parlait même de « passagers clandestins, accusation à peine entendue. Avec Trump, chacun se dit désormais que les négociations vont être plus dures et que l’acquis ne l’est pas indéfiniment. Son élection affecte donc profondément les psychologies politiques.

Toutefois, Trump repoussera d’autres habitudes européennes. Il partage en effet avec de nombreux leaders contemporains un néo-réalisme qui leur fait agir dans le monde à la seule aune des intérêts nationaux. Ce sera particulièrement vrai avec V. Poutine, avec qui le nouvel élu négociera, durement (car parler de son alliance avec lui relève de la caricature) mais sans s’embarrasser de beaucoup de contraintes : autrement dit, la préservation d’un ordre international ne sera pas un objectif majeur des négociations, juste un argument au cours de celles-ci. Là encore, cela risque de froisser des principes qui sont au fondement de la posture géopolitique de l’Europe. Celle-ci, depuis des années, promeut un multilatéralisme dont elle se veut l’avant-garde éclairée. Le porte-à-faux avec l’attitude probable du futur gouvernement américain sera de ce fait très prononcé.

Dernière remise en cause, dans le droit fil des précédentes, celle touchant à la mondialisation. Trump a été élu sur un programme « anti-globaliste » grâce à un électorat qui ne croit plus aux promesses faites depuis trente ans. Or, de larges pans de l’électorat européen pensent de même. Les dirigeants européens sont donc confrontés à une opposition sur deux fronts, à l’extérieur contre le nouveau président, à l’intérieur à l’endroit de leurs populations sceptiques.

L’élection de Trump marque donc l’heure de la grande remise en cause européenne, bien plus peut-être que les crises que celle-ci connaît depuis cinq ans.

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